ARRÊT DU
11 Janvier 2023
CV/CR
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N° RG 21/00862
N° Portalis
DBVO-V-B7F-C5WY
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[M] [F]
C/
[V] [D] [Y]
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GROSSES le
à
ARRÊT n°
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Civile
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,
ENTRE :
Madame [M] [F]
née le 01 Septembre 1988 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 9]
[Localité 1]
Représentée par Me David LLAMAS, avocat au barreau d'AGEN
APPELANTE d'un Jugement du TJ d'Auch en date du 21 Juillet 2021, RG 19/00681
D'une part,
ET :
Madame [V] [D] [Y]
[Adresse 10]
[Localité 2]
Représentée par Me Guy NARRAN, avocat postulant au barreau d'AGEN et par Me Elisabeth FAURE, avocate plaidante au barreau du GERS
INTIMÉE
D'autre part,
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 10 Octobre 2022, sans opposition des parties, devant la cour composée de :
Cyril VIDALIE, Conseiller qui a fait un rapport oral à l'audience
qui en a rendu compte dans le délibéré de la cour composée outre lui-même de Claude GATE, présidente de chambre et Dominique BENON, Conseiller
en application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, et après qu'il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés,
Greffières : Lors des débats : Nathalie CAILHETON, greffière
Lors de la mise à disposition : Charlotte ROSA, adjointe administrative faisant fonction de greffière
ARRÊT : prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
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Faits et procédure :
De l'union de Mme [V] [Y] et de [L] [F], décédé le 27 juin 2015, est née l'enfant [A] née le 9 janvier 2008, décédée le 27 mai 2014.
Mme [Y] avait cédé à [L] [F] la moitié indivise d'un terrain à bâtir situé lieudit [Localité 6], commune de [Localité 11] (Gers), sur lequel ils avaient fait édifier une maison d'habitation.
[L] [F] a laissé pour lui succéder une fille issue d'une précédente union, Mme [M] [F], qui a été placée sous la tutelle de l'association tutélaire du Gers jusqu'au 2 juillet 2019, date de l'arrêt de la cour d'appel d'Agen ordonnant la mainlevée de cette mesure de protection.
Par acte délivré les 1er et 2 juillet 2019, Mme [Y] a assigné Mme [F] et l'association tutélaire du Gers devant le tribunal de grande instance, devenu depuis tribunal judiciaire d'Auch, afin de voir ordonner les opérations de liquidation-partage de l'indivision existant entre elles, et d'obtenir la reconnaissance de diverses créances.
Par jugement du 21 juillet 2021, le tribunal judiciaire d'Auch a :
- ordonné le partage de l'indivision existant entre Mme [V] [Y] et Mme [M] [F] et portant sur la propriété située à [Localité 11] lieudit [Localité 6] cadastrée section al n°[Cadastre 4], sur le véhicule Audi A3 immatriculé [Immatriculation 3] et sur la remorque Lider immatriculée [Immatriculation 7],
- désigné, pour y procéder, Monsieur le président de la chambre interdépartementale des notaires du Gers, du Lot et du Lot et Garonne, avec faculté de délégation (à l'exception de Me [R] [S], notaire à Vic-Fezensac) sous la surveillance du magistrat coordonnateur du service civil général du tribunal,
- préalablement au partage, a défaut d'accord amiable entre les parties sur un partage en nature, ordonné la vente aux enchères publiques, à la barre de ce tribunal de la propriété située à [Localité 11] lieudit [Localité 6] cadastrée section al n°[Cadastre 4] sur une mise à prix de 100 000 euros,
- dit qu'à défaut d'enchère, la vente sera immédiatement reprise sur une mise à prix baissée du quart puis de moitié,
- dit que le cahier des charges sera établi par la SCP d'Argaignon-Bolac, laquelle procédera également aux formalités de publicité dans le Petit journal du Gers et sommairement dans la Dépêche du midi,
- dit que Mme [M] [F] est tenue de verser à l'indivision une indemnité d'occupation d'un montant de 500 euros par mois due à compter du 7 décembre 2015 jusqu'au 7 octobre 2020 et depuis le 12 avril 2021 jusqu`au partage ou jusqu'à la fin de l'occupation privative,
- dit que la créance de Mme [V] [Y] sera inscrite au passif de l'indivision à hauteur de 2 480,59 euros au titre des taxes foncières réglées,
- condamné la succession de [L] [F] à verser à Mme [V] [Y] la somme de 2 217,27 euros au titre du solde créditeur du compte bancaire de [A] [F] à son décès,
- condamné la succession de M. [L] [F] à verser à Mme [V] [Y] la somme de 825 euros au titre de l'occupation du hangar,
- condamné Mme [M] [F] à restituer à Mme [V] [Y] l'appareil photographique contenant les photographies de sa fille [A],
- condamné Mme [M] [F] à verser à Mme [V] [Y] la somme de 400 euros a titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,
- rejeté le surplus des demandes,
- dit n'y avoir lieu a application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les dépens entreront en frais privilégiés de partage,
- ordonné l'exécution provisoire.
Le tribunal a considéré que la demande de partage était fondée au regard de l'article 815 du code civil, et devait porter sur l'immeuble, mais également sur le véhicule et la remorque dont la propriété commune était démontrée.
Le tribunal a rejeté les demandes d'attribution préférentielle de la maison à Mme [Y], car elle était dépourvue de la qualité de conjoint survivant ou d'héritier réservataire, ainsi qu'à Mme [F], compte tenu de la présence dans l'indivision d'héritiers et d'un tiers.
Le tribunal a ordonné la licitation sollicitée par les deux parties, compte tenu de l'absence d'attribution préférentielle.
Le tribunal a rejeté la demande d'expulsion présentée par Mme [Y], en raison de la qualité de copropriétaire indivis de Mme [F].
La demande d'indemnité d'occupation présentée par Mme [Y], admise dans son principe par Mme [F] mais pour une période limitée, a été accueillie par le tribunal pour la période du 7 décembre 2015 au 7 octobre 2020, et pour la période du 12 avril 2021 à la fin de l'occupation privative ou au partage, compte tenu des périodes d'hospitalisation, puis d'incarcération, qu'elle avait subies.
Au regard de la superficie, de l'état de la maison dépourvue de crépi extérieur, et de sa localisation, l'indemnité a été fixée à 500 euros par mois.
Le tribunal a rejeté la demande formée par Mme [Y] au titre de la dégradation de la maison, considérant qu'elle n'était pas démontrée, admis sur le fondement de l'article 815-13 du code civil celle formée au titre des impositions supportées par elle pour le compte de l'indivision, rejeté celle fondée sur la restitution de meubles dont la présence n'était pas établie, à l'exception de l'appareil photo contenant des photographies de [A], à laquelle a consenti Mme [F], admis le bien fondé de la demande d'indemnité d'occupation du hangar de Mme [Y] contenant des biens relevant de la succession de [L] [F], admis à hauteur du quart la demande de restitution de la somme figurant sur le compte de [A] à son décès, soit 2 217,27 euros, et admis partiellement la demande de dommages-intérêts de Mme [Y] considérant que parmi les fautes alléguées, seules les menaces de mort étaient avérées.
Mme [F] a formé appel le 3 septembre 2021, désignant en qualité d'intimée Mme [Y], et visant dans sa déclaration les dispositions du jugement qui ont :
- ordonné la vente aux enchères publiques de la propriété située à [Localité 11] Lieudit [Localité 6],
- dit qu'elle est tenue de verser à l'indivision une indemnité d'occupation d'un montant de 500 euros par mois due à compter du 7 décembre 2015 jusqu'au 7 octobre 2020 et depuis le 12 avril 2021 jusqu'au partage ou jusqu'à la fin de l'occupation privative,
- dit que la créance de Mme [Y] sera inscrite au passif de l'indivision à hauteur de 2 480,59 euros au titre des taxes foncières réglées,
- condamné la succession de [L] [F] à verser à Mme [Y] la somme de
2 217,27 euros au titre du solde créditeur du compte bancaire de [A] [F] à son décès,
- condamné la succession de [L] [F] à verser à Mme [Y] la somme de 825 euros au titre de l'occupation du hangar,
- condamné Mme [F] à verser à Mme [V] [Y] la somme de 400 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,
- rejeté ses demandes.
Prétentions :
Par dernières conclusions du 16 mai 2022, Mme [F] demande à la Cour de :
- infirmer le jugement du tribunal judiciaire d'Auch du 21 juillet 2021 en ce que le tribunal a :
- dit qu'elle est tenue de verser à l'indivision une indemnité d'occupation d'un montant de 500 euros par mois due à compter du 7 décembre 2015 jusqu'au 7 octobre
2020 et depuis le 12 avril 2021 jusqu'au partage ou jusqu'à la fin de l'occupation privative,
- dit que la créance de Mme [Y] sera inscrite au passif de l'indivision à hauteur de 2 480,59 euros au titre des taxes foncières réglées,
- condamné la succession de [L] [F] à verser à Mme [Y] la somme de 2 217,27 euros au titre du solde créditeur du compte bancaire de [A] [F] à son décès,
- condamné la succession de [L] [F] à verser à Mme [Y] la somme de 825 euros au titre de l'occupation du hangar,
- l'a condamnée à verser à Mme [V] [Y] la somme de 400 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,
- rejeté ses demandes,
- fixer l'indemnité d'occupation due par elle à l'indivision à la somme de 400 € par mois du 1er août 2018 au 5 mars 2019, et du 7 septembre 2019 au 7 octobre 2020,
- déclarer irrecevable la demande de Mme [Y] au titre du solde du compte bancaire de [A],
- à tout le moins l'en débouter, comme en toute hypothèse de ses autres demandes, - débouter Mme [Y] de son appel incident,
- condamner Mme [Y] à lui payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Mme [Y] au paiement des entiers dépens conformément aux dispositions de l'article 696 du même code.
Mme [F] expose l'argumentation suivante :
- sur l'indemnité d'occupation :
- il n'est pas démontré d'occupation privative de sa part durant la totalité de la période pour laquelle elle est demandée,
- il est d'usage d'appliquer à la valeur locative un abattement de 30 à 40%, ce qui porte à 400 euros par mois le montant de l'indemnité,
- sur les créances revendiquées par Mme [Y] :
- les taxes foncières : la demande n'est pas fondée, le montant du chèque produit, de 2 480,59 euros, excédant le montant total des avis d'impôts produits,
- le compte bancaire de [A] : la demande fondée sur des virements du 13 septembre 2014 est prescrite, ayant été formée plus de cinq ans après les faits, par conclusions du 13 janvier 2020,
- l'occupation du hangar : le hangar n'étant pas un bien indivis, l'article 815-9 du code civil ne peut être invoqué, il n'est justifié ni d'une convention prévoyant une contrepartie, ni de frais générés par la conservation de véhicules dont l'entreposage avait été autorisé par Mme [Y], un contrat de dépôt, s'il était admis, devrait être considéré comme gratuit,
- sur la demande de dommages-intérêts : elle n'est pas justifiée,
- sur l'appel incident : il n'est pas fondé.
Par dernières conclusions du 12 septembre 2022, Mme [Y] demande à la Cour de :
- infirmer le jugement en ce qu'il a :
- dit que Mme [F] est tenue de verser à l'indivision une indemnité d'occupation d'un montant de 500 euros par mois due à compter du 7 décembre 2015 jusqu'au 7 octobre 2020, et depuis le 12 avril 2021 jusqu'au partage ou jusqu'à la fin de l'occupation privative,
- condamné Mme [F] à lui verser la somme de 400 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral,
- statuant à nouveau,
- fixer l'indemnité d'occupation à un montant de 550 euros par mois due à compter du 7 décembre 2015 jusqu'au jour du partage ou jusqu'à la fin de l'occupation privative,
- ordonner que l'obligation de restitution de l'appareil photo contenant les photographies de sa fille [A] soit assortie d'une astreinte financière dont le montant est laissé à la libre appréciation de la cour,
- condamner Mme [F] à lui verser la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,
- ordonner que le notaire commis chargé des opérations de liquidation et partage procède, avant la vente aux enchères, à l'estimation de la moins-value résultant des dégradations commises dans la maison depuis le départ de Mme [Y] en mai 2015, et subsidiairement depuis le décès de [L] [F],
- ordonner que pour l'estimation de la moins-value, le notaire puisse se faire assister de tout expert de son choix inscrit près la cour d'appel d'Agen,
- ordonner que les frais d'expertise soient portés en frais privilégiés de partage,
- condamner Mme [F] à payer à l'indivision la moins-value estimée par le notaire ou l'expert,
- ordonner que le cahier des charges de la vente aux enchères informe que la maison d'habitation ne dispose pas de droit de passage (servitude de passage) et que tout acquéreur devra faire les frais de la création d'un chemin privé pour accéder de la voie communale à la maison,
Y ajoutant,
- condamner Mme [F] à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Mme [F] aux dépens,
- subsidiairement,
- confirmer le jugement en ce qu'il estime l'indemnité d'occupation à la somme de 500 euros par mois.
Mme [Y] expose l'argumentation suivante :
- sur l'indemnité d'occupation :
- il est avéré que Mme [F] a occupé l'immeuble à titre privatif à compter du 1er novembre 2015 et qu'elle l'occupe toujours au mois de septembre 2022 ; ses attestations sont de complaisance émanant de sa mère et de son compagnon, et elle a supporté les factures liées à cette occupation, avec l'accord de son tuteur ; l'absence d'occupation effective des lieux est sans conséquence, la conservation des clés suffisant à caractériser l'occupation privative,
- le montant de l'indemnité d'occupation est traditionnellement de 5% (80% x valeur du bien), les parties ont désigné Me [S], notaire de Mme [F], pour déterminer la valeur de la maison qui a été fixée à 165 000 euros, soit un montant de 550 euros par mois,
- la somme due s'élève au 31 décembre 2021 à 40 700 euros,
- sur ses créances à l'encontre de l'indivision :
- elle justifie avoir supporté les taxes foncières des années 2017, 2018, et 2019,
- l'immeuble était à l'état neuf lorsqu'elle l'a quitté à la suite des violences conjugales subies de M. [F], qui s'était réfugié dans la boisson après le décès de [A], Mme [F] est redevable des dégradations qu'il a causées, en qualité d'héritière, ainsi que de celles causées par son propre fait ; il est justifié de procéder à un état des lieux afin d'estimer la moins-value résultant,
- M. [F] a perçu la totalité des fonds déposés sur le compte de [A] lorsqu'elle est décédée le 27 mai 2014, 1/4 du montant de cette somme doit lui revenir conformément à l'article 738 du code civil ; la prescription ne peut être acquise dès lors que l'assignation en liquidation-partage a été délivrée le 1er juillet 2019, moins de cinq ans après le virement du 13 septembre 2014,
- les dépendances lui appartenant en propre sont occupées par [M] [F], qui a forcé les fermetures qu'elle avait apposées en place en présence d'un huissier et a endommagé la porte ; elle n'a jamais consenti à cette occupation,
- la maison ne dispose pas de servitude de passage sur le chemin qui lui appartient en propre, ce qui devra être mentionné sur le cahier des charges,
- sur le comportement de Mme [F] :
- le comportement de Mme [F] caractérise un manque de respect pour la personne de Mme [Y], ses biens, et les biens indivis,
- elle n'a ni souscrit une assurance au titre de l'occupation de la maison, ni supporté sa part contributive à l'assurance de propriétaire, ni réglé des factures de consommables,
- sur la restitution de biens mobiliers :
- Mme [F] s'est approprié des biens meubles présents, en particulier les photos de [A], ce qui justifie que la condamnation à la remise de l'appareil photo les contenant soit assortie d'une astreinte,
- sur le préjudice :
- les agissements de Mme [F] justifient une indemnisation du préjudice moral subi à hauteur de 3 000 euros.
La Cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, fait expressément référence à la décision entreprise, et aux dernières conclusions déposées.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 septembre 2022, et l'affaire a été fixée pour être examinée le 10 octobre 2022.
Motifs
Sur l'étendue de la saisine de la cour :
Mme [F] a visé dans sa déclaration d'appel la disposition du jugement ordonnant la vente aux enchères publiques de la propriété située Lieudit [Localité 6] à [Localité 11].
Cependant, elle n'émet aucune prétention à l'encontre de cette disposition dans ses dernières conclusions ; la cour n'en est donc pas saisie, conformément à l'article 954 du code de procédure civile.
Sur l'indemnité d'occupation :
L'article 815-9 du code civil énonce que l'indivisaire qui jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.
L'occupation privative résulte de l'impossibilité, pour les autres coïndivisaires, d'user de la chose, et l'indemnité est due même en l'absence d'occupation effective des lieux.
L'attestation de Mme [J], du 14 octobre 2020, indique que Mme [F] était présente dans l'immeuble indivis depuis le décès de [L] [F].
Cependant, les autres attestations produites par Mme [Y] font état d'une occupation postérieure au mois de juin 2015, l'attestation de M. [J], du 17 mai 2020, situant le début de cette occupation au mois de novembre 2015, celle de M. [K], du 16 mai 2020, la situant à la fin de l'année 2015.
Par ailleurs, le tribunal a écarté à juste titre les attestations de M. [X] et de Mme [H], respectivement compagnon et mère de Mme [F], dépourvues d'impartialité et qui ne sont au demeurant pas exclusives d'une jouissance privative du bien indivis.
Tant les autres attestations produites par l'intimée (Mme [B] du 20 mai 2020, M. [W] du 20 mai 2020, M. [P] du 9 mai 2020, M. [J] du 17 février et du 7 septembre 2022, M. [K] du 15 février 2022), que le jugement du tribunal correctionnel d'Auch du 9 février 20221, ou encore l'acte de signification à la personne de Mme [F] du jugement du tribunal judiciaire d'Auch du 21 juillet 2021, actes dans lesquels elle est domiciliée dans la maison de Touran, démontrent que Mme [F] a continué à l'occuper de manière continue par la suite et jusqu'au mois de septembre 2022.
Si Mme [F] verse aux débats un certificat de présence au centre pénitentiaire d'[8] montrant qu'elle y a été incarcérée entre le 8 octobre 2020 et le 12 avril 2021, l'absence d'occupation effective du bien indivis ne l'exonère pas de l'indemnité d'occupation puisque Mme [Y] n'a pas eu la possibilité d'en reprendre possession durant cette période.
C'est donc à tort que le tribunal a considéré qu'elle n'en était pas redevable durant cette période.
S'agissant du montant de l'indemnité, le tribunal a retenu que la surface du bien était de 169 m², qu'il n'était pas revêtu de son enduit extérieur, et qu'il était situé à [Localité 11].
Les parties s'accordent sur la valeur de la maison, en se référant à l'attestation de valeur établie par Me [E], notaire, le 25 avril 2017, qui mentionne une surface de 130 m² et une valeur de 163 000 euros, en prenant en considération sa localisation en milieu rural.
Elles s'opposent sur la méthode de calcul à appliquer se prévalant d'usages contraires.
Il apparaît que l'absence d'enduit extérieur, peut justifier une baisse du prix en cas de revente, puisque des travaux d'achèvement de l'immeuble devront être réalisés, mais ne constitue, pour son occupant, qu'un défaut d'ordre esthétique qui ne nuit pas à l'habitabilité. Par ailleurs, la maison est située dans un lieu isolé, de construction récente, et spacieuse.
Le montant mensuel fixé par le tribunal est ainsi adapté à la valeur et aux caractéristiques de l'immeuble.
Le jugement sera infirmé, l'indemnité d'occupation due devant être fixée à 500 euros par mois à partir du 7 décembre 2015 date de la sortie d'hôpital de Mme [F], et jusqu'au partage ou jusqu'à la fin de son occupation privative.
Sur les taxes foncières :
Selon l'article 815-13 du code civil, il doit être tenu compte à l'égard d'un indivisaire des dépenses nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu'elles ne les aient point améliorés.
Mme [Y] verse aux débats :
- les avis de taxes foncières concernant le bien indivis pour les années 2017, 2018, et 2019, qui ont été émis à son nom, et lui ont été adressés par l'administration fiscale, et qui mentionnent que les débiteurs sont les propriétaires indivis, Mme [Y] et Mme [F],
- la photocopie d'un chèque de 2 480 euros émis le 11 mars 2020, accompagnée de la photocopie d'un courrier daté du même jour mentionnant qu'elle effectue ce paiement pour les taxes foncières de 2017 à 2019,
- une déclaration de recette délivrée par l'administration au titre de la taxe foncière de 2017 à 2019.
Ces éléments suffisent à démontrer qu'elle a assumé cette dépense pour le compte de l'indivision et à, à tout le moins, supporté un paiement partiel de la dite taxe.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a admis qu'elle détenait une créance de 2 480,59 euros à inscrire au passif de l'indivision.
Sur les dégradations de l'immeuble
L'article 815-13 du code civil impose à l'indivisaire de répondre des dégradations et détériorations ayant diminué la valeur des biens indivis par son fait ou par sa faute.
En cause d'appel, Mme [Y] produit des attestations mentionnant le bon état de l'immeuble indivis au moment du décès de [L] [F], mais aucun élément de nature à démontrer l'existence de dégradations, ou d'actes ayant entraîné une diminution de sa valeur, et qui puissent être imputés à Mme [F] ou à [L] [F].
C'est donc à juste titre que le tribunal a rejeté sa demande.
Sur les sommes versées sur le compte de [A] [F] :
Selon l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
L'article 738 du code civil dispose que lorsque les père et mère survivent au défunt et que celui-ci n'a pas de postérité, la succession est dévolue, pour un quart, à chacun des père et mère et, pour la moitié restante, aux frères et soeurs ou à leurs descendants.
L'action de Mme [Y] tend à obtenir le reversement de la part de l'épargne constituée au nom de sa fille, lui revenant en vertu de l'article 738 du code civil, à l'occasion du partage consécutif au décès de son compagnon, puisque cette épargne avait été versée sur le compte du couple.
Le délai de droit commun de cinq ans de l'article 2224 du code civil a donc été interrompu par l'assignation en liquidation-partage délivrée le 1er juillet 2019, moins de cinq ans après le virement litigieux effectué le 13 septembre 2014.
L'action est donc recevable.
Sur le fond, Mme [F] ne présente aucun moyen de défense, et Mme [Y] verse aux débats le relevé du compte ouvert au nom de l'enfant du 1er janvier au 13 octobre 2020, faisant ressortir une opération de clôture en date du 13 septembre 2014 et de virement du solde créditeur, de 8 869,08 euros, et le relevé du compte commun qu'elle détenait avec [L] [F] du 1er janvier 2013 au 13 octobre 2020, mentionnant la perception de cette somme à la date du 13 septembre 2014.
L'existence de cet actif provenant de la succession de l'enfant [A] décédée le 27 mai 2014 étant démontrée, il est justifié qu'il revienne à hauteur du quart, soit 2 217,27, à Mme [Y].
Le jugement sera confirmé.
Sur l'occupation du hangar de Mme [Y] :
Mme [Y] affirme ne jamais avoir autorisé Mme [F] à occuper les dépendances de la maison, dont elle est propriétaire, et sollicite une indemnité au titre de la présence de véhicules et d'objets ayant appartenu à [L] [F].
Mme [F] invoque l'accord donné par Mme [Y] pour laisser les véhicules dans ce hangar, et le caractère gratuit de l'éventuel contrat de dépôt qui aurait pu être établi.
Mme [Y] n'allègue pas que les véhicules de son compagnon aient été stationnés dans ce hangar par Mme [F], ne démontre pas avoir été dépossédée de son bien, et ne produit aucun élément de nature à démontrer l'existence d'un préjudice justifiant une indemnisation.
La demande étant mal fondée, le jugement sera infirmé sur ce point.
Sur la demande d'astreinte :
Mme [Y] ne justifie pas de circonstances justifiant que la condamnation à la restitution de l'appareil photo contenant des photographies de [A], qui n'a pas été déférée à la cour par Mme [F], soit assortie d'une astreinte.
La demande n'est pas fondée.
Sur les autres demandes :
En application de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
Partie perdante, Mme [F] sera tenue de supporter les dépens d'appel.
L'article 700 du code de procédure civile prévoit que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Mme [F] sera condamnée à payer à Mme [Y] 2 000 € en application de ces dispositions.
Par ces motifs,
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,
Confirme les disposition déférées du jugement du tribunal judiciaire d'Auch du 21 juillet 2021, SAUF en ce qu'il a :
- dit que Mme [M] [F] est tenue de verser à l'indivision une indemnité d'occupation d'un montant de 500 euros par mois due à compter du 7 décembre 2015 jusqu'au 7 octobre 2020 et depuis le 12 avril 2021 jusqu`au partage ou jusqu'à la fin de l'occupation privative,
- condamné la succession de M. [L] [F] à verser à Mme [V] [Y] la somme de 825 euros au titre de l'occupation du hangar,
- condamné Mme [M] [F] à verser à Mme [V] [Y] la somme de 400 euros a titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,
Statuant à nouveau sur les points infirmés,
- dit que Mme [M] [F] est tenue de verser à l'indivision une indemnité d'occupation d'un montant de 500 euros par mois due à compter du 7 décembre 2015 jusqu`au partage ou jusqu'à la fin de l'occupation privative,
- déboute Mme [Y] de sa demande d'indemnisation de l'occupation de son hangar,
- déboute Mme [Y] de sa demande de dommages-intérêts,
- condamne Mme [F] aux dépens d'appel,
- condamne Mme [F] à payer à Mme [Y] 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu l'article 456 du code de procédure civile, le présent arrêt a été signé par Dominique BENON, Conseiller ayant participé au délibéré en l'absence de Mme la présidente de chambre empêchée, et par Charlotte ROSA, adjoint administratif faisant fonction de greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, Le Conseiller,