COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
17e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 15 NOVEMBRE 2012
N°2012/683
AB
Rôle N° 11/15679
SCI SABIA
C/
[U] [C] [Y] épouse [L]
Grosse délivrée le :
à :
Me REBIBOU, avocat au barreau de NICE
Me PAYAN, avocat au barreau de GRASSE
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 10 Juin 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 09/503.
APPELANTE
SCI SABIA, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me David REBIBOU, avocat au barreau de NICE
INTIMEE
Madame [U] [C] [Y] épouse [L], demeurant [Adresse 4]
représentée par Me Aline PAYAN, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Philippe LASSAU, avocat au barreau de GRASSE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 25 Septembre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Alain BLANC, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur Alain BLANC, Président
Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller
Madame Brigitte PELTIER, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Monique LE CHATELIER.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Novembre 2012
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Novembre 2012
Signé par Monsieur Alain BLANC, Président et Madame Monique LE CHATELIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES
La S.C.I SABIA est régulièrement appelante d'un jugement rendu le 10 juin 2010 par le Conseil de Prud'hommes de GRASSE qui , après avoir constaté une relation contractuelle entre cette société et Madame [U] [C] [Y] épouse [L], a dit que la rupture du contrat de travail ainsi constaté s'analysait en un licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement a condamné la dite société au paiement des sommes suivantes :
- 500,00 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 330,00 euros au titre du préavis,
- 33,00 euros au titre des congés payés afférents,
- 3 000,00 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,
- 750,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile et ordonné la délivrance des documents sociaux.
Par des moyens qui seront analysés dans le corps du présent arrêt, la S.C.I SABIA demande à la Cour de réformer le jugement entrepris, de débouter Madame [L] de l'ensemble des demandes et la condamner à lui verser une somme de 2 500,00 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Madame [L] demande à la Cour de :
- confirmer la décision entreprise concernant les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'indemnité de préavis, les congés payés sur préavis, et l'indemnité pour travail dissimulé,
- l'infirmer pour le reste et condamner la S.C.I SABIA au paiement de la somme de 55 091,00 euros à titre de rappel de salaires non versés de janvier 2004 à février 2009,
- ordonner la délivrance des documents sociaux rectifiés sous astreinte de 150,00 euros par jour de retard,
- dire l'ensemble des sommes assimilées à des salaires ainsi que les indemnités légales de rupture, productives d'intérêts de droit, capitalisés d'année en année, à compter de la citation devant le bureau de conciliation, et ce jusqu'à parfait paiement,
- dire que les appels de salaire, préavis, congés payés sur préavis et congés payés découlent du contrat de travail et sont exclus en conséquence de l'article 10 du tarif des huissiers résultant du décret du 8 mars 2001,
- dire que les sommes allouées seront des sommes nettes, exemptes de toutes charges de CSG et de CRDS, qui seront à la charge de l'employeur,
- condamner la S.C.I SABIA à verser la somme de 4 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens, en ce y compris le coût de la traduction des documents.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Vu les conclusions des parties oralement soutenues à l'audience ;
Attendu que Madame [L] prétend avoir été engagée sans être déclarée à compter du mois de juillet 2003 pour assurer l'emploi de ' gardien de la villa Lou Pichoun ' par la société sus visée et qu'il est constant qu'elle a occupé à titre gratuit un local aménagé à l'intérieur de la dite villa ;
qu'elle prétend avoir également effectué de 'multiples tâches pour lesquelles elle n'a jamais reçu aucun salaire ' ;
qu'elle produit un document intitulé ' ATTESTATION ' ainsi rédigé :
' je soussignée [C] [Y] née le [Date naissance 1]/1978 atteste partir de ce logement gratuit ' 2 pièces avec terrasse et jardin ' à compter du 01/03/2009 de Adresse [Adresse 3]. Signé par ' Les propriétaires Sci sabia FAMILLE [N] ' et ' Occupante à titre gratuit '( sic) ;
Attendu que l'intimée a alors prétendu qu'il était ainsi ' de facto' mis fin à ses fonctions de gardienne et que cette rupture s'analysait comme étant un licenciement irrégulier et dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Sur l'existence d'un contrat de travail :
Attendu que l'intimée fait valoir que l'occupation du logement à titre gratuit correspondait à un avantage en nature en échange de son travail de gardien et qu'elle démontre l'existence d'un lien de subordination avec la société appelante ;
qu'elle verse aux débats de nombreux courriels échangés dont il ressort qu'il lui était donné des instructions telles que le nettoyage de la villa, faire les courses, faire les lits, payer des entreprises intervenantes ;
qu'en effet ces instructions ou demandes d'instructions ressortent suffisamment des courriels produits tels que celui du 1er février 2005 et la réponse apportée ; celui du 21 mai 2007 concernant une liste de courses et le retrait d'argent, celui du 22 juillet 2007 sur le port des bagages, celui du 26 juillet 2007 relatif au ménage et la réponse telle que suit :
'tu prépares mon appartement pour le 4-5 août. J'arriverai moi le 13-14 août et pour ce jour il faut nettoyer la maison de mes parents; la batterie de ma voiture n'est pas connectée, le garage Renault à [Localité 7] est à coté et ils doivent réparer quelques pièces, dès que ces pièces arrivent ils vont t'appeler pour que tu amènes la voiture, tu amènes la voiture avec ton ami J' ;
qu'il est produit un courriel du 6 septembre 2007 provenant de la SCI relatif au port des bagages, à l'achat de nourriture et à la préparation des lits ;
que, dans un courriel daté du 4 janvier 2008, il est demandé à l'intimée de ' contrôler les comptes avant d'envoyer les paiements ' et de prévenir si elle a ' besoin de plus pour payer les factures ', mentionnant également l'envoi d'argent à dé&poser sur un compte ;
que, dans un courriel du 16 mars 2008, il est également demandé à l'intimée de faire des courses en vue de l'arrivée des propriétaires ' ;
qu'il est également produit de nombreux autres courriels dont il ressort qu'il lui était demandé de s'occuper du chauffage, de la piscine, de nettoyage de la maison avec des instructions précises tant sur la durée prévue de la prestation que sur les pièces et meubles à nettoyer ;
qu'il ressort également d'un courriel du 7 avril 2008, qu'il a été fait des reproches à l'intimée concernant son absence et le fait de ne pas avoir répondu aux appels téléphoniques, ce courriel ajoutant que l'intimée devait toujours prévenir quand elle partait en vacances et prévenir quand elle rentrait ;
qu'il ressort de ces mêmes éléments que l'intimée a du se justifier concernant son absence ;
Attendu qu'il est également produit des attestations dont il ressort que l'intimée a été vue effectuer diverses tâches d'entretien au sein de la propriété ;
Attendu dès lors que, par des motifs que la Cour adopte, après avoir constaté que la preuve d'un lien de subordination, caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur ayant le
pouvoir de donner des ordres et des directives pour l'exécution de différentes tâches sur la propriété et d'en contrôler l'exécution consistant dans des prestations sur la propriété, était rapportée alors que la rémunération apparaît avoir été constituée par un avantage en nature à savoir la mise à disposition d'un logement, les premiers juges en estimant que les parties étaient liées par un contrat de travail et que la rupture s'analyse comme étant un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ont, par des motifs que la Cour adopte, fait une exacte appréciation des éléments de la cause ;
Attendu que le jugement sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions, l'intimée qui conclut à la confirmation du jugement en ce qui concerne les sommes allouées au titre de l'indemnité de préavis, des congés payés afférents et de l'indemnité pour travail dissimulé, ne fournissant aucun élément de nature à établir un temps de travail supérieur à celui qui a été justement estimé par les premiers juges et sur la base duquel elle a été indemnisée à la suite de la rupture justement qualifiée par les premiers juges ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale,
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Condamne la S.C.I SABIA à payer à Madame [U] [C] [Y] épouse [L] la somme de 1 500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
Condamne la société appelante à supporter les entiers dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT