ARRÊT DU
11 Mai 2022
NE/CR
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N° RG 21/00143
N° Portalis
DBVO-V-B7F-C3NH
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S.A.R.L. ADSIGN
C/
S.A. DIAC
S.C.P. [V] [D]
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GROSSES le 11.05.2022
à Mes VIVIER et O'KELLY
ARRÊT n°
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Civile
Section commerciale
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,
ENTRE :
S.A.R.L. ADSIGN
RCS d'Agen n°523 182 525
[Adresse 6]
[Localité 3]
Représentée par Me Louis VIVIER, avocat inscrit au barreau d'AGEN
APPELANTE d'un Jugement du Tribunal de Commerce d'AGEN en date du 03 Février 2021, RG 2019003478
D'une part,
ET :
S.A. DIAC
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Olivier O'KELLY, avocat inscrit au barreau d'AGEN
INTIMÉE
S.C.P. [V] [D]
es-qualité de commissaire à l'exécution du plan
[Adresse 4]
[Localité 2]
INTIMÉE n'ayant pas constitué avocat
D'autre part,
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 14 Février 2022 devant la cour composée de :
Présidente : Claude GATÉ, Présidente de Chambre
Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller
Nelly EMIN, Conseiller qui a fait un rapport oral à l'audience
Greffières : Lors des débats : Nathalie CAILHETON
Lors de la mise à disposition : Charlotte ROSA, adjoint administratif faisant fonction de greffier
ARRÊT : prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
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FAITS ET PROCEDURE
Selon offre de prêt du 1er décembre 2015, la société DIAC a consenti à la société ADSIGN un crédit accessoire à la vente d'un véhicule NISSAN QASHQAI d'occasion par la société LAUDIS AUTOMOBILE pour un prix de 14900 euros.
Ce crédit d'un montant total de 17769,90 euros, assorti d'un taux d'intérêts de 6,33%, était remboursable en 60 mensualités.
La livraison du véhicule a eu lieu le 24 décembre 2015.
Le 5 décembre 2018,la société ADSIGN a été placée en redressement judiciaire par le tribunal de commerce d'Agen.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 11 décembre 2018, la société DIAC a déclaré sa créance auprès du mandataire liquidateur pour un montant de 8260,75 euros.
Par courrier du même jour, elle a sollicité de la société ADSIGN la reconnaissance de son droit de propriété sur le véhicule ou le paiement du prix du matériel, visant les articles L 624-9 à L 624-18 du code de commerce.
Par jugement du 14 décembre 2019, le tribunal de commerce d'Agen a homologué le plan de redressement par continuation de la société ADSIGN et nommé la SCP [V] [D] commissaire à l'exécution du plan.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 15 janvier 2019, la société NISSAN FINANCE a saisi le juge commissaire afin que la société ADSIGN soit autorisée à payer les échéances postérieures au redressement judiciaire, garder possession du véhicule et en reconnaissance de son droit de propriété sur le véhicule en vertu de la clause de réserve de propriété inscrite dans le contrat de crédit.
Par ordonnance du 18 avril 2019, le juge commissaire a rejeté la requête au motif que la clause de réserve de propriété était au bénéfice de la société DIAC et non de la société NISSAN FINANCE.
Par courrier du 15 mai 2019, la société DIAC a formé opposition à cette ordonnance au motif que la marque NISSAN FINANCE est distribuée par DIAC.
Par jugement du 3 février 2021, le tribunal de commerce d'Agen a :
-déclaré la société DIAC recevable en son recours contre l'ordonnance du juge commissaire au motif de la filiation entre DIAC et NISSAN FINANCE,
-l'a déclaré en conséquence bien fondée en son action en revendication,
-ordonné l'application de la clause de réserve de propriété du véhicule au bénéfice de DIAC,
-autorisé la société ADSIGN à conserver le véhicule dans les termes du contrat et à payer les échéances postérieures au redressement,
-ordonné, en cas de déchéance du terme pour cause d'impayés ou de mise en liquidation judiciaire de la société ADSIGN, la restitution du véhicule à DIAC,
-débouté ADSIGN de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
-dit qu'il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
-ordonné le partage des dépens,
-débouté les parties de toutes leurs autres demandes, fins et conclusions,
-liquidé les dépens dont frais de greffe pour le présent jugement à la somme de 105,28 euros.
Le tribunal de commerce a relevé que le procès verbal de livraison comportait la concomitance entre la demande de règlement et la subrogation au profit de la société DIAC, comme exigée par les articles 2367 et 1346 du code civil sur la clause de réserve de propriété et sur la subrogation.
Par déclaration du 18 février 2021, la société ADSIGN interjeté appel de la décision en visant les chefs du dispositif du jugement suivants :
- déclare la société DIAC bien fondée en son action en revendication,
- ordonne l'application de la clause de réserve de propriété du véhicule au bénéfice de DIAC,
- autorise la société ADSIGN à conserver le véhicule dans les termes du contrat et à payer les échéances postérieures au redressement,
- ordonne, en cas de déchéance du terme pour cause d'impayés ou de mise en liquidation judiciaire de la société ADSIGN, la restitution du véhicule à DIAC,
déboute ADSIGN de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses premières conclusions reçues le 12 mai 2021, comme de ses conclusions récapitulatives reçues le 6 janvier 2022, la société ADSIGN demande à la cour de :
-la déclarer recevable et bien fondée en son appel,
-réformer le jugement entrepris dans l'ensemble de ses dispositions,
En conséquence, statuant à nouveau
-débouter la société DIAC de son recours à l'encontre de l'ordonnance du juge commissaire du 18 avril 2019,
-dire et juger que la société DIAC ne peut se prévaloir d'une clause de réserve de propriété par subrogation conventionnelle de la société LAUDIS AUTOMOBILES consécutivement au financement de son achat de son véhicule NISSAN QASHQAI,
-débouter en conséquence la société DIAC de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
-dire et juger que la créance de la société DIAC telle que déclarée au représentant des créanciers sera réglée conformément aux dispositions du plan de redressement,
-condamner la société DIAC à lui payer la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamner la société DIAC aux entiers dépens.
Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que :
-il ressort d'un avis de la Cour de cassation du 28 novembre 2016 que la subrogation conventionnelle au profit du prêteur par le vendeur du véhicule ne peut porter sur le bénéfice de la clause de réserve de propriété,
-la clause de réserve de propriété ne peut être transférée au bénéfice du prêteur dans la mesure où, si l'auteur matériel du paiement effectué entre les mains du vendeur est bien le prêteur, pour autant, ce dernier n'est pas l'auteur juridique du paiement,
- le paiement est effectué avec les fonds appartenant à l'emprunteur, ce qui empêche toute subrogation conventionnelle, dès lors que le paiement n'émane pas d'une tierce personne au sens des dispositions de l'article 1250-1° du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016,
-la Cour de cassation considère que la clause contractuelle prévoyant le bénéfice de la subrogation quant à la clause de réserve de propriété par le vendeur au profit du financeur constitue une clause abusive,
-la propriété étant transférée dès l'accord sur la chose et le prix, la société LAUDIS AUTOMOBILES n'était plus propriétaire du véhicule au jour où elle a reçu paiement du prix et ne pouvait donc subroger la société DIAC dans le bénéfice de la clause de réserve de propriété,
-surabondamment, la société DIAC a valablement déclaré sa créance et sera payée par le biais de l'exécution du plan de redressement,
- concernant l'arrêt de la Cour de cassation du 10 avril 2017 dont se prévaut la société DIAC, le débat portait uniquement sur les conditions de validité de la subrogation conventionnelle et non sur le transfert par subrogation du bénéfice de la clause de réserve de propriété.
Aux termes de ses uniques conclusions reçues le 4 août 2021, la société DIAC demande à la cour de confirmer dans son intégralité le jugement rendu le 3 février 2021 par le tribunal de commerce d'Agen, y ajoutant de condamner la société ADSIGN à lui verser une somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que:
-en application de l'article 1101 du code civil, le contrat de prêt ne devient parfait qu'à la condition que le prêteur donne son agrément après réception et validation de tous les justificatifs,
-le contrat ne devient donc parfait qu'à la date de livraison, soit en l'espèce le 14 décembre 2015,
-le garage LAUDIS AUTOMOBILE lui a demandé le règlement du montant du prêt le 24 décembre 2015, cette demande contenant expressément la subrogation à son profit, le règlement du prêt n'a donc pu intervenir qu'après cette date, et au jour de la subrogation les fonds étaient nécessairement la propriété de la société DIAC,
-cette analyse est confortée par une jurisprudence bien établie, dont un arrêt de la Cour de cassation du 10 avril 2017.
La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties fait expressément référence à la décision entreprise et aux conclusions déposées.
La SCP [V] [D] n'a pas constitué avocat. La déclaration d'appel lui a été signifiée à personne le 24 mars 2021. Les conclusions de l'appelante lui ont été signifiées le 13 janvier 2022.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 janvier 2022 et l'affaire fixée au 14 février 2022.
MOTIFS
Selon l'article 1250 1° du code civil en vigueur avant l'ordonnance du 10 février 2016, la subrogation est conventionnelle lorsque le créancier recevant son paiement d'une tierce personne la subroge dans ses droits, actions, privilèges ou hypothèques contre le débiteur : cette subrogation doit être expresse et faite en même temps que le paiement.
Le premier juge a fondé sa décision sur la concomitance entre la demande de règlement et la subrogation au profit de la société DIAC pour considérer que la clause de réserve de propriété était établie par subrogation au profit de cette dernière.
Cependant, la concomitance de la subrogation au paiement n'est pas une condition suffisante. Le paiement n'est effectué par un tiers au sens de l'article 1250 1° du code civil ancien que dans la mesure où le tiers règle la créance avec ses propres fonds. Tel n'est pas le cas de l'espèce où le prêteur procède, à la demande de l'emprunteur, au versement du capital emprunté entre les mains du vendeur, ce paiement étant réputé effectué par le débiteur lui-même.
Il en résulte qu'est inopérante la subrogation consentie par le vendeur au prêteur dans la réserve de propriété du véhicule.
En conséquence, le jugement du tribunal de commerce sera infirmé et la société DIAC sera déboutée de ses demandes.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
La société DIAC succombant, il convient de la condamner à verser à la société ADSIGN la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de la condamner aux dépens de l'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt réputé contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,
INFIRME le jugement du tribunal de commerce d'Agen du 3 février 2021 des chefs critiqués,
statuant à nouveau,
DEBOUTE la société DIAC de ses demandes
y ajoutant,
CONDAMNE la société DIAC à verser à la société ADSIGN la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
DEBOUTE la société DIAC de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société DIAC aux dépens de l'appel.
Le présent arrêt a été signé par Claude GATÉ, président, et par Charlotte ROSA, adjoint administratif faisant fonction de greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière,La Présidente,