COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re Chambre B
ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION
DU 12 JANVIER 2012
D.D-P
N° 2012/19
Rôle N° 10/21428
[A] [V] veuve [W]
[P] [W]
[I] [W]
[G] [W]
[X] [W] (MINEURE)
C/
[S] [W]
[R] [T]
Grosse délivrée
le :
à :
SCP BLANC CHERFILS
SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN
SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL
Sur saisine de la cour suite à l'arrêt de la cour de cassation en date du 17 Novembre 2010 enregistré au répertoire général sous le n° K09/70/402 lequel a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l'arrêt n° 2009/242 rendu le 5 mai 2009 par la 1ère chambre A de la cour d'appel d'Aix en Provence à l'encontre d'un jugement du tribunal de grande instance de NICE en date du 3 mars 2008.
DEMANDEURS DEVANT LA COUR DE RENVOI
Madame [A] [V] veuve [W],
née en 1936 à [Localité 10] (LIBAN)
demeurant [Adresse 2]
Monsieur [P] [W]
né le [Date naissance 7] 1965 à [Localité 16] (LYBIE) ,
demeurant [Adresse 2]
Mademoiselle [I] [W]
née le [Date naissance 6] 1968 à [Localité 16] (LYBIE) ,
demeurant [Adresse 2]
Mademoiselle [G] [W]
née le [Date naissance 4] 1978 à [Localité 14] (06),
demeurant [Adresse 2]
Mademoiselle [X] [W] (MINEURE)
née le [Date naissance 4] 1978 à [Localité 14] (06),
demeurant [Adresse 2]
représentés par la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL, avoués à la Cour, assistés de la SCP KLEIN, avocats au barreau de NICE substitué par Me Christelle CIUSSI avocat au barreau de NICE.
DEFENDEURS DEVANT LA COUR DE RENVOI
Monsieur [S] [W]
né le [Date naissance 1] 1989 à [Localité 17] (78),
demeurant Chez Madame [C] - [Adresse 3]
représenté par la SCP BLANC CHERFILS, avoués à la Cour
assisté de Me Béatrice BLAZY-ANDRIEU avocat au barreau de BAYONNE.
Maître [M] [F] [U]
née le [Date naissance 5] 1948 à [Localité 12] (MAROC),
Mandataire judiciaire agissant en qualité d'administrateur provisoire de la succession de Monsieur [H] [W],
[Adresse 9]
représenté par la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avoués à la Cour, ayant pour avocat Me Sylvie MARTIN, avocat au barreau de NICE
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 30 Novembre 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur François GROSJEAN, Président
Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller
Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Janvier 2012.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Janvier 2012.
Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
M.[H] [W], de nationalité libyenne, a épousé en 1964 au Caire Mme [A] [V], leur régime matrimonial étant, à défaut de contrat préalable, celui de la séparation de biens. Ils ont eu quatre enfants : [P], [I], [G] et [X].
M.[H] [W] est décédé le [Date décès 8] 1986 à [Localité 15], laissant pour lui succéder les quatre enfants précités, sa veuve, ainsi qu'un enfant naturel, reconnu, M.[S] [W], issu de sa relation avec de Mme [B] [C].
Le 14 novembre 2003, M.[S] [W] a fait assigner Mme veuve [W], Mlles [I], [G] et [X] [W] et M.[P] [W] devant le tribunal de grande instance de Versailles en nullité d'un testament établi et enregistré par M. [H] [W] auprès de la municipalité d'[Localité 13] en Tunisie le 16 juillet 1985, instituant son épouse comme légataire universelle.
Par jugement contradictoire en date du 3 mars 2008, le tribunal de grande instance de Nice a :
- reçu Me[R] [T] , ès qualités d'administratrice provisoire de la succession (en remplacement de M.[N]), en son intervention volontaire,
- dit que la dévolution de la succession mobilière et immobilière de feu [H] [W] est soumise à la loi française,
- dit que le testament tunisien qui institue [A] [V] veuve [W] légataire universelle ne peut pas être exécuté sur les biens successoraux litigieux situés en France et est donc nul au regard du droit français,
- dit, en conséquence, que la succession de [H] doit être partagée de la manière suivante :
- [A] [V] veuve [W] : un quart en usufruit,
- [P], [I], [G], [X] et [S] [W] un cinquième chacun en pleine propriété,
- ordonné le partage de l'indivision successorale consécutive au décès de [H] [W],
- désigné le président de la chambre des notaires des Alpes Maritimes, ou son délégataire, pour procéder aux opérations de comptes, liquidation et partage,
- dit qu'il appartiendra au notaire commis, assisté de tout évaluateur foncier de son choix, d'évaluer les divers immeubles dépendant de la succession et situés à [Localité 14], [Localité 11] et à [Localité 15],
- dit qu'il appartiendra au notaire d'apprécier si les immeubles dont s'agit sont commodément partageables en nature et si, de l'accord des successibles, ils peuvent faire l'objet d'un partage,
- dit qu'il appartiendra au notaire de déterminer la valeur locative de l'appartement de [Localité 14] [[Adresse 2]] depuis le 14 novembre 1998,
- dit qu'il appartiendra également au notaire, assisté de tout commissaire-priseur de son choix, d'évaluer les biens meubles dépendant de la succession,
- désigné un magistrat du tribunal de grande instance de Nice en qualité de juge commissaire,
- dit que les consorts [W] défendeurs sont débiteurs envers la succession d'une indemnité au titre de leur occupation privative de l'appartement de l'[Adresse 2] à [Localité 14] depuis le 14 novembre 1998,
- déclaré irrecevable la demande en ce qu'elle est dirigée contre M°[L],
- rejeté le surplus des demandes, tant principales que reconventionnelles,
- ordonné l'exécution provisoire,
- et condamné les consorts [W] défendeurs à verser à [S] [W] la somme de
4 000 € par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
Par déclaration en date du 7 mars 2008, Mme veuve [W], Mlles [W] et M. [P] [W] ont relevé appel de ce jugement.
Par arrêt mixte contradictoire en date du 5 mai 2009, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a :
- réformé le jugement entrepris,
- débouté M. [S] [W] de sa demande en nullité du testament de M.[H] [W] du 16 juillet 1985, testament conforme à la loi libyenne, nationalité du testateur,
- invité Mme [A] [V] veuve [W] à faire connaître son choix entre les quotités disponibles entre époux, et les parties à conclure, si elles l'estiment utile, sur les conséquences de ce choix,
- et renvoyé à cet effet l'affaire à prochaine audience.
Un pourvoi a été formé devant la Cour de cassation par M.[S] [W] .
Par arrêt en date du 24 novembre 2009 la cour d'appel d'Aix -en-Provence a ensuite :
- confirmé les dispositions du jugement entrepris ordonnant le partage de l'indivision successorale, désignant le président de la chambre des notaires des Alpes-Maritimes et le président de la troisième chambre du tribunal, disant qu'il appartiendra au notaire commis, assisté de tout évacuateur ou commissaire-priseur de son choix, d'évaluer les biens dépendant de la succession et d'apprécier s'ils sont partageables en nature, et déboutant les appelants de leur demande fondées sur le recel, tendant au rapport à succession de la somme perçue au titre du recel du contrat Via Vie et en production de pièces ;
le réformant pour le surplus et y ajoutant,
' ordonné en tant que de besoin la liquidation le régime matrimonial ayant existé entre M. [H] [W] et Mme [A] [V],
' donné acte à Mme [A] [V] de ce qu'elle opte pour le quart en propriété et des trois autres quarts en usufruit,
' donné acte à Mme [A] [V] de ce qu'elle sollicite l'attribution préférentielle de l'appartement, [Adresse 2],
' dit qu'elle doit indemniser l'indivision pour toutes les dépenses relatives à la jouissance de cet appartement et payées pour le compte de l'indivision,
' dit que M.[S] [W] doit rapporter à la succession de M. [H] [W] la collection d'ivoires et la statuette de tigre en or donnés par M. [H] [W] en 1984,
' débouté les parties du surplus de leurs demandes,
' et déclaré les dépens de première instance et d'appel frais privilégiés de partage et dit qu'ils seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Un second pourvoi, formé contre ce second arrêt, a été déclaré non admis.
En revanche la Cour de cassation, statuant sur le premier pourvoi, par arrêt en date du 17 novembre 2010 a cassé et annulé, dans toutes ses dispositions, l'arrêt mixte rendu le 5 mai 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence, remis la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt, et les a renvoyés devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée, et condamné les consorts [W] aux dépens , et rejeté les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La Cour de cassation reproche à l'arrêt déféré de n'avoir pas satisfait aux exigences de l'article 3 du Code civil en ne recherchant pas si, selon le droit transitoire libyen, la loi appliquée était applicable à un testament rédigé avant son entrée en vigueur.
Par déclaration aux fins de saisine en date du 30 novembre 2010, Mme veuve [W], Mlles [W] et M.[P] [W] (les consorts [W]) ont saisi la cour d'appel de renvoi d'Aix-en-Provence.
Par conclusions déposées le 20 mai 2011 les consorts [W] demandent à la cour :
- de confirmer le jugement parte in qua sur la reconnaissance de l'existence du testament en faveur de Mme Veuve [W],
- de réformer le jugement parte in qua,
- de procéder préalablement la liquidation partage du régime matrimonial,
- d'ordonner la liquidation partage de la succession,
-de leur donner acte de ce qu'ils s'en rapportent à justice concernant les demandes d'expertise,
- de débouter M.[S] [W] de ses demandes,
- de dire et juger valable le testament,
- de constater que Mme veuve [W] a opté pour le quart en pleine propriété et les trois autres quarts en usufruit,
- de prendre acte de ce qu'elle demande l'attribution préférentielle du logement familial de [Localité 14],
- de dire qu'aucune indemnité d'occupation ne sera due,
- de dire que M. [S] [W] s'est rendu coupable de recel successoral concernant la collection d'ivoires, de pierres et de meubles, outre le tigre en or,
- de lui faire injonction de réintégrer ces biens dans la succession, et à défaut de verser une somme correspondant à la valeur actuelle de ces biens,
- de dire que M.[S] [W] ne pourra prétendre à aucun droit sur ces biens,
- de dire que la somme de 62 602 € perçue par M.[S] [W] au titre du contrat d'assurance-vie devra être rapportée à la succession,
- d'enjoindre à M.[S] [W] de révéler à Me[T] ès qualités où se trouvent la paire de canapé, le tapis chinois, le tapis Pemjab, 2 chaises en bois noir époque Napoléon III, une ménagère en inox et plastique, un buffet vaisselier bois laqué, un congélateur et les bijoux répertoriés sur la liste estimative FRED,
- de condamner M.[S] [W] au paiement d'une somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, ceux d'appel distraits.
Par conclusions déposées le 10 juin 2011, M.[S] [W] prie la cour :
A titre principal, vu l'absence de preuve rapportée par la partie adverse sur l'état du droit libyen en vigueur en 1985,
- de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a jugé nul le testament litigieux,
- de constater que la preuve de l'authenticité, voire de la véracité dudit testament, n'est pas rapportée, que l'absence de formalisme ne peut suppléer la preuve d'une évitable volonté de tester,
- et de surseoir à statuer dans l'attente de l' arrêt de la Cour de cassation suite au pourvoi contre arrêt du 24 novembre 2009,
A titre subsidiaire
' d'ordonner le partage de la succession, sur la base d'un quart en usufruit accordé à la veuve, et évalué au jour du décès, et d'un partage égalitaire des biens entre les 5 enfants, en appliquant l'ancienne article 702 du code général des impôts, sous réserve du quart en usufruit du conjoint,
' de confirmer la décision du 3 mars 2008 ans en ce qu'elle a débouté les consorts [W] de leur demande sur le recel successoral, et de leurs demandes reconventionnelles tendant à rapport à succession d'une somme de 68'102 € au titre du contrat VIA-vie,
' de confirmer la décision en ce qu'elle a ordonné une expertise ('),
' de juger que les appelants devront une indemnité d'occupation à compter du décès, la prescription quinquennale ne s'appliquant pas en l'espèce, sur la base du rapport du cabinet EXPERTA pour en déterminer le montant,
' de dire que les appelants supporteront toutes les charges liées à leur jouissance exclusive du bien de [Localité 14],
' de dire que les appelants n'ont pas satisfait à la demande de communication de pièces concernant le livret de famille et les copies intégrales des actes de naissance du défunt et de sa veuve,
' et de condamner Mme veuve [W], Mlles [W] et M. [P] [W] au paiement d'une somme de 15 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, ceux d'appel distraits.
Par conclusions déposées le 19 avril 2011, Me[T], en sa qualité d'administrateur provisoire de la succession de feu [H] [W], s'en rapporte à l'appréciation de la cour, et demande la condamnation de tout succombant aux entiers dépens, ceux d'appel distraits.
L'ordonnance de clôture est datée du 30 novembre 2011.
La cour renvoie aux écritures précitées pour l'exposé exhaustif des moyens des parties.
MOTIFS,
Attendu les consorts [W] font valoir en premier lieu que M. [S] [W] ayant formé successivement deux pourvois en cassation, la cassation de l'arrêt mixte du 5 mai 2009 a entraîné celle de l'arrêt du 24 novembre 2009 et que la cour de renvoi de céans doit donc connaître de l'entier litige ;
Mais attendu qu'en application de l'article 625 du code de procédure civile
« Sur les points qu'elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé.
Elle entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire. » ;
Attendu que l'arrêt du 24 novembre 2009, notamment en ce qu'il a :
' donné acte à Mme [A] [V] de ce qu'elle opte pour le quart en propriété et des trois autres quarts en usufruit,
' donné acte à Mme [A] [V] de ce qu'elle sollicite l'attribution préférentielle de l'appartement, [Adresse 2],
' dit qu'elle doit indemniser l'indivision pour toutes les dépenses relatives à la jouissance de cet appartement et payées pour le compte de l'indivision,
n'est pas la suite, l'application ou l'exécution de l'arrêt du 5 mai 2009 cassé et ne s'y rattache pas par un lien de dépendance nécessaire au sens de l'article 625 du code de procédure civile;
Qu'en effet d'une part les décisions de donner acte sont dépourvues de caractère juridictionnel et ne sont pas susceptibles de conférer un droit à la partie qu'il les a requises et obtenues ; qu'elles ne sauraient dès lors donner lieu à quelque annulation ;que d'autre part, la fixation d'un principe d'indemnisation par Mme [A] [V] de l'indivision au titre de l'occupation du bien indivis est inhérente à sa qualité d'indivisaire ; qu'elle n'est pas conditionnée par la validité ou non du testament litigieux ;
Attendu qu' il s'ensuit le rejet du moyen soulevé et l'irrecevabilité des demandes des consorts [W] et des demandes subsidiaires de M. [S] [W] tendant à voir rejuger ce qui l' a déjà été par la cour de céans en son arrêt définitif en date du 24 novembre 2009, et que la cour doit seulement examiner la demande tendant à l'annulation du testament du 16 juillet 1985 ;
Attendu sur cette question de droit que selon la convention de La Haye du 5 octobre 1961 sur les conflits de loi en matière de forme des dispositions testamentaires, une disposition testamentaire est valable en premier lieu quant à la forme si elle répond à la loi interne du lieu où le testateur a disposé ; que la convention prévoit en second lieu la compétence possible de la loi interne d'une nationalité possédée par le testateur, soit au moment où il a disposé, soit au moment de son décès, et que, selon cette convention, le testament sera enfin valable s'il répond aux formes de la loi interne d'un lieu dans lequel son auteur avait son domicile ou sa résidence habituelle, soit au moment où il a disposé, soit au moment de son décès ; que l'article 6 de la convention précise que l'application des règles de conflit qu'elle établit est indépendante de toute condition de réciprocité et que la convention s'applique même si la nationalité des intéressés ou la loi applicable en vertu des dispositions précitées ne sont pas celles d'un État contractant ; que cette convention, entrée en vigueur en France le 19 novembre 1967 est en conséquence applicable en l'espèce ;
Attendu que la loi tunisienne est en la matière similaire à la loi française, puisque l'article 176 du Code du statut personnel tunisien dispose que « pour être valable le testament doit être fait par acte authentique ou par acte écrit, daté et signé du testateur » ; que l'article 442 du Code des obligations tunisien précise par ailleurs que « l'acte authentique est celui qui a été reçu avec les solennités requises par des officiers publics ayant le droit d'instrumenter dans le lieu où l'acte a été rédigé » ; que l'adjectif « reçu » se dit de l'acte qui est rédigé par un officier public, conformément aux volontés ou aux déclarations des parties contractantes ou comparantes ;
Que le testament litigieux se présente sous la forme d'un document dactylographié, rédigé en arabe, et comportant une signature attribuée, d'après la mention d'homologation de signature, à M. [H] [J] [W], ce qui ne correspond pas aux exigences des textes précités, puisqu'il n'apparaît pas que cet acte ait été rédigé par un officier public, en l'absence de toute mention dans l'acte de nature à l'établir, et que cet acte n'a pas non plus été écrit et daté de la main du testateur ;
Attendu que ce testament ne répond pas non plus aux exigences de la forme de la loi française, qui prévoit que le testament ne peut qu'être olographe, c'est-à-dire écrit en entier, daté et signé de la main du testateur, ou fait par un acte public, ou dans la forme mystique si le testateur ne peut pas parler, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;
Mais attendu que le testament est en revanche valable au regard de la loi libyenne ;
Attendu qu'il résulte en effet d'une consultation auprès de Me [E] [H] [Y] , avocat près la Cour suprême de ce pays qu'en application de l'article 165 du code de procédure civile lybien du 15 novembre 1958 'les tribunaux appliquent le code et les enseignements du rite malekite' ; qu'aux termes de l'article 31 de la loi de réorganisation de la Cour suprême du 25 mai 1982, la jurisprudence de cette Cour suprême 'oblige tous les tribunaux et les autres juridictions de la grande Jamahiriya Libyenne Populaire Socialiste' ; que l'un et l'autre prévoient, et ce, sans changement 'depuis l'institution du code de procédure' en 1958, qu'un testament ne requiert pas de forme particulière ; qu'il est valable en droit libyen s'il est conclu au moyen de tout écrit, déclaration ou signe et qu'il peut être établi par tout moyen de preuve ; et que l'article 4 de la loi numéro 7du 29 janvier 1994 s'est borné à codifier le droit antérieur en édictant que « Le testament est consacré verbalement ou par écrit ou à défaut, si le testateur en est incapable, par une mimique non équivoque [littéralement : 'que l'esprit saisit']. » ) ;
Attendu au cas d'espèce que le testament du 16 juillet 19 85 de M. [H] [W] est par conséquent conforme à la loi nationale à laquelle renvoie la convention de La Haye du 5 octobre 1961; que ce testament a été enregistré auprès de la municipalité d'[Localité 13] en Tunisie, laquelle a procédé à la légalisation de la signature du testateur le jour même, après s'être fait présenter le passeport de M. [H] [W] ; qu'il a donc date certaine ; que l'acte a par ailleurs été enregistré conformément aux prescriptions de l'article 1000 du Code civil français ;
Attendu que M. [S] [W] soutient ensuite que ce testament est contraire à l'ordre public français ; que l'absence de formalisme (une mimique pouvant suffire) est en totale contradiction avec l'esprit du législateur français qui a souhaité sécuriser les successions en faisant du testament un acte solennel ; et que la loi libyenne qui n'offre pas toutes les garanties de sécurité juridique est manifestement incompatible avec l'ordre public français ;
Mais attendu que la question de validité en la forme de l'acte n'intéresse pas l'ordre public ; que le moyen sera donc écarté ;
Attendu en définitive que le jugement déféré qui a déclaré nul le testament de M. [H] [W] doit être réformé ;
Attendu que M. [S] [W] succombant devra supporter la charge des dépens de première instance et d'appel, ainsi que ceux afférents à l'arrêt cassé, en application de l'article 639 du code de procédure civile ; qu'il devra verser en équité la somme totale de 4000 € aux consorts [W] au titre de l'article 700 du code de procédure civile, applicable également tant en première instance qu'en cause d'appel, ne pouvant lui-même prétendre au bénéfice de ce texte;
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,
Vu l'arrêt définitif de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 24 novembre 2009,
Dit n'y avoir lieu de surseoir à statuer,
Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Nice en date du 3 mars 2008 en ce qu'il a dit que le testament tunisien qui institue [A] [V] veuve [W] légataire universel ne peut pas être exécuté sur les biens successoraux litigieux situés en France et qu'il est donc nul au regard du droit français, et qui a dit en conséquence que la succession de [H] [W] doit être partagée de la manière suivante : pour [A] [V] veuve [W] : un quart en usufruit et pour [P], [I], [G], [X], et [S] [W] : un cinquième chacun en pleine propriété et qui a condamné les consorts [W] à verser à M. [S] [W] la somme de 4000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens,
Statuant nouveau
Déboute M. [S] [W] de sa demande en nullité du testament du 16 juillet 1985 de M. [H] [W], et de ses demandes plus amples,
Confirme pour le surplus le jugement déféré,
Y ajoutant
Déclare irrecevables les demandes plus amples des consorts [W], et de M. [S] [W],
Condamne M. [S] [W] à payer à [P], [I], [G], [X] [W] et [A] [V] veuve [W] la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, et ceux de l'arrêt en date du 5 mai 2009 cassé,
Autorise les SCP d'avoués Saint-Ferréol-Touboul et Magnan à les recouvrer directement en application de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT