COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
2ème Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 8 FEVRIER 2012
N° 2012/ 54
Rôle N° 10/18462
S.A.R.L. MODE CONCEPT INTERNATIONAL
C/
S.A.R.L. MNS & Co
Grosse délivrée
le :
à :
BADIE
LIBERAS
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de FREJUS en date du 2 septembre 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 2009/4084
APPELANTE
S.A.R.L. MODE CONCEPT INTERNATIONAL, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice
dont le siège social est [Adresse 2]
représentée par la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD & JUSTON, avocats postulants au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constituée aux lieu et place de la SCP DE SAINT FERREOL & TOUBOUL, avoué à la Cour
plaidant par la SCP GASTALDI - LASSAU - VIALE, avocats plaidants au barreau de GRASSE,
INTIMEE
S.A.R.L. MNS & Co, prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par la SCP LIBERAS BUVAT MICHOTEY, avocats postulants au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
plaidant par la SCP LYONNET-BIGOT ET ASSOCIÉS, avocats plaidant au barreau de PARIS substituée par Me Pierre LIBERAS, avocat plaidant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 9 janvier 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de procédure civile, Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Robert SIMON, Président
Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller
Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Mireille MASTRANTUONO
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 8 février 2012.
ARRÊT
Contradictoire
Prononcé par mise à disposition au greffe le 8 février 2012
Signé par Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller, en l'empêchement de Monsieur Robert SIMON, Président, et Madame Mireille MASTRANTUONO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * *
EXPOSÉ DE L'AFFAIRE
Le 25 février 2006, la société MNS a signé un contrat d'agent commercial avec la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL ayant pour objet la commercialisation par la société MNS de tous les produits issus de la collection de la ligne BENCH dans divers départements.
L'article 5 du contrat prévoyait qu'en rémunération de son activité d'agent commercial, la société MNS percevrait une commission de 11 % du montant de la facturation des produits de la ligne BENCH.
Par avenant du 23 novembre 2006, il était prévu que la société MNS percevrait un supplément de commission de 1% sur l'ensemble de son chiffre d'affaires à compter de la saison printemps/ été 2007.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 avril 2007 signée par tous les agents commerciaux et donc par la société MNS, il était indiqué que le taux fixé au contrat du 25 février 2006 et celui de son avenant du 23 novembre 2006 l'avaient été pour apporter une aide dans le financement des collections, et que les signataires acceptaient une diminution du taux de commission de 12 à 10 % avec en contrepartie un engagement par la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL d'appliquer des tarifs identiques à ceux pratiqués dans d'autres pays.
Par courrier du 27 mai 2007, la société MNS indiquait qu'elle refusait les stipulations imposées unilatéralement par la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL, puis par lettre du 11 juin 2007 demandait qu'il soit mis fin au contrat.
Le 26 juin 2007 la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL prenait acte de la démission de la société MNS.
Le 22 octobre 2007 la société MNS répondait qu'elle n'avait pas démissionné et que le contrat avait été rompu unilatéralement par la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL.
La société MNS informait aussi la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL de l'existence d'un nouvel agent sur les secteurs dont elle avait la charge, que celui-ci avait convoqué ses clients et qu'elle estimait être victime d'un détournement de clientèle.
Par courrier du 6 novembre 2008 le conseil de la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL mettait en demeure la société MNS de lui régler la somme de 4.852, 11 euros correspondant à des factures impayées.
Cette mise en demeure étant restée infructueuse, par acte du 22 juin 2009, la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL a fait assigner la société MNS devant le tribunal de commerce de Fréjus pour obtenir paiement de la somme de 4.852,11 euros au titre du solde de factures impayées, outre celle de 20.141,31 euros au titre du non respect du délai de préavis de rupture de deux mois.
La société MNS présentait une demande reconventionnelle par laquelle elle sollicitait le paiement d'une somme de 1.150,88 euros correspondant à des factures impayées et la somme de 18.479 euros pour rupture abusive de son contrat d'agent commercial.
Par jugement du 2 septembre 2010, le tribunal relevant que la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL avait modifié unilatéralement et sans contrepartie le taux de rémunération de la société MNS mais que les pièces versées aux débats ne permettaient pas de faire les comptes entre les parties, a rejeté leurs demandes respectives.
La société MODE CONCEPT INTERNATIONAL a relevé appel de cette décision et soutient que la réduction du taux de commission a été acceptée et qu'en contrepartie elle s'était engagée
à appliquer les tarifs européens et à reprendre le surplus de collection.
Elle soutient donc que le contrat a été rompu à la seule initiative de la société MNS.
La société MODE CONCEPT INTERNATIONAL prétend être créancière d'une somme de 4.163,17 euros qui n'a pas été contestée, et fait valoir qu'elle est fondée à obtenir une indemnité de préavis pour non respect des délais fixés à l'article L. 134-11 du code de commerce.
La société appelante conteste un quelconque détournement de clientèle faisant observer que la société MNS s'est attribuée deux départements ne figurant pas au contrat et pour lesquels elle a été commissionnée.
Elle fait aussi valoir que la demande d'indemnité de clientèle présentée par la société MNS est irrecevable puisque formée au-delà du délai d'une année prévue à l'article L. 134 - 12 du code de commerce.
La société MODE CONCEPT INTERNATIONAL demande donc la réformation du jugement et la condamnation de la société MNS à lui verser la somme de 4.163,17 euros avec intérêts à compter de l'assignation au titre de factures impayées, celle de 20.141,31 euros au titre de l'indemnité de préavis outre la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société MNS réplique que la rupture est imputable exclusivement à la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL qui a réduit les commissions de 12 à 10 %, a suspendu la distribution de la ligne HOOCH et des accessoires BENCH, a octroyé des divers secteurs à d'autres agents au mépris du mandat qu'elle avait reçu, certains secteurs se chevauchant, a changé l'organisation et le départ des tournées, a refusé de lui régler l'intégralité des commissions, et a engagé un nouvel agent qui s'est approprié ses propres clients.
Elle conteste donc les demandes présentées par la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL et demande sa condamnation à lui payer la somme de 1.150,88 euros avec intérêts à compter du 28 septembre 2008 au titre des factures impayées outre capitalisation des intérêts, 18.479 euros pour rupture abusive du contrat d'agent commercial et 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La cour renvoie, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, à leurs écritures précitées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il est constant que par courrier du 23 avril 2007 les modalités de rémunération de l'agent commercial ont fait l'objet d'une modification puisque le taux de commission a été ramené de 12 à 10 %, la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL s'engageant en contrepartie à appliquer les tarifs fixés dans d'autres pays et à prendre en charge ses collections.
Il apparaît que la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL a procédé unilatéralement à une modification du contrat et de l'avenant signé avec la société MNS, et que le mandant n'apporte nullement la preuve que les compensations proposées étaient suffisantes pour permettre le maintien de l'équilibre contractuel.
En conséquence il convient de considérer que la rupture du contrat est imputable à la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL par application de l'article L. 134 - 13 du code de commerce
Il résulte de l'article L. 134 - 12 du code de commerce que l'agent commercial est fondé à obtenir une indemnité compensatrice de réparation en cas de rupture de ses relations avec le mandant et que cette demande doit être formée dans le délai d'un an à compter de la cessation du contrat.
Le contrat d'agent commercial liant la société MNS avec société MODE CONCEPT INTERNATIONAL a cessé le 11 juin 2007.
Ce n'est que dans ses écritures du 5 octobre 2009 prises devant le tribunal de commerce de Fréjus que la société MNS a sollicité une indemnité compensatrice.
Cette demande est donc irrecevable au regard de l'article précité, la société MNS étant déchue de son droit à indemnité.
Le contrat passé entre les parties a pris effet le 25 février 2006.
Il n'est pas démontré une faute grave de la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL dans la rupture du contrat précité pouvant priver la mandant de l'indemnité de préavis auquel il peut prétendre.
Les factures remises aux débats par la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL ainsi que les correspondances échangées entre les parties démontrent que les relations contractuelles entre cette société et la société MNS ont duré plus d'une année.
Il n'est pas contesté par la société MNS qu'elle n'a pas respecté le préavis de deux mois prévu à l'article L. 134-11 du code de commerce.
La société MODE CONCEPT INTERNATIONAL justifie de facturations effectuées pour le compte de la société MNS d'un montant hors taxe de 66.426,28 euros au titre de la saison printemps/été 2007 et de 54.421,58 euros au titre de la saison automne/hiver 2007.
L'indemnité de préavis est donc fixée à la somme de 66.426,28 /12 x 2 soit 20.141,31 euros.
La société MODE CONCEPT INTERNATIONAL justifie d'un montant de factures impayées pour un montant de 4.163,17 euros, montant qui n'est pas contesté. Cette somme produira intérêts capitalisés au taux légal à compter de l'assignation du 22 juin 2009
Les documents remis aux débats par la société MNS ne permettent pas d'établir qu'elle serait créancière de commissions impayées pour 4.852,11 euros ttc ainsi que d'une somme de 506, 88 euros correspondant à une facturation du client «Ambition».
Les demandes présentées par la société MNS sont donc rejetées.
Le jugement attaqué est infirmé en toutes ses dispositions.
La société MNS dont les demandes sont rejetées est condamnée à payer à la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL une somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement attaqué,
Statuant à nouveau,
Dit que la rupture du contrat d'agent commercial passé le 25 février 2006 entre la société MNS et la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL est imputable cette dernière,
Déclare la société MNS, déchue de sa demande d'indemnité compensatrice,
Condamne la société MNS à payer à la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL la somme de 20.141,31 euros au titre de l'indemnité de préavis
Condamne la société MNS à payer à la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL la somme de 4.163,17 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 juin 2009 au titre de factures impayées,
Dit que les intérêts sur la somme de 4.163,17 euros seront capitalisés conformément à l'article 1154 du code civil,
Condamne la société MNS à payer à la société MODE CONCEPT INTERNATIONAL la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples,
Condamne la société MNS aux dépens de première instance et d'appel recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER,Pour LE PRESIDENT empêché,