ARRÊT DU
29 Mars 2023
CV/CR
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N° RG 21/01038
N° Portalis
DBVO-V-B7F-C6JX
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S.A. COFIDIS
C/
[N] [F],
[M] [J]
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GROSSES le
à
ARRÊT n° 132-2023
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Civile
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,
ENTRE :
S.A. COFIDIS
RCS de Lille Métropole n°325 307 106
[Adresse 8]
[Localité 5]
Représentée par Me Laurence BOUTITIE, avocate postulante au barreau d'AGEN et par Me Stéphanie BORDIEC, avocate plaidante au barreau de BORDEAUX
APPELANTE d'un Jugement du Juge des contentieux de la protection de CONDOM en date du 06 Septembre 2021, RG 21/000053
D'une part,
ET :
Madame [N] [F]
née le [Date naissance 2] 1965 à [Localité 7] (32)
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 3]
Monsieur [M] [J]
né le [Date naissance 1] 1986 à [Localité 6] (32)
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 3]
INTIMÉS n'ayant pas constitué avocat
D'autre part,
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 09 Janvier 2023 devant la cour composée de :
Président : André BEAUCLAIR, Président de chambre
Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller
Cyril VIDALIE, Conseiller qui a fait un rapport oral à l'audience
Greffière : Nathalie CAILHETON
ARRÊT : prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
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Suivant offre préalable acceptée le 3 avril 2019, Mme [F] et M. [J] ont souscrit auprès de la SA Cofidis un emprunt de regroupement de crédits, d'un montant de 35 000 euros, au taux effectif global de 5,94%, remboursable en 119 mensualités de 386,82 euros et d'une mensualité de 385,52 euros.
À la suite de la défaillance des emprunteurs, la SA Cofidis a délivré une mise en demeure de payer l'arriéré par courrier recommandé du 8 janvier 2021, puis a notifié la déchéance du terme par courriers recommandés du 18 janvier 2021.
Par actes du 26 avril 2021, la SA Cofidis a assigné Mme [F] et M. [J] devant le tribunal de proximité de Condom, afin d'obtenir leur condamnation solidaire au paiement de la somme principale de 36 732,03 euros.
Par jugement du 6 septembre 2021, le tribunal de proximité de Condom a :
- prononcé la déchéance du droit aux intérêts,
- dit qu'aucune somme n'est due au titre du contrat d'assurance,
- condamné solidairement Mme [F] et M. [J] à payer à la SA Cofidis la somme de 1 526,41 euros au titre des échéances impayées,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Mme [F] et ML [J] aux dépens de l'instance.
S'agissant du prêt, et faisant application des articles L.312-85, L.312-21, L.312-29, L.341-1, L.341-4 du code de la consommation, le tribunal a observé que la SA Cofidis à laquelle il incombait d'apporter la preuve de la remise des documents prévus par ces dispositions, ne produisait que des photocopies ne permettant pas de conclure que la remise des originaux de ces documents aux emprunteurs avait eu lieu, et qu'il ressortait de copies jointes à un courrier adressé aux emprunteurs daté du 3 avril 2019 que ces documents avaient été édités après la signature du contrat, du 2 avril 2019, ce qui démontrait qu'ils n'avaient pas été portés préalablement à la connaissance des consommateurs.
S'agissant de l'assurance du prêt, le tribunal a retenu que la SA Cofidis ne versait au soutien de son action que la fiche de conseil assurance ne constituant pas un contrat.
S'agissant de la demande de condamnation au paiement de la dette, le tribunal a retenu qu'en l'absence de production des conditions générales du contrat, il n'était pas possible de s'assurer des obligations contractuelles permettant le prononcé de la déchéance du terme, et limité la condamnation des emprunteurs au paiement des seules échéances impayées sous déduction des intérêts et primes d'assurance.
La SA Cofidis a formé appel le 26 novembre 2021, désignant en qualité d'intimés Mme [F] et M [J], et visant dans sa déclaration la totalité des dispositions du jugement à l'exception de celle relative aux dépens.
Prétentions :
Par uniques conclusions du 21 février 2022, signifiées à Mme [F] le 23 février 2022 par remise de l'acte à M. [J] qui était présent à son domicile, et à M. [J] le 23 février 2022 par remise de l'acte à sa personne, la SA Cofidis demande à la Cour de :
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné Mme [F] et M. [J] aux dépens de première instance,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts et a condamné Mme [F] et M. [J] à lui payer la somme de
1 526,41 euros seulement,
- statuant à nouveau, sur ces points,
- condamner solidairement Mme [F] et M. [J], sur le fondement de l'article L.312-39 du code de la consommation dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, à lui payer, au titre du dossier n°28976000774192, la somme en principal de 36 732,03 euros, actualisée au 16 mars 2021, assortie des intérêts calculés au taux contractuel de 5.90 % sur la somme de 32 804,46 euros à compter du 16 mars 2021, date du dernier décompte et au taux légal sur le surplus,
- subsidiairement, si par extraordinaire la cour confirmait le jugement déféré en ce qu'il a jugé que la déchéance du terme n'était pas valablement acquise,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné Mme [F] et M. [J] au paiement des seules échéances échues impayées au jour de l'assignation,
- prononcer la résiliation judiciaire du contrat conclu les parties le 3 avril 2019, sur le fondement des dispositions des articles 1228 et 1229 du code civil,
- condamner solidairement Mme [F] et M. [J], sur le fondement de l'article L.312-39 du code de la consommation dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016, à lui payer, au titre du dossier n°28976000774192, la somme en principal de 36 732,03 euros, actualisée au 16 mars 2021, assortie des intérêts calculés au taux contractuel de 5,90 % sur la somme de 32 804,46 euros à compter du 16 mars 2021, date du dernier décompte et au taux légal sur le surplus,
- très subsidiairement, si la cour, venait à juger, non seulement que la déchéance du terme est irrégulière, mais également que la SA Cofidis n'est pas fondée à solliciter la résiliation judiciaire du contrat de prêt litigieux,
- constater que Mme [F] et M. [J] n'ont effectué aucun règlement depuis mai 2020 jusqu'à ce jour,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné à lui payer la somme de
1 526,41 euros seulement,
- statuant à nouveau sur ce point,
- condamner solidairement Mme [F] et M. [J], sur le fondement de l'article L.312-39 du code de la consommation dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2016-301 du 14-03-2016, à lui payer, au titre du dossier n°28976000774192, la somme de 10 974,04 euros, ladite somme correspondant à la somme des échéances échues impayées du 6 mai 2020 à ce jour (soit 22 x 498.82 euros), assortie des intérêts calculés au taux contractuel à compter de cette date,
- condamner solidairement Mme [F] et M. [J], sur le fondement de l'article L.312-39 du code de la consommation dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14-03-2016, à lui payer, au titre du dossier n°28976000774192, la somme des échéances échues impayées à compter du 6 mars 2022 jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir, ladite somme portant intérêt au taux contractuel, à compter du dit arrêt,
- dire et juger que le contrat litigieux reprendra tous ses effets à compter de l'arrêt à intervenir,
En tout état de cause,
- condamner solidairement Mme [F] et M. [J] à lui payer la somme de 2 000 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner solidairement Mme [F] et M. [J] aux dépens de la procédure d'appel.
La SA Cofidis expose l'argumentation suivante :
- il ne peut être reproché au prêteur de ne pas avoir conservé un exemplaire de la fiche d'information remise à l'emprunteur, et elle a en tout état de cause produit la fiche d'informations précontractuelles européenne normalisées,
- le tribunal ne pouvait, sans ajouter à la loi, retenir que seul le paraphe ou la signature d'un document précontractuel permettait de justifier de sa remise,
- en signant l'offre, les emprunteurs ont reconnu avoir pris connaissance et être restés en possession de la fiche ; cet élément ne suffit pas à justifier de la remise, mais constitue néanmoins un indice qui corroboré par d'autres éléments , ce qui permet de démontrer le respect de l'obligation de l'article L.311-6 du code de la consommation,
- les emprunteurs n'ont pas contesté cette remise,
- il doit être fait application à cette remise de la jurisprudence relative à la remise de la notice d'assurance, retenant que la mention figurant dans les conditions particulières signées par le souscripteur d'un contrat d'assurance, indiquant qu'il reconnaît avoir reçu un exemplaire du contrat composé des conditions particulières et de conditions générales désignées par leur référence, établit que, bien que non signées, elles ont été portées à sa connaissance, et lui sont opposables,
- elle justifie également que l'offre était assortie du bordereau de rétractation,
- la demande de paiement des sommes au titre de l'assurance est bien fondée, dès lors qu'il a été justifié de la demande d'adhésion à l'assurance, des conditions générales,
- la déchéance du terme a été régulièrement prononcée, le prêteur ayant délivré des mises en demeure par courriers recommandés dont il a été accusé réception, puis prononcé la sanction dans les termes prévu par le contrat, qui a été paraphé par les emprunteurs qui en ont eu connaissance,
- le juge ne peut pas soulever d'office le moyen tiré de l'absence de mise en demeure préalable qui n'est pas d'ordre public, tiré de l'article 1225 du code civil et non du code de la consommation,
- en tout état de cause, les emprunteurs n'ayant remboursé que 11 mensualités, et ayant cessé tout paiement depuis le 6 mai 2020, une résiliation judiciaire devrait être prononcée au visa des articles 1228 et 1229 du code civil,
- en l'absence de résiliation, le montant des échéances échues impayées s'élève désormais à 10 974 euros.
La Cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, fait expressément référence à la décision entreprise, et aux dernières conclusions déposées.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 23 novembre 2022, et l'affaire a été fixée pour être examinée le 9 janvier 2023.
Motifs
La SA Cofidis verse aux débats une copie des documents contractuels fondant son action, comportant :
- le contrat de regroupements de crédit établi en trois pages dont les deux premières sont paraphées et la troisième datée des 2 et 3 avril 2019 et signée par les emprunteurs, la troisième page mentionnant qu'ils ont pris connaissance de l'ensemble des conditions du contrat et de la notice d'information sur l'assurance ; ce document indique que le prêteur peut résilier le contrat de crédit si plusieurs mensualités restent impayées après mise en demeure restée infructueuse, et que dans ce cas, il exigera le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés, les sommes restant dues produisant des intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt, et qu'il pourra demander une indemnité égale à 8% du capital restant dû,
- le mandat de prélèvement SEPA signé par les emprunteurs,
- les fiches de conseil en assurance prescrites par l'article L.521-4 du code des assurances, datées et signées par les emprunteurs, qui énoncent les garanties souscrites et le coût mensuel de l'assurance fixé à 0,32% du montant emprunté,
- les fiches de dialogue signée par les emprunteurs,
- les bulletins de paie, cartes d'identité, facture internet et de téléphone des emprunteurs.
La banque produit, concernant la déchéance du terme :
- l'échéancier du crédit, détaillant pour chaque mensualité le montant de l'échéance, des intérêts, de l'assurance, et du capital amorti,
- un historique du compte,
- une mise en demeure adressée à Mme [F] et M. [J] par courrier recommandé du 8 janvier 2021, dont l'accusé de réception est signé, leur enjoignant de procéder au paiement intégral de l'arriéré de 3 771,04 euros, à défaut de quoi la déchéance du terme sera prononcée,
- deux courriers recommandés de notification de déchéance du terme adressés à Mme [F] et à M. [J] datés du 18 janvier 2021, dont les accusés de réception sont signés.
Par ailleurs, la SA Cofidis produit le dossier contenant l'offre de prêt qu'elle a adressé aux emprunteurs et qui est constitué de 30 pages numérotées contenant les informations précontractuelles et notamment :
- la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées en matière de crédits aux consommateurs (FIPAN), spécifiant qu'elle est à conserver par les emprunteurs,
- la fiche d'informations complémentaires en cas de vente à distance,
- le document d'information propre au regroupement de crédits, contenant des informations d'ordre général et le détail de l'endettement du couple, engagé dans cinq emprunts pour un montant total dû de 40 972,12 euros,
- un document d'information sur l'assurance des emprunteurs,
- deux fiches de conseil en assurance à retourner signée par chaque emprunteur,
- une fiche de dialogue, renseignée, exposant la situation socio-professionnelle des deux emprunteurs, à retourner signée,
- le contrat de prêt en double exemplaire, un à conserver, et un à retourner signé,
- un mandat de prélèvement SEPA à retourner signé,
- une notice d'information de trois pages sur l'assurance.
Ceux de ces documents qui sont destinés à être signés et retournés au prêteur sont identiques à ceux des documents qui sont signés, en particulier quant aux informations relatives à la situation particulière des emprunteurs, ce qui démontre leur réception de l'entier dossier et le respect des obligations d'information pesant sur le prêteur.
L'antériorité ou la concomitance des dates portées par les emprunteurs sur le contrat de prêt ne démontre pas que la liasse non signée ait été éditée a posteriori, ainsi que l'a retenu le premier juge, cette hypothèse n'étant pas confirmée, dès lors qu'aucun élément ne permet d'établir la date à laquelle le dossier a été reçu par les emprunteurs, et la surcharge de la date portée au dessus de la signature de M. [J] générant de plus une incertitude quant à son exactitude permettant d'envisager l'hypothèse d'une erreur des emprunteurs.
Il n'est donc pas justifié de déchoir le prêteur du droit aux intérêts.
S'agissant de l'assurance du prêt, il ressort de ce qui précède que tant le contrat de prêt, que plusieurs documents d'information très détaillés ont porté à la connaissance des emprunteurs les modalités de leur adhésion au contrat d'assurance de groupe souscrit par la SA Cofidis auprès des SA ACM Vie et ACM IARD SA.
De plus, l'absence de production des conditions générales du contrat d'assurance dont les emprunteurs ne sont pas signataires et auxquels ils ne sont pas partie, étant adhérents à l'assurance de groupe souscrite par le prêteur, ne peut faire obstacle à l'action en recouvrement des sommes dues par eux au titre du prêt, comportant le coût de leur cotisation d'adhérent à l'assurance, puisque les obligations résultant de ces conventions ne sont pas interdépendantes.
Enfin, il ne peut être opposé au prêteur une absence de production des conditions générales du contrat de prêt rendant impossible la vérification des obligations contractuelles permettant de prononcer la déchéance du terme, dès lors que tous les documents contractuels sont produits, et qu'ainsi qu'exposé précédemment, le contrat expose les conséquences résultant de la défaillance des emprunteurs, et en premier lieu de l'absence d'exécution de leur obligation principale tenant au remboursement du prêt.
La Banque produit la mise en demeure de régulariser l'impayé énonçant la sanction encourue, les courriers de notification de la déchéance du terme.
Enfin, les emprunteurs, auxquels incombe la preuve de l'exécution de leur obligation, n'ont comparu ni en première instance ni en cause d'appel, et n'ont produit aucun justificatif de paiement des échéances dont le tribunal a constaté l'absence de paiement, ce qui justifie la déchéance du terme, et la prise en considération de l'historique et du décompte détaillé de créance versés aux débats par la SA Cofidis.
Il y a donc lieu d'accueillir l'action en paiement, et de condamner solidairement Mme [Z] et M. [J] à payer à la SA Cofidis la somme de 36 732,03 euros, assortie des intérêts au taux annuel de 5,9% sur la somme de 32 804,46 euros à compter du 16 mars 2021, et au taux légal sur le surplus.
Le jugement sera infirmé.
Les dépens d'appel seront supportés par Mme [Z] et M. [J], partie perdante.
Il sera alloué à la SA Cofidis 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs,
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt par défaut prononcé par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,,
Infirme le jugement du 7 septembre 2021 en ses dispositions soumises à la Cour,
Statuant à nouveau,
Condamne solidairement Mme [N] [F] et M. [M] [J] à payer à la SA Cofidis la somme de 36 732,03 euros, assortie des intérêts au taux annuel de 5,9% sur la somme de 32 804,46 euros à compter du 16 mars 2021, et au taux légal sur le surplus,
Y ajoutant,
Condamne solidairement Mme [N] [F] et M. [M] [J] aux dépens d'appel,
Condamne solidairement Mme [N] [F] et M. [M] [J] à payer à la SA Cofidis la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par André BEAUCLAIR, président, et par Nathalie CAILHETON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, Le Président,