COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
3o Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 31 OCTOBRE 2007
No 2007/494
Rôle No 05/19828
SNC X... BERNARD MEDITERRANEE
C/
Jean-Pierre Y...
Société MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS SMABTP
Grosse délivrée
le :
à :
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 30 Juin 2005 enregistré au répertoire général sous le no 04/076.
APPELANTE
SNC X... BERNARD MEDITERRANEE, demeurant ...
représentée par la SCP TOLLINCHI PERRET-VIGNERON BARADAT-BUJOLI-TOLLINCHI, avoués à la Cour, assistée de Me Stéphane ENGELHARD, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES
Monsieur Jean-Pierre Y...
né le 07 Octobre 1940 à MARSEILLE (13000), demeurant ...
représenté par la SCP BOISSONNET- ROUSSEAU, avoués à la Cour,
assisté de Me Stéphane GALLO, avocat au barreau de MARSEILLE
Société MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS SMABTP, et encore par le Directeur de son unité de gestion de MARSEILLE, 300 Boulevard Michelet, Bâtiment B3, 13295 MARSEILLE CEDEX, assignée le 19.12.2006 à domicile à la requête de la SNC X... BERNARD MEDITERRANEE, demeurant 114 Avenue Emile Zola - 75739 PARIS CEDEX 15
représentée par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour,
assistée de Me Gérard EDDAIKRA, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 20 Septembre 2007 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, Monsieur Dominique PRONIER, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Dominique PRONIER, Président, rédacteur
Monsieur André TORQUEBIAU, Conseiller
Madame Chantal ACQUAVIVA, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mademoiselle Véronique PELLISSIER.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 Octobre 2007.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 31 Octobre 2007,
Signé par Monsieur Dominique PRONIER, Président et Mademoiselle Véronique PELLISSIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE :
Suivant un acte notarié du 30 décembre 1996, la Société Civile Immobilière AMANDIER (SCI) a vendu un appartement et deux emplacements de stationnement aux époux Y....
Les travaux ont été exécutés par la Société MCB, aux droits de laquelle se trouve la Société X... BERNARD MÉDITERRANÉE, sous la maîtrise d'oeuvre d'exécution de la Société STRUCTURES INGENIERIE assurée auprès de la Société SMABTP.
Les époux Y... ont pris possession des lieux avec réserves le 29 octobre 1997.
Postérieurement, les époux Y... ont complété la liste des réserves.
Les réserves n'étant pas levées, M. C... a été désigné en qualité d'expert. Il a déposé son rapport le 13 juin 2002.
M. Y... a assigné la Société X... BERNARD et la Société SMABTP.
Par un jugement en date du 30 juin 2005, le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE a condamné la Société X... BERNARD à payer 12.655 Euros au titre des travaux et 2.000 Euros au titre du préjudice de jouissance.
La Société X... BERNARD a interjeté appel le 17 octobre 2005.
Vu le jugement en date du 30 juin 2005 ;
Vu les conclusions de M. Y... en date du 15 janvier 2007 ;
Vu les conclusions de la Société X... BERNARD MÉDITERRANÉE en date du 14 février 2007 ;
Vu les conclusions de la Société SMABTP en date du 31 août 2007 ;
SUR CE :
Attendu que la régularité formelle de la procédure en appel n'étant pas contestée, il sera directement statué sur le fond de l'affaire ;
Sur les demandes formées par M. Y... à l'encontre de la Société X... BERNARD MÉDITERRANÉE :
Attendu que M. Y..., acquéreur, n'agit pas à l'encontre de son vendeur, mais du constructeur de l'immeuble et de l'assureur du maître d'oeuvre d'exécution ;
Attendu que les règles relatives à la vente d'immeuble sont donc étrangères au présent litige ;
Attendu que M. Y..., acquéreur de lots, vient aux droits de son vendeur, la Société Civile Immobilière AMANDIER ;
Attendu, dès lors, que M. Y... peut exercer toutes les actions que son vendeur pouvait, en sa qualité de maître de l'ouvrage, exercer à l'encontre des constructeurs ;
Attendu que la première question qui se pose, laquelle commande la nature des actions à exercer, est celle de savoir si la Société Civile Immobilière AMANDIER a réceptionné les travaux ;
Attendu que la Société X... BERNARD MÉDITERRANÉE soutient que la Société Civile Immobilière AMANDIER a réceptionné les travaux avec réserves suivant un procès-verbal de réception du 12 novembre 1997 ;
Attendu que M. Y... conteste cette réception ;
Attendu que, selon l'article 1792-6 du Code civil, la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserve ;
Attendu que le document en date du 12 novembre 1997 est produit ;
Attendu que ce document intitulé "procès-verbal de réception des communs Bts A, B et C, et parties privatives" indique "le 12 novembre 1997 à 14 heures se sont réunis sur le chantier : DOMAINE DE LA BASTIDE à MARSEILLE : M. JF D..., maître de l'ouvrage, M. F. E... représentant Structures Ingénierie Maître d'oeuvre, l'Entreprise MCB. A la suite de cette visite les réserves suivantes ont été notées" et énumère la liste des réserves relatives aux parties communes et, en annexe, celle des réserves relatives aux parties privatives du logement A 32 constituant le lot Y... ;
Attendu que, nonobstant son intitulé, ce document ne comporte aucune déclaration d'intention du maître de l'ouvrage d'accepter les travaux et ne constitue rien d'autre qu'une simple liste de réserves ;
Attendu que M. C..., homme de l'art, l'a expressément relevé ;
Attendu qu'aucune réception tacite n'est invoquée ;
Attendu, dans ces conditions, que force est de constater qu'il n'est pas démontré que les travaux relatifs tant aux parties communes qu'aux parties privatives aient été réceptionné par la maître de l'ouvrage ;
Attendu que le litige se place donc avant réception ;
Attendu qu'avant réception, l'entrepreneur est tenu envers le maître de l'ouvrage de l'obligation de résultat de livrer un ouvrage exempt de vices ;
Attendu que c'est précisément ce que soutient M. Y..., qui conclut que "sauf à établir un procès-verbal de réception manifestant le désir exprès du maître de l'ouvrage d'accepter les travaux réalisés par MCB sans réserve ou d'une levée expresse des réserves formulées, force sera alors de considérer que la responsabilité de MCB est présumée" ;
Attendu que M. C... a détaillé les malfaçons affectant les parties privatives de M. Y... ;
Attendu que l'expert a exclu de ces malfaçons celles qui avaient fait l'objet de reprises ;
Attendu que l'expert a décrit les travaux restant à exécuter et en a chiffré le coût ;
Attendu que la Cour adopte ces préconisations et estimations, qui reposent sur une analyse concrète et objective de la situation ;
Attendu que M. Y... agit également au titre des parties communes ;
Attendu, certes, que l'action de ce chef appartient en premier lieu au syndicat des copropriétaires ;
Attendu, toutefois, qu'il est admis qu'en cas d'atteinte portée aux parties communes un copropriétaire peut agir à titre individuel s'il justifie d'un préjudice personnel éprouvé dans la jouissance ou la propriété soit des parties privatives comprises dans son lot, soit des parties communes ;
Attendu qu'au titre des parties communes, M. Y... se plaint du bruit généré par la VMC et de défauts affectant les corniches ;
Attendu que M. C... a constaté que "le bruit gênant dans le logement Y... est oscillant entre des maxima et des minima. L'origine est donc certainement les vibrations déphasés des éléments d'extraction. En effet, dans les combles, je retrouve le bruit oscillant qui se propage au logement Y... très proche. Il faut installer un piège à sons" ;
Attendu que ces constatations établissent que le bruit généré par la VMC occasionne une gêne dans le logement de M. Y..., ce qui constitue le préjudice de jouissance personnellement subi par le copropriétaire ;
Attendu qu'après avoir relevé que "le jointoiment des éléments préfabriqués de corniche s'est avéré nécessiter certains colmatages qui ont été faits au mortier poreux", M. C... a précisé "d'où des coulures d'eau qui tachent la façade et certains linteaux. Il faut hydrofuger ce mortier ;
Attendu que ces constatations établissent que le désordre relatif à la corniche cause un préjudice de jouissance personnel à M. Y... ;
Attendu que M. Y... a donc qualité pour agir de ce chef ;
Attendu que M. C... a décrit les travaux de reprise et chiffré leur coût ;
Attendu que, là encore, la Cour adopte ces préconisations et estimations, qui reposent sur une analyse concrète et objective de la situation ;
Attendu, enfin, que la situation cause un préjudice de jouissance à M. Y... ;
Attendu que le premier juge a exactement apprécié ce préjudice ;
Attendu, en définitive, que le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la Société X... BERNARD MÉDITERRANÉE à payer à M. Y... la somme de 12.655 Euros au titre des travaux et celle de 2.000 Euros au titre du préjudice de jouissance ;
Sur les demandes formées par M. Y... à l'encontre de la Société SMABTP, assureur de la Société STRUCTURES INGÉNIERIE, maître d'oeuvre d'exécution :
Attendu que M. Y... n'agit à l'encontre de la Société SMABTP qu'au titre des désordres affectant les parties communes ;
Attendu, toutefois, que la Société SMABTP était l'assureur décennal de la Société STRUCTURES INGÉNIERIE ;
Attendu que le litige se plaçant avant réception, la Société SMABTP est en droit de dénier sa garantie ;
Sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :
Attendu qu'il est équitable de condamner la Société X... BERNARD MÉDITERRANÉE à payer à M. Y... la somme de 2.000 Euros ;
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement, au besoin par substitution des motifs.
Condamne la Société X... BERNARD MÉDITERRANÉE à payer à M. Y... la somme de 2.000 Euros (Deux mille Euros) au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Met les dépens de première instance et d'appel, qui comprendront les frais d'expertise, à la charge de la Société X... BERNARD MÉDITERRANÉE, dont distraction au profit des avoués de la cause par application de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
V. PELLISSIER D. PRONIER