COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 10o Chambre
ARRÊT AU FOND DU 17 JUIN 2008
No 2008 /
Rôle No 03 / 03227
Yves X...
C /
Marc- Antoine Y... S. A. GAN ASSURANCES IARD CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE
Grosse délivrée le : à :
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 05 Décembre 2002 enregistré au répertoire général sous le no 00 / 9670.
APPELANT
Monsieur Yves X... né le 10 Mai 1947 à SEPTEMES LES VALLONS (13240), demeurant Chez Mme Z...- ...- 13001 MARSEILLE représenté par la SCP SIDER, avoués à la Cour, assisté de Me Christophe MAMELLI, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES
Monsieur Marc- Antoine Y... demeurant ...- 13000 MARSEILLE représenté par la SCP LIBERAS- BUVAT- MICHOTEY, avoués à la Cour, assisté de Me Bernard LAURE, avocat au barreau de MARSEILLE
S. A. GAN ASSURANCES IARD S. A à Directoire et Conseil de Surveillance au capital de 630 224 289 €, RCS PARIS B 542 063 797, prise en la personne de son Président du Directoire en exercice, domicilié en cette qualité audit siège, 8 / 10 Rue d'Astorg- 75008 PARIS représentée par la SCP LIBERAS- BUVAT- MICHOTEY, avoués à la Cour, assisté de Me Bernard LAURE, avocat au barreau de MARSEILLE
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié, 8 rue Jules Moulet- 13281 MARSEILLE CEDEX 6 représentée par la SCP SIDER, avoués à la Cour, ayant Me Jacques DEPIEDS, avocat au barreau de MARSEILLE
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COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 06 Mai 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente Madame Bernadette KERHARO- CHALUMEAU, Conseiller Monsieur Benjamin RAJBAUT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES. Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Juin 2008.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Juin 2008,
Signé par Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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E X P O S É D U L I T I G E
Par arrêt avant dire droit du 12 avril 2006, auquel le présent arrêt se réfère expressément pour l'exposé des faits et de la procédure antérieure, la Dixième Chambre Civile de la Cour de céans- statuant sur l'appel interjeté par M. Yves X... contre le jugement rendu le 5 décembre 2002 par le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE dans le litige l'opposant à M. Marc Antoine Y... et à la S. A. GAN ASSURANCES IARD en présence de la C. P. A. M. des Bouches- du- Rhône- a, avant dire droit sur le bien fondé de l'appel et les demandes des parties, sauf en ce qui concerne le rejet de la demande d'expertise, infirmé de ce seul chef le jugement déféré et ordonné une expertise complémentaire confiée au Dr Pierre- Marc D..., réservant les dépens.
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 12 juin 2007.
Vu les conclusions de la C. P. A. M. des Bouches- du- Rhône en date du 12 novembre 2007.
Vu les conclusions de M. Marc Antoine Y... et de la S. A. GAN ASSURANCES IARD en date du 15 novembre 2007.
Vu les conclusions de M. Yves X... en date du 18 décembre 2007.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 7 avril 2008.
M O T I F S D E L'A R R Ê T
Attendu que le Dr Pierre- Marc D..., expert judiciaire, a été désigné par ordonnance de référé du 25 juillet 1997 et a déposé son rapport le 4 septembre 1997, suivi d'un rapport complémentaire le 27 juillet 1999, qu'il a ensuite été à nouveau désigné par l'arrêt avant dire droit du 12 avril 2006 et a déposé son rapport le 12 juin 2007.
Attendu que ces rapports, complets et documentés, ne sont pas sérieusement critiqués par les parties et seront donc entérinés par la Cour.
Attendu qu'il en ressort que M. Yves X..., né le 10 mai 1947, a été opéré le 10 novembre 1995 par le Dr Marc Antoine Y... d'une hernie inguinale bilatérale et qu'il se plaint, depuis les suites de l'intervention, de phénomènes paresthésiques et hyper- algiques au niveau des cicatrices et du pubis.
Attendu que l'opération a été effectuée selon une technique éprouvée dont les suites immédiates ont été conformes à ce type d'opération, que l'expert conclut à une lésion par compression cicatricielle du nerf génito crural au niveau de la cicatrice opératoire, qu'il s'agit là d'une complication exceptionnelle mais connue de ce type d'intervention et qu'une autre technique chirurgicale n'aurait pas permis d'éviter avec certitude ce type de complication.
Attendu qu'en ce qui concerne plus particulièrement le point ayant conduit au complément d'expertise ordonné par l'arrêt avant dire droit du 12 avril 2006, l'expert judiciaire précise qu'il n'y a pas eu de réaction allergique sur les fils de suture employés, étant précisé qu'il s'agissait de fils non résorbables, synthétiques tressés, qui seuls peuvent assurer un bon maintien de la cure de hernie, et que l'emploi d'autres fils de marques différentes n'aurait pas présenté moins de risques.
Attendu que la complication survenue fait donc partie des aléas thérapeutiques propres à cette intervention chirurgicale et qu'aucune faute de technique médicale ne peut être reprochée au Dr Marc Antoine Y..., étant rappelé que le médecin n'est tenu que d'une obligation de moyens et que la réparation de l'aléa thérapeutique n'entre pas dans le champ des obligations dont un médecin est contractuellement tenu à l'égard de son patient.
Attendu que M. Yves X... reproche essentiellement au Dr Marc Antoine Y... un défaut d'information concernant l'existence de cette complication, qu'il précise que, correctement informé, il aurait pu refuser l'opération ou " faire le choix d'un autre chirurgien pratiquant l'opération de la hernie par un autre procédé ".
Attendu que la preuve d'une information complète du patient sur les risques connus d'une intervention, même s'ils ne sont qu'exceptionnels, incombe au médecin, que cette information doit être donnée par le médecin lui- même au patient lui- même et qu'il est ainsi inopérant d'affirmer, comme le fait le Dr Marc Antoine Y... et son assureur, qu'une information aurait été donnée au Dr E..., médecin traitant de M. Yves X....
Mais attendu que s'il est donc établi que le Dr Marc Antoine Y... a manqué à son obligation d'information, cette faute ne peut entraîner comme préjudice qu'une perte de chance pour le patient d'avoir été en mesure soit de refuser l'intervention, soit de choisir un autre mode opératoire.
Attendu que M. Yves X... souffrait d'une double hernie inguinale dont les complications peuvent être brutales et provoquer notamment une occlusion intestinale aux conséquences vitales, que l'intervention chirurgicale est le seul traitement de la hernie, qu'ainsi l'opération effectuée par le Dr Marc Antoine Y... était inévitable et qu'eu égard au caractère exceptionnel et relativement bénin de la complication survenue (l'expert précisant qu'il ne s'agit que de phénomènes douloureux sans trouble fonctionnel vrai, l'érection restant normale), M. Yves X... n'aurait pas pu refuser de subir cette intervention et que la perte de chance de ce chef est nulle.
Attendu d'autre part que l'expert judiciaire indique sans ambiguïté qu'une autre technique chirurgicale n'aurait pas permis d'éviter avec certitude ce type de complication et qu'ainsi la perte de chance de choisir un autre mode opératoire ne présentant pas ce risque de complication est nulle.
Attendu que le défaut d'information n'a donc entraîné aucun préjudice indemnisable au titre d'une quelconque perte de chance et qu'en conséquence le jugement déféré sera également infirmé dans ses autres dispositions non déjà infirmées par l'arrêt avant dire droit du 12 avril 2006, et que, statuant à nouveau, M. Yves X... sera débouté de l'ensemble de ses demandes.
Attendu que la C. P. A. M. des Bouches- du- Rhône indique qu'elle n'a aucune créance à faire valoir, que la Cour constate en conséquence qu'elle ne présente aucune demande.
Attendu que M. Marc Antoine Y... et la S. A. GAN ASSURANCE IARD demandent que soit ordonnée la restitution de la provision de 150 € qu'ils ont versée en vertu de l'exécution provisoire de droit de ce chef du jugement.
Attendu cependant que le présent arrêt infirmatif constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement, et que les sommes devant être restituées portent intérêt au taux légal à compter de la notification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution, qu'il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu à statuer sur ce chef de demande.
Attendu que M. Yves X..., partie perdante, sera condamné au paiement des dépens de la procédure de première instance et d'appel, lesquels comprendront les frais des expertises ordonnées tant en référé qu'en cause d'appel.
P A R C E S M O T I F S
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement.
Vu l'arrêt avant dire droit du 12 avril 2006.
Entérine les rapports d'expertise du Dr Pierre- Marc D....
Infirme le jugement déféré en ses dispositions non déjà infirmées par l'arrêt avant dire droit sus visé et, statuant à nouveau :
Déboute M. Yves X... de l'ensemble de ses demandes.
Constate que la C. P. A. M. des Bouches- du- Rhône ne présente aucune demande.
Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire de droit attachée au jugement déféré à la Cour.
Condamne M. Yves X... aux dépens de la procédure de première instance et d'appel, lesquels comprendront les frais des expertises ordonnées tant en référé qu'en cause d'appel et autorise la S. C. P. LIBERAS, BUVAT, MICHOTEY, Avoués associés et la S. C. P. SIDER, Avoués associés, à recouvrer directement ceux des dépens dont elles auraient fait l'avance sans avoir reçu provision. Rédacteur : M. RAJBAUT
Madame JAUFFRESMadame SAUVAGE GREFFIÈRE PRÉSIDENTE