COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
8e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 18 NOVEMBRE 2010
N° 2010/ 476
Rôle N° 09/19433
SA Coopérative BANQUE POPULAIRE DU SUD
C/
[V] [G]
Grosse délivrée
le :
à :
SCP BLANC
SCP TOUBOUL
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de FREJUS en date du 05 Octobre 2009 enregistré au répertoire général sous le n° 2009/258.
APPELANTE
BANQUE POPULAIRE DU SUD,
SA Coopérative dont le siége social est [Adresse 2]
représentée par la SCP BLANC-CHERFILS, avoués à la Cour,
assistée par Me Jean-Aimé DURAND, avocat au barreau de TOULON
INTIME
Maître [V] [G],
mandataire judiciaire prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la STE STY PHOTO
né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 4] (54), demeurant [Adresse 3]
représenté par la SCP DE SAINT FERREOL - TOUBOUL, avoués à la Cour
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 14 Octobre 2010 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Isabelle VERDEAUX, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Guy SCHMITT, Président
Madame Catherine ELLEOUET - GIUDICELLI, Conseiller
Madame Isabelle VERDEAUX, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame France-Noëlle ROMAN.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Novembre 2010.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé(e) par mise à disposition au greffe le 18 Novembre 2010,
Signé par Monsieur Guy SCHMITT, Président et Madame France-Noëlle ROMAN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Par acte notarié en date du 4 mars 2008, la BANQUE POPULAIRE DU SUD a consenti à L'EURL STY PHOTO un prêt professionnel de 121.500 euros, garanti par un nantissement sur le fonds de commerce de L'EURL.
Le 20 mai 2008, le fonds de commerce nanti a été cédé par la Société STY PHOTO.
Le 23 juin 2008, L'EURL STY PHOTO a été déclarée en liquidation judiciaire immédiate et Maître [V] [G] a été désignée en qualité de liquidateur.
Le 1er juillet 2008, le Notaire a crédité la Banque de la somme de 36.000 euros conformément à son rang et à la nature de son privilège.
Le 19 janvier 2009, Maître [V] [G], es-qualités de liquidateur de la SARL STY PHOTO, a assigné la Société BANQUE POPULAIRE DU SUD devant le Tribunal de Commerce de Fréjus afin de lui demander de :
- condamner la BANQUE POPULAIRE DU SUD à restituer à la SARL STY PHOTO la somme de 36.000 euros, montant des sommes résultant de la vente du droit au bail de la SARL STY PHOTO ;
- condamner la BANQUE POPULAIRE DU SUD à restituer à la SARL STY PHOTO la somme de 15.601,72 euros résultant des chèques déposés sur le compte de la liquidation judiciaire ;
- dire et juger que la restitution se fera avec intérêts de retard à compter de la mise en demeure du 23 octobre 2008 ;
- condamner la BANQUE POPULAIRE DU SUD à payer la somme de 5.000 euros de dommages-intérêts outre la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
- ordonner l'exécution provisoire.
Par jugement en date du 5 octobre 2009, le Tribunal de Commerce de Fréjus a :
- condamné la BANQUE POPULAIRE DU SUD à restituer la somme de 36.000 euros correspondant aux sommes résultant de la vente du droit au bail de la SARL STY PHOTO .
- condamné la BANQUE POPULAIRE DU SUD à restituer la somme de 15.601,72 euros résultant des chèques déposés sur le compte de la société en liquidation judiciaire ;
- dit que les deux sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 23 octobre 2008 ;
- dit que Maître [G] es-qualités ne fait état d'aucun préjudice particulier de nature à justifier sa demande de dommages-intérêts ;
- condamné la BANQUE POPULAIRE DU SUD à payer à Maître [G] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Par déclaration en date du 30 octobre 2009, la BANQUE POPULAIRE DU SUD a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions signifiées et déposées le 15 septembre 2010, l'appelante demande à la Cour d'Appel de :
- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la BANQUE POPULAIRE DU SUD à restituer à Maître [V] [G] es-qualités la somme de 15.601,72 euros au titre des chèques crédités sur le compte de la SARL STY PHOTO ;
- dire et juger qu'il n'y a pas lieu à restituer la somme de 15.601,72 euros au titre des chèques crédités sur le compte de la SARL STY PHOTO ;
- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la BANQUE POPULAIRE DU SUD à payer à Maître [G], es-qualités, la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
- ramener la condamnation de la BANQUE POPULAIRE DU SUD à payer à Maître [G], es-qualités, la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile à de plus justes proportions ;
- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la BANQUE POPULAIRE DU SUD aux entiers dépens de première instance ;
- faire masse des dépens de première instance ;
- dire et juger qu'ils seront supportés par moitié par chacune des parties en la cause ;
- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a dit que Maître [G], es-qualités, ne fait état d'aucun préjudice de nature à justifier sa demande de dommages-intérêts ;
- condamner Maître [G], es-qualités, aux entiers dépens.
L'appelante estime que la somme de 15.601,72 euros n'a pas à être restituée en vertu de l'article L. 330-1 du Code monétaire et financier, selon lequel les paiements dans le cadre de règlements interbancaires sont valables jusqu'à l'expiration du jour où le règlement est rendu.
Elle rappelle que cette somme provient d'un dépôt de chèques en date du 21 juin 2008, alors que le jugement d'ouverture a été rendue le 23 juin 2008.
Par ailleurs, l'appelante estime ne pas avoir commis de faute et donc ne pas devoir verser de dommages-intérêts.
Par conclusions déposées et signifiées le 19 avril 2010, l'intimée demande à la Cour d'Appel de :
- constater que la BANQUE POPULAIRE DU SUD n'a pas conclu ;
- confirmer purement et simplement le jugement entrepris par cette dernière ;
- ordonner la restitution avec intérêts de droit à compter de la mise en demeure en date du 23 juin 2008 de la somme de 36.000 euros ;
- condamner la BANQUE POPULAIRE DU SUD à la somme de 15.601,72 euros avec intérêts de droit à compter de la mise en demeure en date du 23 octobre 2008 ;
- condamner la BANQUE POPULAIRE DU SUD à 5.000 euros à titre de dommages-intérêts et 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile d'ouverture et, s'agissant de la somme de 15.601,72 euros, elle fait valoir que les chèques ont été déposés le 23 juin 2008, jour du prononcé du jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire, qui rétroagit à minuit.
Dès lors, elle estime que ces encaissements ont été remis postérieurement au jugement d'ouverture et doivent être restitués.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 7 octobre 2010.
MOTIFS DE LA DECISION :
Attendu que l'appel de la BANQUE POPULAIRE DU SUD, qui ne conteste pas devoir rembourser la somme de 36.000 euros à Maître [G], es-qualités, et qui déclare même l'avoir déjà restituée, ne porte en conséquence que sur la restitution de la somme de 15.601,72 euros au titre des chèques crédités sur le compte de la SARL STY PHOTO ;
Attendu s'agissant de la demande de Maître [G], es-qualités, en paiement des intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 23 juin 2008, qu'il y a lieu de constater que la mise en demeure produite est en date du 23 octobre 2008 et que c'est donc à bon droit que le Premier Juge a condamné l'appelante à restituer la somme de 36.000 euros, avec intérêts de droit à compter du 23 octobre 2008 ; que l'intimée sera donc déboutée de sa demande en paiement des intérêts de droit à compter du 23 juin 2008 ;
Attendu que la somme de 15.601,72 euros dont Maître [G], es-qualités, sollicite la restitution pour avoir été portée au crédit du compte de la société débitrice le 23 juin 2008, jour de la liquidation judiciaire, correspond à une remise déplacée de 6 chèques effectuée le 21 juin 2008 auprès de la BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR ainsi qu'il résulte du bordereau de remise en date du 21 juin 2008 ;
Attendu que la rétroactivité à 0 h du jugement de liquidation judiciaire s'impose par application de l'article R 621-4 du Code de Commerce disposant que le jugement d'ouverture prend effet à compter de sa date et conduit à considérer comme nul le paiement d'une créance antérieure effectuée le jour même du jugement d'ouverture, en raison du dessaisissement du débiteur ;
Attendu qu'en matière de chèque, le transfert de la provision est réalisé par l'émission du chèque, c'est-à-dire sa création et sa mise en circulation ;
Qu'en application de l'article L 131-1 du Code monétaire et financier, un chèque est émis et sa provision transférée dès que le tireur s'en est dessaisi au profit du bénéficiaire ;
Qu'en l'espèce, il résulte du bordereau de remise de 6 chèques déplacée auprès de la BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR en date du 21 juin 2008 que le tireur s'en est dessaisi au profit du bénéficiaire et que la provision a été transférée à L'EURL STY PHOTO, à cette date, soit antérieurement au jugement de liquidation judiciaire ; que par conséquent, il n'y a pas lieu à restitution de la somme de 15.601,72 euros, s'agissant d'un paiement antérieur qui a pu se compenser avec le solde débiteur du compte de la société en liquidation judiciaire ;
Que le jugement entrepris sera infirmé de ce chef ;
Attendu dès lors la procédure d'appel ne revêt aucun caractère manifestement abusif, que Maître [G], es-qualités, sera déboutée de sa demande en dommages-intérêts ;
Attendu que la demande en restitution de la somme de 36.000 euros étant justifiée, il n'y a pas lieu à réformer le jugement en ce qu'il a condamné la BANQUE POPULAIRE DU SUD au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux dépens de première instance;
Attendu que l'équité commande d'allouer à la BANQUE POPULAIRE DU SUD la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et de débouter Maître [G], es-qualités, de la demande formée sur ce fondement.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'appelante à restituer la somme de 36.000 € (trente six mille euros), à payer la somme de 1.500 € (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et les entiers dépens.
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'appelante à restituer la somme de 15.601,72 € (quinze mille six cent un euros soixante douze).
Statuant à nouveau,
Déboute Maître [G], es-qualités, de sa demande en paiement des intérêts de la somme de 36.000 € à compter du 23 juin 2008 ; de sa demande en restitution de la somme de 15.601,72 € (quinze mille six cent un euros soixante douze) ; de sa demande en dommages-intérêts, et de sa demande au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Condamne Maître [G], es-qualités, à payer à l'appelante la somme de 1.500 € (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Condamne Maître [G], es-qualités, aux entiers dépens d'appel et autorise la SCP BLANC et CHERFILS, titulaire d'un office d'avoués, à procéder à leur recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT