2ème Chambre
ARRÊT AU FOND DU 24 JUILLET 2008
No 2008 / 283
Rôle No 07 / 13222
S. A. S. ALTEREO
C /
I. N. P. I.
Société ALTAREA
Monsieur le Procureur Général Près la Cour d'Appel
Grosse délivrée à : SIDER
Décision déférée à la Cour :
Décision de Monsieur le Directeur Général de l'Institut National de la Propriété Industrielle en date du 2 juillet 2007, enregistré sous le no 0PP07-0031
DEMANDERESSE
S. A. S. ALTEREO dont le siège social est sis Parc d'Activités-Point Rencontre-2 avenue Madeleine Bonnaud-13770 VENELLES représentée par la SCP SIDER, avoués à la Cour plaidant par Me Yves BOYER, Avocat au barreau de MARSEILLE
DEFENDEURS
INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE dont le siège social est sis 26 bis rue de Saint Pétersbourg-75800 PARIS CEDEX 08 représenté par Melle Marianne X... (Chargée de mission) en vertu d'un pouvoir général
Société ALTAREA dont le siège social est sis 108 rue de Richelieu-75002 PARIS non comparante
Monsieur le Procureur Général Près la Cour d'Appel en ses bureaux sis Palais Monclar-13100 AIX EN PROVENCE représenté par M. André VIANGALLI (Avocat Général)
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COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 12 juin 2008 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur Robert SIMON, Président Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller Monsieur André JACQUOT, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Mireille MASTRANTUONO
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 juillet 2008.
Ministère Public : Monsieur André VIANGALLI, Avocat Général, lequel a été entendu en ses observations orales.
ARRÊT
Réputé contradictoire
Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 juillet 2008
Signé par Monsieur Robert SIMON, Président, et Madame Mireille MASTRANTUONO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La S. A. ALTAREA est titulaire de la marque complexe « ALTAREA » déposée, le 15 avril 1999, auprès de l'Office de l'Harmonisation dans le Marché Intérieur en classes 35, 36, 37 et 42 pour désigner divers produits ou services, notamment « consultation sur la protection de l'environnement, expertises géologiques … ». La S. A. ALTAREA a, conformément à l'article L 712-4 du code de la propriété intellectuelle, fait opposition à la demande d'enregistrement de la marque complexe en couleurs « altereo » en lettres minuscules, signe déposée, le 25 septembre 2006, par la S. A. S. ALTEREO auprès de l'Institut National de la Propriété Industrielle, désignant notamment en classes 1, 7, 9, 11, 35, 36, 37, 40, 41 et 42 les produits ou services suivants : « équipements et produits de traitement d'épuration de l'eau, audits et inspection d'ouvrages, études et conseils environnementaux de protection de ressources naturelles »... ;
Par décision en date du 2 juillet 2007, Monsieur le Directeur de l'Institut National de la Propriété Industrielle a admis partiellement l'opposition de la S. A. ALTAREA en ce qui concerne une longue liste de produits et services ayant trait aux conseils, expertises, audits, études travaux … en matière d'environnement.
La S. A. S. ALTEREO a régulièrement formé un recours à l'encontre de cette décision dans les formes et délai légaux, le 27 juillet 2007 et a déposé, le 20 août 2007, un exposé contenant ses moyens, puis, le 20 février 2008, des conclusions récapitulatives et en réplique au mémoire du directeur de l'Institut National de la Propriété Industrielle.
Dans ses conclusions en date du 20 février 2008, la S. A. S. ALTEREO a fait exposer les moyens suivants tendant à l'annulation de la décision de Monsieur le Directeur de l'Institut National de la Propriété Industrielle :
1- le risque de confusion doit être apprécié globalement à partir de l'impression d'ensemble produite par la comparaison des différents signes litigieux et, à cet égard, au plan visuel comme phonétique les deux signes présentent des dissemblances excluant un risque de confusion, au plan visuel : calligraphie, couleur, placement des lettres et au plan phonétique : sonorité médiane, sonorité finale et sonorité prépondérante différentes,
2- au plan conceptuel ou intellectuel, la dénomination « ALTEREO » évoque les activités exercées par la S. A. S. ALTEREO : métiers liés à l'environnement et à sa protection tant par la signification des éléments la composant : Alter pour autrement, Ter pour terre, O pour eau, E pour environnement, que par les couleurs choisies : bleue pour l'eau et verte pour la terre,
3- subsidiairement, si certains produits ou services visés dans le dépôt fait par la S. A. ALTAREA et dans la demande d'enregistrement de la S. A. S. ALTEREO sont similaires, il n'existe aucune similitude pour beaucoup d'autres produits ou services,
4- en définitive, le signe « ALTEREO » étant disponible, le risque de confusion dans l'esprit du consommateur d'attention moyenne n'est pas possible ;
Par observations écrites communiquées à la S. A. S. ALTEREO, Monsieur le Directeur de l'Institut National de la Propriété Industrielle soutient que :
1- la S. A. S. ALTEREO n'a pas contesté précisément dans le mois du recours formé contre la décision dont s'agit, les liens d'identité ou de similarité entre les produits ou services visés dans la marque déposée et ceux visés dans la demande d'enregistrement, liens qui avaient été retenus dans la décision attaquée « parfaitement bien fondée, eu égard aux libellés des marques en présence et aux critères traditionnellement admis par la jurisprudence pour juger de la similarité, que la requérante semble ignorer »,
2- la comparaison des signes en présence pour apprécier le risque de confusion doit s'effectuer en considération de l'impression visuelle, phonétique et conceptuelle d'ensemble laissée par les signes dans l'esprit d'un consommateur d'attention moyenne n'ayant pas le loisir de procéder à une comparaison directe des signes en présence et qu'il existe une similitude certaine entre les deux signes incriminés provenant d'une disposition identique de cinq lettres, dont les trois d'attaque, d'une prononciation identique en quatre temps avec une suite identique de sonorités terminée par un hiatus E-O et E-A, si bien qu'un risque de confusion entre les signes est patent,
3- la calligraphie distincte et l'introduction de deux couleurs pour le signe « ALTEREO » ne sont pas des éléments prépondérants et fortement distinctifs modifiant la perception d'ensemble, essentiellement verbale, des signes en présence,
4- la référence aux métiers de l'environnement censée être produite par le signe « ALTEREO » dans l'esprit d'un consommateur d'attention moyenne n'est pas avérée ;
La S. A. ALTAREA, titulaires de la marque communautaire et opposante, bien que régulièrement appelée dans la cause par lettre recommandée dont elle a signé l'avis de réception, le 10 mars 2008, n'a pas fait connaître d'observations écrites ou orales.
Le dossier de l'affaire a été transmis à Monsieur le Procureur Général près la Cour d'Appel d'AIX en PROVENCE pour recueillir ses observations, son représentant ayant été entendu lors de l'audience, conformément à l'article L 411-4 du code de la propriété intellectuelle.
DISCUSSION
Attendu qu'il n'est pas véritablement contesté que les marque et signe en concours concernent, pour le moins, certains produits ou services similaires, voire identiques : « conseils techniques, études et ingénierie de projets techniques pour l'urbanisme et l'aménagement du territoire », expertises dans le domaine de l'environnement …. » ; que la S. A. S. ALTEREO reconnaît dans ses conclusions un « risque de similitude » pour plusieurs services identiques ;
Attendu que le risque de confusion entre des signes litigieux doit s'apprécier globalement en considération de l'impression visuelle, phonétique et intellectuelle ou conceptuelle procurée par les signes en présence ; que, dans l'appréciation du risque de confusion, il y a lieu de retenir les éléments dominants et distinctifs des signes complexes, à l'exclusion de leurs éléments insignifiants qui ne retiennent pas l'attention d'un consommateur d'attention moyenne ;
Attendu qu'il ne peut être considéré que la calligraphie en minuscules avec traitement particulier de la barre de la lettre t et l'utilisation de deux couleurs (verte pour le t et bleue pour les autre lettres) dans le signe « altereo » constituent un élément insignifiant qui n'a pas de caractère distinctif par comparaison au signe « ALTAREA » en calligraphie courante et en lettres majuscules noires ; que la présentation du signe « altereo » a un impact visuel qui ne résulte pas uniquement de lettres dont certaines sont effectivement identiques et disposées dans le même ordre que dans le signe « ALTAREA » (cinq lettres communes doit trois placées dans le même ordre en début des signes) ; qu'au plan visuel, les signes présentent des différences certaines ; que le signe « altereo » qui ne se résume pas à un élément sonore prédominant, se prononce de manière différente du signe « ALTAREA » ; que les deuxièmes sonorités « ter » pour le signe « altereo » et « ta » pour le signe « ALTAREA » et les sonorités finales respectivement « e-o » et « re-a » sont différentes de manière significative ; que le consommateur d'attention moyenne, à défaut de percevoir toute la symbolique que la S. A. S. ALTEREO a entendu conférer à son signe, perçoit pour le moins qu'un « message » y est contenu et résulte du choix d'une attaque en « alter » au pouvoir actuellement évocateur « d'altérité » ou « d'autrement » et de l'association de deux couleurs évoquant la Nature ; que le signe « ALTAREA » n'a aucun pouvoir évocateur en soi et ne vise pas à susciter chez le consommateur d'attention moyenne une quelconque interrogation sur un sens caché ; que l'impression d'ensemble visuelle, phonétique et intellectuelle procurée par chacun des deux signes considérés est différente ; qu'un consommateur moyennement vigilant n'aura pas son attention indifféremment sollicitée ou attirée, sans pouvoir différencier les signes, lorsqu'il verra l'un ou l'autre de manière non concomitante ; qu'il n'existe pas de risque de confusion entre des signes procurant à tous les plans une impression d'ensemble distincte ;
Attendu qu'il convient d'annuler la décision du directeur de l'Institut National de la Propriété Industrielle justement contestée par la S. A. S. ALTEREO ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt réputé contradictoire,
Annule en toutes ses dispositions la décision de Monsieur le Directeur de l'Institut National de la Propriété Industrielle en date du 2 juillet 2007, accueillant partiellement l'opposition formée par la S. A. ALTAREA.
Dit que le présent arrêt sera notifié par le greffe à la requérante, la S. A. S. ALTEREO, à Monsieur le Directeur de l'Institut National de la Propriété Industrielle et à la S. A. ALTAREA, conformément à l'article R 411-26 du code de la propriété intellectuelle.
LE GREFFIER LE PRESIDENT