COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 10o Chambre
ARRÊT AU FOND DU 09 OCTOBRE 2007
No 2007 /
Rôle No 06 / 05095
LES MUTUELLES DU MANS S. A. R. L. SHEMA ENTREPRISES MARITIMES
C /
S. A. IMMOBILIERE ET D'EXPLOITATION DE L'HOTEL MAJESTIC
Grosse délivrée le : à :
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de CANNES en date du 19 Décembre 2002 enregistré au répertoire général sous le no 02 / F11.
APPELANTES
LES MUTUELLES DU MANS Société d'Assurance Mutuelle à cotisations fixes, Entreprise régie par le Code des Assurances RCS DU MANS No 440 048 882, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié ès-qualité au siège sis,...-72030 LE MANS représentée par la SCP DE SAINT FERREOL-TOUBOUL, avoués à la Cour, assistée de Me Gildas ROSTAIN, avocat au barreau de PARIS substitué par Me TORTI avocat au barreau de PARIS
S. A. R. L. SHEMA ENTREPRISES MARITIMES agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié ès-qualité audit siège,...-06210 MANDELIEU représentée par la SCP DE SAINT FERREOL-TOUBOUL, avoués à la Cour, assistée de Me Gildas ROSTAIN, avocat au barreau de PARIS substitué par Me TORTI avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
S. A. IMMOBILIERE ET D'EXPLOITATION DE L'HOTEL MAJESTIC inscrite au RCS de CANNES sous le noB 695 420 331, prise en la personne de son Président Directeur Général domicilié en cette qualité au siège social, ...-06400 CANNES représentée par la SCP BLANC AMSELLEM-MIMRAN CHERFILS, avoués à la Cour, assistée de Me Jean-Claude CANAVESE, avocat au barreau de GRASSE
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COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 26 Juin 2007 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente Madame Bernadette KERHARO-CHALUMEAU, Conseiller Monsieur Benjamin RAJBAUT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES. Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Octobre 2007.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Octobre 2007,
Signé par Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Vu le jugement rendu par le tribunal de commerce de Cannes le 19 décembre 2002
Vu l'appel de la compagnie MMA et de la société SHEMA Entreprises Maritimes en date du 16 janvier 2003
Vu les conclusions de ces appelantes en date du 22 juin 2007
Vu les conclusions de la société immobilière et d'exploitation de l'hôtel MAJESTIC en date du 25 mai 2007
Vu l'ordonnance de clôture en date du 26 juin 2007
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Le jugement déféré condamne solidairement la société SHEMA Entreprises Maritimes à payer avec exécution provisoire à la société immobilière et d'exploitation de l'hôtel MAJESTIC la somme de 104 491, 61 € à titre de provision suite à la destruction du ponton de l'hôtel MAJESTIC le 6 novembre 2000 par une barge de 60 tonnes appartenant à la société SHEMA et ayant rompu ses amarres.
Les premiers juges, considérant que la responsabilité de la société SHEMA est engagée tant en raison de la faiblesse de l'amarrage que de l'absence d'intervention de cette société, professionnel de la mer, ont écarté l'argument tiré de l'existence d'un cas de force majeure en raison du caractère violent et imprévu de la tempête survenue entre le 5 et le 6 novembre 2000.
Ils ont par ailleurs ordonné une mesure d'expertise confiée à M. Gérald B... relativement au coût de la remise en état du ponton.
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Les appelantes concluent à la réformation du jugement et au remboursement de la provision en soulevant au principal l'irrecevabilité de l'action pour défaut d'intérêt à agir, l'hôtel MAJESTIC ayant déjà été indemnisé par ses assureurs à hauteur de 322 495, 53 €.
Subsidiairement, elles font valoir l'absence de négligence de la société SHEMA qui avait fait vérifier et remplacer les amarres de la barge et qui ne disposait pas de l'équipement permettant de prévenir et de guider l'échouage de la barge.
Sur ce dernier point, les appelantes font état de circonstances météorologiques exceptionnelles et imprévisibles les 5 et 6 août 2000 avec des rafales de l'ordre de 140 km à l'heure et une houle dévastatrice de secteur sud.
Très subsidiairement, elles concluent à la désignation d'un expert maritime chargé de déterminer les causes et origines de l'événement des 5 et 6 novembre 2000.
À titre infiniment subsidiaire, elles opposent une limitation de responsabilité en application de l'article 58 de la loi du 3 janvier 1967.
En tout état de cause, elles invoquent les limites de garantie de la MMA plafonnée par la police à 91 469, 41 €.
La société intimée demande la confirmation du jugement et l'évocation du dossier sur l'indemnisation définitive de son préjudice. A cet égard elle sollicite la condamnation des appelantes à lui payer la somme de 355 616 € outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation ainsi que la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
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Le moyen tiré du défaut d'intérêt à agir en raison des sommes réglées par les assurances doit être écarté dans la mesure où le chiffrage des dommages effectué par l'expert judiciaire, laisse apparaître une somme supérieure au montant des sommes réglées à l'intimée.
Le préjudice ayant été occasionné au ponton de l'hôtel MAJESTIC par une chose en mouvement, en l'occurrence la barge de la société SHEMA, cette dernière ne peut s'exonérer de la responsabilité encourue en vertu des dispositions de l'article 1384 alinéa 1 du Code civil que par la démonstration d'un cas de force majeure.
Les certificats d'intempéries délivrées par Météo France concernant le secteur de Cannes-Antibes font état d'une vitesse du vent égale à 86 km heure à Cannes-port avec une très forte houle du sud, les précipitations ayant, selon ces documents, débuté le 5 novembre 2000 vers 17 heures et s'étant terminées le 6 novembre 2000 vers 15 heures. Il est indiqué que compte tenu des vitesses du vent enregistrées, il est possible que des rafales de vent égales ou supérieures à 100 km à l'heure aient pu intéresser les endroits proches des points de mesure et que la très forte houle explique les nombreux dégâts sur les bords de mer.
Deux témoins, M. X... et M. C..., indiquent avoir vu la barge s'approcher de la plage vers 10 h 30, les services de la ville de Cannes ayant été prévenus vers 10 h 40, selon M. X.... M. C... précise que vers 10 h 50 la barge a percuté une première fois la passerelle du ponton sans causer de dégâts irrémédiables mais que la barge a porté des coups répétés au ponton dont la première partie s'est effondrée vers 13 h 30 et que la société SHEMA est intervenue peu avant 15 heures.
Au regard de ces éléments, ni le caractère exceptionnel de la tempête, ni la dérive de la barge vers le ponton, entamées l'une et l'autre depuis plusieurs heures avant l'intervention de la société SHEMA ne peuvent être jugés comme des faits imprévisibles et inévitables.
L'évaluation du préjudice de l'intimée doit être effectuée au regard des données et conclusions du rapport d'expertise de M. Gérald B..., expert spécialisé en travaux maritimes ayant dressé un rapport aboutissant au chiffrage suivant :
-coût de la reconstruction du ponton :
facture EMCC 5 000 000 F HT
travaux enrochements (EMCC) 130 000 F HT
fluide et bornes lumineuses 152 440 F HT
5 282 440 F HT
à déduire, améliorations :-1 050 000 F HT
soit un coût des travaux nécessaires de : 4 232 440 F HT (645 231 € HT)
Le montant qui a été réglé par les assurances s'élève à 2 115 402 F (322 491 €)
La société immobilière et d'exploitation de l'hôtel MAJESTIC ajoute au coût de la reconstruction, des honoraires de l'expert D... pour 36 254 F et de SIS pour 179 400 F en visant des pièces communiquées numéro 7 et numéro 8. Toutefois les pièces communiquées par cette partie selon sa liste annexée aux conclusions du 25 mai 2007 n'étant pas numérotées et ne comportant pas les factures d'honoraires en question, la Cour ne peut faire droit à ces demandes.
Enfin, c'est à tort que les appelantes invoquent une limitation de leur responsabilité par application à l'espèce de la loi du 7 juillet 1967 relative aux événements en mer, ce texte ne pouvant recevoir application pour l'abordage d'un ponton par une barge.
Il est équitable d'allouer à l'intimée la somme de 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant publiquement et par arrêt contradictoire
Confirme le jugement déféré
Et évoquant sur l'indemnisation du préjudice
Condamne in solidum la société SHEMA Entreprises maritimes et les Mutuelles du Mans Assurances à payer à la société immobilière et d'exploitation de l'hôtel MAJESTIC, en deniers ou quittance, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision, la somme de 322 740 €, somme tenant compte du montant de 322 491 € déjà réglé par les compagnies d'assurances ainsi que la somme de 6 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Condamne les mêmes aux dépens distraits au profit de la SCP BLANC-AMSELLEM-MIMRAN CHERFILS, avoué.
Magistrat Rédacteur : Mme KERHARO-CHALUMEAU
Madame JAUFFRES Madame SAUVAGE GREFFIÈRE, PRÉSIDENTE