11o Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 06 NOVEMBRE 2008
No 2008 / 474
Rôle No 06 / 19631
Christian Jean-Paul Camille Y...
C /
Carole Z...
Grosse délivrée
le :
à : BOISSONNET
ERMENEUX
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal d'Instance de CAGNES SUR MER en date du 07 Novembre 2006 enregistré au répertoire général sous le no 05 / 154.
APPELANT
Monsieur Christian Jean-Paul Camille Y...
né le 19 Mai 1944 à VICHY (03200),
demeurant...-...
représenté par la SCP BOISSONNET-ROUSSEAU, avoués à la Cour,
plaidant par Me Edith FARAUT, avocat au barreau de NICE, substituant Me Jacqueline MARRO, avocat au barreau de NICE
INTIMEE
Madame Carole Z...
née le 12 Avril 1947 à NICE (06000),
demeurant...
représentée par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY-LEVAIQUE, avoués à la Cour,
plaidant par la SCP VERSTRAETE & ASSOCIES, avocats au barreau de GRASSE
*- *- *- *- *
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 02 Septembre 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Mme COUX, présidente, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Marie Chantal COUX, Président
Monsieur Michel JUNILLON, Conseiller
Madame Chantal HUILLEMOT-FERRANDO, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Novembre 2008.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Novembre 2008,
Signé par Madame Marie Chantal COUX, Président et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Vu le jugement rendu le 7 novembre 2006 par le Tribunal d'Instance de Cagnes sur Mer qui a débouté Christian Y... de l'ensemble de ses demandes présentées au motif de troubles dans la jouissance de locaux professionnels lui ayant été donnés en location par acte du 14 octobre 1997 par Carole C... épouse Z... et l'a condamné à payer à cette dernière les sommes de 8 000 euros en réparation du préjudice moral et de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Vu l'appel interjeté par Christian Y... le 21 novembre 2006,
Vu les uniques conclusions de Christian Y... du 21 mars 2007,
Vu les dernières conclusions de Carole C... épouse Z... du 8 juin 2008,
MOTIFS DE LA DÉCISION :
L'appel interjeté dans le mois suivant le jugement est recevable.
Sur le rapport d'expertise :
Rien ne permet d'imputer une absence d'objectivité et d'impartialité à l'expert judiciaire qui a déposé un rapport complet sur la mission qui lui a été donnée après avoir examiné de façon détaillée les nombreuses pièces qui lui ont été remises par les parties, s'est déplacé deux fois sur les lieux, a entendu contradictoirement les parties, assistées de leur conseil, et répondu de façon motivée aux divers dires qui lui ont été soumis.
Christian Y... ne peut sérieusement soutenir que le premier accédit s'est déroulé plus d'un an après le jugement ordonnant l'expertise ; en effet, l'expert a été commis par jugement du 14 décembre 1999 et la première réunion d'expertise a été tenue sur les lieux en présence des parties et de leur conseil le 8 février 2000 ; puis le nouveau conseil de Christian Y... ayant, le 6 juin 2002, fait grief à l'expert de ne pas avoir visité les lieux, et demandé des investigations complémentaires, les parties ont été, à nouveau, réunies sur les lieux le 22 janvier 2003.
Enfin, il ne peut être reproché à l'expert de ne pas avoir pratiqué des mesures acoustiques dès lors qu'à la date où il a été commis les travaux litigieux étaient terminés depuis plusieurs mois ; seuls les éléments techniques analysés après visite des lieux permettaient, à la date de la mission d'expertise, d'apprécier les nuisances et préjudices invoqués par Christian Y....
C'est donc, à juste titre, que le premier juge n'a pas écarté le rapport d'expertise.
Sur la violation des obligations de la bailleresse et les troubles subis par le preneur :
Le jugement entrepris est confirmé, les moyens critiques et les prétentions contraires développés en appel par l'appelant s'avérant dénués de fondement.
Christian Y... invoque vainement un manquement à l'obligation de délivrance, les travaux litigieux n'ayant pas entraîné une modification des locaux loués ; en effet, ceux-ci ont consisté, d'abord, en une réfection de parties privatives, non comprises dans la location, situées au rez de chaussée puis en une rénovation des façades de l'immeuble.
De même, il ne peut sérieusement soutenir n'avoir pas été informé au préalable de ces travaux, Christian D..., agent immobilier, attestant que lors de la négociation du bail, il a été informé que la façade de l'immeuble allait être refaite dans les mois suivant son installation et, en outre, que la bailleresse viendrait habiter dans l'immeuble dès qu'elle aurait effectué les travaux utiles à la rénovation de son appartement ; au surplus, Julien E..., architecte, a informé Christian Y... par courrier du 15 janvier 1998 que les travaux de ravalement de la façade allaient intervenir dans les mois à venir ; l'information de ce ravalement a été confirmée par un avis à tous les occupants de l'immeuble en date du 24 avril 1998.
Ces travaux de ravalement, entrepris le 30 avril et terminés fin juillet 1998, n'ont pas été exécutés en infraction aux règles administratives ainsi que le soutient l'appelant tenu par la clause du bail, telle que reproduite dans le jugement et dont la portée n'a pu lui échapper eu égard à l'étendu de ses connaissances juridiques, de supporter sans indemnité, ni diminution de loyer " tous travaux et constructions " que le bailleur jugera utile d'effectuer dans les lieux loués ou dans l'immeuble dont ils dépendent, " quelqu'en soit l'importance ou la durée ", les termes même de la clause excluant toute distinction entre trouble normal et anormal ou excessif ; il n'est pas, par ailleurs, établi que, dans l'exécution de ces travaux, la bailleresse, ou les divers intervenants pour le compte de cette dernière, ont commis une quelconque faute ; au contraire, il résulte des pièces versées aux débats que Carole C... épouse Z... a pris toutes les mesures pour réduire dans la limite du possible les nuisances inévitablement occasionnées par le ravalement des façades.
Les travaux réalisés au rez de chaussée sont ceux de rénovation de l'appartement de Carole C... épouse Z... ; il résulte des comptes rendus de chantier que les travaux de démolition entrepris au cours du dernier trimestre 1997 avaient été terminés, de même que la mise en oeuvre de la dalle béton en sous-sol, lorsque Christian Y... a emménagé dans les locaux loués le 19 janvier 2008, que les travaux de reprise en sous-oeuvre étaient achevés à 85 % le 20 février 1998 et totalement le 16 mars 1998, qu'après cette date seuls des travaux de doublage de cloisons, pose de carrelages et de faïences ont été réalisés à l'intérieur de l'appartement ; il résulte des constatations techniques de l'expert que les travaux exécutés après le 19 janvier 1998 n'étaient pas de nature à engendrer de nuisances substantielles et aucun des occupants de l'immeuble ne s'est plaint, les avocats d'un cabinet voisin de celui de Christian Y..., au premier étage de l'immeuble, ayant, au contraire, déclaré à l'expert, lors du premier accedit, n'avoir subi aucune nuisance ; d'ailleurs, Christian Y... ne produit aucun élément objectif tel que constat d'huissier ou rapport d'expertise susceptible d'établir l'existence d'un quelconque trouble de jouissance avant la mise en place des échafaudages nécessaires au ravalement des façades
Suite à une dénonciation de Christian Y... aux services de l'urbanisme en date du 16 avril 1998, un procès-verbal d'infractions a été établi le 24 juillet 1998 pour les travaux du rez de chaussée et classé sans suite par le parquet, les infractions mentionnées dans le procès-verbal ayant été régularisées par une déclaration de travaux ; sur nouvelle plainte de Christian Y..., en date du 20 juin 2000, demandant des investigations complémentaires, les agents des services de l'urbanisme se sont rendus à deux reprises sur les lieux, les 21 juillet et 19 octobre 2000 et ont constaté que la situation était inchangée depuis le procès-verbal du 24 juillet 1998, qu'aucun travaux soumis à autorisation administrative n'avait été réalisé, qu'aucune infraction n'avait été commise ; il n'est pas établi que les infractions constatées, et par la suite régularisées, constituent une faute ayant directement causé un dommage à Christian Y....
Sur la demande de dommages et intérêts de Carole C... épouse Z... :
Le jugement est confirmé par adoption de motifs sur la demande au titre du préjudice matériel, Carole C... épouse Z... ayant déjà obtenu réparation de ce préjudice tel qu'invoqué.
Sur le préjudice moral, l'intimée demande à la fois de confirmer le jugement en ce que le tribunal a condamné Christian Y... à lui payer une somme de " 1 000 euros " et dans le corps de ses conclusions de le condamner à lui payer la somme de 30 000 euros, soit 5 000 euros par année pour la période du premier janvier 1998 au 31 décembre 2003.
Christian Y... a incontestablement causé un préjudice moral à Carole C... épouse Z... par les tracasseries, voire le harcèlement, constitués par les multiples lettres au ton peu amène, même parfois comminatoire (" je vous interdis ") ou accusateur (" vous manquez totalement d'éducation "), portant des revendications injustifiées et auxquelles il a été chaque fois répondu, avec tentative de conciliation, ainsi par les plaintes adressées aux administrations, notamment celle du 20 juin 2000 aux services de l'urbanisme alors que les opérations d'expertise étaient en cours, et par l'obstacle mis à l'avancement des travaux et à leur réception (démontage des échafaudages reconnus par Christian Y... dans un courrier à l'intimée du 28 juillet 1998, lettre de l'entrepreneur BIGAZZI du 4 août 1998 à Carole C... épouse Z... faisant état de cette obstruction, refus de Christian Y... de laisser visiter les locaux à la date de réception prévue du 28 septembre 1998) ; ce préjudice a été justement réparé par le tribunal et il sera fait droit à la demande de confirmation du jugement présentée par l'appelante, la somme de 1 000 euros figurant dans le dispositif des conclusions par suite d'une erreur manifestement matérielle compte tenu de la demande précédant ce dispositif.
Sur les autres demandes :
Carole C... épouse Z... ne démontre pas l'existence d'un préjudice causé par l'actuelle procédure autre que celui d'avoir été dans l'obligation d'engager des frais mais indemnisable sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ; il n'y a pas lieu, en conséquence de lui allouer des dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire.
Christian Y... qui succombe doit supporter les dépens de première instance et d'appel ; à la juste indemnité allouée par le premier juge à Carole C... épouse Z... sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile sera ajoutée celle équitablement fixée à 2 300 euros pour les frais non compris dans les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS,
La Cour statuant par mise à disposition au greffe, publiquement et contradictoirement
Reçoit l'appel,
Confirme le jugement,
Condamne Christian Y... à payer à Carole C... épouse Z... la somme de 2 300 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile en indemnisation des frais non compris dans les dépens d'appel,
Rejette toutes autres demandes des parties,
Condamne Christian Y... aux dépens d'appel, lesquels pourront être recouvrés par l'avoué de l'intimée conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT