COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1ère Chambre C
ARRÊT
DU 24 FÉVRIER 2011
N° 2011/199
A. V.
Rôle N° 10/17591
[C] [D]
C/
UNION COLLÉGIALE DES CHIRURGIENS ET MÉDECINS SPÉCIALISTES FRANÇAIS 'U.C.C.M.S.F.'
Grosse délivrée
le :
à :
SCP MAYNARD
SCP TOUBOUL
réf 10/17591
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 22 Septembre 2010 enregistrée au répertoire général sous le N° 10/01616.
APPELANT :
Monsieur [C] [D],
pris tant en son nom personnel qu'en sa qualité de Président de l'U.C.C.M.S.F.
né le [Date naissance 2] 1956 à [Localité 5] (MAROC),
demeurant [Adresse 1]
représenté par la SCP MAYNARD - SIMONI, avoués à la Cour,
plaidant par Maître Hervé DE FONTMICHEL, avocat au barreau de GRASSE
INTIMÉE :
UNION COLLÉGIALE DES CHIRURGIENS ET MÉDECINS SPÉCIALISTES FRANÇAIS 'U.C.C.M.S.F.',
dont le siège est [Adresse 3]
représentée par la SCP DE SAINT FERREOL-TOUBOUL, avoués à la Cour,
plaidant par Maître Franck GAMBINI, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 25 Janvier 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Anne VIDAL, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Marie-Claire FALCONE, Président
Madame Anne VIDAL, Conseiller
Madame Marie-Annick VARLAMOFF, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Monsieur Serge LUCAS.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Février 2011.
ARRÊT :
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Février 2011,
Signé par Madame Marie-Claire FALCONE, Président, et Monsieur Serge LUCAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*-*-*-*-*-*
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :
Suivant acte d'huissier en date du 10 septembre 2010, l'Union Collégiale des Chirurgiens et Médecins Spécialistes Français (UCCMSF) a fait assigner devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Grasse M. [D] en vue de lui faire défense, au visa des articles 808 et 809 du code de procédure civile, de se prévaloir de la qualité de président de ce syndicat professionnel, sous astreinte de 10.000 euros par infraction constatée.
Par ordonnance en date du 22 septembre 2010, le juge des référés du tribunal de grande instance de Grasse a déclaré la demande présentée par le Dr [U] pris en sa qualité de président de l'UCCMSF recevable et bien fondée et, ayant constaté l'existence d'un trouble manifestement illicite généré par le comportement de M. [D], a fait interdiction à ce dernier de se prévaloir de la qualité de président de ce syndicat, sous peine d'une astreinte de 5.000 euros par infraction constatée à compter du lendemain de la signification de l'ordonnance et pendant une durée de 3 mois. Il a également condamné M. [D] à payer à l'UCCMSF une somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
M. [D] a interjeté appel de cette décision suivant déclaration au greffe en date du 1er octobre 2010.
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M. [D], aux termes de ses dernières conclusions en date du 9 décembre 2010, demande à la cour :
d'écarter les demandes formulées in limine litis par M. [U] es qualité prétendue de président de l'UCCMSF,
à titre principal,
de dire que l'assignation délivrée par M. [U] se prétendant président de l'UCCMSF est nulle et de nul effet car il ne possède pas la qualité pour agir dont il fait état, et de réformer en conséquence les dispositions de l'ordonnance dont appel sur la recevabilité,
de dire que le juge des référés aurait dû se déclarer incompétent en l'état de nombreuses contestations sérieuses et en l'absence d'un trouble manifestement illicite imputable à M. [D], étant ajouté qu'aucune urgence n'est attachée à la procédure,
à titre subsidiaire,
de rejeter les prétentions de M. [U] ès qualités,
en tout état de cause,
de condamner M. [U] à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Il critique l'ordonnance de référé et conteste les moyens et arguments adverse en faisant valoir, pour l'essentiel :
que le mandat de président du Dr [U] expirait le 21 janvier 2009 puisqu'il n'avait fait que prendre la suite du Dr [H], démissionnaire lors de l'Assemblée générale du 29 mars 2008 ;
Qu'en application du principe d'alternance entre les deux branches du syndicat, c'était à la branche médicale que revenait la présidence à la fin du mandat du Dr [U] ;
qu'à l'Assemblée générale du 6 décembre 2009, le Dr [U] ne s'est pas présenté et qu'il a été décidé d'élire deux coprésidents dans les personnes du Dr [D] et du Dr [B], chacun représentant l'une des deux branches du syndicat ; que le procès verbal de cette assemblée générale en fait foi ;
qu'il a régulièrement convoqué l'Assemblée générale du 4 juillet 2010 et qu'il a été élu président de l'UCCMSF, de même qu'a été formé un nouveau conseil d'administration, le mandat des administrateurs sortants ayant expiré le 21 janvier 2009 ;
qu'il n'a occasionné aucun trouble manifestement illicite en présentant des listes aux élections des URPS sous le nom 'Union Collégiale', s'étant trouvé dans cette obligation puisque le ministère de la Santé avait refusé à l'UCCMSF de présenter des listes, en raison du conflit existant sur la désignation de son président, et qu'il n'a pas contrefait le logo de l'UCCMSF ;
que le contentieux soumis au juge des référés est en réalité un contentieux de fond échappant aux pouvoirs du juge des référés.
L'Union Collégiale des Chirurgiens et Médecins Spécialistes Français (UCCMSF), prise en la personne de son président, M. [U], en l'état de ses dernières écritures déposées le 19 janvier 2011, conclut à la confirmation de la décision déférée et demande à la cour :
de déclarer les écritures et les demandes présentées par M. [D] le 10 novembre 2010 irrecevables en ce qu'il se présente comme le président de l'UCCMSF et en ce qu'il conclut contre M. [U] qui n'est pas dans la cause,
de mettre M. [U] hors de cause,
de faire défense à M. [D] de se prévaloir de la qualité de président de l'UCCMSF sous astreinte de 5.000 euros par infraction constatée,
de le condamner à lui verser une somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle conteste le procès verbal d'assemblée générale du 6 décembre 2009 rédigé par M. [D] et soutient que ce dernier n'a été élu lors de cette assemblée qu'en qualité de coprésident d'une commission chargée de préparer de nouveaux statuts, M. [U] étant toujours président en exercice puisque son mandat était valable jusqu'au 29 mars 2011. Elle appuie sa contestation sur les attestations de divers médecins présents à cette assemblée, notamment celles du Dr [B], et sur le fait que les statuts ne prévoient pas la possibilité d'une coprésidence.
Elle ajoute que M. [D] a, pour les élections aux URPS, déposé des listes au nom d'un syndicat qu'il a créé pour l'occasion et qu'il a dénommé 'Union Collégiale', créant ainsi volontairement une confusion avec l'UCCMSF, allant jusqu'à utiliser le logo de cette dernière ; que, par jugement en date du 18 novembre 2010, le tribunal d'instance de Marseille a, sur le recours formé par le Dr [T], annulé les élections du 2ème collège de l'URPS PACA en raison de cette confusion.
Elle termine en indiquant que M. [D] a continué, après la signification de l'ordonnance de référé, à se prévaloir de la qualité de président, notamment dans le cadre d'actions judiciaires, de sorte qu'elle a intérêt à solliciter la prolongation de l'interdiction qui n'avait été prononcée par le premier juge que pour une durée de 3 mois.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur la recevabilité des écritures de M. [D] :
Attendu qu'il est constant que M. [D] a conclu, le 9 décembre 2010 comme le 7 octobre 2010 auparavant, 'tant à titre personnel qu'en qualité de président de l'Union Collégiale des Chirurgiens et Médecins Spécialistes Français (UCCMSF)' à l'encontre du Dr [U] 'ès qualités, se prétendant président en exercice de l'Union Collégiale des Chirurgiens et Médecins Spécialistes Français (UCCMSF)' ;
Que la cour ne peut que constater que les parties à la procédure, telles que mentionnées dans la déclaration d'appel, en conformité avec les qualités de l'ordonnance de première instance, sont M. [D] , appelant, et l'Union Collégiale des Chirurgiens et Médecins Spécialistes Français, intimée ;
Que M. [D] n'est donc en la cause qu'à titre personnel et que c'est de manière irrégulière qu'il conclut ès qualités de président de l'UCCMSF, alors au surplus que la décision dont il fait appel lui interdit expressément de se prévaloir de cette qualité ; qu'il sera donc constaté que les écritures de M. [D], ès qualités, sont irrecevables ;
Que le Dr [U] n'est pas non plus dans la cause et que seule est intimée l'Union Collégiale des Chirurgiens et Médecins Spécialistes Français représentée par son président en exercice ; qu'il n'y pas lieu de mettre M. [U] personnellement hors de cause puisqu'il n'est pas dans la cause ;
Sur la recevabilité de l'action de l'UCCMSF représentée par M. [U] et sur l'interdiction faite à M. [D] de se prévaloir de la qualité de président :
Attendu que le premier juge a, à juste titre, lié les deux questions puisque la qualité de président de M. [U] exclut celle de président de M. [D] et inversement ;
Que c'est en vain que M. [D] oppose que la question soumise au juge des référés échapperait à ses pouvoirs au regard de l'existence de contestations sérieuses et de l'absence d'urgence, alors, d'une part que le juge des référés, saisi d'une difficulté tenant à la recevabilité de la demande présentée par l'UCCMSF pour défaut de qualité est dans l'obligation de trancher cette difficulté, d'autre part que le syndicat demandeur invoque l'existence d'un trouble manifestement illicite, ce qui exclut que puisse être opposée l'existence de contestations sérieuses, enfin que l'urgence, même si elle n'est pas indispensable, est caractérisée en l'espèce puisque l'UCCMSF s'est trouvée en difficulté, au moment des élections aux URPS, en raison du conflit existant entre ses deux présidents prétendus ;
Attendu qu'il résulte de l'analyse des statuts de l'UCCMSF :
que l'UCCMSF regroupe des syndicats de médecins et que ses statuts prévoient, pour respecter la parité entre les deux branches qui la composent, la branche des généralistes et la branche des spécialistes (PTL), que le conseil d'administration sera composé de 8 membres désignés par chaque branche, plus deux personnalités qualifiées ;
que ce sont les administrateurs, élus pour un mandat de 3 ans, qui élisent le bureau et plus spécialement le président, et non l'assemblée générale ;
que, si la parité entre les deux branches est posée comme principe pour la composition du Conseil d'administration, il n'existe aucune règle écrite concernant la prétendue alternance du président ;
Que la chronologie des faits et la lecture des différentes pièces produites de part et d'autre de la barre, procès verbaux d'assemblée générale ou de conseil d'administration, courriers, mails et attestations permettent de retenir :
que lors des réunions intervenues le 21 janvier 2006, les 18 membres du Conseil d'administration ont été élus par l'assemblée générale et ont ensuite élu les membres du bureau dont le président a été désigné en la personne de M. [H] ;
que, lors du Conseil d'administration du 29 mars 2008 (et non lors de l'assemblée générale), M. [H] a démissionné de ses fonctions de président et M. [U] a été élu à sa place ; que le nouveau bureau constitué de M. [U] président, M. [D] trésorier et M. [I] secrétaire, a été déclaré à la préfecture d'[Localité 4] le 23 septembre 2009 ;
qu'une assemblée générale a été convoquée pour le 6 décembre 2009, sans que la convocation soit produite aux débats, de sorte que l'ordre du jour n'est pas connu ; que la teneur des débats et des décisions de cette assemblée générale sont l'objet des discussions les plus vives entre les parties ;
Que M. [D] prétend avoir été élu par cette assemblée générale, aux côtés de M. [B], comme coprésident de l'UCCMSF, à la suite de quoi il a convoqué une nouvelle assemblée générale le 4 juillet 2010 au cours de laquelle un nouveau Conseil d'administration a été élu qui l'a choisi comme président ; qu'il fait état, pour ce faire, du procès verbal de l'assemblée générale du 6 décembre 2009 rédigé par ses soins puisqu'il était secrétaire de séance l'assemblée générale, mais que la signature de ce procès verbal a été refusée par M. [U], président de séance, de sorte que ce document n'a pas de caractère probant ; qu'il produit également divers communiqués de presse rapportant son élection comme coprésident de l'UCCMSF, mais que la cour note que ces communiqués ne sont que la transcription des déclarations faites par l'intéressé lui-même et la reprise d'un communiqué établi sur le papier à en-tête de l'UCCMSF mais non signé, dont le Dr [B] nie être l'auteur ;
Que l'UCCMSF oppose que, lors de l'assemblée générale du 6 décembre 2009, M. [D] et M. [B] ont été élus coprésidents d'une commission chargée d'élaborer de nouveaux statuts pour avancer dans la recherche de l'autonomie des deux branches en vue d'une présidence partagée et produit diverses attestations de médecins présents lors de cette Assemblée générale confirmant ses dires, notamment celles du Dr [B] ; qu'elle ajoute, à juste titre, que les statuts ne prévoyant qu'un seul président, il ne pouvait être question d'élire deux coprésidents ; qu'il convient en outre de rappeler que l'élection du président, aux termes des statuts, relève des pouvoirs du Conseil d'administration et non de l'Assemblée générale ; qu'il n'est pas envisageable que les membres de l'UCCMSF, et plus spécialement M. [D] qui était assisté à la réunion du 6 décembre 2009 de son conseil, aient pu méconnaître aussi totalement les statuts ;
Qu'enfin la cour relève que M. [D] a convoqué seul l'assemblée générale du 4 juillet 2010, hors le concours de M. [B], pourtant coprésident, mais manifestement tenu à l'écart de ses multiples initiatives destinées à obtenir la présidence de l'UCCMSF ;
Attendu qu'il y a lieu en conséquence de constater, comme l'a fait le premier juge, qu'il n'est pas établi que M. [U] ait perdu sa qualité de président et que M. [D] ait été régulièrement élu coprésident, puis président de l'UCCMSF ;
Qu'il en ressort, en premier lieu, que l'action engagée par l'UCCMSF prise en la personne de M. [U] , son président en exercice, est recevable ;
Qu'il en résulte, en second lieu, que la prétention de M. [D] à se présenter comme le président de l'UCCMSF est manifestement illicite et qu'elle a occasionné un trouble important puisque le ministère de la santé, confronté aux dissensions internes de ce syndicat, a refusé de jouer les arbitres et que l'UCCMSF n'a pu déposer de listes aux élections des URPS, prévues en septembre 2010 ;
Que l'ordonnance déférée sera donc confirmée en ce qu'elle a fait interdiction à M. [D] de se prévaloir de la qualité de président de l'UCCMSF, à peine d'une astreinte fixée à 5.000 euros par infraction constatée à compter de la signification de la décision l'instituant ; que seule la durée de l'astreinte sera modifiée pour être portée à une durée d'une année, la cour constatant que la durée de 3 mois fixée par le juge n'était pas suffisante compte tenu des enjeux du litige et de la ténacité de M. [D] ;
Attendu que l'abondant débat opposant les parties sur la création du syndicat 'Union Collégiale', l'utilisation du logo de l'UCCMSF et la confusion dénoncée entre ce nouveau syndicat et l'UCCMSF est sans intérêt sur le litige soumis à la cour qui est circonscrit à la seule question de l'utilisation indue par M. [D] de la qualité de président de l'UCCMSF ;
Vu les dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Vu l'article 696 du Code de Procédure Civile,
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, contradictoirement,
en matière de référé et en dernier ressort,
Déclare les conclusions déposées par M. [D], ès qualités de président de l'Union Collégiale des Chirurgiens et Médecins Spécialistes Français irrecevables ;
Constate que M. [U] n'est pas en la cause à titre personnel ;
Confirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions, sauf à porter le délai de liquidation de l'astreinte de 3 mois à une année ;
Y ajoutant,
Condamne M. [D] à payer à l'Union Collégiale des Chirurgiens et Médecins Spécialistes Français une somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Le condamne aux dépens d'appel ;
En autorise le recouvrement direct par la SCP de Saint Ferréol et Touboul , avoués, dans les formes et conditions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT