COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
6e Chambre C
ARRÊT AU FOND
DU 31 JANVIER 2012
N°2012/57
Rôle N° 10/22229
[C] [Z] [J] épouse [F]
C/
[E] [S] [L] [F]
Grosse délivrée
le :
à :la SCP COHEN-GUEDJ
Maître JAUFFRES
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge aux affaires familiales d'AIX-EN-PROVENCE en date du 01 Décembre 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 08/7740.
APPELANTE
Madame [C] [Z] [J] épouse [F]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 11881 du 25/01/2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX EN PROVENCE)
née le [Date naissance 1] 1942 à [Localité 7]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 6]
représentée par la SCP COHEN GUEDJ, avoués à la Cour,
assistée de Maître Paul-victor BONAN, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIME
Monsieur [E] [S] [L] [F]
né le [Date naissance 2] 1940 à [Localité 9]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Jean marie JAUFFRES, avoué à la Cour,
assisté de Maître Martine GATTIGLIO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 29 Novembre 2011, en Chambre du Conseil, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marguerite LECA, Président, et Madame Monique DELTEIL, Conseiller, chargés du rapport.
Madame Marguerite LECA, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Marguerite LECA, Président
Madame Monique DELTEIL, Conseiller
Madame Cécile THIBAULT, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Marie-Christine RAGGINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 Janvier 2012.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 31 Janvier 2012.
Signé par Madame Marguerite LECA, Président et Madame Marie-Christine RAGGINI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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[C] [J] ET [E] [F] se sont mariés le [Date mariage 4] 1966 sans contrat ;
Une enfant majeure née le [Date naissance 5] 1968 est issue de leur union ;
Une première procédure en divorce a été introduite en 1999 mais les époux ont été débouté de leur demande par décision de la Cour d'Appel d'AIX EN PROVENCE en date du 29 Octobre 2008 ;
Par décision en date du 1er Décembre 2010, le Juge aux Affaires Familiales d'AIX EN PROVENCE a :
- prononcé le divorce des époux,
- ordonné la liquidation du régime matrimonial,
- condamné [E] [F] à régler à [C] [J] une prestation compensatoire sous forme d'une rente viagère de 1.200 € par mois,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et dit que les dépens seront supportés par moitié ;
[C] [J] a formé appel de la décision par déclaration au Greffe en date du 13 Décembre 2010 ;
Dans le dernier état de ses écritures signifiées le 24 Août 2011, [C] [J] demande de prononcer le divorce sur le fondement de l'article 233 du code civil mais d'infirmer la décision sur le prestation compensatoire ;
Elle sollicite, à titre principal, le versement de la somme de 304.898 € en capital, outre l'abandon par le mari de ses droits sur l'immeuble commun ayant constitué le domicile conjugal estimé à 427.000 € par l'expert, à titre subsidiaire, une rente viagère mensuelle de 1.750 € outre l'abandon de la part du mari sur l'immeuble commun ;
Elle réclame également 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
[E] [F], dans le dernier état de ses écritures en date du 18 Novembre 2011, demande de :
- débouter [C] [J] de sa demande de prestation compensatoire en capital, outre l'abandon de la part du mari sur l'immeuble commun ayant servi de domicile conjugal ;
- débouter [C] [J] de sa demande de prestation compensatoire à hauteur de 1.750 €, outre l'abandon de sa part sur l'immeuble commun ;
- dire satisfactoire son offre de régler une rente de 1.000 € indexée ;
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- condamner [C] [J] à lui régler 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
MOTIFS /
[C] [J] a formé un appel général de la décision mais n'en critique que les dispositions relatives à la prestation compensatoire ;
La Cour saisie par l'effet dévolutif de l'appel et de l'entier litige confirmera les mesures non contestées en l'espèce le prononcé du divorce et la liquidation des droits des parties ;
' Sur la prestation compensatoire :
[C] [J] fait valoir qu'elle n'a aucun patrimoine, ni mobilier, ni immobilier, ni aucune liquidités à l'exception de sa part dans le bien commun ;
Elle prétend que [E] [F] a dû percevoir des bons anonymes, possède de nombreuses actions Eurocopter et Thomson Multimédia, qu'il dissimule ses opérations financières en faisant des retraits en espèce et a notamment accaparé une somme de 685.000 €, qu'elle est dans une situation précaire, n'a qu'une retraite de 139,49 € par mois et un état de santé déficient ;
[E] [F], quant à lui, affirme qu'il est retraité depuis 1998 et perçoit actuellement une retraite de 3.500 € par mois, qu'il ne possède ni bons anonymes, ni compte titres, ni coffre ; que [C] [J] a disposé librement des finances du couple alors qu'il travaillait à l'étranger et ne s'est jamais expliquée sur la gestion de ses fonds et leur destination dilapidant une partie de cet argent en s'offrant véhicule automobile et bijoux ; qu'elle a prélevé entre Décembre 1995 et Février 1996 une somme de 349.975 F correspondant à la première partie de sa prime de congédiement
Qu'elle a effectué des retraits en espèce et a préparé depuis longtemps son divorce avant l'introduction de la procédure en 1999, détournant les sommes placées sur les comptes communs et sur les comptes de [E] [F] et faisant des virements sur son compte ;
Il prétend qu'elle a acheté et encaissé des bons anonymes, qu'elle sera héritière avec sa soeur d'un bien appartenant à [T] [J] évalué à 226.000 € ;
Il affirme que la valeur de l'immeuble commun fixée à 427.000 € par l'expert n'est plus d'actualité suite à de nombreuses fissures de l'immeuble qu'il n'a pu faire réparer, faute de moyens ;
Il considère que son offre de régler une rente viagère de 1.000 € est plus que raisonnable et fait observer qu'en cas de décès de [E] [F], [C] [J] percevra un pension de réversion de 1.930 € par mois ;
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Aux termes des articles 270, 271 et 272 du code civil, la prestation compensatoire que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre est destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux ; elle est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible;
Pour déterminer les besoins et ressources, il est tenu compte notamment de la durée du mariage, de l'âge et de la santé des époux, de leur qualification et situation professionnelles, des conséquences des choix professionnels faits pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps consacré ou qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, des droits existants et prévisibles, de leur patrimoine, estimé ou prévisible, tant en capital qu'en revenus, après liquidation du régime matrimonial et enfin de leur situation respective en matière de pensions de retraite ;
La situation respective des parties est la suivante :
[C] [J] est âgée de 69 ans ¿, elle n'a travaillé que quelques années, aussi le montant de sa retraite s'élevait, en 2009, à 178,25 € par mois ;
Elle vit avec sa fille dans un appartement dont le loyer s'élève à 957 €, elle acquitte les charges courantes, outre 162 € de mutuelle ;
Il ne peut être tenu compte des éventuels héritages de [C] [J], la Cour n'ayant pas à examiner la vocation successorale des époux qui est totalement aléatoire en l'espèce ;
[E] [F], quant à lui, est âgé de 71 ans, il bénéficie d'une retraite de 3.515 € par mois, il occupe actuellement l'immeuble commun pour lequel il devra acquitter une indemnité d'occupation relativement élevée à la communauté ;
Il fait face aux dépenses habituelles de la vie courante (impôt sur le revenu, taxe d'habitation, taxe foncière) ;
Il possède, avec six autres héritiers, une petite maison occupée par sa soeur aînée, située à [Localité 9] évaluée à 60.000 F en 1986 ;
Le couple marié depuis 45 ans a eu une vie commune de 33 ans. En effet, une première ordonnance de non-conciliation est intervenue le 03 Juin 1999 mais ils ont été déboutés de leur demande en divorce par arrêt de la Cour d'Appel du 29 Octobre 2008;
La communauté est propriétaire d'un bien immobilier sis à [Localité 8] qui a été évalué dans la précédente procédure par l'expert [D] à 427.000 € en 2006 ;
[E] [F] conteste cette somme en faisant valoir que la maison est affectée de nombreuses fissures et produit des évaluations de l'immeuble à moins de 300.000 €;
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Toutefois, ces observations ont été déjà présentées à l'expert qui a maintenu cette évaluation en 2006, alors que les fissures étaient intervenues en 1999, 2003 et 2004 ;
Quoiqu'il en soit, chaque époux à vocation à obtenir la moitié de la valeur de ce bien tout comme des éventuelles actions et de la prime de licenciement de [E] [F];
Chaque époux prétend, par ailleurs, que l'autre a distrait d'importantes sommes de la communauté pendant la vie commune, comme l'a relevé à juste titre le premier juge, il n'y a pas lieu dans le cadre de la procédure en divorce de statuer sur la liquidation du régime matrimonial en l'état des contestations des époux sur la consistance de leur patrimoine et des détournements allégués par chacun d'eux au détriment de la communauté;
Néanmoins, chaque époux est fondé à obtenir une somme minimale de l'ordre de 200.000 € sous réserve d'éventuelles récompenses ;
Si le principe d'une prestation compensatoire n'est pas discuté, [C] [J] n'ayant qu'une très faible retraite et s'étant consacrée à l'éducation de l'enfant, les demandes exorbitantes de [C] [J] formées tant à titre principal qu'à titre subsidiaire, auraient pour effet de priver [E] [F] de tous droits sur un patrimoine qu'il a constitué par son travail ;
Il n'est nullement démontré qu'il soit en mesure de régler une somme importante en capital et son âge lui permet difficilement d'obtenir un prêt, aussi, il y a lieu de confirmer le principe d'une rente viagère allouée à l'épouse qui sera toutefois portée à 1.300 € par mois, étant rappelé qu'en cas de prédécès de [E] [F], [C] [J] bénéficiera d'une pension de réversion confortable ;
' Sur l'article 700 du code de procédure civile :
Il n'est pas contraire à l'équité de laisser à la charge des parties les frais non inclus dans les dépens, les demandes de ce chef seront rejetées ;
' Sur les dépens :
Chaque partie qui succombe partiellement en ses demandes conservera la charge de ses dépens ;
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PAR CES MOTIFS /
LA COUR,
Statuant en Chambre du Conseil, contradictoirement, après débats non publics ;
Confirme la décision déférée à l'exception du montant de la prestation compensatoire sous forme de rente viagère qui sera portée à 1.300 € par mois, l'indexation demeurant inchangée ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens ;
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,