COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 15 FEVRIER 2011
B.R.
N° 2011/
Rôle N° 10/02982
SOCIETE MEDITERRANEENNE DE BATIMENT 'SM2B'
C/
SAS GROUPE CONFIANCE
SARL PAROS
Grosse délivrée
le :
à :
réf
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 01 Février 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 08/3205.
APPELANTE
SOCIETE MEDITERRANEENNE DE BATIMENT 'SM2B' poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, y domicilié,1659 [Adresse 6]
représentée par la SCP TOLLINCHI - PERRET-VIGNERON - BARADAT-BUJOLI-TOLLINCHI , avoués à la Cour,
assistée par Me Christine BALENCI, avocat au barreau de TOULON
INTIMEES
SAS GROUPE CONFIANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice, y domicilié, [Adresse 3]
représentée par la SCP LATIL - PENARROYA-LATIL - ALLIGIER, avoués à la Cour,
assistée par Me Olivier DOLMAZON, avocat au barreau de LYON
SARL PAROS prise en la personne de son liquidateur amiable Madame [O] [R] épouse [U], née le [Date naissance 2] 1933 à [Localité 5], demeurant et domiciliée [Adresse 1], demeurant [Adresse 4]
défaillante
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 18 Janvier 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, M.LAMBREY, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Gérard LAMBREY, Président
Monsieur Jean VEYRE, Conseiller
Monsieur Bernard ROUSSEAU, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Février 2011.
ARRÊT
Réputé Contradictoire,
Prononcé(e) par mise à disposition au greffe le 15 Février 2011,
Signé par Monsieur Gérard LAMBREY, Président et Mademoiselle Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Vu le jugement du 1er février 2010 du Tribunal de Grande Instance de Toulon,
Vu la déclaration d'appel formée le 15 février 2010 par la Société Méditerranéenne de Bâtiment,
Vu les conclusions régulièrement déposées le 15 juin 2010 par la SARL Paros,
Vu les conclusions régulièrement déposées le 6 janvier 2011 par la Société Groupe Confiance,
Vu les conclusions régulièrement déposées le 10 janvier 2011 par l'appelante,
MOTIFS DE LA DECISION :
Suivant compromis de vente du 7 novembre 2007 la Société Méditerranéenne de Bâtiment et la SARL Paros vendaient à la Société Groupe Confiance un bien immobilier composé de parcelles de terre situées sur la commune de [Localité 8] (Var), pour un prix total de 9'180'000 € hors taxes, l'acquéreur ayant le projet d'y construire un hôtel, des logements ou résidences de tourisme et des logements sociaux.
Ce compromis de vente était assorti de conditions suspensives dont il était dit qu'elles étaient expressément stipulées dans l'intérêt exclusif de l'acquéreur. Parmi ces conditions figuraient notamment la justification de l'acquisition par acte authentique, par les vendeurs, des parcelles en cause, et l'obtention d'un permis de construire au bénéfice de l'acquéreur.
Le compromis du 7 novembre 2007 devait être régularisé par acte authentique au plus tard le 28 février 2009.
Bien que sommée par les venderesses, par exploit du 24 février 2009, d'avoir à comparaître en l'étude de Maître [N], notaire à [Localité 7], la Société Groupe Confiance ne comparaissait pas et l'acte authentique n'était pas régularisé.
Faisant application des dispositions contractuelles, les sociétés venderesses mettaient en demeure, par courrier du 25 janvier 2008, la Société Groupe Confiance d'avoir à se prononcer sur la renonciation aux conditions suspensives prévues en sa faveur, et plus particulièrement sur la renonciation à la condition suspensive concernant la délibération du conseil municipal de la commune de [Localité 8] devant intervenir de façon définitive au plus tard le 29 février 2008, autorisant une surface hors oeuvre nette minimum de 6840 m², autorisant les constructions à usage d'habitation ou de résidences de tourisme, et supprimant les plafonds concernant le nombre de chambres et de logements.
Il était stipulé qu'à la suite d'une telle mise en demeure, l'acquéreur disposait d'un mois pour faire savoir s'il renonçait aux conditions suspensives prévues en sa faveur, et qu'à défaut pour l'acquéreur de se prononcer dans ce délai, la condition suspensive serait réputée avoir défailli, et le compromis de vente serait caduc.
À la suite de la mise en demeure adressée le 25 janvier 2008, par les sociétés venderesses à la Société Groupe Confiance, celle-ci ne prenait pas position dans le délai requis.
Il en résulte qu'à l'issue de ce délai, le compromis de vente pouvait être considéré comme caduc, et chacune des parties aurait été libérée de toute obligation, mais tel n'a pas été finalement l'intention des parties puisque chacune d'elles a par la suite entendue obtenir la réitération de l'acte.
En effet par courriers des 11 et 28 mars 2008, Me [T] [X], notaire de la Société Groupe Confiance, faisait savoir à Maître [L], que sa cliente demandait la réitération authentique de la convention aux charges et conditions initialement convenues. En outre par acte d'assignation du 2 juin 2008, la Société Groupe Confiance entendait voir le Tribunal de Grande Instance de Toulon, condamner les sociétés venderesses à réitérer en la forme authentique le compromis de vente.
Ces dernières, par voie de conclusion déposée le 27 août 2008 devant le Tribunal de Grande Instance de Toulon, faisaient savoir qu'elles étaient d'accord pour réitérer par acte authentique la vente des biens immobiliers. En outre elles sommaient par acte d'huissier du 24 février 2009 la Société Groupe Confiance à comparaître pour signer l'acte définitif de vente.
Il en ressort que les parties n'entendaient attacher aucun effet au silence gardé par la Société Groupe Confiance au cours du délai d'un mois suivant la mise en demeure du 25 janvier 2008.
Contrairement à ce que soutiennent les sociétés venderesses, si les parties ont entendu ainsi renoncer à la caducité du compromis de vente, la Société Groupe Confiance n'a jamais renoncé aux bénéfices des conditions suspensives. Bien au contraire le notaire de la Société Groupe Confiance, Maître [X], précisait bien dans son courrier du 11 mars 2008, que sa demande de réitération de l'acte authentique devait se faire aux charges et conditions initialement convenues. D'ailleurs dans son courrier suivant du 25 mars 2008 il faisait référence aux conditions suspensives, et plus particulièrement celle relative à l'obtention d'un titre de propriété par les venderesses.
C'est à tort que les sociétés venderesses soutiennent qu'un nouveau contrat s'est formé par novation entre les parties, puisque renonçant à la caducité résultant de la mise en demeure du 25 janvier 2008, les parties n'ont jamais entendu stipuler de nouvelles conditions contractuelles, et n'ont jamais modifié ni supprimer aucune des conditions initialement stipulées, le compromis de vente initial demeurant ainsi leur loi.
Par conséquent la Société Groupe Confiance est fondée à se prévaloir de la non réalisation de conditions suspensives, et plus précisément de la non obtention du permis de construire.
La Société Groupe Confiance a déposé sa demande de permis de construire le 31 mars 2008, comme elle s'y était engagée dans le compromis de vente ; elle a complété son dossier le 23 avril 2008 comme elle y était invitée par la mairie.
Elle obtenait le bénéfice d'un permis de construire tacite le 23 novembre 2008, mais celui-ci était retiré par arrêté du maire du 4 février 2009, cette décision portant refus de délivrance du permis de construire.
Ainsi, alors qu'elle venait d'être sommée de se présenter le 28 février 2009 en l'étude du notaire pour réitérer l'acte authentique, la Société Groupe Confiance, par courrier du 26 février 2009, faisait savoir à la Société Méditerranéenne de Bâtiment qu'elle était dans l'impossibilité de donner suite à l'opération, non pas par volonté délibérée, mais en raison, notamment, de la non réalisation de la condition suspensive liée au permis de construire, du fait de la commune de [Localité 8].
La condition d'obtention d'un permis de construire, comporte nécessairement un aléa, sinon elle n'aurait aucune raison d'être. Il ne peut être reproché à l'acquéreur d'avoir déposé une demande qui ne soit pas considérée, par l'autorité administrative, exactement conforme aux prescriptions d'urbanisme.
L'examen des motifs de refus de permis de construire opposés par le Maire de [Localité 8] à la Société Groupe Confiance, ne révèle aucune faute caractérisée de la part de cette société, montrant qu'elle ait voulu délibérément enfreindre les réglementations d'urbanisme, les critiques énoncées portant sur des insuffisances d'indications quant au raccordement à l'assainissement, à l'emplacement et aux caractéristiques de la voie publique et de la servitude de passage permettant d'accéder aux bâtiments, sur le non respect de la distance de 6 m au moins entre les constructions, alors qu'il est relevé une séparation de 3 m entre l'hôtel et non pas un bâtiment, mais la piscine, sur un dépassement de 17 cm de la hauteur des constructions sur un total de 9 m, sur une insuffisance d'indications sur les espaces plantés et sur les airs de jeu, sur un projet comportant plusieurs parties d'espaces verts communs inférieures à 2000 m², alors qu'une seule partie inférieure à cette superficie était admise, et sur l'avis défavorable émis par la commission départementale d'accessibilité aux personnes handicapées, dont on ne connaît pas les motifs, alors que des avis favorables avaient été émis par la commission départementale d'équipement commercial et par la sous-commission départementale de sécurité pour les établissements recevant du public et les immeubles de grande hauteur.
On constate à la lecture de l'arrêté du maire refusant le permis de construire, que la délibération du conseil municipal qui devait être prise au sujet des autorisations concernant la surface hors oeuvre nette minimum, les constructions à usage d'habitation et la suppression des plafonds du nombre de chambres et de logements, et mentionnée dans la 6e condition suspensive est sans incidence sur le rejet de la demande de permis de construire.
Il ressort de l'ensemble de ces constatations qu'il ne peut être imputée à faute à la Société Groupe Confiance, la non obtention de son permis de construire et donc la non réalisation de cette condition suspensive avant la date limite du 28 février 2009, fixée pour la passation de l'acte authentique.
Cette condition n'étant pas accomplie, la vente doit être considérée comme ne s'étant jamais réalisée, le compromis de vente du 7 novembre 2007 ne produisant dès lors aucun effet et les parties étant libérées de toute obligation sans que l'anéantissement de ce compromis puisse être imputé à l'une ou l'autre des parties.
En conséquence le dépôt de garantie d'un montant de 459'000 €, versé par l'acquéreur doit lui être restitué, et aucune clause pénale ni dommages et intérêts ne peuvent être mise à la charge de l'une ou à l'autre des parties.
Le jugement déféré sera donc confirmé.
La Société Méditerranéenne de Bâtiment succombant dans l'exercice de son recours, elle devra supporter seule les dépens d'appel, et pour la même raison l'équité implique qu'elle indemnise à hauteur de 5000 € la Société Groupe Confiance pour les frais irrépétibles que celle-ci a exposés en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS,
La Cour statuant par mise à disposition au greffe, publiquement et contradictoirement
Reçoit l'appel,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la Société Méditerranéenne de Bâtiment à payer à la Société Groupe Confiance la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que les dépens d'appel sont à la charge de la Société Méditerranéenne de Bâtiment, avec distraction au profit de la SCP Latil-Penarroya Latil-Alligier, avoués associés, pour ceux dont elle a fait l'avance,
Déboute les parties de toutes conclusions plus amples ou contraires.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,