COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
15e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 24 FEVRIER 2012
N° 2012/128
Rôle N° 11/00485
[L] [E]
C/
SA MCS & ASSOCIES
Grosse délivrée
le :
à : la SCP COHEN-GUEDJ
la SCP BADIE-SIMON-JUSTON
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 13 Décembre 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 10/2009.
APPELANT
Monsieur [L] [E]
né le [Date naissance 1] 1944 à [Localité 4] (ALGERIE), demeurant [Adresse 2]
représenté par la SCP COHEN GUEDJ, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constitué aux lieu et place de la SCP COHEN-GUEDJ, avoués, plaidant par Me Dominique BRUNEL, avocat au barreau de NICE
INTIMEE
SA MCS & ASSOCIES, prise en la personne de son représentant légal, demeurant [Adresse 3]
représentée par la SCP BADIE-SIMON-JUSTON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constitué aux lieu et place de la SCP DE SAINT FERREOL - TOUBOUL, avoués, plaidant par Me Frédéric DE LA SELLE, avocat au barreau de PARIS
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 18 Janvier 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Christian COUCHET, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame France-Marie BRAIZAT, Président
Monsieur Christian COUCHET, Conseiller
Monsieur Olivier BRUE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Février 2012.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Février 2012,
Signé par Madame France-Marie BRAIZAT, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Par jugement du 30 juin 1995 le tribunal de commerce de Nice a condamné M. [L] [E], ès qualités de caution solidaire de la société OTIC, à payer à la Banque Parisienne de Gestion et de dépôt la somme de 5 122 840,66 FRF avec intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance, et, par arrêt du 8 février 2000, la cour de céans a confirmé ce jugement en toutes ses dispositions au profit du Consortium de réalisation CDR CREANCES, cessionnaire de l'ensemble des créances de la Banque Parisienne de Gestion et de dépôt.
Agissant en vertu de cet arrêt confirmatif la société MCS & Associés, venant aux droits de la société PERCIER FINANCES SAS suivant acte sous seing privé du 17 janvier 2006, a fait dresser le 15 février 2010 un procès-verbal de saisie de droits d'associé ou de valeurs mobilières et un acte de nantissement judiciaire provisoire puis définitif de parts sociales et de valeurs mobilières entre les mains de la SCI Centre Invest à l'encontre de M. [E], pour paiement de la somme totale de 1 020 000,49 €.
Saisi par M. [E] de contestations tendant à voir ordonner la mainlevée des saisies pratiquées, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Nice, par jugement du 13 décembre 2010 (RG 10/02009), a :
* écarté la fin de non-recevoir relative à la prescription,
* débouté le requérant de ses prétentions et mis les dépens à sa charge.
Par déclaration du 11 janvier 2011 M. [E] a relevé appel de ce jugement.
Par conclusions déposées et notifiées le 8 avril 2011 M. [E] se prévaut de la prescription sur le fondement des dispositions de l'article 2222 du code civil, justifiant de vérifier si cette prescription se trouvait acquise au jour de la promulgation de la loi du 17 juin 2008 et d'infirmer le jugement entrepris de ce chef, considère que la société MCS ne dispose pas d'un titre à son encontre puisque la Banque Parisienne de Gestion et de dépôt a cédé l'ensemble des créances qu'elle détenait au Consortium de réalisation CDR CREANCES, lequel va céder les créances à PERCIER FINANCES les transmettant à MCS le 27 janvier 2006, et conclut que cette dernière cession est irrégulière à défaut d'avoir été signifiée à Maître [U], liquidateur judiciaire de la société OTIC disposant encore de fonds lui permettant de désintéresser la société intimée si le titre dont elle se prévaut est fondé.
L'appelant observe que si la créance OTIC a été acquise dans le cadre du portefeuille de PERCIER FINANCES à MCS il s'agit uniquement de la créance OTIC et non la cession de créance à son encontre telle que résultant du jugement de condamnation et de l'arrêt de confirmation, soulignant de plus que la créance OTIC n'est pas individualisée contrairement à l'arrêt de la Cour de cassation du 27 mai 2008, condition lui permettant d'invoquer le retrait litigieux dans la mesure où l'obligation d'information depuis l'arrêt de la cour d'appel n'a pas été effectuée, soutient que la déchéance aux droits des intérêts pouvait être opposée, et estime que la société MCS ne peut nullement invoquer à son égard une quelconque créance.
Il demande à la cour de le recevoir en son appel, de constater d'une part que la société MCS ne bénéficie d'aucune cession de créances ni d'un titre régulier à son encontre, et d'autre part que dans le cadre de la cession de portefeuille intervenue entre PERCIER FINANCES et MCS il a été procédé à la cession d'une créance OTIC et non d'une créance individualisée le concernant, d'ordonner en conséquence la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 15 février 2010 et du nantissement postérieur, sauf à titre subsidiaire à dire que l'intimée est déchue du droit aux intérêts faute d'information de la caution, et de condamner la société MCS & Associés à lui payer la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions déposées et signifiées le 6 juin 2011 la SA MCS & Associés, après le rappel des faits et de la procédure, expose que par acte sous seing privé du 11 juin 2003 déposé au rang des minutes de Maître [K], notaire, la société CDR Créances a cédé à la société PERCIER FINANCES SAS un portefeuille de créances contentieuses parmi lesquelles figurait notamment la créance détenue sur la société OTIC dont M. [E] s'était porté caution solidaire et à l'égard duquel la cession a été signifiée par acte non judiciaire du 1er septembre 2003 conformément aux dispositions de l'article 1690 du code civil, et précise que par nouvel acte sous seing privé du 17 janvier 2006 la société PERCIER FINANCES SAS lui a cédé un portefeuille de créances contentieuses contenant ladite créance sur M. [E] en sa qualité de caution solidaire dont il a eu connaissance par acte non judiciaire du 23 octobre 2008.
Elle relève qu'aucun pourvoi en cassation n'a été formé à l'encontre de l'arrêt confirmatif de la cour du 8 février 2000, explique avoir souhaité, étant titulaire d'une créance de 1 020 000,49 € arrêtée au 12 février 2010, procéder à des investigations sur la solvabilité de M. [E] son débiteur, associé majoritaire d'une société civile immobilière CENTRE INVEST en sorte que plusieurs mesures d'exécution forcées ont été diligentées notamment par procès-verbaux du 15 février 2010 valant saisies-attributions de comptes bancaires et de comptes d'associé, outre un nantissement provisoire par acte du 15 février 2010, devenu définitif le 19 mars 2010, et conclut disposer de la qualité à agir suite à la fusion-absorption de la Banque Parisienne de Gestion et de dépôt (BPGD) par la société CDR Créances procédant ensuite à la cession d'un portefeuille de créances, régulièrement signifiée à l'appelant selon les modalités de l'article 658 du code de procédure civile.
La société intimée soutient avoir procédé à la communication d'un extrait d'acte de cession de créances établi par Maître [H], notaire, dans la mesure où aucune disposition légale ou réglementaire n'impose au cessionnaire d'une créance de produire un acte de cession dans son intégralité, considère que l'appelant n'est pas en droit de se prévaloir des dispositions relatives au retrait litigieux puisqu'elle se trouve effectivement subrogée dans les droits de CDR Créances pour faire valoir notamment son droit de créance à l'égard de la partie adverse et que la créance considérée n'était pas litigieuse au jour de la cession en l'absence de tout procès, s'oppose à la demande de déchéance des intérêts, et demande à la cour de débouter l'appelant de toutes ses prétentions, de confirmer le jugement entrepris et de condamner M. [E] à lui payer la somme de 3 000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 décembre 2011.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la prescription :
Il est demandé par l'appelant à la cour, en référence aux dispositions de la loi du 17 juin 2008 modifiant le régime de la prescription, et de la jurisprudence, de confirmer le jugement entrepris de ce chef, ce qui justifie de statuer en ce sens.
Sur la régularité du titre :
Par acte du 11 juin 2003, déposé au rang des minutes de Maître [K], notaire, la société CDR Créances, venant aux droits de la Banque Parisienne de Gestion et de dépôt dite BPGD de par une fusion-absorption, a cédé à la société PERCIER FINANCE SAS un portefeuille de créances contentieuses parmi lesquelles figurait notamment la créance détenue sur la société OTIC dont M. [E] s'était porté caution solidaire, à l'égard duquel la
cession a été signifiée, conformément à l'article 1690 du code civil invoqué par l'appelant, par acte extrajudiciaire du 1er septembre 2003 en vertu de l'article 658 du code de procédure civile.
Par ailleurs il est établi que suivant nouvel acte reçu en l'office notarial de Maître [H], notaire à Meudon le 17 janvier 2006, la société PERCIER FINANCE SAS a cédé à la SA MCS & Associés un portefeuille de créances contentieuses contenant ladite créance sur M. [E] en sa qualité de caution solidaire, dont il a eu connaissance par acte d'huissier de justice du 23 octobre 2008 délivré à la requête de la SA MCS & Associés en vertu des articles 656 et 658 du code de procédure civile.
Il résulte des extraits régulièrement communiqués à ce titre en l'espèce, que la société intimée dispose indiscutablement de la qualité à agir, sans nécessité ou obligation en sa qualité de cessionnaire de communiquer d'autres éléments contrairement à l'argumentation de l'appelant, régulièrement avisé du transfert de la créance objet du présent litige, étant relevé de plus que la prétendue absence de signification de la cession de portefeuille de créances à Maître [U], liquidateur de la société OTIC débiteur principal, n'affectant pas l'existence de la dette n'est pas de nature à libérer M. [E] poursuivi en sa qualité de caution de ladite société.
Les contestations élevées de ce chef par l'appelant sont donc rejetées, d'autant plus qu'il a été condamné par jugement du tribunal de commerce de Nice du 30 juin 1995, ès qualités de caution solidaire de la société OTIC, à payer à la Banque Parisienne de Gestion et de dépôt la somme de 5 122 840,66 FRF avec intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance, que la présente cour a, par arrêt du 8 février 2000 signifié au débiteur par acte extrajudiciaire du 17 mars 2000, confirmé en toutes ses dispositions au profit du Consortium de réalisation CDR CREANCES, cessionnaire initial de l'ensemble des créances comprenant celle à l'égard de M. [E], désormais détenue par la société intimée.
Sur les autres demandes :
La SA MCS & Associés démontre donc disposer, en tant que cessionnaire de la créance considérée, des titres exécutoires susvisés, lui permettant d'agir aux fins de recouvrement, en sorte que les actes d'exécution critiqués, non autrement discutés, ont été régulièrement diligentés.
Par ailleurs l'appelant n'est pas davantage en mesure de se prévaloir de la notion de retrait litigieux, dans la mesure où la créance considérée ne présente aucun caractère litigieux au sens des articles 1699 et suivants du code civil.
Enfin la demande de l'appelant tendant, en référence à l'article L. 313-3 du code monétaire et financier, à la déchéance des intérêts réclamés par la société intimée, est également écartée puisque le texte en question ne s'applique qu'à l'exonération de la majoration ou à la réduction de son montant, et ce en considération de la situation du débiteur.
Le jugement entrepris est dès lors confirmé en toutes ses dispositions.
L'équité commande de condamner M. [E] à payer une indemnité de 1.000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Reçoit l'appel,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne M. [E] à payer à SA MCS & Associés la somme de 1.000 € (mille) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande,
Condamne M. [E] aux entiers dépens, ceux d'appel étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier Le Président