COUR D' APPEL D' AIX EN PROVENCE
4o Chambre C
ARRÊT AU FOND
DU 13 DECEMBRE 2007
No 2007 / 433
Rôle No 05 / 14306
Société KOM BEHEER BV
C /
S. A. R. L SOPHIE ANGELE
CGIS- CIS
SERVICE DES IMPOTS DES ENTREPRISES DE LA CANNET
Grosse délivrée
le :
à :
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 20 Juin 2005 enregistré au répertoire général sous le no 04 / 01050.
APPELANTE
Société KOM BEHEER BV agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège,
demeurant Straatweg 199- 3054 AE Rotterdam- PAYS BAS
représentée par la SCP BOISSONNET- ROUSSEAU, avoués à la Cour,
assistée de la SCP AELEGIS, avocat au barreau de MARSILLE, substitué par Maître MAILLIET WOZNIAK, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
S. A. R. L SOPHIE ANGELE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié au siège,
demeurant 19 / 27 route de Valbonne- 06110 LE CANNET
représentée par la SCP BLANC AMSELLEM- MIMRAN CHERFILS, avoués à la Cour,
assistée de Maître Gilbert UGO, avocat au barreau de GRASSE
PARTIES EN INTERVENTION FORCEE
CGIS- CIS,
demeurant 5 A 9, rue Van Gogh Tour Mornay- 75591 PARIS CEDEX 12
défaillante
SERVICE DES IMPOTS DES ENTREPRISES DE LA CANNET,
demeurant Avenue du Campon- Immeuble le Cannet Espace- 06110 LE CANNET
défaillante
*- *- *- *- *
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Nouveau Code de Procédure Civile, l' affaire a été débattue le 10 Octobre 2007, en audience publique, les avocats ne s' y étant pas opposés, devant Monsieur Michel NAGET, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l' audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Brigitte BERNARD, Président
Madame Marie- Françoise BREJOUX, Conseiller
Monsieur Michel NAGET, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Marie- Christine RAGGINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Décembre 2007.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Décembre 2007
Signé par Madame Brigitte BERNARD, Président et Madame Marie- Christine RAGGINI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :
Par acte sous seing privé en date du 16 décembre 1994, la société civile immobilière CANNET I a donné à bail à la SARL RESTAURATION HÔTELIÈRE DU CANNET des locaux commerciaux à usage d' hôtel restaurant situé 19 à 27 route de Valbonne 06110, LE CANNET, pour une durée de neuf ans, au loyer mensuel hors taxes de 35. 000, 00 francs.
Ce bail comporte (page 12) une clause de révision du prix du loyer dont les termes sont les suivants :
" Le loyer déterminé ci- dessus sera réajusté de plein droit à l' issue de chaque période triennale, et en application avec les dispositions légales en vigueur.
Il variera proportionnellement à l' évolution de la moyenne de l' indice national de l' hôtellerie publié par L' INSEE.
L' indice de base est le dernier publié lors de l' entrée en jouissance. De même, c' est le dernier indice publié au moment de l' ajustement qui sera pris en compte pour le calcul de l' indexation. "
Suivant acte reçu de Maître Patricia X..., notaire associé à Cannes, le 28 juillet 1998, la société à responsabilité limitée SOPHIE ANGÈLE a acquis le fonds de commerce, conformément à un plan de cession arrêté par le Tribunal de Commerce de Cannes, le 30 avril 1998, à la suite d' un redressement judiciaire ouvert à l' égard de la société RESTAURATION HÔTELIÈRE DU CANNET, suivant jugement du même tribunal en date du 4 septembre 1997.
Puis, le 13 décembre 2001, la société de droit hollandais KOM BEHEER BV a été déclarée adjudicataire de l' immeuble dans lequel est exploité cet hôtel, vendu aux enchères publiques.
Par la suite, un litige a opposé les parties, à propos d' un arriéré de loyers, réclamé à la société SOPHIE ANGÈLE, et qui trouvait son origine, d' une part, sur l' existence d' un avis à tiers détenteur, notifié par le Trésor Public à cette société, et d' autre part, sur le montant du loyer révisé, l' ancien propriétaire n' ayant, pendant très longtemps, réclamé que le loyer d' origine sans tenir compte de l' indexation contractuelle, et la société KOM BEHEER ayant, à son entrée en jouissance, réclamé sans aucune justification des montants paraissant erronés.
Le 17 juin 2003, la bailleresse a fait donner congé à la société SOPHIE ANGÈLE pour le 18 décembre 2003, ou en tous cas, pour le 29 septembre 2004, sans offre de renouvellement, ni indemnité d' éviction, " pour manquements contractuels ". Mais il n' apparaît pas que l' une ou l' autre des parties aient donné à cet acte une suite quelconque.
Le 17 décembre 2003, la société SOPHIE ANGÈLE a fait délivrer à la société KOM BEHEER B. V. Une demande de renouvellement de son bail, à laquelle celle- ci a répondu, le 17 mars 2004, par la notification d' un refus de renouvellement, sans indemnité d' éviction, motivé par le défaut de payement du loyer et par le défaut de remboursement de la taxe foncière.
Le 27 janvier 2004, la société KOM BEHEER B V a fait délivrer à sa locataire commandement d' avoir à lui payer un arriéré de loyers s' élevant à 151. 546, 52 euros, échus du premier mars 2002 au 31 janvier 2004, outre celle de 69. 548, 00 euros, réclamée au titre de l' impôt foncier de 2003 et 2004.
Suivant assignation du 11 février 2004, la SARL SOPHIE ANGÈLE a fait opposition à ce commandement, dont elle a demandé l' annulation devant le Tribunal de Grande instance de Grasse.
Par jugement du 20 juin 2005, le Tribunal a annulé le commandement de payer, et condamné la société KOM BEHEER BV à payer à sa locataire deux indemnités de 3. 000, 00 euros chacune, l' une en application de l' article 700 du nouveau code de procédure civile, et l' autre à titre de dommages- intérêts, sanctionnant un usage abusif des procédures d' exécution.
Le Tribunal a d' autre part rejeté les demandes reconventionnelles présentées par la société SOPHIE ANGÈLE, qui demandait la condamnation sous astreinte de sa bailleresse à effectuer des travaux d' entretien de parties communes et lui réclamait une somme de 50. 000, 00 euros à titre de dommages- intérêts, en réparation d' un préjudice qu' elle prétendait subir, par suite du défaut d' entretien de ces parties d' immeubles.
Appel a été interjeté par la société KOM BEHEER suivant déclaration reçue au Greffe de la Cour le 8 juillet 2005.
Par arrêt en date du 11 janvier 2007, la Cour d' Appel de céans a confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu' il a débouté l' appelante de sa demande en payement de loyers arriérés, et avant plus amplement faire droit sur ce point, a ordonné la réouverture des débats et renvoyé la cause et les parties à une audience ultérieure, en invitant la société KOM BEHEER B. V. à communiquer à son adversaire, et à verser aux débats pour cette date :
- sur toute la période de location concernée, des factures en français, comportant toutes les mentions obligatoires, et en particulier le montant de la T. V. A.
- le décompte des loyers restant dûs, dont le montant H T sera calculé selon les bases contractuelles telles qu' elles sont définies par son arrêt ;
La Cour a par ailleurs statué sur toutes les autres questions alors en litige, y compris sur les dépens pouvant alors être liquidés et l' application de l' article 700 du nouveau code de procédure civile.
La société KOM BEHEER a fourni les factures demandées, et dans des conclusions du 5 octobre 2007 elle affirme que :
- le montant de ces factures s' élevaient au 30 septembre 2007 à la somme de 459. 503, 63 euros,
- il convenait d' en déduire celle de 244. 503, 63 euros versées par le Trésor Public d' une part, et celle de 74. 424, 84 euros payé par la preneuse d' autre part, soit au total 318. 684, 72 euros en tout,
Elle réclame ainsi payement d' un solde de 140. 818, 91 euros, compte arrêté au 30 septembre 2007, avec intérêts légaux à compter du 28 juin 2007, date d' une mise en demeure qu' elle aurait adressée à son adversaire.
Ces conclusions du 5 octobre 2007 comportent également toute une série de demandes diverses, sans rapport avec les interrogations formulées par l' arrêt de réouverture des débats.
De son côté, la société SOPHIE ANGÈLE a conclu le 28 septembre 2007 à l' irrecevabilité des demandes de la société KOM BEHEER, en tant qu' elles portent sur des questions déjà jugées par l' arrêt susvisé, à la confirmation du jugement entrepris. Mais elle a elle- même sollicité la condamnation de son adversaire aux dépens et au payement de deux indemnités de 5. 000, 00 et de 3. 000, 00 euros, l' une en application de l' article 700 du nouveau code de procédure civile, et l' autre, à titre de dommages- intérêts pour procédure abusive, et qui sont également des questions sur lesquelles la Cour a déjà statué.
Sur le fond du litige, elle soutient que l' indice national de l' hôtellerie aurait disparu, et que la revalorisation du prix du loyer restait subordonnée à l' accomplissement des formalités prévues par l' article L 145- 38 du code de commerce.
De plus, elle a formulé, à ce niveau de la procédure, et en méconnaissance des dispositions de l' article 445 du nouveau code de procédure civile, une demande reconventionnelle en payement d' une nouvelle sommes de 33. 004, 00 euros, à titre de dommages- intérêts.
M O T I F S :
En premier lieu, il convient de déclarer irrecevables toutes les demandes, présentées de part et d' autres, et dont la Cour a d' ores et déjà vidé sa saisine, par son arrêt du 11janvier 2007, pour ne statuer que sur la question restant en litige.
Il convient également de rejeter, au fond, la demande additionnelle de dommages- intérêts, présentée par la société SOPHIE ANGÈLE, en réparation d' un préjudice qu' elle aurait subi, à la suite de deux redressements fiscaux dont elle a fait l' objet, au titre de la TVA, pour des montants de 17. 227, 00 et 15. 777, 00 euros, et dont elle impute la responsabilité à la " gestion calamiteuse " de la société KOM BEHEER. En effet, même si cette dernière a reconnu avoir établi, pendant une certaine période, des factures qui ne comportaient aucune mention de la TVA, il n' existe pour autant aucun lien de causalité direct et suffisant entre cette facturation, et les sanctions fiscales appliquées à la société SOPHIE ANGÈLE, pour avoir, sous le prétexte qu' elle était en possession de pièces comptables irrégulières, reconstitué elle- même un calcul de T. V. A. qui n' y apparaissait pas.
Ceci exposé, le montant du loyer du entre le premier décembre 2001 et le premier septembre 2007 dépend à la fois de la situation locative des parties, et de l' application d' une clause d' indexation contenue dans le bail.
Le bail d' origine, en date du 16 décembre 1994, a été conclu pour la période comprise ente le 19 décembre 1994 et le 16 décembre 2003. Pendant cette période, la clause de révision du loyer prévoit un réajustement " de plein droit " à l' issue de chaque période triennale, en sorte que, nonobstant le fait que le bailleur de l' époque n' ait réclamé, jusqu' en novembre 2001, que le loyer d' origine, le réajustement est néanmoins acquis au bailleur, à la fin de chaque période triennale, sans formalité particulière, les " dispositions légales en vigueur " n' interdisant ni ce genre de clause qualifiée par l' article L 145- 39 du code de commerce de " clause d' échelle mobile ", ni son application automatique, contrairement à ce que fait plaider la preneuse. En tous cas, la société KOM BEHEER était fondée à en réclamer l' exécution dès son entrée dans les lieux, sur la période de location restant à courir.
L' indice choisi est conforme à l' article L 112- 2 du code monétaire et financier, et contrairement à ce qui est soutenu par la société SOPHIE ANGÈLE, L' INSEE publie toujours actuellement un indice de l' hôtellerie, que son adversaire a pu trouver sur son site INTERNET, alors que les indices " Produits et Services Divers " ont disparus en juillet 2004. De toutes façons, la bailleresse n' ayant effectué aucun calcul de revalorisation au- delà de cette date, une éventuelle disparition en juillet 2004 de l' indice choisi n' aurait pas d' incidence sur le montant réclamé.
Il s' en suit que deux réajustements se sont opérés de plein droit les 16 décembre 1997 et 16 décembre 2000.
D' autre part, la question de savoir si des revalorisations devaient également intervenir en décembre 2003 et décembre 2006 n' aura pas à être examinée, car la société KOM BEHEER a, pour toute la période comprise entre le 13 décembre 2001 et le 30 septembre 2007, réclamé uniformément la même somme de 6. 600, 84 euros T T C par mois, soit :
- du 13 au 31 décembre 2001 :
4 045, 67
- de janvier 2002 à septembre 2007 : 6. 600, 84 x 69 =
455 457, 96
Total (en euros) :
459 503, 63
De ce qui précède, il résulte que :
- en appliquant au loyer initial H T de 35. 000, 00 francs soit 5. 335, 72 euros la variation de l' indice choisi, qui était de 92, 2 en décembre 1994 et de 105, 3 en décembre 2000, la Cour obtient un montant de 6. 093, 83 euros hors taxes et 6. 600, 84 euros TTC réclamé par la société KOM BEHEER ;
- qu' après déduction des sommes versées soit au trésor Public, soit à la bailleresse elle- même, il convient de condamner la société SOPHIE ANGÈLE à payer, à la société KOM BEHEER en deniers ou quittances (c' est- à- dire sans avoir à renouveler les règlements déjà effectués et dont la preuve serait rapportée), la somme de 140. 818, 91 euros.
Toutes plus amples demandes des parties sont par ailleurs rejetées, pour les raisons ci- avant exposées.
Par ces motifs,
La Cour,
Statuant en audience publique et contradictoirement,
Vu l' arrêt rendu entre les parties le 11 janvier 2007.
Condamne la S. A. R. L. SOPHIE ANGÈLE à payer, en deniers ou quittances, à la société KOM BEHEER BV la somme de 140. 818, 91 euros (cent quarante mille huit cent dix huit euros et quatre vingt onze centimes), à titre de loyers restant dûs pour la période comprise entre le 13 décembre 2001, et le 30 septembre 2007.
Déclare irrecevables toutes les autres demandes des parties.
Déboute en outre la S. A. R. L. SOPHIE ANGÈLE de sa demande reconventionnelle de dommages- intérêts.
Rappelle qu' il a déjà été statué sur l' application de l' article 700 du nouveau code de procédure civile.
Condamne la S. A. R. L. SOPHIE ANGÈLE aux dépens d' appel restant à liquider. Admet la SCP BOISSONNET- ROUSSEAU, avoués à la Cour qui pourra les recouvrer directement, conformément à l' article 699 du nouveau code de procédure civile, si elle en a effectué l' avance, sans en avoir reçu provision suffisante.
La Greffière : La Présidente :