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01/12/2011 | FRANCE | N°10/01321

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre b, 01 décembre 2011, 10/01321


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B



ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

DU 01 DECEMBRE 2011

FG

N° 2011/735













Rôle N° 10/01321



CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE SETE FRONTIGNAN ET MEZE

C/

SA BNP PARIBAS

[P] [A]

[O] [O]

SCP [D]

[T] [G] épouse [W]

SCP [N]

[H] [W]

[J] [W] épouse [K]

SCP [P]

[F] [W] épouse [Z]





Grosse délivrée

le :

à :

SCP BLANC CHERFIL

S



SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL





SCP COHEN GUEDJ



SCP BOISSONNET ROUSSEAU











Sur saisine de la cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation en date du 19 Novembre 2009 enregistré au répertoire général sous le n° ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B

ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

DU 01 DECEMBRE 2011

FG

N° 2011/735

Rôle N° 10/01321

CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE SETE FRONTIGNAN ET MEZE

C/

SA BNP PARIBAS

[P] [A]

[O] [O]

SCP [D]

[T] [G] épouse [W]

SCP [N]

[H] [W]

[J] [W] épouse [K]

SCP [P]

[F] [W] épouse [Z]

Grosse délivrée

le :

à :

SCP BLANC CHERFILS

SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL

SCP COHEN GUEDJ

SCP BOISSONNET ROUSSEAU

Sur saisine de la cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation en date du 19 Novembre 2009 enregistré au répertoire général sous le n° 08/19.173 lequel a cassé et annulé l'arrêt n°2008/400 (RG 06/4016) rendu le 8 août 2088 par la 8ème chambre section C de la cour d'appel d'Aix-en-Provence à l'encontre d'un arrêt rendu le 22 juin 2004 par la cour d'appel de Montpellier (1ère chambre section B).

DEMANDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI

CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE SETE FRONTIGNAN ET MEZE,

prise en la personne de son président en exercice domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 1]

représentée par la SCP BLANC CHERFILS, avoués à la Cour,

assistée de Me Jean-Daniel SIMONET, avocat au barreau de PARIS

DEFENDEURS DEVANT LA COUR DE RENVOI

SA BNP PARIBAS,

dont le siège social est [Adresse 4]

prise en la personne de son représentant légal y domicilié.

représentée par la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL, avoués à la Cour, ayant pour avocat la SCP TROEGELER J.M - GOUGOT M. - BREDEAU-TROEGELER E., avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Maître [P] [A]

Notaire

demeurant [Adresse 5]

SCP [P],

office notarial venant aux droits de la SCP [I] [B] et [P] [A], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 5]

représentés par la SCP BOISSONNET ROUSSEAU, avoués à la Cour,

assistés de de Me Bernard VIAL, avocat au barreau des PYRENEES ORIENTALES.

Maître [O] [O]

Notaire

[Adresse 6]

SCP [D],

venant aux droits de la SCP [R], elle-même venant aux droits de la SCP [O], Notaires associés

[Adresse 6]

Madame [T] [G] épouse [W],

demeurant [Adresse 2]

prise en sa qualité d'ayant droit de feu [X] [W], en son vivant notaire.

SCP [N],

Notaires associés

[Adresse 3]

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège.

Mademoiselle [H] [W],

demeurant [Adresse 7]

prise en sa qualité d'ayant droit de feu [X] [W], en son vivant notaire.

Madame [J] [W] épouse [K],

demeurant [Adresse 11]

prise en sa qualité d'ayant droit de feu [X] [W], en son vivant notaire.

Madame [F] [W] épouse [Z],

demeurant [Adresse 9]

prise en sa qualité d'ayant droit de feu [X] [W], en son vivant notaire.

représentés par la SCP COHEN GUEDJ, avoués à la Cour

assistés de Me Gilles LASRY du cabinet BRUGUES & associés, avocat au barreau de Montpellier.

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 02 Novembre 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur François GROSJEAN, Président

Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller

Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 Décembre 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 01 Décembre 2011,

Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS,

La Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze a initié à partir de 1987 une opération visant à créer un complexe de tourisme hôtelier et de thalassothérapie à Sète.

Elle va s'associer à la Banque Dupuy de Parseval pour constituer la société civile immobilière Cap de la Corniche, dont elle aura 90% du capital, et avec le syndicat générale de l'industrie hôtelière pour constituer la Sarl Cap de la Corniche, dont elle aura 99% du capital.

Les fonds nécessaires au financement de l'opération seront recherchés et obtenus de cinq établissements bancaires, la BNP, le Crédit Lyonnais, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Midi, le Crédit Coopératif et le Crédit Local de France. Ces prêts feront l'objet d'actes sous seing privé.

Par acte sous seing privé du 8 novembre 1988 la BNP a consenti aux sociétés SCI Cap de la Corniche et Sarl Cap de la Corniche une ouverture de crédit d'un montant de 'deux millions d'écus', selon cette référence de panier de monnaies antérieure à l'euro, faisant l'objet d'une utilisation en francs français pour une durée de quinze ans. Ce montant de 2.000.000 d'écus a été converti en décembre 1989 à 13.802.000 francs (2.104.101 €).

Il était prévu que cette ouverture de crédit était conditionnée à une autorisation du Ministère de tutelle, à un cautionnement solidaire de la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze, à une autorisation du conseil municipal de Sète, à une couverture du déficit prévisionnel sur 16 ans à 50% par la commune de Sète, à une promesse d'hypothèque en premier rang, à une promesse de nantissement par la Sarl.

Par acte sous seing privé du 8 novembre 1988 la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze s'est portée caution solidaire de la SCI Cap de la Corniche et de la Sarl Cap de la Corniche vis à vis de la BNP au titre de ce contrat d'ouverture de crédit du même jour.

Par acte authentique reçu le 28 décembre 1992 par M°[P] [A], notaire associé à Perpignan, avec la participation de M°[X] [W], notaire associé à Sète, et de M°[O] [O], notaire associé à Sète, la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze et la Banque Dupuy de Parseval ont cédé l'intégralité de leurs 1.000 parts de la SCI Cap de la Corniche à la société anonyme Thalacap Symbiose pour 998 parts et MM.[Y] et [E] pour 2 parts, pour 1.000 francs au total, ou un franc la part.

Le cessionnaire s'engageait à faire un apport en compte courant de 65 millions de francs ayant pour objet le remboursement du capital restant dû sur les prêts, les cédants s'engageaient à acquitter les échéances de ces prêts.

Par acte authentique reçu le même jour, 28 décembre 1992 par M°[P] [A], notaire associé, la nouvelle SCI du Cap, avec ses nouveaux associés vendait l'ensemble immobilier composant son actif à la société Prominvest Sarl pour 80.055.000 francs.

Le prix en était payé comptant à hauteur de 20.000.000 francs. Le solde de 60.055.000 francs étant payable à terme le 31 décembre 1993, avec une partie de 47.500.000 francs bénéficiant d'un cautionnement solidaire du Comptoir des Entrepreneurs en faveur de la SCI Cap de la Corniche à hauteur de 47.500.000 francs, avec obligation pour cette société d'affecter ce cautionnement au profit des cinq établissements financiers prêteurs, dont la BNP.

Avant que la BNP n'ait demandé à bénéficier de la délégation de caution, les sociétés SCI Cap de la Corniche, Prominvest et Thalacap seront mises en procédure collective, SCI Cap de la Corniche et Sa Thalacap le 30 décembre 1993 et Prominvest le 18 janvier 1994.

Le 13 mars 1996, la BNP a fait assigner la Chambre de Commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze devant le tribunal de grande instance de Montpellier en paiement du solde de l'emprunt, en sa qualité de caution.

Le 21 mai 1997, la Chambre de Commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze a fait assigner Mes [A], [W] et [O], et la SCP [B] - [A], la SCP [N], et la SCP [O] devant le tribunal de grande instance de Montpellier en responsabilité professionnelle et garantie.

Par jugement contradictoire en date du 25 juin 2002, le tribunal de grande instance de Montpellier a :

- rejeté l'exception d'irrecevabilité soulevée par la Chambre de Commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze,

- condamné la Chambre de Commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze, prise en sa qualité de caution, à payer à la S.A BNP PARIBAS la somme de 1.781.298,77 euros outre intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 1993,

- faisant droit à la demande reconventionnelle de la Chambre de Commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze,

- condamné la S.A BNP PARIBAS à payer à la Chambre de Commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze la somme de 1.781.298,77 euros outre intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 1993,

- ordonné la compensation à due concurrence entre les sommes ainsi allouées de part et d'autre,

- rejeté l'ensemble des demandes formées au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- condamné la S.A BNP PARIBAS aux dépens de l'instance lesquels seront recouvrés par la SCP ESCARGUEL ESCARGUEL sur affirmation de ses droits conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile, sauf ceux exposés par M° [P] [A], la SCP [S] [B] [P] [A], M°[X] [W], la SCP [N], M°[O] [O] et la SCP [O] et qui seront mis à la charge de la Chambre de Commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze.

Par déclaration de la SCP CAPDEVILA - VEDEL - SALLES, avoués, en date du 15 juillet 2002, la BNP PARIBAS a relevé appel de ce jugement.

Par déclaration de la SCP TOUZERY - COTTALORDA, avoués, en date du 24 juillet 2002, la Chambre de Commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze a relevé appel de ce jugement.

Par arrêt contradictoire en date du 22 juin 2004, la cour d'appel de Montpellier a :

- reçu en la forme les appels de la SA BNP PARIBAS et de la Chambre de Commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze, mais les dit non fondés,

- confirmé en toutes ses dispositions le jugement déféré,

- fait masse des dépens d'appel qui seront supportés par moitié par la SA BNP PARIBAS et par la Chambre de Commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze,

- dit qu'il sera fait application des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile au profit de la SCP DIVISIA-SENMARTIN, avoués,

- débouté les parties de leurs demandes, plus amples ou contraires.

Sur pourvoi formé par la BNP Paribas, la Cour de cassation, chambre commerciale, par arrêt en date du 29 novembre 2005 a :

- cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il a condamné la société BNP Paribas à payer à la chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze la somme de 1.781 298,77 euros outre intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 1993 et ordonné la compensation, l'arrêt rendu le 22 juin 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remis, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyés devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

- condamné la chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze aux dépens ;

- vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejeté les demandes ;

- dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé.

La Cour de cassation a motivé son arrêt au visa de l'article 1147 du code civile, en jugeant qu'en statuant ainsi, alors que la caution ne saurait reprocher au créancier de ne pas avoir accepté le bénéfice d'une délégation de créance qui ne lui avait été consentie que postérieurement à son engagement, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Par déclaration de saisine de la SCP de SAINT-FERREOL et TOUBOUL, avoués, en date du 28 février 2006, la SA BNP PARIBAS a saisi la cour d'appel d'Aix-en-Provence.

Par arrêt contradictoire en date du 8 août 2008, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a :

- vu l'arrêt de la cour de cassation du 29 novembre 2005,

- infirmé le jugement rendu le 25 juin 2002 par le tribunal de grande instance de Montpellier en ses dispositions relatives à la demande reconventionnelle formée par la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze contre la société BNP Paribas, à la compensation de créances, aux demandes formées au titre de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile et aux dépens,

- et statuant à nouveau,

- rejeté la demande de dommages-intérêts formée par la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze contre la société BNP Paribas,

- déclaré recevable l'appel en garantie formé par la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze,

- rejeté la demande en garantie et la demande en paiement de dommages-intérêts formées par la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze,

- rejeté la demande de dommages-intérêts formée par la SCP [N], M. [O] [O], par la SCP [D] et par les héritiers de M. [X] [W],

- condamné la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze aux dépens de première instance, de l'arrêt cassé et du présent arrêt,

- condamné la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze à payer la somme globale de 3 000 euros à M. [P] [A] et à la SCP [P], la somme de 5 000 euros à la BNP et la somme globale de 5 000 euros à la SCP [N], à M. [O] [O], à la SCP [D] et aux héritiers de M. [X] [W],

- vu l'article 699 du nouveau code de procédure civile,

- autorisé les SCP d'avoués De Saint Ferreol - Touboul, Boissonnet - Rousseau et Cohen - Guedj à recouvrer les dépens du présent arrêt directement contre la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze, si elles en ont fait l'avance sans avoir reçu provision.

Sur pourvoi formé par la chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze, la Cour de cassation, première chambre civile, par arrêt en date du 19 novembre 2009 a :

- cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il rejette l'appel en garantie de la CCI dirigé contre les notaires, l'arrêt rendu le 8 août 2008, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remis, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyés devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée;

- condamné la chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze aux dépens ;

- vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejeté les demandes ;

- dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé.

La Cour de cassation a motivé son arrêt au visa de l'article 1382 du code civil, en jugeant 'qu'en se déterminant ainsi, quand l'opération à laquelle ils prêtaient leur concours et qui, aboutissant à transférer la charge du remboursement des prêts sur les cessionnaires, créait un lien de dépendance entre les actes successifs, imposait aux notaires d'examiner les actes initiaux de prêt et d'appeler l'attention des parties sur leurs stipulations, dont la stipulation litigieuse, la cour d'appel a violé le texte susvisé'.

Par déclaration de saisine de la SCP BLANC et CHERFILS, avoués, en date du 20 janvier 2010, la Chambre de Commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze a saisi la cour d'appel d'Aix-en-Provence.

Par ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 14 octobre 2011, la Chambre de Commerce et d'Industrie de Sète Frontignan et Mèze demande à la cour d'appel, au visa de l'acte de prêt du 8 novembre 1988, de l'acte de cautionnement du 8 novembre 1988, du jugement du tribunal de grande instance de Montpellier du 25 juin 2002 et de l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 22 juin 2004 qui ont condamné la Chambre de commerce en sa qualité de caution à payer à la BNP la somme de 1.781.298,77 € avec intérêts aux taux légal à compter du 28 décembre 1993, des arrêts de la Cour de cassation des 29 novembre 2005 et 19 novembre 2009 qui ont conféré à cette condamnation un caractère définitif, de l'article 1382 du code civil, de :

- dire qu'en ayant laissé les parties aux actes authentiques du 28 décembre 1992 consacrer d'un côté la cession par la Chambre de commerce au groupe Symbiose de la totalité des parts (100%) représentant le capital social de la SCI Cap de la Corniche et de la Sarl Cap de la Corniche, et de l'autre la vente immobilière par la SCI Cap de la Corniche Symbiose à la société Promovest Symbiose à un prix de 67.500.000 francs, dont 47.500.000 francs payables à un terme d'un an (31 décembre 1993) sans les avoir conduits à négocier selon l'usage avec les organismes financiers une substitution de caution au bénéfice de la Chambre de commerce, ni à inviter les organismes financiers à intervenir aux actes pour accepter cette substitution de caution, donner ou confirmer leur accord au

remboursement anticipé organisé par l'acquéreur et le vendeur au bénéfice de la Chambre de commerce, autoriser, notamment par la BNP, la vente immobilière projetée, convenir avec date certaine d'une délégation parfaite par laquelle les créanciers bancaires auraient expressément déclaré, conformément à l'article 1275 du code civil, qu'ils entendaient décharger leur débiteur principal, la SCI Cap de la Corniche Symbiose et, par là-même, la Chambre de commerce, caution, et accepter la société Prominvest Symbiose comme nouveau débiteur, garanti par le cautionnement bancaire du Comptoir des Entrepreneurs, sécurité absolue, ni inviter les organismes financiers à inscrire éventuellement une hypothèque sur les immeubles de la SCI Cap de la Corniche et un nantissement sur le fonds de commerce de la Sarl Cap de la Corniche, pour conférer à l'opération une garantie globale dans l'intérêt de toutes les parties, M°[A], la SCP [P], M°[O], la SCP [D], la SCP [N] et M°[W] ont gravement méconnu leur devoir de conseil impératif et absolu au préjudice de la Chambre de commerce,

- dire en outre qu'en ayant laisse consacrer le cautionnement solidaire du Comptoir des Entrepreneurs au profit de la SCI Cap de la Corniche Symbiose, et non de la Chambre de commerce, au mépris du pouvoir conféré par l'assemblée consulaire du 16 avril 1992 et des dispositions du compromis de vente du 16 avril 1992 dont ils avaient parfaitement connaissance, les notaires ont gravement méconnu leur devoir de conseil impératif et absolu, d'autant plus qu'ils n'avaient pas conduit la Chambre de commerce à être déchargée à l'occasion de la cession de la totalité des parts sociales (100%) dans la SCI Cap de la Corniche des cautionnements qu'elle avait souscrits en faveur de la BNP, du Crédit Agricole, du Crédit Lyonnais, du Crédit Local de France et de la Caisse Centrale de crédit coopératif,

- dire au surplus qu'en ayant négligé de tout mettre en oeuvre afin de conférer à leurs actes authentiques une efficacité pratique, pour faire valider avec date certaine par les cinq organismes bancaires la délégation imparfaite organisée à leur profit et protéger la Chambre de commerce, leur caution non déchargée, des conséquences d'une éventuelle cessation des paiements de la SCI Cap de la Corniche Symbiose, débiteur délégant, et de la société Prominvest Symbiose, débiteur délégué, les notaires ont méconnu gravement leur devoir de conseil impératif et absolu,

- dire que la responsabilité des notaires est entière à l'égard de la Chambre de commerce qui a été laissée seule face à la BNP, au Crédit Agricole et au Crédit Lyonnais en qualité de caution non déchargée,

- en vertu de l'article 16 de la loi n°66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles, déclarer l'appel en garantie des notaires recevable et fondé,

- condamner en conséquence, solidairement, les notaires concernés, leurs héritiers et leurs sociétés civiles professionnelles, à garantir la Chambre de commerce de toutes condamnations prononcées à son encontre en faveur de la BNP par le jugement précité du 25 juin 2002 et l'arrêt désormais définitif du 22 juin 2004 en principal, intérêts, frais judiciaires et extra-judiciaires sans exception et ce à titre de dommages et intérêts,

- donner acte à la Chambre de commerce qu'en exécution partielle de l'arrêt définitif du 22 juin 2004, elle a versé à la BNP en valeur au 26 juin 2007 une somme de 882.700,77 €, à laquelle il convient d'ajouter en vertu de l'arrêt rendu en faveur de la BNP le 16 février 1999 des intérêts au taux légal d'un montant arrêté au 31 octobre 2011 à 90.760,27 €, soit ensemble 973.461,04 €, sauf à parfaire des intérêts à échoir à compter du 1er novembre 2011,

- condamner en outre les notaires, sous la même solidarité, à payer à la Chambre de commerce une somme de 200.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de l'atteinte portée par leurs fautes à son image de marque et du préjudice financier qu'ils lui ont causé par la nécessité dans laquelle elle s'est trouvée d'immobiliser la somme de 1.781.298,77 € avec intérêts aux taux légal à compter du 28 décembre 1993 en vertu de la condamnation prononcée en faveur de la BNP, et de payer à cette banque le 15 mai 2007 un acompte de 882.700,77 €,

- les condamner ensemble à payer à la Chambre de commerce une somme de 67.780 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- déclarer les offices notariaux de Sète tant irrecevables que mal fondés en leur demande reconventionnelle, les en débouter,

- déclarer la BNP tant irrecevable que mal fondée en sa demande reconventionnelle, l'en débouter,

- débouter M°[A] et la SCP [P] de leur demande en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les notaires in solidum, par application de l'article 696 du code de procédure civile aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de la SCP BLANC et CHERFILS, avoués.

Par leurs dernières conclusions, déposées et notifiées le 15 février 2011, M°[P] [A] et la SCP [P], titulaire d'un office notarial à Perpignan, demandent à la cour d'appel de :

- débouter la Chambre de Commerce et d'Industrie de Sète Frontignan et Mèze de l'ensemble de ses demandes,

- condamner la Chambre de Commerce et d'Industrie de Sète Frontignan et Mèze au paiement d'une somme de 7.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Chambre de Commerce et d'Industrie de Sète Frontignan et Mèze aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SCP BOISSONNET ROUSSEAU, avoués.

M°[A] et la SCP [P] font observer que la BNP avait donné son accord à la cession et aux actes établis par les notaires et qu'il ne peut être fait grief aux notaires d'avoir omis d'attirer son attention sur ce point alors qu'elle fait expressément connaître son acceptation à la délégation et que la BNP ne se prévaut d'aucune faute des notaires.

M°[A] et la SCP [P] font remarquer que cette opération a été imaginée non par les notaires, mais par la CCI elle-même, organisme semi-administratif qui avait rédigé des compromis soumis pour examen à leur organisme de tutelle.

La CCI avait explicité dans ces documents sous seing privé qu'elle voulait tout à la fois bénéficier de nouveaux concours financiers tout en voulant conserver les anciens et qu'elle a souhait ne pas rembourser tout de suite la BNP.

Par leurs dernières conclusions, déposées et notifiées le 18 mai 2011, la SCP [N], titulaire d'un office notarial à Sète, M°[O] [O], notaire à Sète, la SCP [D], venant aux droits de la SCP [R], titulaire d'un office notarial à Sète, Mlle [H] [W] Mme [F] [W] épouse [Z], Mme [J] [W] épouse [K] et Mme [T] [G] épouse [W], ayants droit de feu [X] [W], notaire, demandent à la cour d'appel, au visa des articles L.711-1 et L.711-2 du code de commerce, 9, 12 et 700 du code de procédure civile, 1315 et 1382 du code civil, :

tenant le rôle économique de la personne morale de droit public qu'est la CCI de Sète Frontignan et Mèze, organisme chargé d'assurer le développement économique et industriel de sa circonscription,

tenant les accords préalables économiques et financiers négociés par la CCI de Sète Frontignan et Mèze hors la présence de tout notaire pour la mise en place de l'opération initiale, de :

- donner acte aux notaires concluants de ce que dès l'assemblée générale extraordinaire du 16 avril 1992, les seuls élus, hors tout conseil, tout contact et préalablement à la saisine des notaires concluants, ont définitivement pris la décision de cession des parts et à cet effet ont mandaté avec tout pouvoir leur président M.[M] [V],

- dire que les notaires ne sauraient être tenus pour responsables des conséquences de cette décision prise antérieurement à leur saisine,

tenant le choix délibéré de la CCI d'arrêter en 1992 de participer à une opération prévue pour 15 ans et de choisir des cessionnaires ainsi que de nouveaux partenaires suppléant sa caution hors intervention des notaires,

tenant les négociations intervenues entre la CCI de Sète Frontignan et Mèze et ses partenaires concernant les conditions de cession des parts et de vente des immeubles,

tenant la connaissance par la BNPPARIBAS de l'existence du cautionnement du Comptoir des Entrepreneurs et de ses modalités,

tenant le comportement de la BNP qui n'a pas fait valoir ses droits en temps opportun,

tenant les courriers adressés par la CCI à la BNP les 19/11/2002, 3/12/02, 21/12/03 et 23/12/03 sollicitant l'accord de la BNP aux fins de signature des actes de cession,

tenant la réponse conditionnelle de la BNP du 24/12/2002 aux demandes de la CCI aux fins d'obtenir l'accord de la banque à la signature de la cession,

- dire qu'avant la cession intervenue le 28/12/2002 la CCI était parfaitement informée de la nécessité d'obtenir, conformément au contenu des prêts antérieurs, l'accord de la BNP à la vente des immeubles,

- dire en conséquence que le devoir de conseil n'avait pas à s'exercer sur ce point parfaitement connu de la CCI de Sète Frontignan et Mèze,

- dire que les notaires n'ont commis aucune faute,

- dire que les notaires n'étaient pas tenus d'une obligation de conseil et de mise en garde vis à vis de la CCI concernant l'opportunité économique de l'opération commerciale initiée et pilotée par la CCI,

- dire que les notaires n'étaient pas débiteurs envers la CCI d'un devoir de conseil tendant à respecter le contenu des actes de prêts conclus huit mois auparavant hors intervention des notaires, et dont la CCI avait connaissance,

- dire que la CCI ne justifie d'aucun préjudice en relation directe de causalité avec l'intervention des notaires,

- prendre acte de ce que le préjudice matériel allégué par la CCI confine à la perte de chance d'avoir pu négocier avec la BNP une substitution de caution,

- dire que la CCI ne rapporte pas la preuve lui incombant de la perte de chance alléguée,

- dire que la préjudice allégué et qui tient à l'exécution d'un engagement de caution qui lui est personnel est étranger aux offices notariaux concluants,

- prendre acte de ce que la Cci invoque un préjudice matériel indéterminé et non chiffré,

- dire non indemnisable le préjudice indéterminé allégué par la CCI,

- dire que la CCI ne rapporte pas la preuve du paiement auprès de la BNP des sommes auxquelles elle a été condamnée en qualité de caution,

- dire que la CCI de Sète Frontignan et Mèze, personne morale de droit public, ne subit aucun préjudice moral,

- requalifier en dommages et intérêts les indemnités que la CCI de Sète Frontignan et Mèze sollicité à hauteur de 67.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, par application de l'article 12 du code de procédure civile,

- en conséquence, confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Montpellier du 25 juin 2002, débouter la CCI de Sète Frontignan et Mèze de toutes ses demandes,

- subsidiairement, si par impossible la cour retenait la responsabilité des notaires concluants, dire que la CCI de Sète Frontignan et Mèze a commis une faute consistant à avoir sciemment méconnu le contenu des actes de prêts interdisant la revente de l'immeuble sans l'accord de la BNP, et ordonner le partage de responsabilité entre la CCI de Sète Frontignan et Mèze et les offices notariaux concluants, évaluer la responsabilité de la CCI de Sète Frontignan et Mèze à 70% du préjudice allégué,

- en toute hypothèse, condamner la CCI de Sète Frontignan et Mèze à payer à la SCP [D], à la SCP [N] et aux héritiers [W] chacun, la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner la CCI de Sète Frontignan et Mèze à payer à la SCP [D], à la SCP [N] et aux héritiers [W] chacun, la somme de 15.000 € HT sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la CCI de Sète Frontignan et Mèze aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SCP COHEN GUEDJ, avoués.

Par ses conclusions, notifiées et déposées le 4 octobre 2011, la société BNP PARIBAS demande à la cour d'appel de la mettre hors de cause en l'état du caractère définitif à son égard de l'arrêt du 8 août 2008, de débouter toutes parties qui émettraient des demandes à son encontre, de condamner la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze ou tout succombant à lui payer la somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts et de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, de les condamner aux dépens, avec distraction au profit de la SCP de SAINT FERREOL et TOUBOUL, avoués.

L'instruction de l'affaire a été déclarée définitivement close, d'accord des représentants des parties, le 2 novembre 2011, avant les débats.

MOTIFS,

-I) Les actes réalisés par les notaires :

Les actes litigieux à propos desquels la responsabilité des notaires sont deux actes authentiques du 8 décembre 1992.

Le premier acte du 8 décembre 1992 a été reçu par M°[P] [A] avec le concours de M°[X] [W] et de M°[O] [O]. Il s'agit d'un acte de cession de parts.

Le second acte du 8 décembre 1992 a été reçu par M°[P] [A] seul. Ni M°[W], ni M°[O] n'y participent. Il s'agit d'une vente immobilière.

I-1) L'acte de cession de parts du 8 décembre 1992 :

Les 1000 parts de la SCI Cap de la Corniche étaient jusqu'alors à raison de 900 parts par la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze et à raison de 100 parts par la Banque Dupuy de Parseval.

La Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze cède ses 900 parts à une société Thalacap-Symbiose pour 900 F.

La Banque Dupuy de Parseval cède ses 100 parts, 98 à Thalacap-Symbiose pour 98 F, une à M.[E] pour 1 F et une à M.[Y] pour 1 F.

La SCI Cap de la Corniche avait emprunté d'importantes sommes d'argent à cinq établissements bancaires. Ces prêts sont rappelés dans l'acte, 25 millions de prêt du Crédit Local de France,

21 millions de francs du Crédit Lyonnais, 16 millions de francs de la BNP, un million de francs du Crédit Coopératif et cinq millions de francs du Crédit Agricole.

Il est rappelé que la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze était caution de la SCI Cap de la Corniche vis à vis de ces banques.

La Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze, en tant que propriétaire de 90% du capital de la SCI emprunteuse et également caution de cette SCI, était jusque là en première ligne pour assumer la charge du remboursement des prêts.

Grâce à cette cession elle transfère à titre principal cette charge aux cessionnaires.

Cet acte de cession qui revient à transférer la charge des prêts explique la valeur symbolique des parts.

La difficulté était que la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze était également caution vis à vis à vis des cinq banques.

Au vu de ces éléments, il convenait d'examiner les actes de cautionnement.

Il existait un acte cautionnement par la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze de la SCI Cap de la Corniche et de la Sarl Cap de la Corniche vis à vis de la BNP dans le cadre d'un prêt de deux millions d'écus par acte sous seing privé du 8 novembre 1988.

Cet acte de cautionnement n'avait rien de particulier.

Les parties laissent entendre que ce prêt de deux millions d'écus correspond aux 16 millions de francs visés dans le rappel des prêts en cours.

Quant à l'acte d'ouverture de crédit du 8 novembre 1988, il ne comporte pas de disposition particulière relative à un éventuel changement des associés de la société emprunteuse.

L'acte de cession prévoit que le cessionnaire s'engage à faire un apport en compte courant ayant pour objet unique et principal le remboursement du capital restant dû sur le crédit bancaire..ainsi que le remboursement partiel des comptes courants des associés cédants et financé de la manière suivante: 20 millions de francs à ce jour, 45 millions de francs au plus tard le 31 décembre 1993

Corrélativement les cédants s'engagent durant cette période à acquitter pour le compte de la SCI les échéances du crédit bancaire.

Ainsi la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze et la Banque Dupuy de Parseval continuaient d'assurer le paiement des échéances des prêts jusqu'au 31 décembre 1993, date à laquelle le capital correspondant au remboursement leur était remis par les cessionnaires.

Selon ce montage, les prêts pouvaient être remboursés par la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze au 31 décembre 1993.

L'acte de cession de parts prévoit que la SCI Cap de la Corniche, avec ses nouveaux associés, va vendre une partie de l'ensemble immobilier composant son actif à la Sarl Prominvest au prix de 80.055.000 F payable comptant à hauteur de 20.000.000 F et à terme au 31 décembre 1993 pour le solde de 60.055.000 F avec un cautionnement solidaire par le Comptoir des Entrepreneurs pour 47.500.000 F avec obligation pour la SCI Cap de la Corniche d'en déléguer le bénéfice au profit des cinq organismes bancaires, dont la BNP, étant précisé que la délégation au profit des cinq organismes bancaires pourra être modifiée au bénéfice exclusif de la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze mais en tant que le transfert lui aurait été accordé et signifié par voie d'avenant, ce qu'elle devra justifier auprès du cessionnaire, sans que celui-ci ne puisse s'y opposer.

Le deuxième acte, celui de la vente immobilière, est annoncée en cet acte de cession de parts, pour expliquer comment le cautionnement de la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze, sera transféré du moins à hauteur de 47.500.000 F, au Comptoir des Entrepreneurs, une fois cette vente réalisée.

En l'état de la cession de parts, la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze reste caution de la SCI Cap de la Corniche. Il ne pouvait en être autrement alors que les organismes bancaires ne sont pas parties à l'acte.

I-2) L'acte de vente du 8 décembre 1992 :

Cet acte a été reçu par M°[A] seul.

Cet acte est passé entre deux le vendeur, la SCI Cap de la Corniche , et l'acquéreur, la Sarl Prominvest, avec une troisième partie intervenante, le Comptoir des Entrepreneurs.

La Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze n'est pas partie à cet acte.

La SCI Cap de la Corniche vend à la Sarl Prominvest les 362 lots de copropriété de l'ensemble immobilier cadastré [Cadastre 8] à Sète, lieudit [Localité 10], d'une surface cadastrale de

19.528 m², moyennant le prix de 80.055.000 F.

Ce prix est payé en partie comptant pour 20.000.000 F.

Le solde de 60.055.000 F est payable à terme au 31 décembre 1993.

A l'acte intervient le Comptoir des Entrepreneurs qui déclare se déclarer caution solidaire de l'acquéreur la Sarl Prominvest, à l'égard du vendeur la SCI Cap de la Corniche.

Il est également stipulé que la SCI Cap de la Corniche, venderesse, 'déclare .. conformément à l'engagement qu'il a pris dans l'acte d'acquisition des parts sociales de la société civile reçu par le notaire soussigné un instant avant les présentes , s'obliger expressément à affecter le montant du prix payable à terme pour lequel cette caution est délivrée, au profit des cinq organismes bancaires ayant financé le projet immobilier édifié par la société civile Cap de la Corniche, en tant qu'il s'agit du Crédit local de France, de la société de Crédit coopératif, du Crédit Lyonnais, du Crédit Agricole et de la Banque Nationale de Paris. Etant précisé que la délégation au profit des cinq organismes bancaires pourra être modifiée au bénéfice exclusif de la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze mais en tant seulement que le transfert lui aurait été accordé et signifié par voie d'avenant, ce qu'elle devra justifier tant auprès de la société Cap de la Corniche que du Comptoir des Entrepreneurs.'

Compte tenu de ce que la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze n'est pas partie à cet acte, n'a plus de parts dans la SCI venderesse, elle ne peut reprocher au notaire rédacteur d'avoir manqué à son obligation de conseil à son égard à l'occasion de cet acte.

La responsabilité éventuelle des notaires à l'égard de la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze ne peut être recherchée que sur la base de l'acte de cession de parts.

-II) La recherche d'une faute des notaires à l'occasion de l'acte de cession de parts :

Les notaires ont accepté le montage demandé par la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze qui cherchait à se dégager de cette opération qu'elle avait initiée.

Si la cession des parts sociales ne posait pas de difficultés, sauf pour les organismes prêteurs qui auraient pu se plaindre de perdre la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze comme principal associé de leur débiteur la SCI Cap de la Corniche, cette situation était de nature à nuire plus aux banques qu'à la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze. Or les banques, et en tout cas la BNP ne reproche rien aux notaires.

En tout état de cause, même au vu de la cession stricto sensu, la BNP conservait sa caution la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze.

Le point délicat réside dans la volonté de la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze de se retirer de ses engagements de cautionnement.

La seule façon claire de le faire eut été d'obtenir l'accord des banques à ce sujet.

Mais il est bien évident qu'on ne comprendrait pas pourquoi les banques auraient accepté de perdre ce cautionnement. En tout état de cause, cette solution n'a pas été obtenue, pour autant qu'elle ait été tentée, par la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze.

Il en résulte un montage d'une grande complexité, avec revente, caution donnée à l'acquéreur, encore qu'il ne s'est agi que d'une caution pour partie, avec système de délégation permettant à la caution de l'acquéreur de se substituer à la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze.

L'acte d'ouverture de crédit par la BNP à la SCI Cap de la Corniche et à la Sarl Cap de la Corniche comportait une clause selon laquelle 'pendant toute la durée du crédit, l'emprunteur s'interdit, à moins d'accord préalable et écrit de la banque de réaliser tout ou partie de leur patrimoine immobilier ou de l'apporter à une société ou toute personne morale, ou de conférer une hypothèque sur tout ou partie de leurs immeubles'.

Selon ce qui avait été prévu dans l'acte de cession de parts, les prêts pouvaient être remboursés au 31 décembre 1993. Mais il en résultait une situation fragile entre le 8 décembre 1992 et le 31 décembre 1993.

La Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze a demandé à de multiples reprises à la BNP dès avant l'acte du 8 décembre 1992 son autorisation pour cet opération.

Les notaires ont commis une faute en ne s'assurant pas auprès de la BNP que celle-ci acceptait cette opération. Mais c'est la BNP qui en a été victime et non la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze.

Sans attendre les conseils du notaire et dès le 19 novembre 1992 la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze avait contacté par courrier la BNP à ce sujet.

Il en ressort la preuve que la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze avait parfaitement conscience des enjeux.

Le cautionnement résultant de la vente suivant la cession, déjà prévu dans la cession, ne pouvait être fait au profit de la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze. Il ne pouvait être qu'un cautionnement de la Prominvest acquéreur et débiteur du prix de vente.

Le créancier du prix de vente étant le vendeur, ce cautionnement ne pouvait être prévu qu'en faveur du vendeur.

La Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze n'étant pas partie à l'acte de vente ne pouvait être bénéficiaire de ce cautionnement.

Le fait que la société SCI Cap de la Corniche ait été placée en redressement judiciaire avant d'avoir pu s'acquitter de la somme payable au 31 décembre 1993 est un risque inhérent à tout paiement à terme.

C'est la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze, organisme composée de personnes rompues aux affaires, qui a décidé d'une opération qu'elle menait jusqu'en 1992, et dont elle a voulu se désengager ensuite, opération dont l'avenir, par la procédure collective, a montré qu'elle était à haut risque déficitaire.

Ce ne sont pas les notaires qui ont conseillé la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze de mener cette opération. Ce ne sont pas les notaires qui lui ont conseillé de s'engager et d'être caution.

La Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze a eu une autorisation du Ministère de tutelle, une autorisation du conseil municipal de Sète, une couverture du déficit prévisionnel sur 16 ans à 50% par la commune de Sète.

De nombreuses autorités s'étaient ainsi impliquées dans cette opération, et ce hors toute intervention des notaires. La Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze était une partie particulièrement avisée, institution reconnue officiellement comme chargée de l'aide et du suivi des affaires dans son secteur, et particulièrement entourée de conseils institutionnels.

La Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze était fortement engagée financièrement dans cette opération. Cet engagement s'est fait hors toute intervention des notaires.

Elle a cherché à se désengager.

Dans le cadre de cette opération de désengagement, les notaires, officiers ministériels, n'étaient pas spécifiquement les conseils de la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze; ils devaient, de par leur statut, préserver les intérêts de toutes les parties à l'acte et établir un acte respectant les volontés des parties en veillant à ce qu'aucune ne soit lésée.

La succession d'actes en cascade, cession de parts, approvisionnement du compte courant, vente d'immeuble, paiement et caution avec délégation a été appréciée en leurs tenants et aboutissants.

Il existait un risque, compte tenu du paiement à terme, dans le cas où la délégation de cautionnement n'intervenait pas rapidement.

Ce risque a été pris en toute connaissance de cause par la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze qui voulait à tout prix se désengager sans attendre.

Les notaires ont respecté leur devoir de conseil à cet égard.

La procédure collective du cessionnaire était un risque que prenait le cédant et à cet égard une chambre de commerce et d'industrie, dont des membres sont habituellement magistrats consulaires, était particulièrement bien placée pour savoir que ce risque existait et pour le mesurer.

Le préjudice dont se plaint la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze

n'est pas la conséquence des actes notariés.

Les notaires n'ont pas à payer le prix des erreurs de stratégie commerciale ou financière ou des risques sciemment pris par des parties particulièrement avisées et, au surplus, dûment éclairées par eux comme c'était le cas, aux actes qu'ils transcrivent pour formaliser leurs volontés.

Ils ne sont pas garants des opérations commerciales effectués par les parties.

Ils sont seulement débiteurs d'un devoir de prudence, de diligence et de conseil, et doivent respecter les volontés des parties et les dispositions légales.

La preuve d'un manquement à cet égard n'est pas rapportée. Les notaires ont clairement pris connaissance de tous les actes antérieurs sous seing privé liant les parties et c'est bien sur la base de tous ces éléments qu'ils ont donné tous conseils et établi leur acte. Ils se devaient de respecter ce que les parties demandaient, celles-ci dûment éclairées par eux, même si elles étaient particulièrement bien placées pour mesurer les tenants et aboutissants des actes.

Si la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze avait renoncé à cette cession de parts sociales, il n'est pas dit que la situation déficitaire de l'opération ne l'aurait pas rattrapée de toutes façons.

En admettant que les notaires de l'acte de cession aient commis un manquement à leur obligation de conseil à l'égard de la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze, il n'est pas dit que, suite aux conseils donnés, la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze aurait renoncé à cette cession, ou à cette cession dans ces conditions.

Ce préjudice au surplus n'est qu'éventuel ou hypothétique, ou consistant en une perte de chance inexistante alors que la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze ne voulait pas renoncer à tenter de se désengager à tout prix.

En conséquence, la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze sera déboutée de son action en responsabilité des notaires.

Pour autant la procédure ne peut être dite abusive.

La société BNPPARIBAS, présente, ne demande rien au fond et il ne lui est rien demandé.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,

Vu les dispositions non cassées de l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier en date du 22 juin 2004, confirmant le jugement du tribunal de grande instance de Montpellier du 25 juin 2002

Vu les dispositions non cassées de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 8 août 2008,

Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 19 novembre 2009,

Déboute la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze de son action en responsabilité civile contre M°[P] [A], notaire, et la SCP [P], titulaire d'un office notarial à Perpignan, contre la SCP [N], titulaire d'un office notarial à Sète, M°[O] [O], notaire à Sète, la SCP [D], venant aux droits de la SCP [R], titulaire d'un office notarial à Sète, Mlle [H] [W] Mme [F] [W] épouse [Z], Mme [J] [W] épouse [K] et Mme [T] [G] épouse [W], ayants droit de feu [X] [W], notaire,

Condamne la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze à payer en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile les sommes suivantes

- 5.000 € à M°[P] [A], notaire, et la SCP [P], titulaire d'un office notarial à Perpignan,

- 5.000 € à la SCP [N], titulaire d'un office notarial à Sète, M°[O] [O], notaire à Sète, la SCP [D], venant aux droits de la SCP [R], titulaire d'un office notarial à Sète, Mlle [H] [W] Mme [F] [W] épouse [Z], Mme [J] [W] épouse [K] et Mme [T] [G] épouse [W], ayants droit de feu [X] [W], notaire,

Condamne la Chambre de commerce et d'industrie de Sète Frontignan et Mèze aux dépens de première instance et d'appel, et autorise la SCP BOISSONNET et ROUSSEAU avoués, et la SCP Hervé COHEN Laurent COHEN & Paul GUEDJ, avoués, à recouvrer directement contre elle, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, les dépens dont ces avoués affirment avoir fait l'avance sans avoir reçu provision,

Dit que la société BNP-PARIBAS conservera ses frais irrépétibles et ses dépens en la présente instance de renvoi .

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre b
Numéro d'arrêt : 10/01321
Date de la décision : 01/12/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1B, arrêt n°10/01321 : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-12-01;10.01321 ?
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