COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1ère Chambre C
ARRÊT AU FOND
DU 02 OCTOBRE 2008
No 2008/
N. G.
Rôle No 08/12954
Gilbert X...
C/
CENTRE HOSPITALIER DE MONTPERRIN
En présence de :
Monsieur le Procureur Général près la Cour d'Appel d'Aix-En-Provence
Grosse délivrée
le :
à :
SCP BLANC
Centre Hospitalier de Montperrin
Monsieur le Procureur Général près la Cour d'Appel
réf 0812954
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Juge des Libertés et de la Détention près le Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 16 Juillet 2008 enregistré au répertoire général sous le No 9/2008.
APPELANT :
Monsieur Gilbert X...
né le 10 Octobre 1952,
demeurant ...
représenté par la SCP BLANC AMSELLEM-MIMRAN CHERFILS, avoués à la Cour
INTIMÉ :
CENTRE HOSPITALIER DE MONTPERRIN,
représenté par son Directeur en exercice,
dont le siège est 109, Avenue du Petit Barthélémy - 13617 AIX EN PROVENCE
Représenté par Monsieur Francis LEJEUNE, dûment mandaté
En présence de :
Monsieur le Procureur Général près la Cour d'Appel d'Aix-En-Provence, demeurant Palais de Justice - Place de Verdun - 13100 AIX EN PROVENCE
Non représenté
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 01 Septembre 2008 en Chambre du Conseil. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Nicole GIRONA, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Guy ROMAN, Président
Madame Anne FENOT, Conseiller
Madame Nicole GIRONA, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Monsieur Serge LUCAS.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Octobre 2008.
MINISTÈRE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.
ARRÊT :
Réputé contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Octobre 2008,
Signé par Monsieur Guy ROMAN, Président, et Monsieur Serge LUCAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*-*-*-*-*-*
A la requête de Monsieur X... enregistrée le 17 mars 2008, le juge de la liberté et de la détention du tribunal de grande instance d'Aix en Provence a rejeté sa demande de la mainlevée de la mesure d'hospitalisation prise à la demande d'un tiers à l'égard du requérant en date du 25 janvier 2002 et exécutée au centre hospitalier Montperrin, par décision rendue le 16 juillet 2008.
Monsieur X..., qui a pris connaissance de cette décision le 17 juillet 2008, en a interjeté appel le 22 juillet 2008.
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A l'audience du 1er septembre 2008, Monsieur X..., représenté, a fait valoir que son hospitalisation ne se justifiait plus au sens des articles L 3212-1 et suivants du code de la santé publique, dès lors que les troubles ayant motivé cette mesure avaient disparu et qu'il ne lui était prescrit aucun traitement.
Il a ajouté que son maintien présentait, en revanche, le risque d'aggraver son état de santé. Il a ainsi sollicité une nouvelle expertise, et en tout état de cause, la réformation de la décision.
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Le ministère public a conclu à la recevabilité de l'appel et à la confirmation de la décision déférée. Il a exposé que, au vu des rapports des deux mesures d'expertise ordonnées par le premier juge, la pathologie psychiatrique dont souffre Monsieur X... justifie une prise en charge soutenue et sous le mode de la contrainte.
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Le représentant du Centre Hospitalier Montperrin a, pour sa part, soulevé l'irrecevabilité de recours engagé par Monsieur X... au motif qu'il ne disposait pas de la capacité à agir, étant placé sous tutelle, en exécution d'un jugement rendu le 5 septembre 2000 par le tribunal d'instance d'Aix en Provence.
A titre subsidiaire, il a fait observé que l'hospitalisation sur demande d'un tiers avec sortie d'essai était une mesure particulièrement bien adaptée à l'état de l'appelant, dont les troubles mentaux rendent impossibles son consentement aux soins mais dont son état nécessite un suivi et un traitement médical spécialisés.
MOTIFS DE LA DÉCISION:
- Sur la recevabilité du recours:
L'article L 3211 - 12 du code de la santé publique dispose que peuvent, à quelque époque que ce soit, se pourvoir par simple requête devant le juge de la liberté et de la détention du tribunal de grande instance du lieu de la situation de l'établissement pour solliciter la sortie immédiate:
- la personne hospitalisée sans son consentement ou retenue dans quelque établissement que ce soit, qui accueille des malades soignés pour des troubles mentaux,
- son tuteur si elle est mineure,
- son tuteur ou son curateur, si majeure, elle est placée sous tutelle ou en curatelle,
- son conjoint, son concubin,
- un parent ou une personne susceptible d'agir dans l'intérêt du malade
- et éventuellement le curateur à la personne.
L'objectif du législateur, à l'élaboration de la loi du 27 juin 1990, a été de faciliter les recours à l'encontre des décisions d'hospitalisation d'office ou à la demande d'un tiers, qui constituent des mesures portant atteinte à la liberté individuelle. Cette disposition n'impose aucune forme, aucun délai et dresse une liste des personnes recevables à contester la mesure d'hospitalisation prise sans le consentement de l'intéressé, en commençant par la personne hospitalisée. Cette énumération est cumulative et ne prévoit aucune exclusion.
Aussi, il convient d'en déduire que ce texte spécial crée une dérogation aux dispositions applicables aux majeurs placés sous mesure de protection, au terme de laquelle une personne, même placée sous tutelle, dispose de la capacité à présenter une requête afin de contester l'hospitalisation qui lui est imposée.
Dans ces conditions, le recours de Monsieur X... à l'encontre de la décision rendue le 16 juillet 2008 doit être déclaré recevable.
- Sur le fond:
A l'examen des rapports d'expertise déposés par les deux experts désignés successivement par le premier juge, par ordonnances des 28 mars et 21 avril 2008, d'une part, et du 2 juin 2008, d'autre part, il apparaît que le Docteur Y... et le Docteur Z... sont parvenus à des conclusions similaires, après avoir reçu et procédé à l'examen psychologique de Monsieur X....
Ainsi, le Docteur Y... relève:
- que l'état de Monsieur X... est stabilisé sous l'effet du traitement retard dont il bénéficie, mais auquel il n'adhère pas, étant convaincu de faire l'objet d'un simple suivi, purement inutile,
- qu'il cessera tout soin dès la levée de son placement sous contrainte, décision susceptible de générer de nouveaux épisodes processifs faisant craindre le risque de réhospitalisation temps plein sur plusieurs années dans un contexte de passages à l'acte potentiels.
Il conclut que le maintien de la mesure actuelle est nécessaire dans l'intérêt du patient.
Pour sa part, le Docteur Z... souligne:
- que Monsieur X... souffre d'une pathologie psychiatrique chronique de type délire paranoïaque évoluant depuis de nombreuses années, qui justifie une prise en charge soutenue afin de prévenir un nouvel épisode de décompensation aigue comme cela a été le cas dans ses antécédents,
- que son état pose ainsi l'indication d'une mesure de contrainte de soins actuellement de type congé d'essai d'hospitalisation à la demande d'un tiers puisqu'il n'existe pas d'alliance thérapeutique en raison d'une méconnaissance de ses troubles,
- que son état fait craindre l'éclosion d'un épisode psychotique fécond compromettant sa sécurité ou celle des tiers, ou portant atteinte de façon grave à l'ordre public, en cas de levée de la mesure, qui doit être maintenue et éprouvée dans le temps.
En l'état de ces deux expertises concordantes, effectuées par des médecins spécialisés en psychiatrie, dont le premier est inscrit sur la liste nationale et sur la liste des experts judiciaires de la Cour d'Appel d'Aix en Provence, il n'apparaît pas nécessaire d'ordonner une nouvelle mesure d'expertise.
De plus, les renseignements techniques dont elles font état ne souffrent aucune discussion, étant établi que Monsieur X..., qui est atteint de troubles mentaux qu'il dénie, a besoin d'un traitement pour maintenir la stabilité qu'il a acquise et qu'il est avéré, en considération de sa pathologie, qu'il ne peut lui être administré que sous la contrainte d'une mesure d'hospitalisation à la demande d'un tiers, actuellement aménagée dans le cadre d'un congé d'essai, lui permettant de disposer d'une cadre de vie personnel et familial.
Aucun élément médical ne permet d'affirmer que l'état mental du requérant est susceptible de s'aggraver dans l'hypothèse d'un maintien de la mesure contestée.
Il est donc indispensable pour Monsieur X... que la mesure d'hospitalisation à la demande d'un tiers soit maintenue. La décision déférée sera donc confirmée.
PAR CES MOTIFS:
La Cour,
Statuant contradictoirement,
Déboute Monsieur X... de sa demande d'expertise,
Confirme la décision rendue le 16 juillet 2008 par le juge de la liberté et de la détention à l'égard de Monsieur Gilbert X...,
Laisse en tant que de besoin les dépens de la présente procédure à la charge de Monsieur X....
Le Greffier Le Président