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21/02/2012 | FRANCE | N°10/15621

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre, 21 février 2012, 10/15621


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

18e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 21 FÉVRIER 2012



N°2012/163















Rôle N° 10/15621







[M] [V]





C/



SA INAER HELICOPTERE FRANCE













































Grosse délivrée le :

à :



Me Catherine FILZI, avocat au barreau de P

ARIS



Me Christian VIGNET, avocat au barreau d'AUXERRE



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 30 Juillet 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 09/935.





APPELANT



Monsieur [M] [V], demeurant [Adresse 2...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

18e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 21 FÉVRIER 2012

N°2012/163

Rôle N° 10/15621

[M] [V]

C/

SA INAER HELICOPTERE FRANCE

Grosse délivrée le :

à :

Me Catherine FILZI, avocat au barreau de PARIS

Me Christian VIGNET, avocat au barreau d'AUXERRE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 30 Juillet 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 09/935.

APPELANT

Monsieur [M] [V], demeurant [Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Catherine FILZI, avocat au barreau de PARIS (146 boulevard Haussmann - 75008 Paris)

INTIMÉE

SA INAER HELICOPTERE FRANCE, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Christian VIGNET, avocat au barreau d'AUXERRE ([Adresse 1]) substitué par Me Béatrice CARLO-VIGOUROUX, avocat au barreau d'AUXERRE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 14 Décembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Guénael LE GALLO, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Gisèle BAETSLE, Président

Monsieur Guénael LE GALLO, Conseiller

Madame Fabienne ADAM, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Lydie BERENGUIER.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Février 2012 prorogé au 21 Février2012.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Février 2012

Signé par Monsieur Guénael LE GALLO, Conseiller pour le Président empêché, et Madame Lydie BERENGUIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES

Engagé par la S.A. PROTEUS en qualité de pilote professionnel d'hélicoptère à compter du 15 juin 2006 et affecté au SAMU de Nice, suivant contrat de travail à durée indéterminée soumis à la convention collective nationale du personnel navigant technique des exploitants d'hélicoptères du 13 novembre 1996, Monsieur [M] [V] a été licencié pour faute lourde par lettre du 7 juillet 2009.

Contestant la légitimité de son licenciement, Monsieur [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Toulon, par requête reçue le 24 juillet 2009, aux fins de voir annuler l'avertissement notifié le 5 juin 2009, voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et voir condamner l'employeur à lui payer plusieurs sommes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail, outre une indemnité pour frais irrépétibles, ainsi qu'à lui remettre les documents sociaux conformes.

Par jugement du 30 juillet 2010, le conseil de prud'hommes a condamné la société INAER HELICOPTER FRANCE, nouvelle dénomination de la société PROTEUS, à payer à Monsieur [V] la somme de 203,42 € au titre des vols effectués au mois de janvier 2008 en période de réquisition, a débouté le salarié du surplus de ses demandes et l'a condamné à payer à l'employeur la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ailleurs, s'il a omis d'en faire mention au dispositif de sa décision, le conseil de prud'hommes a énoncé dans l'exposé de ses motifs qu'il y avait lieu d'annuler l'avertissement du 5 juin 2009, mais de rejeter la demande indemnitaire afférente.

Ayant interjeté appel de cette décision le 16 août 2010, Monsieur [V] a fait plaider à l'audience des conclusions écrites dans lesquelles il demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a annulé ledit avertissement, de le réformer pour le surplus et de condamner la société INAER HELICOPTER au paiement des sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter de la demande, capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du code civil, outre à la remise des bulletins de paie, d'un certificat de travail et d'une attestation Assédic conformes :

dommages et intérêts au titre de l'avertissement annulé 10.000,00 €

indemnité conventionnelle de licenciement 8.328,00 €

indemnité compensatrice de préavis 9.892,30 €

indemnité de congés payés sur préavis 989,23 €

indemnité compensatrice de congés payés (5,75 jours) 615,57 €

indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse 85.000,00 €

salaire de janvier 2008 2.940,90 €

dommages et intérêts pour non-paiement du salaire 5.000,00 €

indemnité compensatrice pour heures d'astreinte 24.011,49 €

congés payés afférents 2.401,15 €

indemnité compensatrice de jours de congés payés supplémentaires904,00 €

article 700 du code de procédure civile 5.000,00 €

Il fait valoir essentiellement :

- qu'à partir du 15 mai 2009, l'employeur, ne tenant aucun compte des avis de l'inspection du travail, s'abstenant de consulter les représentants du personnel et se prévalant d'un accord atypique illicite, est revenu à sa pratique antérieure consistant à déduire les pauses repas du temps de permanence des pilotes, afin de conserver le cycle de travail prévu à l'article 3.2 de l'annexe II de la convention collective et d'éviter le passage au cycle de l'article 3.3, qui aurait nécessité de nouvelles embauches pour ne pas dépasser le seuil annuel de 2000 heures de service, alors que cette organisation du travail était contraire aux dispositions conventionnelles et dangereuse, en ce qu'elle conduisait à dépasser de deux heures l'amplitude maximale du temps de permanence ;

- qu'en application de l'article L. 422-2 du code de l'aviation civile, le commandant de bord est personnellement responsable des missions qui lui sont confiées et que le règlement intérieur de l'entreprise imposait précisément à chaque salarié de signaler toute situation de travail qu'il estimait dangereuse ;

- qu'il était donc fondé à cesser son service à 20 heures au lieu de 22 heures, le 11 juin 2009, et que, contrairement aux dires de l'employeur, il n'a pas averti le SAMU dans le but de nuire à l'entreprise, mais pour permettre la continuité du service public.

Sollicitant, dans les motifs de ses conclusions écrites soutenues oralement à l'audience, la réformation du jugement déféré en ce qu'il a considéré que l'avertissement du 5 juin 2009 devait être annulé, mais demandant in fine à la cour de confirmer ce jugement 'en toutes ses dispositions' et de condamner l'appelant à lui payer la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, la société intimée réplique principalement :

- que 'les permanences étaient interrompues pendant les pauses repas', ce qui ramenait à 12 heures le temps de travail effectif pour une permanence comprise entre 8 heures et 22 heures,

et '(qu') au-delà de cette discussion sur la durée des permanences', Monsieur [V] n'a jamais dépassé le seuil de 2000 heures annuelles de travail ;

- que si Monsieur [V] estimait que les consignes résultant des notes de service et de l'accord atypique du 30 mars 2009 étaient 'inopposables ou illégales', il lui appartenait 'de saisir les instances compétentes et non de se faire justice à lui-même' ;

- qu'en exerçant des pressions sur l'employeur, dans le but de le 'faire plier' et de lui 'faire admettre sa propre interprétation des dispositions légales ou réglementaires, ou même collectives, sans aucune considération pour le service auquel il était affecté', en décidant en toute connaissance de cause de cesser son service à 20 heures, contraignant ainsi l'employeur à faire appel en urgence à un autre pilote pour prendre sa relève, et en informant directement le SAMU de Nice de cet abandon de poste, alors que la société s'était engagée sur une programmation 8h/22h, Monsieur [V] a volontairement nui à la société et qu'il a ainsi commis une faute lourde.

MOTIFS DE L'ARRÊT

- sur la recevabilité de l'appel

La recevabilité de l'appel n'est pas discutée. Les éléments du dossier ne conduisent pas la cour à le faire d'office.

- sur la cause du licenciement

Conformément à l'article L. 1235-1 du code du travail, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de l'intéressé dans l'entreprise pendant la durée du préavis. Il incombe à l'employeur qui l'invoque d'en apporter la preuve.

La faute lourde est celle commise dans l'intention de nuire à l'employeur ou à l'entreprise.

En l'espèce, Monsieur [V], mis à pied à titre conservatoire par lettre du 11 juin 2009 et convoqué par lettre du 23 juin 2009 à un entretien préalable fixé au 3 juillet 2009, a été licencié pour faute lourde par lettre du 7 juillet 2009, signée par Monsieur [E], directeur général délégué, ainsi libellée :

'(...) Les fautes qui vous sont reprochées sont les suivantes :

- Vous avez décidé unilatéralement de ne plus respecter les consignes compagnie et d'arrêter votre service à 20 heures en place de 22 heures.

- Vous en avez informé directement notre client, service public SAMU de NICE, en sachant que cela est contraire au contrat nous liant à l'hôpital, avec la volonté de nuire à notre entreprise et de faire pression sur nous.

- Suite au courrier que vous nous avez envoyé le 28 mai 2009 et que nous avons reçu le 4 juin 2009, je vous avais informé des conséquences si vous persistiez dans cette voie.

- Vous avez fait en sorte par votre attitude, en prenant directement notre client à témoin, de commettre volontairement une faute afin de nous obliger à vous licencier.

- Lors de l'entretien du 3 juillet 2009, vous m'avez confirmé, devant Monsieur [B], Directeur des Opérations aériennes, que vous ne suivriez pas les consignes de notre entreprise et que, si nous vous remettions à votre poste, vous continueriez d'arrêter les missions de secours à 20 h au lieu de 22 h.

Pour toutes les raisons évoquées ci-dessus, vous ne nous laissez pas le choix. Nous avons décidé, étant donné le caractère volontaire et prémédité de votre faute, avec le but de nuire à notre entreprise, de vous licencier pour faute lourde privative de toutes indemnités et de préavis. (...)'

Pour preuve des griefs énoncés dans cette lettre, la société PROTEUS se prévaut essentiellement des pièces suivantes, versées aux débats par l'une ou l'autre partie :

- le règlement intérieur de l'entreprise prévoyant en son article 14 que 'les salariés doivent respecter les horaires de travail fixés par la direction' et que 'chaque salarié doit se trouver à son poste aux heures fixées pour le début et pour la fin du travail' ;

- la lettre adressée par Monsieur [E] à Monsieur [V] et aux autres salariés concernés, le 16 décembre 2008, leur demandant de prendre position sur le régime conventionnel de travail qu'ils souhaitaient voir appliquer, dans les termes suivants :

'Après avoir présenté, dans son ensemble, les mesures que je compte appliquer pour le planning, au Délégué du Personnel, qui se montre très réservé, vous en trouverez ci-dessous le détail.

Je suis convaincu, comme beaucoup d'entre vous, que le rythme de 7 jours est le plus favorable pour vous et pour l'entreprise.

Je vous ai déjà exposé lors d'un précédent courrier nos contraintes liées au choix du travail selon l'article 3.2 ou 3.3.

Le 3.3 nous impose un rythme de travail maximum de 7 jours et une permanence au plus de 14 heures par jour ; ce qui nous oblige, afin de garder une souplesse pour les remplacements imprévus, de réduire le temps de permanence à 5 jours.

Le 3.2 nous impose un rythme de travail maximum de 12 jours et une permanence au plus de 12 heures par jour ; ce qui nous permet, tout en gardant une souplesse pour les remplacements imprévus, de rester à un temps de permanence de 7 jours.

Dans les deux cas, le temps de permanence annuel tous services confondus n'excède pas 2000 heures par an.

Notre et votre problème est que pour nos clients SAMU la permanence est de 8 heures à 22 heures, ce qui représente 14 heures par jour. Pour répondre à cette demande et rester à un rythme de travail de 7 jours, la seule solution est de travailler selon le régime 3.2, mais qui nous limite à 12 heures par jour.

Voilà la raison pour laquelle je vous propose, en toute légalité, de ne pas comptabiliser les deux heures de pause journalière en temps de travail ce qui réduit la permanence à 12 heures.

Dans tous les cas cela ne change rien pour vous, vous travaillerez toujours moins de 2000 heures par an, vous restez au rythme actuel, nous conservons l'augmentation du nombre de pilotes ce qui facilite les remplacements et nous conservons les primes SAMU du 3.3.

Le gros avantage pour la majorité d'entre vous, est la non augmentation du nombre de rotations et les 7 jours correspondent à une semaine civile.

Il me semble que ne pas accepter ce mode de fonctionnement serait pénalisant pour tous les pilotes.

Quelle que soit la solution que vous choisissez cela ne pénalisera en rien l'entreprise ; mais si vous choisissez de rester au 3.3, le rythme de travail passera en 5 jours et cela est non négociable.

Etant donné les relations pour le moins difficiles que j'entretiens avec votre Délégué du Personnel et pour certains avec votre Délégué Syndical, je préfère vous demander directement votre avis.

Je vous demande donc de prendre position et de nous retourner le formulaire joint par courrier, fax ou mail. J'informerai le Délégué du Personnel du résultat de vos réponses et en fonction soit nous appliquerons le 3.3 avec un rythme de travail de 5 jours, soit je proposerai au Délégué Syndical un accord d'entreprise prenant en compte le souhait majoritaire.

Répondez nombreux et rapidement, la mesure devant s'appliquer début 2009.'

- '(l') Accord Atypique Personnel Navigant SAMU', daté du 31 mars 2009 et signé par Monsieur [E], ainsi libellé :

'Suite à la consultation du 16 décembre 2008, concernant l'application de l'article 3.3 ou 3.2, vous vous êtes prononcés à 86,36 % en faveur de l'application de l'article 3.2.

En conséquence, j'ai décidé de répondre favorablement à votre attente dans les conditions suivantes.

- A compter du 9 avril 2009, le personnel navigant SAMU travaillera selon l'article 3.2.

- Les permanences seront les suivantes :

Activité entre 08h00 et 22h00

La permanence est de 12 heures entre 08h00 et 22h00.

Cette permanence est interrompue 2 fois pour 1 heure de pause repas.

Activité H 24

De jour : la permanence est de 11 heures entre 08h00 et 20h00.

Cette permanence est interrompue 1 fois pour 1 heure de pause repas.

De nuit : la permanence est de 11 heures entre 20h00 et 08h00.

Cette permanence est interrompue 1 fois pour 1 heure de pause repas.

Activité entre 08h00 et 20h00

La permanence est de 11 heures entre 08h00 et 20h00

Cette permanence est interrompue 1 fois pour 1 heure de pause repas.

Activité de jour aéronautique

La permanence débute du lever du soleil - 30 min et termine au coucher du soleil + 30 min sans dépasser le créneau horaire de 08h00 à 22h00.

La permanence est de 12h00 maximum.

Pour une activité jusqu'à 20h00, la permanence est interrompue 1 fois pour 1 heure de pause repas.

Pour une activité jusqu'à 22h00, la permanence est interrompue 2 fois pour 1 heure de pause repas.

Tranches horaires repas

' déjeuner entre 11h00 et 14h00

' dîner entre 18h00 et 21h30

- Les permanences passent de 5 jours consécutifs à 7 jours consécutifs pouvant être portés à 9 jours sans planification pour faire face à un imprévu maladie ou autre.

- Les cycles de l'annexe II seront respectés.

- Les prolongations de la permanence de 7 jours à 9 jours doivent rester exceptionnelles.

- Les primes SAMU associées à l'article 3.3 restent acquises.

- Si des dépassements d'horaires pour des raisons impératives sont constatés, les heures seront immédiatement récupérées le lendemain par une prise de service retardée du même nombre d'heures.

- Pendant les pauses repas, le pilote est d'astreinte ; si une mission urgente se déclenche pendant la pause repas, l'astreinte se transforme en temps de travail. L'heure de pause est alors reportée à l'issue de la mission et ne peut plus être interrompue.

Cet accord atypique répond à une demande importante du personnel (86,36 %), elle reste dans les limites fixées par l'annexe II et améliore les conditions de travail.

Au cas où elle amènerait une détérioration des conditions de travail, elle sera, après consultation, dénoncée avec retour aux conditions de travail précédentes.

Il en sera de même si cet accord était déclaré illégal par les tribunaux compétents.'

- la note de service du même jour (NS/DG/Hd1/09-009) conforme à cet accord, ainsi que celle du 11 mai 2009 (NS-MCY-09-13), destinée au SAMU et au personnel navigant technique, 'suite au renouvellement de l'appel d'offre des transports sanitaires héliportés pour le compte du SAMU 06', confirmant la 'modification des clauses du cahier des charges' concernant notamment le temps de permanence (l'offre retenue étant la suivante : horaires d'hiver du 1er octobre au 31 mars, permanence de 8 heures à 20 heures - horaires d'été du 1er avril au 30 septembre, permanence de 8 heures à 22 heures), ainsi que 'la mise en place des horaires d'été à compter du 15 mai prochain' ;

- la lettre de Monsieur [V] informant l'employeur, le 28 mai 2009, qu'il ne pourrait assurer sa prochaine permanence débutant le jeudi 11 juin 2009 au-delà de 20 heures s'il restait soumis à 'l'article 3.2', au motif que la permanence de 8 heures à 22 heures imposait de le 'programmer suivant l'article 3.3' ;

- la réponse de la société PROTEUS, datée du 4 juin 2009, confirmant 'les dispositions de la note de service référencée NS-MCY-09-13 du 11 mai 2009 et de l'accord atypique du 31 mars 2009', et mettant Monsieur [V] en garde s'il interrompait son service à 20 heures, ce qui serait considéré comme 'une rupture unilatérale de (sa) part du contrat de travail' ;

- le bulletin de relève d'équipage établi par Monsieur [V], le 10 juin 2009 à 22 heures, indiquant notamment à la rubrique 'remarques particulières' :

'Je n'ai pas eu de réponse à ma lettre recommandée avec AR n° 1A 030 749 3235 2 que vous avez reçue le jeudi 4 juin. Sauf avis contraire, je suis donc toujours programmé suivant l'article 3.2 qui me limite à des permanences de 12 H. Débutant mon travail à 8 h, j'arrêterai donc légalement ma permanence à 20h. Merci de m'informer de la décision prise que je puisse en aviser le médecin régulateur du SAMU 06 avant 14h.' ;

- le cahier des clauses particulières du marché de 'prestation hélicoptère' conclu avec le C.H.U. de [Localité 5], prévoyant des 'pénalités pour retard d'exécution ou indisponibilité'.

Aux dires communs des parties, Monsieur [V] relevait de l'annexe II de la convention collective, relative à la durée du travail et applicable au personnel navigant technique 'affecté, pour tout ou partie de son temps, à la réalisation d'opérations aériennes civiles d'urgence par hélicoptère imposant d'assurer la permanence du service en vue d'effectuer un vol dont l'urgence rend la programmation impossible', prévoyant notamment :

- que 'le temps de service comprend les temps de permanence, les périodes de vol avec les temps de briefing et de debriefing, les formations, les maintiens de compétences et les visites médicales', que la permanence, qui 'peut être de jour ou de nuit', est la 'période de temps passée sur le site de travail, comportant des périodes d'inaction, au cours de laquelle le membre d'équipage est susceptible d'être appelé pour effectuer un vol', et que le 'temps de repos' est 'une période de temps ininterrompue et définie pendant laquelle un personnel navigant, libre de tout temps de service, peut vaquer librement à ses occupations personnelles' (art. 2) ;

- que 'la répartition du temps de permanence doit être programmée comme indiqué en 1 ci-après ou selon les cycles et modalités requis par leurs spécificités comme indiqué en 2 et 3', étant précisé que 'la mise en oeuvre de cette organisation intervient après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel' :

1. Soit dans le cadre de la semaine civile par périodes de permanence de jour réparties sur 5 jours et suivies du repos périodique.

2. Soit dans le cadre de cycles qui comprennent une succession de permanences de jour à l'exclusion de tout service de nuit dans la limite de 12 jours consécutifs entre 2 repos périodiques. La durée maximale de chaque cycle est de 18 semaines.

3. Soit dans le cadre de cycles qui comprennent une succession de permanences de jour ou une succession de services de nuit dans la limite de 7 jours consécutifs entre 2 repos périodiques. La durée maximum de chaque cycle est de 12 semaines' (art. 3) ;

- que la durée programmée du temps de permanence des personnels navigants professionnels ne peut en principe excéder 12 heures par période de 24 heures dans le régime de travail défini aux articles 3.1 et 3.2, et 14 heures dans le régime défini à l'article 3.3 (article 4), sous réserve des dérogations exceptionnelles de l'article 12 ;

- que le nombre de jours d'activité programmés et réalisés ne peut être supérieur à 212 par an dans le cadre des deux premiers régimes et à 166 par an dans le cadre du régime de l'article 3.3, et que 'le temps annuel de service, tous types d'activité confondus, est limité à 2000 heures infranchissables' (art. 6) ;

- que le personnel navigant bénéficie de 2 jours consécutifs de repos pour 5 jours consécutifs de permanence programmés dans le régime de l'article 3.1, d'un jour de repos pour 2 jours consécutifs de permanence (soit 6 jours consécutifs de repos pour 12 jours consécutifs de permanence) dans le régime de l'article 3.2, et d'un jour de repos pour un jour de permanence (soit 7 jours consécutifs de repos pour 7 jours de permanence) dans le régime de l'article 3.3 (art. 10).

Dès lors que Monsieur [V] pouvait être appelé à tout moment pendant ses pauses repas pour exécuter une mission urgente et que, selon les dispositions conventionnelles précitées, auxquelles l'accord atypique du 31 mars 2009 ne pouvait pas faire échec, la permanence est précisément définie comme la 'période de temps passée sur le site de travail, comportant des périodes d'inaction, au cours de laquelle le membre d'équipage est susceptible d'être appelé pour effectuer un vol', ces pauses faisaient nécessairement partie du temps de permanence, et ce nonobstant la consigne de l'employeur selon laquelle la permanence était alors 'interrompue', l'astreinte ne se transformant en temps de travail qu'en cas de mission urgente à l'issue de laquelle l'heure de la pause repas était reportée.

Même si le régime conventionnel de l'article 3.2 présentait des avantages pour l'entreprise et les salariés concernés, exposés par l'employeur dans divers écrits et notamment dans sa lettre du 26 septembre 2008 ('souplesse en cas de maladie ou d'absence d'un pilote', ce régime autorisant 12 jours de travail consécutifs ; obligation 'd'embaucher 2 pilotes ou plus afin de ne pas dépasser le maximum d'heures autorisé' et 'augmentation du nombre de rotations' créant 'une situation très contraignante' pour les pilotes n'habitant pas sur place, en cas de 'retour à l'article 3.3), il n'en demeure pas moins que ce régime, limitant la durée de permanence à 12 heures par période de 24 heures, n'était pas applicable à Monsieur [V] et aux autres pilotes dont la permanence s'étendait de 8 heures à 22 heures, soit pendant 14 heures, comme l'employeur l'avait d'ailleurs lui-même admis, suite à ses échanges avec le délégué du personnel et l'inspection du travail, dans diverses correspondances et notes de service versées aux débats, dont celle du 5 octobre 2008 ('vos temps de permanence correspondent au début - fin de service (les pauses repas n'existent plus). Ex. permanence de 08h00 à 22h00 = 14 heures de permanence'), avant d'opérer un revirement et d'indiquer dans l'accord atypique : 'La permanence est de 12 heures entre 08h00 et 22h00. Cette permanence est interrompue 2 fois pour 1 heure de pause repas.'

En outre, bien qu'il n'invoque pas expressément le droit de retrait d'une situation de travail présentant un danger grave et imminent, tel que prévu à l'article 4 du règlement intérieur au visa de l'ancien article L. 231-8 du code du travail, Monsieur [V] a pu estimer que la programmation du travail mise en place par l'employeur dans le cadre de l'article 3.2 était de nature à compromettre la sécurité des vols, comme il l'a indiqué dans sa correspondance circonstanciée à l'employeur en date du 16 juillet 2008, dès lors que la durée effective de la permanence dépassait 12 heures.

L'article L. 422-2 du code de l'aviation civile disposant que 'le commandant de bord est responsable de l'exécution de sa mission' et 'peut différer ou suspendre le départ (...) chaque fois qu'il l'estime indispensable à la sécurité et sous réserve d'en rendre compte en fournissant les motifs de sa décision', le refus de Monsieur [V] de poursuivre sa permanence au-delà de 20 heures à compter du 11 juin 2009, dont celui-ci a rendu compte à l'employeur par lettre motivée du 28 mai 2009, puis par observations écrites lors de la relève du 10 juin 2009, était donc justifié par un motif légitime exclusif de toute 'pression' fautive, étant observé que la société intimée fait vainement valoir :

- qu'elle s'était engagée avec le SAMU 06 sur une permanence de 8 heures à 22 heures et que Monsieur [V] n'a eu aucune considération pour ce service public d'urgence, alors d'une part, que l'employeur avait été alerté à plusieurs reprises sur le non-respect des dispositions conventionnelles, non seulement par le délégué du personnel et l'inspection du travail, mais aussi par le salarié lui-même, dans sa lettre du 16 juillet 2008 antérieure de près d'un an au licenciement, et qu'il lui appartenait d'organiser les cycles de travail en fonction de cette spécificité, et d'autre part, que le salarié a informé l'employeur, par lettre du 28 mai 2009, de son refus de poursuivre la permanence au-delà de 20 heures à compter du 11 juin 2009, soit avec un délai de prévenance suffisant pour permettre à l'employeur de changer son régime de travail ou de pourvoir à son remplacement ;

- que l'article 11 de l'annexe I de la convention collective qualifie de 'manquement à la discipline' toute inobservation des règlements intérieurs et qu'en l'espèce le règlement intérieur de l'entreprise prévoyait que les salariés devaient respecter les horaires fixés par la direction, alors qu'il est précisé au même article que 'la gravité de la faute ou le comportement professionnel est apprécié à la fois en fonction des circonstances, de la nature des fonctions assurées par le navigant et dans la mesure où celui-ci a compromis la sécurité des vols' ;

- que Monsieur [V] n'a jamais dépassé le seuil annuel de temps de service de 2000 heures, alors que cette limite est applicable à tous les régimes de travail.

Enfin, outre que ce grief ne ressort que du bulletin de relève du 10 juin 2009 versé aux débats par le salarié lui-même, dans lequel celui-ci constate simplement que sa lettre recommandée reçue le 4 juin 2009 est demeurée sans réponse et invite l'employeur à lui faire part de sa décision concernant sa demande de changement de régime de travail, afin qu'il 'puisse en aviser le médecin régulateur du SAMU 06 avant 14 heures', aucun élément ne permet de considérer que Monsieur [V] a annoncé au médecin régulateur du SAMU qu'il finirait sa permanence à 20 heures dans l'intention de nuire à l'employeur ou à l'entreprise.

Le licenciement de Monsieur [V] étant dès lors dépourvu de cause réelle et sérieuse, le jugement déféré sera réformé en ce que, après avoir relevé que 'le refus de Monsieur [V] de prendre son travail après 20 heures (était) compatible avec les obligations mises à sa charge et ne (pouvait) donc revêtir de ce chef un caractère fautif', il a toutefois considéré que ce licenciement était justifié par une faute lourde, aux motifs d'une part, que le salarié avait 'clairement et volontairement transgressé son statut en exposant ses griefs et son mécontentement à l'encontre du SAMU, principal client de la société INAER', ce qui ne ressort d'aucun élément de la cause, et d'autre part, que 'l'abandon de poste de pilote au SAMU de [Localité 5], service public d'urgence, privant le département de tout secours aérien (était) suffisamment grave pour constituer, bien plus qu'une cause réelle et sérieuse de licenciement, une faute qui (revêtait) le caractère de faute lourde, dès lors que le fait de le faire volontairement et d'en informer le client, mettant en difficulté la société PROTEUS HELICOPTERES à l'égard de son client SAMU 06, (procédait) manifestement d'une volonté de nuire', alors qu'il résulte des pièces versées aux débats que l'employeur avait pris des dispositions pour remplacer tout salarié absent et qu'en informant la société et le SAMU de son intention, Monsieur [V] a permis de pourvoir immédiatement à son remplacement (par Monsieur [D]) et d'assurer ainsi la continuité du service public.

- sur les conséquences du licenciement

* sur les indemnités de rupture

Son licenciement étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, Monsieur [V], titulaire d'une ancienneté de trois ans dans l'entreprise et percevant en dernier lieu une rémunération mensuelle brute totale de 3.297,43 €, est fondé à réclamer le paiement d'une indemnité compensatrice de 5,75 jours de congés payés, soit la somme de 615,57 €, d'une indemnité compensatrice de préavis de trois mois de salaire, conformément à l'article 5 de l'annexe I 'Personnel navigant technique - Hélicoptères' de la convention collective, soit la somme de 9.892,30 €, de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis s'élevant à 989,23 €, et de l'indemnité conventionnelle de licenciement calculée selon les modalités prévues à l'article 7 de l'annexe susvisée, soit la somme de 8.328 €, étant précisé que, si elles sont contestées par l'employeur dans leur principe, les demandes de ces chefs ne le sont pas dans leurs montants.

Le jugement qui a rejeté ces demandes sera ainsi infirmé.

* sur les dommages et intérêts

Agé de 54 ans au moment de son licenciement, titulaire d'une ancienneté supérieure à deux ans au sein de la société INAER employant au moins onze salariés, admis au bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi d'un montant net journalier du 58,80 € à compter du 29 juillet 2009, Monsieur [V] indique sans en justifier qu'après avoir connu une période de chômage jusqu'au 20 avril 2010, il a retrouvé un emploi dans une entreprise située à [Localité 3], dans le cadre d'un contrat à durée déterminée, moyennant un salaire inférieur.

Compte tenu de l'ensemble des éléments de la cause, une somme de 33.000 € lui sera allouée à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail.

Le jugement qui l'a débouté de cette demande sera infirmé.

- sur l'avertissement du 5 juin 2009 et la demande de dommages et intérêts afférente

Monsieur [V] s'est vu notifier un avertissement par lettre de Monsieur [E], datée du 5 juin 2009, ainsi motivée :

'Je viens de recevoir de Monsieur [D], le R.D.F.E. de la compagnie, un rapport à votre sujet, suite au contrôle qu'il a effectué le 03 juin 2009 dans le cadre des ECP.

Il a relevé les points suivants :

- Pour la partie contrôle Hors Ligne, vous ne connaissez pas les puissances autorisées en AEO (All Engine Operative), pas plus qu'en OEI (One Engine Inoperative).

- Pour la partie En Ligne, au départ, vous effectuez un décollage sans fiche VAC ou Jeppesen, ni fiche d'hélistation.

Monsieur [D] vous avait déjà signalé verbalement, il y a deux ans, un début de dérive dans ce sens.

Cette attitude, peu professionnelle, doit être rectifiée immédiatement.

Pour cette raison, je vous donne un avertissement ; si vous deviez persister dans ce sens, je serai obligé d'envisager une nouvelle sanction pouvant aller jusqu'à la rupture du contrat nous liant pour faute professionnelle grave.

Monsieur [D] est chargé de vous faire passer, très prochainement, un nouveau contrôle de vos connaissances théoriques, sans préavis, qui sera sans aucun doute satisfaisant.'

Pour preuve du bien-fondé de cet avertissement, la société INAER produit le rapport conforme de Monsieur [D], daté du jour même, reprochant à Monsieur [V] de ne pas tenir à jour ses connaissances théoriques, ce qui nuisait à la sécurité des vols.

Le salarié a contesté cette sanction par lettre du 1er juillet 2009, en observant qu'elle avait été prononcée le jour même de la réception par l'employeur de sa lettre du 28 mai 2009 et que le grief invoqué était contredit par son admission au test que lui avait fait passer Monsieur [D], laquelle lui avait permis de valider sa licence auprès de l'aviation civile.

L'employeur se bornant à répliquer que l'avertissement était justifié par un manque de connaissances théoriques, sans s'expliquer de manière probante sur la compatibilité de cette sanction avec la réussite du salarié au contrôle de compétence, alors même que, selon le rapport de l'examinateur, les carences de Monsieur [V] au plan théorique nuisaient à la sécurité des vols, le jugement sera confirmé en ce qu'il a considéré dans l'exposé de ses motifs que cette sanction devait être annulée.

Toutefois, ce jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté la demande indemnitaire de ce chef et une somme de 3.000 € sera allouée à Monsieur [V] à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral nécessairement subi à ce titre.

- sur les autres demandes

* sur le salaire de janvier 2008 et la demande afférente de dommages et intérêts

Il résulte des pièces versées aux débats que, Monsieur [V] ayant été requis par le Préfet des Alpes-Maritimes au mois de janvier 2008 'pour assurer le pilotage de l'hélicoptère du SAMU 06', suite à un préavis de grève, la société PROTEUS a opéré une retenue de 2.940,90 € sur son salaire pour 'absence non rémunérée', sans procéder ultérieurement à une quelconque régularisation, alors même que, par lettre du 14 avril 2008, la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales a confirmé que le CHU de Nice s'était acquitté, le 25 mars 2008, des factures du mois de janvier 2008 et qu'il n'appartenait pas à l'administration, mais à l'employeur, de rémunérer son pilote.

La société INAER ne contestant pas sérieusement son obligation au paiement du salaire, laquelle ne saurait être limitée à sa proposition de payer la somme de 203,42 € correspondant au temps de vol effectué (10h54), au taux horaire de 19,30 €, alors que tel n'était pas le mode de rémunération prévu au contrat de travail, il sera fait droit à la demande en paiement de la somme de 2.940,90 € et le jugement sera réformé de ce chef.

En revanche, le salarié ne rapportant pas la preuve de l'existence d'un préjudice distinct de celui qui sera réparé par la condamnation au paiement des intérêts au taux légal sur la somme due à compter du 28 juillet 2009, date de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation valant mise en demeure, le jugement qui l'a débouté de sa demande à ce titre sera confirmé.

* sur l'indemnité compensatrice de jours d'astreinte

S'il résulte de l'article L.3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Aux termes de l'article 14.3 b) de l'annexe II de la convention collective, 'pour le personnel navigant auquel est appliqué un régime de travail tel que prévu aux points 3.2 ou 3.3 de l'article 3 de la présente annexe, seule est considérée comme heure supplémentaire pour l'application des (anciens) articles L. 212-5 et L. 212-5-1 du code du travail toute heure de temps de service effectif effectuée au-delà d'une moyenne hebdomadaire de 44 heures de temps de service sur la durée du cycle.'

En l'espèce, Monsieur [V] indique que l'employeur imposait de véritables astreintes à ses pilotes pendant les deux jours suivants chaque cycle de permanence, et ce sans aucune contrepartie.

La société INAER réplique que le temps de permanence était réduit à cinq jours afin de faire face aux imprévus et notamment à l'absence d'un pilote, en sorte que, tant dans le régime de l'article 3.2 que dans celui de l'article 3.3, les deux jours supplémentaires dits 'de souplesse' n'ont entraîné aucun dépassement du nombre maximum de jours de permanence.

En tout état de cause, s'il produit un décompte faisant ressortir un total de 1.471 heures d'astreinte ainsi effectuées pendant toute la durée d'exécution de son contrat de travail et dont il réclame le paiement, Monsieur [V] n'allègue pas avoir dépassé la durée hebdomadaire de 44 heures de temps de service sur la durée du cycle, compte tenu des heures litigieuses, ni ne communique aucun élément en ce sens.

Le jugement qui l'a débouté de cette réclamation sera confirmé.

* sur le rappel de congés payés supplémentaires

L'article 18 de l'annexe I de la convention collective prévoit que les congés pris en période d'hiver, soit du 1er octobre au 30 avril, donnent droit à un supplément de congés payés selon les modalités suivantes : 'neuf à onze jours : + deux jours - douze et au-delà : + trois jours.'

Or il résulte des pièces versées aux débats que l'employeur imposait au personnel navigant technique de prendre au moins 14 jours de congés en période d'hiver, tout en refusant expressément d'accorder des jours de congés supplémentaires, comme il l'a confirmé au délégué du personnel lors de la réunion du 12 décembre 2008.

Compte tenu de ce refus explicite et par ailleurs les congés ne se confondant pas avec les repos, la société intimée fait vainement valoir que Monsieur [V] a 'bénéficié de beaucoup plus de repos qu'il n'avait de droits' et qu'il est 'mal venu de réclamer 3 jours complémentaires par an, qu'il pouvait aisément poser mais qu'il n'a jamais posés.'

En conséquence, la société INAER sera condamnée à payer à Monsieur [V], au titre de 9 jours de congés supplémentaires à raison de trois jours par an depuis 2006, une indemnité compensatrice de 904 €.

Le jugement sera également infirmé de ce chef.

- sur la capitalisation des intérêts

Les sommes allouées à titre de rappel de salaire, de congés payés supplémentaires et d'indemnités de rupture porteront intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 2009, avec capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du code civil à compter du 3 juin 2010, date de l'audience de première instance, tandis que les dommages et intérêts porteront intérêts au taux légal avec capitalisation à compter du présent arrêt.

- sur la remise des documents sociaux conformes

La société INAER devra remettre à Monsieur [V] un bulletin de paie rectificatif, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi conformes au présent arrêt, dans le délai de deux mois à compter de sa notification.

- sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

En équité, une somme de 2.500 € sera allouée au salarié au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel, tandis que la demande de l'employeur sur ce fondement sera rejetée, tant en première instance qu'en cause d'appel.

Outre ceux de première instance, la société INAER supportera les dépens d'appel.

Le jugement sera infirmé à ce double titre.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale, par mise à disposition au greffe,

Reçoit l'appel,

Infirme partiellement le jugement déféré,

Statuant de nouveau sur le tout et y ajoutant,

Dit que le licenciement de Monsieur [V] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Annule l'avertissement du 5 juin 2009,

Condamne la société INAERT à payer à Monsieur [V] les sommes suivantes :

indemnité compensatrice de congés payés 615,57 €

indemnité compensatrice de préavis 9.892,30 €

congés payés sur préavis 989,23 €

indemnité conventionnelle de licenciement 8.328,00 €

dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse 33.000,00 €

rappel de salaire janvier 2008 2.940,90 €

indemnité compensatrice de 9 jours de congés payés supplémentaires 904,00 €

dommages et intérêts pour avertissement injustifié 3.000,00 €

frais irrépétibles de 1ère instance et d'appel 2.500,00 €

Dit que les sommes allouées à titre de rappel de salaire, de congés payés supplémentaires et d'indemnités de rupture porteront intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 2009, avec capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du code civil à compter du 3 juin 2010, et que les dommages et intérêts porteront intérêts au taux légal avec capitalisation à compter du présent arrêt,

Déboute Monsieur [V] de sa demande de dommages et intérêts pour non-paiement du salaire du mois de janvier 2008 et de celle à titre d'indemnité compensatrice de jours d'astreinte,

Dit que la société INAER devra remettre à Monsieur [V] un bulletin de paie rectificatif, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi conformes au présent arrêt, dans le délai de deux mois à compter de sa notification,

Condamne la société INAER aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER.LE CONSEILLER,

POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre
Numéro d'arrêt : 10/15621
Date de la décision : 21/02/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, arrêt n°10/15621 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-02-21;10.15621 ?
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