COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
2e Chambre
ARRÊT SUR CONTREDIT
DU 04 OCTOBRE 2012
N° 2012/ 376
Rôle N° 11/17684
[S] [H]
[W] [P] épouse [H]
[L] [H] épouse [Y]
C/
[J] [N]
SOCIETE FINANCIERE AZUR
Grosse délivrée
le :
à :
Me RAMPONNEAU
SCP BADIE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de CANNES en date du 22 Septembre 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 2011F00067.
DEMANDEURS AU CONTREDIT
Monsieur [S] [H]
né le [Date naissance 1] 1940 à [Localité 12] (ITALIE), demeurant [Adresse 7]
Madame [W] [P] épouse [H]
née le [Date naissance 4] 1946 à [Localité 14] (ITALIE), demeurant [Adresse 7]
Madame [L] [H] épouse [Y]
née le [Date naissance 3] 1970 à [Localité 9], demeurant [Adresse 7]
tous trois représentés par Me Jean-louis RAMPONNEAU, avocat plaidant postulant au barreau de GRASSE substitué par Me Joëlle GUILLOT, avocat au barreau de GRASSE
DEFENDEURS SUR CONTREDIT
Maître [J] [N] Agissant en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL FINANCIERE AZUR, désigné à ces fonctions suivant Jugement du Tribunal de Commerce de CANNES du 15 Mars2011
né le [Date naissance 5] 1960 , demeurant [Adresse 6]
représenté par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocats postulants au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
SOCIETE FINANCIERE AZUR
dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocats postulants au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 10 Septembre 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur SIMON, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Robert SIMON, Président
Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller
Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Viviane BALLESTER.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Octobre 2012
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Octobre 2012,
Signé par Monsieur Robert SIMON, Président et Madame Viviane BALLESTER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Monsieur et Madame [S] [H] et Madame [L] [H] ont cédé, le 5 septembre 2008, à la S.A.R.L. Financière Azur toutes les actions qu'ils détenaient et qui composaient le capital social de la S.A.S. Azur Bâtiment, propriétaire d'un fonds de commerce de travaux de gros 'uvre du bâtiment moyennant le prix de 2 millions d'€, le paiement d'un solde de 100.000 € étant différé. Une clause intitulée Médiation/Arbitrage était insérée dans l'acte de cession en cas de contestations et litiges et désignait le centre de Médiation et d'Arbitrage de [Localité 13]. Un protocole d'accord du 30 janvier 2009 a été régularisé entre les parties à propos de la garantie de passif, il contenait la même clause Médiation/Arbitrage. La S.A.S. Azur Bâtiment et la S.A.R.L. Financière Azur ont fait l'objet, le 2 février 2010 de procédure de redressement judiciaire, convertie ultérieurement, le 15 mars 2011, en liquidation judiciaire pour ce qui concerne la S.A.R.L. Financière Azur, Maître [J] [N] étant nommé en qualité de liquidateur judiciaire. Une action en nullité de la convention de cession d'actions de la S.A.S. Azur Bâtiment avait été engagée contre Monsieur et Madame [S] [H] et Madame [L] [H] par les organes de la procédure collective de la S.A.R.L. Financière Azur, le 30 avril 2010, sur le fondement des man'uvres dolosives et de l'erreur provoquée, et une expertise judiciaire confiée à Monsieur [U] [F], expert-comptable, avait été ordonnée par référé, le 8 juillet 2010.
Par jugement contradictoire en date du 20 janvier 2010, le Tribunal de Commerce de Cannes a sursis à statuer sur la demande de la S.A.R.L. Financière Azur dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise judiciaire.
Par un second jugement contradictoire, statuant sur une omission de statuer en date du 22 septembre 2011, le Tribunal de Commerce de Cannes, complétant son jugement, a débouté Monsieur et Madame [S] [H] et Madame [L] [H] de leur demande visant à l'incompétence du Tribunal de Commerce de Cannes au profit du tribunal arbitral et s'est donc déclaré matériellement compétent aux motifs que le litige en cours « ne concerne en rien l'exécution ou l'interprétation » de la convention de cession d'actions et que Maître [J] [N], ès-qualités, n'était pas signataire de la clause compromissoire et poursuivait une action engagée au profit de la collectivité des créanciers.
Monsieur et Madame [S] [H] et Madame [L] [H] ont régulièrement formé, le 6 octobre 2011, un contredit motivé à l'encontre de cette décision dans les formes et délai légaux.
Monsieur et Madame [S] [H] et Madame [L] [H] ont fait déposer, le 6 octobre 2011, à l'appui de leur contredit, les observations écrites selon lesquelles *la clause compromissoire peut être mise en 'uvre de manière autonome, indépendamment de la validité ou de l'efficacité de la convention qui la contient, il s'agit du principe compétence-compétence qui ne connaît de limité qu'en cas de nullité manifeste, * la demande de nullité du contrat est bien soumise à la clause compromissoire, il s'agit d'un litige relatif à l'exécution de la convention, * enfin le liquidateur judiciaire a intenté une action en nullité pour dol ou erreur substantielle et la clause compromissoire s'impose à lui.
Maître [J] [N], ès-qualités, a fait déposer, le 10 septembre 2012, à l'appui de son argumentation, les observations écrites selon lesquelles *la clause compromissoire limite la compétence de l'arbitre aux litiges ayant trait à l'interprétation et à l'exécution de la convention, et ne l'a pas étendue aux litiges ayant trait à sa validité, * en raison de l'ancienneté du litige, il convient d'évoquer le fond de l'affaire par application de l'article 89 du code de procédure civile, * au fond, que la preuve des agissements dolosifs des vendeurs entraînant l'annulation de la cession des actions de la S.A.S. Azur Bâtiment au profit de la S.A.R.L. Financière Azur, est suffisamment rapportée.
Attendu que la convention de « cession d'actions » conclue, le 5 septembre 2008, entre d'une part, Monsieur et Madame [S] [H] et Madame [L] [H] et d'autre part, la S.A.R.L. Financière Azur comporte un article 13 intitulé « Médiation/Arbitrage » libellé ainsi : « Les contestations et litiges auxquels pourraient donner lieu l'interprétation ou l'exécution des présentes, seront d'abord soumis préalablement à toute action contentieuse au règlement de médiation et en cas d'échec de celui-ci, au règlement d'arbitrage du Centre de Médiation et d'Arbitrage de [Localité 13] auquel les parties déclarent adhérer' » (soulignement ajouté par les soins du rédacteur de la présente décision) ;
Attendu que sous l'empire de la loi applicable dans sa rédaction antérieur au décret N° 2001-48 en date du 13 janvier 2011, entré en vigueur le 1er mai 2011 et de la jurisprudence issue de la loi alors applicable, seule la nullité ou l'inapplicabilité manifeste de la clause compromissoire est de nature à faire obstacle au principe dit « compétence-compétence » selon lequel il appartient au seul arbitre désigné de statuer sur sa propre compétence et d'examiner l'existence, la validité et l'étendue de la convention d'arbitrage ; que la compétence de l'instance arbitrale a été fixée par l'article 13 de la convention de « cession d'actions » ; que celui-ci investit l'arbitre uniquement pour connaître des contestations ayant trait à l'interprétation et à l'exécution de ladite convention ; que cette limitation expresse, précise et claire de la mission dévolue à l'instance arbitrale exclut que cette dernière puisse connaître des contestations relatives à la conclusion du contrat ; que le litige dont le Tribunal de Commerce de Cannes est saisi relève bien de cette catégorie (action en nullité d'une convention fondée sur un vice du consentement) ;
Attendu que manifestement, la clause compromissoire litigieuse n'a pas entendu conférer à l'instance arbitrale le pouvoir de connaître le litige dont est saisi le Tribunal de Commerce de Cannes ; que la clause compromissoire est manifestement inapplicable au litige en question ; que cette circonstance permet de faire obstacle au principe « compétence-compétence » rappelé ci-dessus et autorisait donc la juridiction consulaire cannoise à retenir, comme elle l'a fait, sa compétence matérielle pour connaître de l'action en nullité de convention de « cession d'actions » ;
Attendu que le jugement attaqué mérite confirmation pour ces motifs et ceux non contraires des premiers juges, conformément à l'article 955 du code de procédure civile ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire application de la simple faculté ouverte par l'article 89 du code de procédure civile et d'évoquer le fond de l'affaire, outre qu'une expertise est en cours devant les premiers juges ;
Attendu que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 7OO du code de procédure civile ; que les parties seront déboutées de leur demande faite à ce titre ;
La Cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé par sa mise à disposition au greffe de la Cour d'Appel d'AIX en PROVENCE à la date indiquée à l'issue des débats, conformément à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Reçoit le contredit de Monsieur et Madame [S] [H] et de Madame [L] [H] comme régulier en la forme.
Au fond, confirme les jugements déférés en toutes leurs dispositions.
Dit que les frais afférents éventuellement au contredit seront à la charge de qui a succombé sur la question de compétence en application de l'article 88 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT