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04/09/2024 | FRANCE | N°20/00703

France | France, Cour d'appel d'Agen, Chambre civile, 04 septembre 2024, 20/00703


ARRÊT DU

04 Septembre 2024





AB/CTE





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N° RG 20/00703

N° Portalis DBVO-V-B7E -C2D2

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CRCAM NORD MIDI- PYRÉNÉES



C/



[E] [I]



[W] [I]



[T] [I] épouse [R]



[B] [J]



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GROSSES aux avoca

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ARRÊT n° 249/24











COUR D'APPEL D'AGEN



Chambre Civile









LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,







ENTRE :



CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL (CRCAM) NORD MIDI-PYRÉNÉES pris en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège

RC...

ARRÊT DU

04 Septembre 2024

AB/CTE

---------------------

N° RG 20/00703

N° Portalis DBVO-V-B7E -C2D2

---------------------

CRCAM NORD MIDI- PYRÉNÉES

C/

[E] [I]

[W] [I]

[T] [I] épouse [R]

[B] [J]

------------------

GROSSES aux avocats

le

ARRÊT n° 249/24

COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Civile

LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,

ENTRE :

CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL (CRCAM) NORD MIDI-PYRÉNÉES pris en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège

RCS 444 953 830 ALBI

[Adresse 4]

[Localité 7]

représentée par Me Lynda TABART, membre de la SCP DIVONA LEX, avocate au barreau du LOT

APPELANTE d'un jugement du tribunal judiciaire de CAHORS en date du 18 septembre 2020, RG 18/00351

D'une part,

ET :

Monsieur [E] [I]

né le [Date naissance 6] 1974 à [Localité 10]

de nationalité française, chef de ligne

Monsieur [W] [I]

né le [Date naissance 3] 1944 à [Localité 8]

de nationalité française, retraité

domiciliés ensemble : '[Localité 11]'

[Localité 8]

représentés par Me Paulette SUDRE, avocate au barreau du LOT

INTIMÉS

Madame [T] [I] épouse [R] en sa qualité d'héritière de Mme [L] [U] épouse [I], décédée le [Date décès 1] 2021

née le [Date naissance 5] 1970 à [Localité 10]

de nationalité française

domiciliée : '[Localité 11]'

[Localité 8]

Monsieur [B] [J] en sa qualité d'héritier de Mme [L] [U] épouse [I], décédée le [Date décès 1] 2021

né le [Date naissance 2] 1990 à [Localité 10]

de nationalité française

[Adresse 9]

[Localité 8]

n'ayant pas constitué avocat

ASSIGNÉS EN INTERVENTION FORCÉE

D'autre part,

COMPOSITION DE LA COUR :

l'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 10 juin 2024 devant la cour composée de :

Président : André BEAUCLAIR, Président de chambre, qui a fait un rapport oral à l'audience

Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller

Anne Laure RIGAULT, Conseiller

Greffière : Nathalie CAILHETON

ARRÊT : prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

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EXPOSÉ DU LITIGE

Vu l'appel interjeté le 30 septembre 2020 par la CRCAM NORD MIDI PYRÉNÉES à l'encontre d'un jugement du tribunal judiciaire de CAHORS en date du 18 septembre 2020, intimant M [E] [I], et les époux [W] [I] et [L] [U] ;

Vu le décès d'[L] [U] épouse [I], l'assignation en intervention forcée de :

- Mme [T] [I] épouse [R] héritière d'[L] [U] en date du

21 mars 2023 par acte remis à sa personne.

- M [B] [J] fils de Mme [N] [I] héritière renonçant à la succession de sa mère [L] [U] en date du 1er février 2024 par procès verbal article 659 du code de procédure civile.

Vu les conclusions de la CRCAM NORD MIDI PYRÉNÉES en date du 16 mai 2024, et du 15 septembre 2023 signifiées à la personne de Mme [T] [I] le 20 septembre 2023.

Vu les conclusions des consorts [E] [I] et [W] [I] en date du 20 octobre 2023, et du 5 septembre 2023 signifiées à la personne de Mme [T] [I] le 13 septembre 2023.

Vu l'ordonnance de clôture du 22 mai 2024 pour l'audience de plaidoiries fixée au 10 juin 2024.

------------------------------------------

Par acte sous seing privé en date du 7 février 2007, la CRCAM Nord Midi Pyrénées a consenti au GAEC de [Localité 11], devenu EARL DE [Localité 11] en mars 2013, un prêt d'un montant de 70.000 euros remboursable selon utilisation sur une durée de 144 mois par règlement d'annuités de 9.153,58 euros au taux d'intérêt nominal de 5,20 %. MM [E] [I], [D] [R], Mme [T] [R], les époux [W] [I] et [L] [U] se sont portés cautions solidaires de cet engagement de prêt dans la limite de la somme de 91.000 euros. Les échéances sont demeurées impayées depuis celle du 30 juin 2016.

Par acte sous seing privé en date du 24 mai 2011, la CRCAM Nord Midi Pyrénées a consenti également au GAEC de [Localité 11], devenu EARL DE [Localité 11], un prêt d'un montant de 29.400 euros, destiné à financer l'acquisition d'une faucheuse LANDINI, remboursable en 7 annuités de 4.844,16 euros au taux d'intérêt nominal de 3,70%.

M [E] [I], les époux [D] [R] et [T] [I] se sont portés caution solidaire de cet engagement de prêt dans la limite de la somme de 38.220 euros. Les échéances sont demeurées impayées depuis celle du 28 février 2016.

Par courriers des 18 août 2017 et du 27 septembre 2017, la CRCAM a mis en demeure, sans succès, l'EARL DE [Localité 11] et les cautions de régler les sommes dues au titre des engagements précités. La CRCAM a prononcé ensuite la déchéance du terme des prêts souscrits par l'EARL DE [Localité 11] et a sollicité auprès de la débitrice principale et des cautions solidaires le règlement de :

- 40.320,42 euros au titre du prêt d'un montant de 70.000 euros, outre les intérêts au taux de 5,20 % calculés sur la somme de 32.307,89 euros à compter du 26 octobre 2017,

- 19.358,93 euros au titre du prêt d'un montant de 29.400 euros, outre les intérêts au taux de 3,70 % calculés sur la somme de 16.381,35 euros à compter du 26 octobre 2017.

Nonobstant l'envoi de ces mises en demeure, ni l'EARL DE [Localité 11] ni les cautions solidaires n'ont régularisé la situation.

Par jugement du 19 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Cahors a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de l'EARL DE [Localité 11] et de M [D] [R]. La CRCAM a régulièrement déclaré ses créances entre les mains du mandataire judiciaire, Me [S] [X], par courriers des 11 et 18 janvier 2018, et a ensuite obtenu en mars 2018 l'autorisation d'inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur les biens appartenant aux cautions en vue de garantir les sommes dues par l'EARL DE [Localité 11] et M [D] [R].

Par acte d'huissier du 26 mars 2018, la CRCAM Nord Midi Pyrénées a assigné les époux [W] [I] et [L] [U], M [E] [I] et Mme [T] [I] épouse [R] devant le tribunal de grande instance de CAHORS sur le fondement des dispositions des articles L 622-28 du code de commerce et 1134, 1147, 1153 et suivants, 2288 et suivants du code civil, afin d'obtenir un titre exécutoire contre les cautions.

Par jugement du 29 janvier 2019, un plan de redressement a été adopté et publié au BODACC du 12 février 2019. Cette décision ayant pour effet de mettre fin à la suspension des poursuites des cautions prévue à l'article L 622-28 alinéa 2 du code de commerce, la CRCAM est en droit de solliciter le règlement des sommes susvisées par les cautions qui ne pourront lui opposer les dispositions du plan de redressement en raison de l'application des dispositions de l'article L 631-20 du code de commerce.

Par jugement en date du 18 septembre 2020, le tribunal judiciaire de CAHORS a :

- déclaré recevable et bien fondée l'action des époux [W] [I] et [L] [I] en nullité des cautionnements souscrits le 6 février 2007, concernant le prêt de 70 000 euros en date du 07 février 2007 consenti à l'EARL de [Localité 11] et concernant le prêt de 29 400 euros en date du 24 mai 2011 consenti à l'EARL de [Localité 11].

- débouté la CRCAM Nord Midi Pyrénées de toutes ses demandes à l'encontre des époux [W] [I] et [L] [I],

- jugé sans objet les demandes des époux [W] [I] et [L] [I] visant :

* à voir déclarer les cautionnements souscrits le 06 février 2007 disproportionnés,

* à voir constater un manquement de la CRCAM à l'obligation de mise en garde ou de conseil à leur égard,

* à engager la responsabilité de la CRCAM Nord Midi PYRÉNÉES à ce titre.

* à voir prononcer la déchéance du droit aux intérêts.

- jugé disproportionnés les cautionnements consentis par M [E] [I] le 07 février 2007 et le 24 mai 2011, concernant le prêt de 70 000 euros en date du 07 février 2007 consenti à l'EARL de [Localité 11] et concernant le prêt de 29 400 euros en date du

24 mai 2011 consenti à l'EARL de [Localité 11],

- jugé que la CRCAM Nord Midi Pyrénées ne peut se prévaloir à l'encontre de

M [E] [I] de ces cautionnements et l'a déboutée de toutes ses demandes en paiement au titre de ces cautionnements,

- constaté que Mme [T] [R] née [I] n'a pas constitué avocat et a laissé le tribunal dans l'ignorance de ses prétentions et moyens,

- condamné Mme [T] [R] née [I] en sa qualité de caution solidaire de l'EARL DE [Localité 11], à verser à la CRCAM :

- capital restant dû au 25/10/2017 16 972,12 euros

- échéances échues impayées 15 335,77 euros

- outre les intérêts au taux de 5,20 % calculés sur la somme de

32.307,89 euros à compter du 26 octobre 2017 et une indemnité de 1 000 euros.

- capital restant dû au 25/10/2017 9 175,97 euros

- échéances échues impayées 7 205,38 euros

- outre les intérêts au taux de 3,70 % calcules sur la somme de 16.381,35 euros à compter du 26 octobre 2017 et une indemnité de 500 euros

- débouté toutes les parties de leur demande en application de l'article 700 du

code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire du jugement,

- condamné Mme [T] [R] née [I] aux dépens.

Pour statuer en ce sens, le tribunal a retenu que :

- l'acte de cautionnement des époux [I] porte la date du 6 février 2007 et le prêt a été signé le 7 février 2007.

- l'exception de nullité ne se prescrit pas en l'absence d'exécution de l'acte de cautionnement dont la nullité est avancée.

- l'erreur est déterminante, il n'est pas établi que les époux [I] avaient connaissance des termes du prêt conclu le lendemain, la simple mention du débiteur garanti et du numéro de dossier du prêt ne les informe pas des conditions d'octroi du prêt au débiteur garanti.

- au jour de la conclusion de l'acte de cautionnement par M [E] [I], celui ci n'avait aucun revenu, vivant avec ses deux enfants chez ses parents. Au jour où il est poursuivi, il perçoit un salaire de 1.500,00 euros, et vit avec ses enfants chez ses parents. Il détient des parts sociales d'une exploitation qui fait l'objet d'un plan de redressement. Son engagement est disproportionné.

Les chefs du jugement critiqués dans la déclaration d'appel sont ceux ayant :

- déclaré recevable et bien fondée l'action des époux [W] [I] et [L] [I] en nullité des cautionnements souscrits le 6 février 2007, concernant le prêt de 70 000 euros en date du 07 février 2007 consenti à l'EARL de [Localité 11] et concernant le prêt de 29 400 euros en date du 24 mai 2011 consenti à l'EARL de [Localité 11].

- débouté la CRCAM Nord Midi Pyrénées de toutes ses demandes à l'encontre des époux [W] [I] et [L] [I],

- jugé sans objet les demandes des époux [W] [I] et [L] [I] visant :

* à voir déclarer les cautionnements souscrits le 06 février 2007 disproportionnés,

* à voir constater un manquement de la CRCAM à l'obligation de mise en garde ou de conseil à leur égard,

* à engager la responsabilité de la CRCAM Nord Midi PYRÉNÉES à ce titre.

* à voir prononcer la déchéance du droit aux intérêts

- jugé disproportionnés les cautionnements consentis par M [E] [I] le 07 février 2007 et le 24 mai 2011,concernant le prêt de 70 000 euros en date du 07 février 2007 consenti à l'EARL de [Localité 11] et concernant le prêt de 29 400 euros en date du 24 mai 2011 consenti à l'EARL de [Localité 11],

- jugé que la CRCAM Nord Midi Pyrénées ne peut se prévaloir à l'encontre de M [E] [I] de ces cautionnements et l'a déboutée de toutes ses demandes en paiement au titre de ces cautionnements.

La CRCAM NORD MIDI PYRÉNÉES demande à la cour de :

- prendre acte qu'au 21 janvier 2023, MM [E] [I], [W] [I] et Mme [T] [R] ont la qualité pour la CRCAM NORD MIDI PYRÉNÉES en application de l'article 772 du code civil d'héritiers réputés acceptant pur et simple de la succession d'[L] [U] épouse [I]

- dire qu'ils sont redevables à titre personnel et en leur qualité d'héritiers réputés acceptant pur et simple de la succession d'[L] [U] épouse [I] des sommes dues à la CRCAM NORD MIDI PYRÉNÉES

- infirmer le jugement entrepris des chefs visés à la déclaration d'appel,

- statuant à nouveau,

- Débouter M [W] [I] et M [E] [I], en son nom personnel pour le premier et en les deux en leur qualité d'héritier pur et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] au 22 janvier 2023, et Madame [T] [R], en qualité d'héritière pure et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] au 22 janvier 2023 de leur action en nullité du cautionnement souscrit le 6 février 2007

- débouter M [W] [I] et M [E] [I], en leur nom personnel et en leur qualité d'héritier pur et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] au

22 janvier 2023, et Mme [T] [R], en qualité d'héritière pure et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] au 22 janvier 2023 de leur demande visant à voir déclarer les cautionnements souscrits disproportionnés

- déclarer irrecevable en raison de la prescription intervenue M [W] [I] et M [E] [I], en leur nom personnel et en leur qualité d'héritier pur et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] au 22 janvier 2023, et Mme [T] [R], en qualité d'héritière pure et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] au 22 janvier 2023, en raison de son action en responsabilité visant à voir constater un manquement de la CRCAM NORD MIDI PYRÉNÉES à l'obligation de mise en garde ou de conseil à son égard

- dire que la CRCAM NORD MIDI PYRÉNÉES ne pouvait être tenue d'une obligation de conseil ou de mise en garde à l'égard de M [E] [I], et des époux [W] [I] et [L] [I],

- débouter M [W] [I] et M [E] [I], en leur nom personnel et en leur qualité d'héritier pur et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] au 22 janvier 2023, et Mme [T] [R], en qualité d'héritière pure et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] au 22 janvier 2023, en leur qualité de caution solidaire de l'EARL DE [Localité 11], de leur demande visant à engager la responsabilité de la CRCAM NORD MIDI PYRÉNÉES à ce titre,

- débouter M [W] [I] et M [E] [I], en leur nom personnel et en leur qualité d'héritier pur et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] au

22 janvier 2023, et Mme [T] [R], en qualité d'héritière pure et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] au 22 janvier 2023, en leur qualité de caution solidaire de l'EARL DE [Localité 11], de leur demande au titre de l'obligation de mise en garde.

- débouter M [W] [I] et M [E] [I], en leur nom personnel et en leur qualité d'héritier pur et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] au

22 janvier 2023, et Mme [T] [R], en qualité d'héritière pure et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] au 22 janvier 2023, en leur qualité de caution solidaire de l'EARL DE [Localité 11], de leur demande visant à voir prononcer la déchéance du droit aux intérêts

- Condamner solidairement M [W] [I] et M [E] [I], en leur nom personnel et en leur qualité d'héritier pur et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] au 22 janvier 2023, en leur qualité de caution solidaire de l'EARL DE [Localité 11], et Mme [T] [R], en qualité d'héritière pure et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] au 22 janvier 2023, à verser à la CRCAM NORD MIDI PYRÉNÉES au titre du cautionnement du prêt de 70 000 euros consenti le 7 février 2007, la somme de 38.815,07 euros, outre les intérêts au taux de 3,25 % à compter du 18 août 2023 jusqu'au parfait paiement.

- Condamner M [E] [I], en sa qualité de caution solidaire de l'EARL DE [Localité 11], à verser à la CRCAM NORD MIDI PYRÉNÉES au titre du cautionnement pour le prêt de 29 400 euros consenti le 24 mai 2011 la somme de 16.905,05 euros au titre du prêt n° 58046057078 d'un montant de 29.400 euros, outre les intérêts au taux de 3,25 % à compter du 18 août 2023 jusqu'au parfait paiement,

- à titre subsidiaire s'il venait être fait droit à la demande en déchéance du droit aux intérêts des cautions,

o Constater [après correction des erreurs de frappe] que M [W] [I] et Monsieur [E] [I], en leur nom personnel et en leur qualité d'héritier pur et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] au 22 janvier 2023, ne sont plus redevable de somme (70.000 euros - 78.797,34 euros réglé (pièce n° 25 et 41) au titre du prêt d'un montant de 70.000 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation et jusqu'à parfait paiement.

o Condamner M [E] [I] en sa qualité de caution solidaire de l'EARL DE [Localité 11], à verser à la CRCAM NORD MIDI PYRÉNÉES la somme de 5.303,31 euros (29.400 euros - 24.096,69 euros réglé) (pièce n° 26 et 41) au titre du prêt d'un montant de 29.400 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation et jusqu'à parfait paiement.

- confirmer pour le surplus le jugement entrepris

- condamner solidairement M [W] [I] et M [E] [I], en leur nom personnel et en leur qualité d'héritier pur et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] et Mme [T] [R], en qualité d'héritière pure et simple ayant accepté la succession d'[L] [U] au 22 janvier 2023 à verser à la CRCAM NORD MIDI PYRÉNÉES, la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens.

MM [W] et [E] [I] demandent à la cour de :

- déclarer la CRCAM mal fondée en son appel et de la débouter de l'ensemble de ses demandes

- confirmer le jugement entrepris des chefs visés à la déclaration d'appel (après rectification d'une erreur matérielle contenue dans son dispositif, en page 9, ayant mentionné «déclare recevable et bien fondée l'action de [W] [I] et [L] [I] en nullité des cautionnements souscrits le 6 février 2007, concernant le prêt de 70 000 euros en date du 07/02/2007 consenti à l'EARL de [Localité 11] et concernant le prêt de 29.400 euros en date du 24 mai 2011 consenti à l'EARL DE [Localité 11]» dès lors qu'il n'y a jamais eu d'actes de cautionnement de [W] [I] et [L] [I] pour le prêt de 29 400 euros en date du 24 mai 2011, et que la CRCAM NORD MIDI-PYRÉNÉES n'a jamais prétendu ou réclamé quoi que ce soit à l'encontre de [W] et [L] [I] au titre de ce prêt.

- condamner la CRCAM à régler à MM [W] et [E] [I], à chacun, une indemnité de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et les entiers dépens de première instance et d'appel.

- déclarer, par application de l'article L 341-4 du code de la consommation, disproportionnés les cautionnements consentis par [W] et [L] [I] par acte du 6 février 2007, concernant le prêt de 70 000 euros en date du 07/02/2007 consenti à l'EARL DE [Localité 11],

- juger que la CRCAM ne peut se prévaloir à l'encontre de [W] [I], personnellement, et en sa qualité d'héritier d'[L] [I], née [U], et à l'encontre de [E] [I], en sa qualité d'héritier d'[L] [I], née [U], de ces cautionnements

- débouter la CRCAM de l'ensemble de ses demandes

- condamner la CRCAM à régler à [W] et [E] [I], à chacun, une indemnité de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et les entiers dépens de première instance et d'appel.

- débouter la CRCAM de l'ensemble de ses demandes, celle-ci ne justifiant pas des sommes réclamées dans leur quantum

- dans l'hypothèse où la CRCAM justifierait du quantum de ses demandes :

* prononcer la déchéance du droit aux intérêts, pénalités et intérêts de retard, sur le fondement des articles L 333-2 et L 343-6 du Code de la Consommation, L 313-22 du Code Monétaire et Financier.

* par voie de conséquence, de juger qu'après application de la déchéance du droit aux intérêts :

- aucune somme ne peut être réclamée à MM [W] et [E] [I] au titre du cautionnement du prêt du 7/02/2007, tant en leur nom personnel qu'en leur qualité d'héritiers d'[L] [I], née [U],

- il ne saurait être réclamé à M [E] [I] une somme supérieure à 8 094,66 euros au titre du cautionnement du prêt du 24 mai 2011 (avec la précision que devront venir en diminution les sommes réglées par l'EARL DE [Localité 11] dans le cadre du plan de redressement).

- juger que la CRCAM a manqué à son obligation de mise en garde à l'égard des époux [W] [I], [L] [I], née [U], et de M [E] [I],

- condamner la CRCAM à régler à MM [W] et [E] [I], à titre personnel et en qualité d'héritiers d'[L] [I], née [U], la somme de

75 000 euros de dommages et intérêts pour perte de chance, sur le fondement de l'article 1231-1 du Code Civil.

- ordonner la compensation entre les sommes que MM [W] et [E] [I], pourraient être condamnés à régler à l a CRCAM, et la somme que celle-ci sera condamnée à leur régler à titre de dommages et intérêts

- ordonner que dans l'hypothèse où MM [W] et [E] [I] resteraient débiteurs de quelque somme que ce soit à l'égard de la CRCAM, par application de l'article 1343-5 du Code Civil, le paiement des sommes dues est reporté à deux années et que les paiements effectués s'imputeront d'abord sur le capital

- débouter la CRCAM de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamner la CRCAM à régler à MM [W] et [E] [I], à chacun, une indemnité de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et les entiers dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés par Me SUDRE.

Il est fait renvoi aux écritures des parties pour plus ample exposé des éléments de la cause, des prétentions et moyens des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1- Sur les actes de cautionnement de [W] [I] et [L] [U] son épouse :

Ces cautionnements ont été souscrits sous l'empire des dispositions de l'article

L 341-2 du code de la consommation dans sa rédaction en vigueur depuis le 1er février 2007 qui dispose des prescriptions d'ordre public de protection du consommateur de sorte que le prêteur ne peut se prévaloir d'une erreur excusable ou du caractère non déterminant de l'erreur affectant l'acte.

En l'espèce les actes de cautionnement de [W] [I] et d'[L] [U], établis sur des actes distincts de celui du prêt, sont datés du 6 février 2007, cette date étant manifestement portée de la main d'[L] [I] en tête de la mention manuscrite prescrite, or la première page de l'acte porte que le contrat de prêt leur a été remis le 7 février 2007.

Les actes de cautionnement ne portent pas engagement de caution sans détermination d'objet ou de durée, ils sont rattachés à un contrat de prêt dont les conditions ne sont pas reprises dans l'acte de cautionnement.

Le premier juge en a justement déduit que :

- soit l'acte de cautionnement a été signé le 6 février 2007 et les cautions n'ont pas reçu l'acte de prêt signé le 7 février 2007,

- soit l'acte de cautionnement a été signé concomitamment au prêt soit le 7 février 2007 et la date de sa signature est erronée.

Les actes de cautionnement de Mme [T] [I] et de M [D] [R] sont en date du 7 février 2007, jour de signature effective du contrat de prêt.

Ainsi la banque n'établit pas qu'au jour où [W] [I] et [L] [U] ont souscrit leur engagement de caution, ils étaient informés des conditions d'octroi du prêt au GAEC DU [Localité 11].

C'est donc à bon droit que le premier juge a retenu que ces actes de cautionnement étaient nuls et a débouté la banque de sa demande de ce chef.

Le jugement est rectifié en ce qu'il mentionne un cautionnement des époux [W] et [L] [I] pour un prêt de 29.400,00 euros souscrit par le GAEC DU [Localité 11] le 24 mai 2011, engagement qui n'existe pas.

2- Sur la disproportion :

Aux termes de l'article L 341-4 du code de la consommation dans sa rédaction en vigueur lors de la conclusion des contrats en litige (2007 et 2011), un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à cette obligation.

Ce texte n'impose pas au créancier de vérifier la situation financière de la caution lors de son engagement, laquelle supporte, lorsqu'elle l'invoque, la charge de la preuve de démontrer que son engagement de caution était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus.

La disproportion doit être manifeste, c'est à dire flagrante ou évidente, au regard de tous les éléments du patrimoine de la caution et pas seulement de ses revenus.

La disproportion manifeste du cautionnement aux biens et revenus de la caution suppose que cette dernière se trouve, lorsqu'elle s'engage, dans l'impossibilité manifeste de faire face à son obligation avec ses biens et revenus en prenant en compte l'endettement global de la caution.

Les engagements postérieurs à la date du cautionnement souscrits n'ont pas à être pris en compte.

Cette disproportion s'apprécie en prenant en compte, notamment, l'endettement global de la caution au moment où cet engagement est consenti.

Ce texte n'impose pas au créancier de vérifier la situation financière de la caution lors de son engagement, laquelle supporte, lorsqu'elle l'invoque, la charge de la preuve de démontrer que son engagement de caution était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus.

En l'espèce en 2007, cautionnement d'un prêt de 70.000,00 euros en principal : M [E] [I] travaillait sur l'exploitation du GAEC DU [Localité 11] et a perçu un revenu annuel de 2.538,00 euros (avis d'imposition sur le revenu de 2006 et un déficit agricole de - 10.857,00 euros en 2007 (avis d'imposition sur le revenu 2007). Il vivait chez ses parents avec son épouse et ses deux enfants.

Il avait reçu en donation divers biens sis à [Localité 8] estimés à (2001) 13.616,00 euros ; (2003) 763,00 euros avec réserve de droit de retour, interdiction d'aliéner d'hypothéquer et de vendre, (2005) 23.000,00 euros avec réserve de droit de retour, interdiction d'aliéner d'hypothéquer ; (2005) 24.952,00 euros. Outre 3.000 parts à 15,00 euros dans le GAEC DU [Localité 11] (mai 2007).

Le prêt accordé est un prêt de restructuration, ce qui induit que la santé financière du GAEC est précaire, ce qui doit conduire à considérer que la valeur des parts du GAEC est théorique, deux biens immobiliers sont grevés d'interdiction d'aliéner ce qui conduit à minorer leur valeur effective.

Ainsi au vu d'un revenu déficitaire sur l'année 2007, et de la faible valeur du patrimoine, la disproportion entre l'engagement de M [E] [I] d'une part et ses revenus et son patrimoine d'autre part, est manifeste.

En 2011, cautionnement d'un prêt de 29.400,00 euros : la situation de M [E] [I] est la suivante : revenu agricole 2010 : 6.365,00 euros, il vit avec ses deux enfants chez ses parents, son patrimoine s'est accru d'une parcelle en 2008 d'une valeur de 9.150,00 euros, et il supporte un engagement de caution de 70.000,00 euros.

La disproportion est de nouveau manifeste.

Au jour où la caution est appelée soit en août et septembre 2017, la situation de la caution est la suivante : il vit chez ses parents avec ses deux enfants, il est séparé de leur mère qui ne verse pas de pension alimentaire : selon l'avis d'imposition 2018 : revenus salariaux 23.610 euros ; revenus agricoles : déficit de 6.908,00 euros ; patrimoine immobilier identique, le GAEC est en procédure collective, ses parts sociales ont perdu leur valeur.

Au jour où M [E] [I] est appelé à exécuter son engagement de caution, son patrimoine et ses revenus ne lui permettent pas d'y faire face.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a déchargé M [E] [I] de son engagement de caution.

Le jugement est confirmé en toutes ses obligations sauf rectification de l'erreur matérielle.

3- Sur les demandes accessoires :

La CRCAM succombe, elle supporte les dépens d'appel, augmentés d'une somme de 2.000,00 euros au bénéfice de MM [W] et [E] [I] chacun, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La distraction des dépens toujours prévue par l'article 699 du code de procédure civile n'a plus d'objet du fait de la suppression de tout tarif pour l'avocat le 8 août 2015 en première instance et le 1er janvier 2012 devant la cour.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt par défaut prononcé par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions et y ajoutant,

Condamne la CRCAM NORD MIDI PYRÉNÉES à payer à MM [W] et [E] [I] chacun la somme de 2.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la CRCAM NORD MIDI PYRÉNÉES aux entiers dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par André BEAUCLAIR, président, et par Nathalie CAILHETON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Agen
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/00703
Date de la décision : 04/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-04;20.00703 ?
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