COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
8e Chambre C
ARRÊT AU FOND
DU 10 MAI 2012
N°2012/228
Rôle N° 10/02176
SA HSBC FRANCE
C/
SAS LIFE VALLEY
SELARL [W]
Grosse délivrée
le :
à :SIDER
BADIE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de GRASSE en date du 07 Décembre 2009 enregistré au répertoire général sous le n° 2007F303.
APPELANTE
SA HSBC FRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège est sis [Adresse 1]
représentée par Me Maxime ROUILLOT avocat au barreau de Nice constitué aux lieu et place de la SCP SIDER, avoués et plaidant par Me BERNARDINI-FRICERO, de la SCP ROUILLOT GAMBINI avocats au barreau de Nice
INTIMES
SAS LIFE VALLEY prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège est [Adresse 7]
défaillant
SELARL [W] prise en la personne de Maître [Z] [W], en sa qualité de liquidateur judiciaire de LIFE VALLEY, demeurant [Adresse 4]
représentée par la SCP BADIE, SIMON-THIBAUT et JUSTON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place dela SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL avoués et plaidant par Me Jean-Marc COHEN, avocat au barreau de NICE substituant Me KLEIN, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 20 Mars 2012 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président, et Monsieur Jean-Noël ACQUAVIVA, Conseiller, chargés du rapport.
Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président
Monsieur Jean-Noël ACQUAVIVA, Conseiller
Madame Marie-Claude CHIZAT, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Mai 2012.
ARRÊT
Défaut,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Mai 2012.
Rédigé par Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président,
Signé par Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA COUR
Par acte notarié le 19 mai 2006, la société HSBC France (HSBC) a consenti à la société Life développement un prêt de 1 370 000€ sur trois mois remboursable in fine, destiné à financer l'acquisition d'un terrain à construire.
Le prêt n'ayant pas été remboursé, la société HSBC a fait assigner en paiement, le 16 novembre 2007, la société Life valley en se prévalant d'un engagement de caution souscrit le 9 mai 2006. L'acte fait mention de la société Life développement en qualité de débiteur cautionné et, dans la rubrique 'opération garantie', d'un prêt de 1 500 000€ d'une durée de 3 mois au taux d'intérêts Euribor 3 mois + 1,80 %.
Les sociétés Life développement et Life valley ont été mises en liquidation judiciaire le 20 février 2008, selon des procédures distinctes.
La société HSBC a déclaré sa créance au passif des deux sociétés.
L'instance en paiement dirigée à l'encontre de la société Life valley a été reprise après que le liquidateur judiciaire, la SELARL Gauthier - Sohm, ait été mis en cause.
Par jugement du 7 décembre 2009, le tribunal de commerce de Grasse a débouté la société HSBC de ses demandes, l'a condamnée aux dépens et au paiement de la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société HSBC est appelante de ce jugement.
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Vu les conclusions déposées le 10 mai 2010 par la société HSBC ;
Vu l'assignation délivrée le 25 juin 2010 à la société Life valley selon procès-verbal de recherches infructueuses ;
Vu les conclusions déposées le 20 février 2012 par la SELARL Gauthier - Sohm ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Life valley ;
Vu l'ordonnance de clôture du 20 mars 2012 ;
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la validité de l'acte introductif d'instance
Le liquidateur judiciaire oppose l'irrégularité de fond de l'acte introductif d'instance et de l'acte de mise en cause du liquidateur judiciaire qui ont été délivrés les 16 novembre 2007 et 22 avril 2008 sur le territoire de la commune de [Localité 8], située dans le ressort du tribunal d'instance de Grasse, par un huissier de justice qui, selon le moyen, n'était pas habilité à cette fin pour exercer ses fonctions dans le ressort du tribunal d'instance de Cannes.
Il résulte de l'article 5 du décret N° 56-222 du 29 février 1956, dans sa rédaction applicable en la cause, antérieure à celle résultant du décret N° 2007-813 du 11 mai 2007 entré en vigueur le 1er janvier 2009, que les huissiers de justice sont compétents pour délivrer les actes dans le ressort du tribunal d'instance de leur résidence. L'article 6 de ce texte permet d'étendre exceptionnellement leur compétence au ressort d'un ou de plusieurs autres tribunaux d'instance dépendant du même tribunal de grande instance, dans toutes les matières à l'exception des affaires pénales et de celles portées devant le tribunal d'instance.
Les huissiers de justice établis dans les ressorts des tribunaux d'instance de Grasse, Cannes, Antibes et Cagnes sur Mer ont été habilités par un arrêté du Garde des sceaux, ministre de la justice, du 17 novembre 1992 à effectuer concurremment dans ces ressorts les actes prévus à l'article 6 précité, c'est à dire ceux qui relèvent de toutes les matières, à l'exception des affaires pénales et de celles qui sont portées devant le tribunal d'instance.
Il s'ensuit qu'un huissier de justice à la résidence de [Localité 5] a compétence pour signifier, sur le territoire de la commune de [Localité 8] située dans le ressort du tribunal d'instance de Grasse, des assignations à comparaître devant un tribunal de commerce.
La demande en nullité d'actes de procédure est rejetée.
Sur la détermination de l'obligation garantie
Le liquidateur judiciaire soutient que l'acte de cautionnement du 9 mai 2006, qu'il qualifie de 'succinct et abscons', ne peut être rattaché au prêt de 1 370 000 € dont se prévaut la banque puisqu'il est souscrit en garantie d'un crédit de 1 500 000€ et qu'au surplus l'acte de prêt mentionne, de façon contradictoire, d'un côté, que le prêt doit être affecté au paiement d'un prix de 1 370 000€, d'un autre côté, que le prix a déjà été pour partie payé.
Mais, il résulte de la chronologie des opérations que :
- le 28 avril 2006, une assemblée générale extraordinaire de la société Life valley a autorisé le président à engager la société en qualité de caution de la société Life développement 'pour la délivrance d'un financement à hauteur de 1 500 000€ concernant l'acquisition d'un terrain, situé à [Localité 6], [Adresse 3] en vue de la promotion d'une résidence étudiante...' ;
- l'acte de cautionnement litigieux a été souscrit le 9 mai 2006, pour un montant de 1 500 000€, envers la société HSBC, en garantie d'un prêt de 1 500 000 €, d'une durée de 3 mois, consenti à la société Life développement au taux d'intérêts Euribor 3 mois + 1,80% ;
- l'acte notarié du 19 mai 2006 a constaté l'achat par la société Life développement d'une 'parcelle de terre à bâtir' située à [Localité 6] [Adresse 2] au prix de 1 370 000€, financé par un 'crédit d'accompagnement' du même montant d'une durée de 3 mois, au taux de 'l'Euribor à 3 mois majoré de 1,20% l'an, soit à titre indicatif à la date du 4 mai 2006, 2,792% l'an majoré d'une marge de 1,80% l'an soit au total 4,592% l'an'.
Le rapprochement de ces trois opérations, échelonnées sur trois semaines, la concordance entre la nature de l'opération financée citée dans l'autorisation de l'assemblée générale et dans l'acte de prêt, et la similitude de durée et de taux d'intérêt ne laissent aucune incertitude sur la volonté de la société Life valley de garantir le prêt du 19 mai 2006, étant au surplus observé que s'agissant d'un cautionnement donné par une société commerciale la preuve de l'obligation peut être rapportée par tous moyens.
Par suite, le jugement est infirmé en ce qu'il a débouté la banque en considérant qu'il n'est pas possible de rattacher le cautionnement à la créance litigieuse.
Sur le défaut de mention de l'existence du cautionnement dans l'acte de déclaration de la créance au passif du débiteur principal
Le cautionnement garantissant une créance sur un débiteur en procédure collective est une sûreté personnelle dépourvue d'influence sur cette procédure en sorte qu'il n'a pas à être mentionné dans la déclaration de la créance.
Dès lors, le moyen tiré du défaut de mention du cautionnement dans l'acte de déclaration de la créance au passif de la société Life développement est écarté.
Sur la recevabilité de la demande en paiement des intérêts au taux légal
La société Life Valley qui avait demandé en première instance l'application des intérêts au taux conventionnel est recevable à ne réclamer en appel que les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure adressée à la caution, cette demande, formée en conséquence de la sanction encourue pour défaut de l'information prescrite par l'article L 313-22 du code monétaire et financier, ne constituant pas une prétention nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile.
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Il convient de fixer la créance au passif de la société Life valley conformément à la demande.
Les dépens sont à la charge de la procédure collective.
L'équité ne commande pas l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour
Statuant publiquement, par arrêt de défaut,
Infirme le jugement attaqué,
Statuant à nouveau
Rejette la demande en nullité d'actes de procédure,
Rejette la demande en nullité de l'acte de cautionnement,
Rejette le moyen tiré d'un défaut de mention du cautionnement dans la déclaration de la créance au passif du débiteur principal,
Dit que la société HSBC France est recevable à se prévaloir des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure,
Fixe au passif de la société Life valley la créance de la société HSBC France, à titre chirographaire, à la somme de 1 419 941,75 €, avec intérêts au taux légal à compter du 21 février 2008,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Met les dépens à la charge de la liquidation judiciaire de la société Life valley,
Dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier Le Président