2ème Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 12 JUIN 2008
No2008/227
Rôle No 06/20956
S.A.S. ECM ENGINEERING CONSTRUCTION MANAGEMENT
C/
S.A.R.L. INGEREM
Grosse délivrée
à : COHEN
JAUFFRES
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce d'AIX-EN-PROVENCE en date du 5 décembre 2006 enregistré au répertoire général sous le no 2006 03599
APPELANTE
S.A.S. ECM ENGINEERING CONSTRUCTION MANAGEMENT
dont le siège est sis 17 Lieut dit la Raphelle - 13700 MARIGNANE
représentée par la SCP COHEN - GUEDJ, avoués à la Cour,
plaidant par Me Jean-Louis BONAN, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
S.A.R.L. INGEREM
dont le siège est sis 190 boulevard Pereire - 75017 PARIS
représentée par Me Jean-Marie JAUFFRES, avoué à la Cour,
plaidant par Me André BARNIER substitué par Me Jean-Louis SAVES, avocat au barreau de TOULON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 mai 2008 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
Monsieur Robert SIMON, Président Rapporteur,
et Monsieur André JACQUOT, Conseiller Rapporteur,
chargés du rapport qui en ont rendu compte dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur Robert SIMON, Président
Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller
Monsieur André JACQUOT, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Mireille MASTRANTUONO
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 juin 2008.
ARRÊT
Contradictoire
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 juin 2008
Signé par Monsieur Robert SIMON, Président, et Madame Mireille MASTRANTUONO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * *
EXPOSE DU LITIGE
La société ENGINEERING CONSTRUCTION MANAGEMENT (dénommée ici ECM) s'est adressée à la société INGEREM en vue d'ouvrir un bureau à Paris pour y développer ses activités. Cette dernière a mis à sa disposition durant l'année 2003 deux employés en la personne de Marc et Irène B... selon offre de prestations du 24 décembre 2002 pour un montant total de 22.867,74 euros. Soutenant que sa mission avait été reconduite pour l'année 2004 et qu'un certain nombre de factures n'était pas réglé, la société INGEREM a assigné la société ECM en paiement devant le Tribunal de Commerce d'Aix-en-Provence qui par jugement contradictoire du 5 décembre 2006 a:
- condamné la société ECM à payer à la société INGEREM la somme principale de 127.109,61 euros et celle de 1000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile;
- débouté la société INGEREM de sa demande en paiement de dommages intérêts.
La société ECM est appelante du jugement selon déclaration du 12 décembre 2006 et soutient dans ses dernières conclusions du 1er février 2008 que:
- la convention initialement acceptée pour une durée de six mois a été prorogée d'un commun accord pour une durée de quatre mois et demi et a pris fin à la mi-novembre 2003;
- à compter du 19 novembre 2003, la société INGEREM a cessé toute activité pour le compte de la société ECM et a demandé à ses préposés Monsieur et Madame B... de ne plus oeuvrer pour elle;
- cette cessation d'activité est confirmée par lettre du 17 décembre 2003 adressée par la société INGEREM et les témoignages de salariés;
- la société INGEREM a fait référence à de prétendus accords, formellement contestés par la société ECM, pour lui adresser des factures en février, avril et mai 2004 tout autant contestées par courriers recommandés;
- nonobstant ces protestations, la société INGEREM a émis pendant dix huit mois toute une série de factures puis a fait délivrer le 1er septembre 2004 une sommation de payer à laquelle la société ECM a répliqué par notification protestative du 3 septembre 2004;
- ainsi la créance alléguée n'est pas fondée, les prestations de la société ECM pour l'année 2003 ayant été entièrement réglées;
- la société INGEREM a en outre agi de manière déloyale en participant à la création d'une société concurrente après avoir compris le mode de fonctionnement de la société ECM.
La société appelante conclut à l'infirmation du jugement déféré, au rejet de la demande en paiement et à la condamnation de la société INGEREM au paiement des sommes de 20.000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive et de 5000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Dans ses conclusions d'intimée du 19 avril 2007, la société INGEREM rétorque que:
- les éléments produits démontrent l'existence "d'un contrat au moins tacite, sinon écrit entre les deux sociétés";
- en modifiant sa position, la société ECM agit de mauvaise foi;
- le paiement de factures en 2003 pour un montant total de 82.719,26 euros établit la réalité des relations commerciales;
- la société ECM ne peut contester le bien fondé de celles émises postérieurement en 2004;
- les attestations de ses employés sur la cessation des relations en novembre 2003 sont dénuées de caractère probant au regard du lien de subordination envers l'employeur;
- la participation de la société INGEREM dans la société P.P.M.S est totalement étrangère au litige dont l'objet est le paiement de factures.
La société INGEREM conclut à la confirmation du jugement déféré sauf à porter la condamnation à la somme principale de 155.177,33 euros et à condamner la société ECM au paiement des sommes supplémentaires de 7.000 euros à titre de dommages intérêts pour résistance abusive et de 3.000 euros pour frais de procédure.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 avril 2008.
DISCUSSION
Sur la demande en paiement de factures :
Les relations commerciales intervenues entre les parties ne sont pas contestées au titre de l'année 2003 et ainsi que le fait observer très justement la société INGEREM, elles résultent nécessairement des factures acquittées pour cette période par la société ECM pour un montant de 82.719,26 euros TTC. Cependant les factures de 2003 ne peuvent fonder à elles-seules celles émises au titre de l'année 2004 et qui ont été immédiatement contestées par la société ECM.
C'est donc à la société INGEREM, qui se prétend créancière, d'établir en application de l'article 1315 du code civil qu'elle a poursuivi ses prestations durant l'année 2004 pour le compte de la société ECM dans les termes de l'accord "tacite sinon écrit" ayant prévalu en 2003.
Il est acquis qu'elles consistaient principalement en la mise à disposition de deux salariés à Paris. Très curieusement la société INGEREM conteste les témoignages des employés de la société ECM sur la cessation de cette mise à disposition alors qu'elle reconnait expressement dans son courrier du 17 décembre 2003 avoir "démobilisé", à la demande d'ECM "notre équipe à savoir Marc B... et son assistante Irène B...".
Elle mentionne encore dans ce même courrier : "en tant que fournisseur, nous avons obtempéré à votre décision....Nous tenons cependant à souligner le caractère abrupt de cette décision qui est sans préavis et qui n'est pas dans la droite ligne des relations de confiance que nous avions établies à ce jour".
Il s'évince de ces termes, sauf à en dénaturer le sens, que les parties ont bien mis un terme à leurs relations et aux prestations qu'elles induisent. La société INGEREM prétend que la société ECM se serait également engagée à lui rétrocéder, sous forme de commissions, "30% de la marge générée par les affaires"selon accord visé dans la lettre précitée du 17 décembre 2003. Cependant, aucun document opposable à la société ECM n'établit la preuve d'un tel accord dont la société ECM a contesté la teneur dès le 2 janvier 2004 selon courrier en réponse puis par courriers postérieurs et note protestative du 3 septembre 2004. De même la proposition de convention du 24 décembre 2002 qui certes n'a pas été signée par la société ECM mais a été exécutée pour l'année 2003 ainsi qu'il a été dit ci-dessus, ne fait aucunement état d'un tel interessement.
Enfin la production non commentée de cahiers de notes manuscrites diverses et variées et difficilement compréhensibles dont l'auteur n'est pas identifié est inopérante dans la mesure où la société INGEREM n'explique pas de quelle note résulterait la preuve de l'accord prétendu.
Il s'évince de l'ensemble de ces éléments que les factures litigieuses établies sur ses seules commissions provisionnelles ne sont pas fondées et qu'ainsi la société INGEREM ne dispose d'aucune créance certaine à opposer à la société ECM.
Sa demande est rejetée et le jugement est infirmé en toutes ces dispositions.
Sur les demandes annexes :
Le rejet de la demande principale rend sans objet la demande en paiement de dommages intérêts pour résistance abusive.
Mais dès lors que la demande principale a été accueillie par les premiers juges, la société ECM ne peut pas plus conclure utilement en appel à une procédure abusive initiée par la société INGEREL.
Il n'y a donc pas lieu à paiement de dommages intérêts au profit de quiconque.
Aucune cause économique ou d'équité en revanche ne conduit à écarter l'application de l'article 700 du Code de procédure civile.
La société INGEREM qui succombe dans ses prétentions supportera les dépens d'appel et de première instance.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement,
Reçoit l'appel;
Infirme le jugement déféré rendu par le Tribunal de Commerce d'Aix-en-Provence;
Et statuant à nouveau :
Déboute la société INGEREM de l'intégralité de ses demandes;
Déboute la société ECM de sa demande en paiement de dommages intérêts;
Condamne la société INGEREM à lui payer la somme de 3.000 € (trois mille euros) en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
La condamne aux dépens tant de première instance que d'appel et autorise la SCP COHEN-GUEDJ, avoués à les recouvrer suivant les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT