COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
8e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 06 JANVIER 2011
N° 2011/ 12
Rôle N° 09/21808
[W] [X]
C/
SELARL [M] [O]
Grosse délivrée
le :
à :
SCP SIDER
SCP MAYNARD
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de GRASSE en date du 23 Novembre 2009 enregistré au répertoire général sous le n° 06L1310.
APPELANT
Monsieur [W] [X],
pris en sa qualité de gérant de la SARL IRIS BLEU COM
né le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 3] ([Localité 3]), demeurant [Adresse 4]
représenté par la SCP SIDER, avoués à la Cour,
assisté par Me Emmanuel BRANCALEONI, avocat au barreau de NICE
INTIMEE
SELARL [M] [O],
agissant en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL IRIS BLEU COM,
représentée par son représentant légal en exercice, demeurant [Adresse 2]
représentée par la SCP MAYNARD - SIMONI, avoués à la Cour,
assistée par la SELARL RAYNEL JJ - MILON M, avocats au barreau de NICE substituée par Me Aline DOSDAT, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 17 Novembre 2010 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Catherine ELLEOUET-GIUDICELLI, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Guy SCHMITT, Président
Madame Catherine ELLEOUET - GIUDICELLI, Conseiller
Madame Isabelle VERDEAUX, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame France-Noëlle MASSON.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Janvier 2011.
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé(e) par mise à disposition au greffe le 06 Janvier 2011,
Signé par Monsieur Guy SCHMITT, Président et Madame France-Noëlle MASSON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par jugement en date du 6 octobre 2003, le Tribunal de commerce de GRASSE a ouvert une procédure de redressement judiciaire de la S.A.R.L. IRIS BLEU COM, procédure qu'il a convertie, le 19 novembre 2003, en liquidation judiciaire.
La S.E.L.A.R.L. [M] & [O], désignée en qualité de liquidateur judiciaire a, par acte du 4 octobre 2006, fait assigner M. [W] [X], gérant de la société, pour obtenir sur le fondement des articles L 621-1 et L 624-3 du Code commerce, sa condamnation au paiement de tout ou partie des dettes sociales.
L'affaire a fait l'objet de nombreux renvois et après un renvoi sine die, le président du Tribunal de commerce a rendu, le 2 février 2009, une ordonnance de 'réouverture des débats et de remise au rôle', puis, le 20 mai 2009, par application de l'article R 651-2 du Code de commerce, il a, par une deuxième décision, ordonné au greffier de faire convoquer par acte d'huissier M. [X] à l'audience de la chambre du conseil du 23 septembre 2009.
Par jugement en date du 23 novembre 2009, le Tribunal a, au visa des articles L 631-4 et L 651-2 du Code de commerce, condamné M. [X] à payer l'intégralité des dettes sociales de la S.A.R.L. IRIS BLEU COM, soit 226 754,69 euros.
M. [X] a relevé appel de cette décision.
Dans des conclusions du 25 octobre 2010, tenues ici pour intégralement reprises, il expose ses arguments et développe des moyens, auxquels il sera répondu, pour obtenir la constatation de la nullité de la décision entreprise ou subsidiairement sa réformation.
Dans des conclusions du 5 novembre 2010, tenues aussi pour intégralement reprises, l'intimée demande la confirmation de la décision déférée
Le dossier a été communiqué à M. Le Procureur Général le 2 septembre 2010.
L'ordonnance de clôture est du 10 novembre 2010.
Le 12 novembre 2010, l'appelant a déposé de nouvelles conclusions et de nouvelles pièces et, le 15 novembre 2010, il a demandé à la Cour de révoquer l'ordonnance de clôture.
Par des écritures du 16 décembre 2010, la S.E.L.A.R.L. [M] & [O] s'est opposée à cette révocation.
MOTIFS DE L'ARRÊT :
SUR LA DEMANDE DE RÉVOCATION DE L'ORDONNANCE DE CLÔTURE :
Attendu qu'à l'appui de cette demande M. [X] soutient, d'une part, que l'intimée ayant conclu trois jours avant la clôture, il n'a pas été en mesure de répondre à ces conclusions, et que, d'autre part, il a été contraint de communiquer une pièce postérieurement à la clôture ;
Attendu que la S.E.L.A.R.L. [M] & [O] réplique que, si elle a conclu le 5 novembre ce n'est que l'appelant n'avait, lui, conclu que le 27 octobre 2010 en réponse à ses propres écritures du 25 mai 2010, qu'en réalité la demande de révocation a pour but de permettre d'attraire aux débats une pièce qui n'avait jamais été communiquée jusqu'alors ;
Attendu que la communication aux débats trois jours avant la clôture de conclusions qui ne sont qu'une réponse à des conclusions récapitulatives ne permet pas de considérer qu'il existe en l'espèce une violation du principe du contradictoire et donc une cause grave justifiant la révocation de l'ordonnance de clôture, qu'en conséquence cette révocation ne sera pas prononcée,
qu'elle le sera d'autant moins que les pièces que M. [X] entend produire aux débats sont des ordonnances de juge-commissaire de mai 2004 et décembre 2005, qu'il pouvait donc parfaitement produire avant la clôture ;
SUR LA DEMANDE DE NULLITÉ DE LA DÉCISION DÉFÉRÉE :
Attendu qu'au soutien de sa demande de nullité, M. [X] expose que le jugement est intervenu à l'issu de deux procédures différentes, l'une intentée par le mandataire, l'autre par le greffier, que la première, qui avait fait l'objet d'un renvoi sine die, est toujours en cours et probablement à ce jour couverte par la péremption et que la seconde est nulle puisque le greffier ne pouvait saisir le Tribunal ;
Attendu qu'il apparaît eu vu des éléments de procédure produits que le Tribunal a bien statué dans l'instance introduite par la S.E.L.A.R.L. [M] ET [O] et ce même si, pour régulariser cette procédure, puisque l'article R 651-2 du Code de commerce dans sa rédaction alors applicable exigeait l'audition du dirigeant en chambre du Conseil, le président du Tribunal a ordonné au greffier de faire assigner M. [X] devant cette chambre, assignation qui en l'espèce n'introduit pas l'instance mais vaut convocation du dirigeant,
que dès lors la décision déférée ne sera pas annulée ;
SUR LA DEMANDE DE CONDAMNATION DE M. [X] :
Attendu que l'article L 651-2 du Code de commerce dispose :
'Lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion...',
qu'en l'espèce M. [X] soutient que le Tribunal l'a condamné à tort à combler l'insuffisance d'actif au motif qu'il avait déposé tardivement la déclaration d'état de cessation des paiements, alors même qu'il n'a pas défini à quelle date était intervenue cette cessation des paiements et qu'il n'a pas non plus établi l'existence d'un quelconque lien entre cette faute et le montant de l'insuffisance d'actif, mais que, par contre, c'est à bon droit que ce Tribunal a dit que le détournement d'éléments d'actif de la société et le détournement d'actif bancaire que lui reprochait le mandataire n'étant de toute façon pas antérieurs à l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ne pouvaient pas justifier une condamnation ;
Attendu que le mandataire réplique que le jugement doit être confirmé dans la mesure où les nombreuses créances impayées, notamment celles de l'URSSAF, montrent que l'état de cessation des paiements était bien antérieur à la déclaration du gérant et qu'il n'est pas besoin, pour faire constater cette faute, d'obtenir un report de la date de cessation des paiements, qu'en outre, et même si le tribunal ne l'a pas retenu, il existait bien des actes de détournement d'actif de la part de M. [X] ;
Attendu que c'est à bon droit que le tribunal, qui n'était pas pour cela tenu de modifier la date de cessation des paiements fixée lors de l'ouverture de la procédure, a, au vu des factures impayées produites par le mandataire, mais aussi du bilan établi au 31 mai 2003, qui ne faisait état d'aucune disponibilité et montraient d'importantes pertes d'exploitation, considéré que dès le premier semestre 2003, la société IRIS BLEU COM, n'était plus en mesure de régler ses dettes avec ses actifs disponibles,
que M. [X] ne peut être admis à soutenir, comme il le fait devant la Cour, que la société n'était pas en cessation des paiements puisqu'il existait des commandes, alors que ces commandes n'étaient pas des actifs disponibles et que la société devait pour les satisfaire engager de nouvelles dépenses,
que donc la déclaration d'état de cessation des paiements le 5 septembre 2003 par M. [X], qui avait lui-même reconnu devant le mandataire judiciaire avoir eu des difficultés de trésorerie dès le mois de mai 2003, était tardive puisqu'elle aurait dû, compte tenu de la situation de sa société, intervenir au plus tard le 15 juillet 2003 ;
Attendu que si le liquidateur de la société IRIS BLEU COM soutient aussi que M. [X] a commis des fautes en transférant à une autre société, dont il était actionnaire, la société M.S.O., les opérations de confection et d'édition du journal, SPORT SUD, journal conçu et édité jusqu'en octobre 2003 par la société IRIS BLEU COM, ainsi que le fichier des clients de ce journal, et en réglant des créanciers après le prononcé de la procédure de redressement judiciaire dans le seul but, s'agissant d'imprimeurs, de ne pas compromettre leurs relations avec cette société tierce, ces faits étant postérieurs à l'ouverture de la procédure collective, c'est à bon droit que le tribunal a considéré qu'ils ne pouvaient justifier une condamnation à combler le passif ;
Attendu que M. [X], qui a laissé fonctionner pendant plusieurs mois une société dans des conditions particulièrement déficitaires, est à l'origine de l'intégralité du passif de la dite société, passif constitué pour l'essentiel par les créances sociales et par les créances nées des dépenses engagées pour la confection du journal, photographies, maquettes, mises en page, distribution,
que le seul fait qu'il indique avoir apporté en compte courant une somme de 155 000 euros qui a été d'ores et déjà absorbée ne peut suffire à considérer qu'il y ait lieu de modérer la condamnation prononcée,
que dès lors le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a retenu que l'intégralité de ce passif devait être mise à sa charge ;
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,
DÉBOUTE M. [X] de sa demande de révocation de l'ordonnance de clôture,
CONFIRME le jugement entrepris,
Condamne M. [X] aux dépens, dit ces dépens frais privilégiés de liquidation judiciaire et autorise la S.C.P. MAYNARD SIMONI, titulaire d'un office d'avoué à procéder à leur recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :