COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 1 Chambre A ARRÊT AU FOND DU 15 MARS 2005 JF/G.LAMBREY No 2005/ Rôle No 03/12292 CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE PROVENCE ALPES CORSE S.A. ECUREUIL VIE C/ Jean X... Y... Z... épouse A... B... délivrée le : à : réf Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 03 Juin 2003 enregistré au répertoire général sous le no 01/10743. APPELANTES CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE PROVENCE ALPES CORSE, prise en la personne de son représentant en exercice, domiciliée Place Estrangin Pastré - BP 108 - 13269 MARSEILLE CEDEX 6 S.A. ECUREUIL VIE, prise en la personne de son représentant légal-Intervenant volontaire-, domiciliée 5 rue Masseran - 75007 PARIS représentés par la SCP COHEN - GUEDJ, avoués à la Cour INTIMES Monsieur Jean X... né le 26 Juillet 1928 à MARSEILLE (13000), demeurant 17 boulevard Farigoule - 13011 MARSEILLE représenté par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avoués à la Cour, plaidant par Me Frédéric ASDIGHIKIAN, avocat au barreau de MARSEILLE Madame Y... Z... épouse A... ... par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour-- Vu le Jugement rendu le 3 juin 2003 par le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE entre Jean X..., Y... Z... épouse
A... et la CAISSE D'EPARGNE PROVENCE ALPES CORSE, Vu l'appel interjeté le 4 juillet 2003 par la CAISSE D'EPARGNE PROVENCE ALPES CORSE, Vu les conclusions déposées le 5 mai 2004 par l'appelante, communes à la SA ECUREUIL VIE intervenante volontaire, Vu les conclusions déposées le 30 décembre 2003 par Jean X... contenant appel incident, Vu les conclusions déposées le 15 janvier 2004 par Y... A... née Z..., Vu l'ordonnance de clôture rendue le 17 janvier 2005, SUR CE, Sur la procédure 1. Attendu que l'appel, régulier en la forme, est recevable, ainsi que l'appel incident ; 2. Attendu que l'intervention volontaire de la SA ECUREUIL VIE assureur, est recevable et fondée ; Sur le fond 1. Attendu que Jean X... né en 1928 a souscrit le 6 octobre 1994 un contrat d'assurance vie " ASSURECUREUIL" à durée indéterminée, avec un versement initial de 150.000F, qu'il avait désigné lors de la souscription comme bénéficiaire, en cas de décès "ses enfants nés ou à naître, à défaut ses héritiers"; Attendu que Jean X... a procédé à deux rachats partiels : - le 20 avril 2000 de 40.000F - le 24 octobre 2000 de 40.000F Attendu que par avenant du 22 février 2001, Jean X... a modifié la clause bénéficiaire, désignant comme bénéficiaire "Madame Z... Y... née le 9 septembre 1939, à défaut ses enfants par parts égales, à défaut ses héritiers"; Attendu que Y... Z... sa compagne du moment a accepté expressément le bénéfice de la police d'assurance-vie le 22 février 2001, ce dont la CAISSE D'EPARGNE lui a accusé réception le 9 mai 2001 ; Attendu que tout en invoquant divers articles de doctrine sur une" prétendue paralysie du droit au rachat pour l'acceptation" et un possible revirement de jurisprudence, la SA ECUREUIL VIE a refusé le 18 juillet 2001 de faire droit à la demande de rachat ou de modification de clause par le souscripteur, en invoquant les dispositions impératives de l'article L 132.9 du Code des Assurances
; Attendu qu'il pèse sur l'assureur une obligation de conseil, dont il doit prouver la mise en oeuvre et qui persiste après la souscription, avec la remise de la notice d'information, tout le long de la durée du contrat ; Attendu en l'espèce qu'il appartenait à la SA ECUREUIL VIE d'éclairer le souscripteur lors de la modification par avenant du contrat d'assurance-vie le 22 février 2001 sur le risque d'une indisponibilité des fonds en cas d'acceptation par le bénéficiaire et de la nécessité pour lui de garder confidentielle cette désignation en cas d'acceptation du fait de l'irrévocabilité de la stipulation ; Attendu que la SA ECUREUIL VIE prétend avoir satisfait à cette obligation, (dans une hypothèse que le Ministre de l'Economie et des Finances qualifiait dans sa réponse du 11 juillet 1996 devant le Sénat "d'opération non courante") par l'envoi à Jean X... d'une information jointe au relevé annuel de situation des contrats ASSURECUREUIL fin janvier 2001 comportant un article intitulé "ASSURANCES-VIE: choisissez vos bénéficiaires mais restez maître à bord", rédigé le 29 décembre 2000 ; Attendu que Jean X... conteste avoir reçu une telle documentation,au demeurant assortie de l'avis suivant: "votre conseiller CAISSE D'EPARGNE reste votre interlocuteur privilégié pour tout complément d'information" ; Attendu qu'il incombait audit conseiller de fournir à Jean X... cette information le 22 février 2001 lorsque ce dernier a envisagé de modifier la clause bénéficiaire de son contrat, avec toutes les conséquences de droit, la présence de Y... Z... aux côtés de l'assuré n'empêchant nullement la pertinence d'une telle information de nature à éclairer le choix de Jean X... de gratifier sa compagne d'alors au détriment de ses deux enfants ; Attendu que c'est par conséquent à bon droit que le premier juge a retenu la faute de la banque au titre d'un manquement à son obligation de conseil et d'information ; 2. Attendu que le préjudice
subi par Jean X... est en l'espèce égal à l'indisponibilité totale et irrévocable des fonds lui appartenant, du fait de l'acceptation du bénéficiaire, et du refus réitéré opposé par Y... Z... à toute demande de rachat du contrat par le souscripteur ; Attendu que le premier juge a fixé le préjudice de Jean X... au montant des sommes disponibles au 4 septembre 2002, soit 19.403,94ç, outre intérêts contractuels à compter du 9 mai 2001, date de l'assignation ; Attendu que Jean X... ne peut réclamer la somme de 22.867,35ç avec intérêts au taux initial de 4,90% ( garantie pendant les 8 premières années) Attendu que Jean X... ne peut réclamer la somme de 22.867,35ç avec intérêts au taux initial de 4,90% ( garantie pendant les 8 premières années) correspondant à la totalité des versements effectués sur le contrat d'une part parce qu'il a déjà effectué des rachats, et d'autre part parce que le rachat total, équivalant à la résiliation, le privait de toute rémunération de toute son épargne ; Attendu en conséquence que le jugement sera confirmé sauf à assortir la condamnation en principal des intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation, en application des dispositions de l'article 1153-1 du Code Civil ; 3.Attendu que le jugement sera également confirmé en ce qu'il a débouté Jean X... de ses demandes de dommages et intérêts ; 4.Attendu que Y... Z... épouse A... qui a été intimée par la CAISSE D'EPARGNE sera déboutée de sa demande de dommages intérêts formée contre Jean X... pour procédure abusive et vexatoire, la preuve d'un tel abus n'étant pas démontrée de la part de ce dernier, qui obtient gain de cause sur sa demande principale ; Vu l'article 696 du Nouveau Code de Procédure Civile ; PAR CES MOTIFS La Cour, Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort, Reçoit l'appel principal et l'appel incident, Reçoit la SA ECUREUIL VIE en son intervention volontaire, Au FOND, Confirme le jugement
sauf à remplacer les intérêts contractuels par l'intérêt légal à compter du 22 octobre 2001, Y ajoutant : Condamne la CAISSE D'EPARGNE et la SA ECUREUIL VIE à payer à Jean X... la somme de 1000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Déboute les parties du surplus de leur demandes principales et accessoires, Condamne la CAISSE D'EPARGNE et la SA ECUREUIL VIE aux dépens, Autorise les SCP ERMENEUX- CHAMPLY- LEVAIQUE et BOTTAI GEREUX-BOULAN. Avoués, à recouvrer directement contre celles-ci le montant de leurs avances. LE GREFFIER LE PRESIDENT