COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
10o Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 17 JUIN 2008
No 2008/
Rôle No 06/17354
Jeannette X... épouse Y...
C/
LA REGIE D'ISOLA 2000 "REGISOLA"
LA COMMUNE D'ISOLA
Grosse délivrée
le :
à :
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 19 Septembre 2006 enregistré au répertoire général sous le no 00/7369.
APPELANTE
Madame Jeannette X... épouse Y...
née le 26 Juin 1935 à CRAU DE CAGNES, demeurant ...
représentée par la SCP TOLLINCHI PERRET-VIGNERON BARADAT-BUJOLI-TOLLINCHI, avoués à la Cour,
assistée de Me Robert ROBERTY, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me GUARDIOLE-VIVIANI, avocat au barreau de GRASSE
INTIMEES
LA REGIE D'ISOLA 2000 "REGISOLA", prise en la personne de son représentant légal en exercice, Service des Pistes Parking 1 - Résidence Clarine - 06420 ISOLA 2000
représentée par la SCP BLANC AMSELLEM-MIMRAN CHERFILS, avoués à la Cour,
assistée de Me Michel TEBOUL, avocat au barreau de PARIS
LA COMMUNE D'ISOLA, représentée par son Maire en exercice, Hôtel de Ville - 06420 ISOLA
représentée par la SCP JOURDAN - WATTECAMPS, avoués à la Cour,
assistée de Me Jean-Pierre COURTIGNON, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 07 Mai 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Benjamin RAJBAUT, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente
Madame Bernadette KERHARO-CHALUMEAU, Conseiller
Monsieur Benjamin RAJBAUT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Juin 2008.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Juin 2008,
Signé par Madame Joëlle SAUVAGE, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Vu le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nice le 19 septembre 2006
Vu l'appel de Mme Y... née X... en date du 16 octobre 2006
Vu les conclusions de cette appelante en date du 7 avril 2008
Vu les conclusions de la Régie d'ISOLA 2000 en date du 29 avril 2008
Vu les conclusions de la commune d'ISOLA en date du 15 mars 2007
Vu l'ordonnance de la clôture en date du 7 avril 2008 révoquée à l'audience de ce jour avec l'accord de toutes les parties et la clôture à nouveau de la procédure ce jour
***
Victime le 11 février 2000 d'un accident de télésiège à ISOLA 2000, Mme Y... a saisi le tribunal de grande instance de Nice lequel, par jugement du 19 septembre 2006, a déclaré son action recevable mais n'a pas retenu de fautes contractuelles à l'égard de la Régie d'ISOLA 2000 ni de faute délictuelle à l'égard de la commune d'ISOLA et a donc débouté Mme Y....
Mme Y... invoque la responsabilité contractuelle de la Régie d'ISOLA 2000 estimant celle-ci tenue d'une obligation de sécurité de résultat envers elle et, subsidiairement des fautes de la Régie ainsi que la responsabilité délictuelle de la commune d'ISOLA en faisant état à l'égard de cette dernière des dispositions de l'article 1384 du code civil et en articulant différentes fautes à son encontre.
La commune d'ISOLA a conclu à la confirmation du jugement en faisant observer qu'elle n'est pas propriétaire de la piste où la chute a eu lieu et que les juridictions de l'ordre judiciaire sont incompétentes pour statuer sur un prétendu manquement du maire à ses pouvoirs de police administrative.
La Régie d'ISOLA 2000 a conclu à la confirmation du jugement estimant que l'accident est dû à la seule faute de Mme Y... qui a omis de débarquer à l'arrivée et a sauté de deux mètres de haut au lieu d'attendre sa prise en charge par un employé
sur l'action en responsabilité contre la commune d'ISOLA
La recherche de la responsabilité de la commune d'ISOLA tant sur le fondement de l'article 1384 du code civil en sa qualité invoquée de " gardienne des pistes " que sur la faute consistant à ne pas avoir pris " toutes les précautions pour qu'aucun accident ne se produise " ne ressort
pas, s'agissant de la mise en cause d'une personne morale de droit public, de la compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire.
sur l'action en responsabilité contre la Régie d'ISOLA 2000
Mme Y... expose que se trouvant seule sur un télésiège de la régie d'ISOLA 2000 dont elle avait relevé la barre de protection avant la phase de débarquement, elle n'a pas pu descendre du fait de la vitesse de ce télésiège, qu'elle a attendu que le gardien le stoppe sur la partie enneigée mais que ledit gardien n'étant pas en poste dans sa guérite, le télésiège a poursuivi sa course et a entamé la phase de descente, que dans cette phase, alors que le télésiège se trouvait à une hauteur de deux mètres au-dessus du sol, un portillon de sécurité l'a brutalement arrêté en pleine course et que de ce fait elle a été éjectée et s'est retrouvée inanimée sur un tas de pierres.
Sur le plan juridique Mme Y... invoque à l'encontre de la Régie d'ISOLA 2000 une obligation de sécurité de résultat dans le cadre du transport en cours, et à titre très subsidiaire, une faute tenant au déclenchement tardif du système d'arrêt du télésiège en raison de la faute de la vigie, le vigile n'étant pas à son poste.
La cour doit donc rechercher, au travers des éléments d'appréciation qui lui sont soumis, les circonstances exactes de la chute de Mme Y... et particulièrement si cette chute est intervenue au cours du transport ou dans la phase de débarquement.
Le procès-verbal dressé le 11 mars 2000 par les militaires de la gendarmerie de Saint-Étienne sur Tinée comporte l'audition de M. D..., perchiste, entendu le 11 février 2000 à midi et un quart, lequel a déclaré :
" Ce jour, vers 11 heures 35, il y a eu un accident à la fin du télésiège Méné. Une femme d'un certain d'âge, relativement âgée, est tombée après la fin du télésiège. Elle n'est pas descendue quand il le fallait. J'ai donc déclenché l'arrêt d'urgence depuis l'intérieur. Je me trouvais à l'intérieur de la cabine. Ensuite le portillon a fait son effet également. Alors qu'il y avait encore l'inertie du télésiège et qu'il commençait à se stopper, la dame a sauté. Elle est tombée face contre terre et était inconsciente. ".
La fiche d'intervention de secours sur piste dressée au moment de l'accident le 11 février 2000 à 11 h 30, signé par l'époux de Mme Y..., comporte un paragraphe " observations" conçu en ces termes :
" Personne n'ayant pas débarqué ,a sauté du siège sans attendre l'arrêt de l'appareil provoqué par la vigie en place et le déclenchement du portillon. Celle-ci a tapé la tête sur le sol. "
Ces éléments permettent de constater que Mme Y... n'est pas parvenue à descendre dans la zone de débarquement et que l'accident est survenu au cours de la phase d'arrêt du télésiège et non pas dans une phase de transport.
Aucun élément ne permet de vérifier que cette phase d'arrêt aurait été marquée par une anomalie liée à son déclenchement tardif et/ou au fonctionnement brutal de l'appareillage qui aurait entraîné l'éjection de Mme Y... du télésiège.
A cet égard, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il résulte d'une pièce versée aux débats que le télésiège litigieux a bénéficié, le 21 avril 1999, d'une visite de contrôle annuel par un bureau agréé, le fonctionnement du système de freinage et la sécurité de l'appareil ayant alors été déclarés conformes aux normes réglementaires, que dès lors le temps de décélération nécessaire à l'arrêt complet du télésiège explique qu'après le déclenchement des deux mécanismes d'arrêt d'urgence du télésiège, ce dernier ait poursuivi sa course sur plusieurs mètres entamant la descente en sens inverse avant de ralentir progressivement et de s'immobiliser complètement, ce procédé de décélération destiné à éviter un arrêt brutal de l'appareil rendant ainsi improbable le fait que Mme Y... ait été éjectée de l'assise du télésiège, cette dernière ne rapportant au demeurant aucun élément de preuve en ce sens.
En conséquence, en l'absence de preuve d'une faute imputable à la Régie d'ISOLA 2000 dans les obligations de sécurité contractuelle dont elle était tenue à l'égard de Mme Y... au moment de sa chute, c'est à bon droit que les premiers juges ont débouté Mme Y... de ses demandes.
Le jugement déféré doit par suite être confirmé.
Il est équitable de fixer à 1300 € la somme devant être allouée d'une part à la Régie d'ISOLA 2000 d'autre part à la commune d'ISOLA au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant publiquement et par arrêt contradictoire
Se déclare incompétente pour statuer sur la responsabilité de la commune d'ISOLA et renvoie Mme Y... à mieux se pourvoir
Confirme pour le surplus le jugement déféré
Condamne Mme Y... à payer la somme de 1300 € à la Régie d'ISOLA 2000 et la somme de 1300 € à la commune d'ISOLA
Condamne Mme Y... aux dépens distraits au profit de la SCP JOURDAN-WATTECAMPS et de la SCP BLANC-AMSELLEM-MIMRAN- CHERFILS, avoués.
Magistrat Rédacteur: Mme KERHARO-CHALUMEAU
Madame JAUFFRESMadame SAUVAGE
GREFFIÈRE,PRÉSIDENTE