COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
3e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 08 MARS 2012
N° 2012/140
Rôle N° 11/12317
[E] [K]
C/
Société EDA LIMITED
Grosse délivrée
le :
à : SCP LATIL
SCP LIBERAS
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance de référé du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 07 Juin 2011 enregistrée au répertoire général sous le n° 11/10.
APPELANT
Monsieur [E] [K]
né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 4] (RUSSIE)
demeurant [Adresse 3] - 99 SUISSE
représenté par la SCP LATIL PENARROYA-LATIL ALLIGIER, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
ayant pour avocat Me François HONNORAT, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
Société EDA LIMITED
devenue EDA ERICDANTONARTS Limited
prise en la personne de son représentant légal Monsieur [B] [N]
sise [Adresse 5]
représentée par la SCP LIBERAS BUVAT MICHOTEY, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
ayant pour avocat Me Pascal ULINE, avocat au barreau de LYON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 31 Janvier 2012 en audience publique devant la Cour composée de :
Madame Christine DEVALETTE, Présidente
Monsieur Gilles ELLEOUET, Conseiller (rédacteur)
Monsieur Michel CABARET, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Lydie BADEL.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Mars 2012.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Mars 2012,
Signé par Madame Christine DEVALETTE, Présidente et Madame Lydie BADEL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
La société SARL EDA Limited à ce jour dénommée EDA-ERICANTONARTS Limited a réalisé des travaux d'aménagement du jardin de la Villa Serena propriété de M.[E] [K] sise [Adresse 2].
Contestant la qualité et le coût des travaux exécutés, M.[K] a obtenu, par ordonnance de référé du 16 septembre 2008, la désignation de M.[U] en qualité d'expert.
Au vu du rapport déposé par l'expert, le 10 mai 2010, la société EDA a, par acte du 23 décembre 2010, assigné en référé M.[K] en paiement d'une provision à valoir sur le solde des travaux.
Par ordonnance du 7 juin 2011, le juge des référés du tribunal de grande instance de Nice a:
- débouté M.[K] de son exception d'incompétence
- condamné M.[K] à payer à la société EDA LIMITED la somme de 119 737,51 € avec les intérêts légaux à compter de la décision
- dit n'y avoir lieu à capitalisation des intérêts
- désigné Me [I] huissier de justice, avec mission de se rendre au domicile de M.[E] [K] à [Localité 6] pour faire toutes constatations utiles en présence de M.[N] quant au descriptif de la piscine et prendre les photographies, le cas échéant avec l'aide de la force publique
- condamné M.[K] à payer à la société EDA LIMITED la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
M.[K] a relevé appel de cette ordonnance 11 juillet 2011.
Vu les conclusions du 23 janvier 2012 de M.[K] ;
Vu les conclusions du 31 janvier 2012 de la société EDA LIMITED actuellement dénommée EDA-ERICANTONARTS Limited ;
Vu l'ordonnance de clôture du 31 janvier 2012.
SUR QUOI
sur la demande de sursis à statuer
La cour possède les éléments suffisants pour statuer sur les demandes dont elle est saisie sans qu'il y ait lieu de surseoir à statuer à la suite de la plainte déposée par M.[K] entre les mains du Procureur de la République de Nice.
Il ne sera pas fait droit à la demande de sursis à statuer de la société ERICANTONARTS Ltd.
Sur la demande d'annulation de l'ordonnance de référé du 7 juin 2011
M.[K] soutient que la décision déférée a été obtenue par fraude aux droits de la défense sur la base d'un rapport d'expertise intervenu sur de faux éléments, alors que la société EDA à ce jour dissoute, radiée du registre britannique des sociétés et dépourvue de capacité à agir, a indiqué une adresse inconnue.
Il soutient également n'avoir pas eu connaissance de l'assignation en référé du 23 décembre 2010, reprochant au premier juge de ne pas avoir fait respecter le principe du contradictoire.
La société intimée réplique que le principe du contradictoire a été respecté en première instance, au cours de laquelle M.[K] était régulièrement représenté.
Régulièrement représenté en première instance, M.[K] après avoir pris connaissance des demandes de la société EDA, a, en l'état des renvois accordés par le premier juge, eu le temps de préparer sa défense.
M.[K] ne démontre pas en quoi, le premier juge a contrevenu aux dispositions de l'article 16 du code de procédure civile.
Il n'y donc pas lieu à annulation de l'ordonnance déférée, les autres moyens invoqués par l'appelant concernant le rapport d'expertise ou la capacité à agir de la société intimée, postérieurement à l'ordonnance déférée, étant inopérants.
Sur l'exception d'incompétence soulevée par M.[K]
M.[K] demande la réformation de l'ordonnance déférée ayant écarté l'exception d'incompétence soulevée en application de la convention de LUGANO en demandant à la juridiction française de se déclarer incompétente au profit de la juridiction suisse du canton et de la ville de Genève.
La société EDA-ERICANTONARTS Limited réplique que cette exception d'incompétence n'est pas recevable au regard de l'article 75 du code de procédure civile faute pour M. [K] d'avoir fait connaître, dans son déclinatoire, la juridiction devant laquelle il demandait que l'affaire soit portée.
Dans ses conclusions de première instance, M.[K] soutenait, dans le cadre de l'exception d'incompétence soulevée, être domicilié à [Adresse 3] depuis 2008.
Ce moyen est suffisant pour retenir que M.[K] demandait, en application de la convention de LUGANO, applicable à la Suisse, que l'affaire soit portée devant la juridiction de cet Etat.
Dès lors, l'exception d'incompétence soulevée est recevable au regard de l'article 75 du code de procédure civile.
M.[K] soutient qu'en application de la convention de LUGANO, il devait être assigné à son domicile en Suisse.
L'article 3 de la convention de LUGANO, dans sa rédaction du 16 septembre 1998, applicable au litige, dispose que les personnes domiciliées sur le territoire d'un Etat contractant, ne peuvent être attraites devant les tribunaux d'un autre État contractant qu'en vertu des règles énoncées aux sections 2 à 6.
S'agissant de la France, cet article 3 précise que les dispositions des articles 14 et 15 du code civil ne peuvent être opposées.
L'article 14 du Code civil dispose que l'étranger, même non-résident en France, peut être cité devant les tribunaux français, pour l'exécution des obligations par lui contractées en France avec un Français ; il pourra être traduit devant les tribunaux de France pour les obligations contractées en pays étranger envers des Français.
Cependant, l'article 5 de la Convention de LUGANO dispose également que le défendeur domicilié dans un état contractant, peut être attrait dans un autre État contractant, en matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée.
M.[K] domicilié à [Adresse 3], dans un Etat contractant (la Suisse) de la convention de LUGANO, a chargé la SARL EDA Limited à ce jour dénommée EDA-ERICANTONARTS Limited, société de droit anglais, de la réalisation de travaux d'aménagement dans sa propriété à [Localité 7].
C'est sur la base de ce contrat que la SARL EDA Limited à ce jour dénommée EDA-ERICANTONARTS Limited a assigné M.[K] en paiement d'une provision devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Nice, juridiction compétente, au regard de l'article 5 susvisé de la convention de LUGANO compte tenu du lieu d'exécution des travaux.
En conséquence, l'ordonnance déférée sera, par motifs susbtitués, confirmée en ce qu'elle a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par M.[K]
Sur la demande de provision de la société EDA-ERICANTONARTS Limited
Au vu des éléments versés aux débats, la société EDA actuellement dénommée EDA-ERICANTONARTS Limited, société de droit anglais, régulièrement immatriculée, a une existence légale et toujours valablement représentée par M.[B] [N].
L'action engagée par cette société à l'encontre de M.[K] est donc parfaitement recevable.
M.[K] régulièrement répresenté lors des opérations d'expertise de M.[U] n'a déposé aucun dire contestant l'analyse et les conclusions précises de l'expert à la suite de ses investigations et de l'examen des pièces et notamment des factures de la société EDA, soumises à son examen.
M.[U] relève en effet que bien que le jardin n'ait pas été géré depuis 18 mois, les végétaux se portent bien.
En retenant que l'aménagement des plantations est conforme aux critères habituels de l'aménagement paysager, et que les options prises sans prendre en compte le critère économique, sans soins particuliers depuis leur installation, avec un arrosage défaillant et en résistant à l'épreuve du temps, confirment la pertinence de ces choix, l'expert estime que l'aménagement réalisé est d'une qualité remarquable.
S'agissant de la réclamation de la société SARL EDA Limited, l'expert, tout en relevant que les factures de la société SARL EDA Limited ne comportent aucun sous détail, conclut que compte tenu des prestations effectuées et des factures de fournitures, M.[K] reste devoir une somme de 119'737,51 €.
Au vu de ces conclusions particulièrement précises sur la nature des prestations réalisées par la société EDA et des pièces versées aux débats, l'obligation de M.[K] au paiement d'une provision, en application de l'article 809 alinéa 2 du code de procédure civile, n'est pas sérieusement contestable et l'ordonnance déférée sera confirmée du chef de la condamnation de M.[K] au paiement de la somme de 119'737,51 € à titre provisionnel, avec les intérêts légaux à compter de l'ordonnance de référé, outre celle de 1000 € au titre des frais irrépétibles.
Sur la demande de désignation d'un constatant
M.[K] conclut à la réformation de l'ordonnance déférée du chef de la mesure de constatation ordonnée soutenant que la société EDA ne justifie d'aucun motif légitime à l'appui de sa demande de constat.
La société EDA réplique que le constat d'huissier a été dressé de sorte qu'il n'y a plus lieu de statuer.
M.[K] est recevable à contester la mesure de constat, même si cette mesure a été déjà été exécutée puisque l'ordonnance de référé entreprise est exécutoire de plein droit.
La société EDA ne s'explique pas et ne verse aucun élément établissant qu'elle a un motif légitime, au sens de l'article 145 du code de procédure civile, d'avoir, avant tout procès, à faire procéder par voie d'huissier à des constatations relatives à la piscine.
L'ordonnance déférée sera en conséquence réformée en ce qu'elle a désigné un huissier.
L'équité ne commande pas, en cause d'appel, l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire
Constate que la société EDA LIMITED dénommée EDA-ERICANTONARTS Limited est représentée par M.[B] [N] ;
Dit n'y avoir lieu à annulation de l'ordonnance déférée ;
Infirme partiellement l'ordonnance de référé du 7 juin 2011 en ce qu'elle a désigné un huissier pour établir un procès-verbal de constat concernant la piscine de la propriété de M.[K] à [Localité 6] et statuant à nouveau de ce chef ;
Dit n'y avoir lieu à la désignation d'un huissier pour établir un procès-verbal de constat concernant la piscine de la propriété de M.[K] à [Localité 6] ;
Confirme l'ordonnance déférée pour le surplus ;
Dit n'y avoir lieu à application, en cause d'appel, à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M.[K] aux entiers dépens recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE