COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 09 AVRIL 2013
J.V
N° 2013/
Rôle N° 12/06574
[M], [J] [N]
C/
[D] [C] [N]
Grosse délivrée
le :
à :BADIE
la SCP BOISSONNET-ROUSSEAU
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance d'Aix en Provence en date du 19 Mars 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 10/07726.
APPELANT
Monsieur [M], [J] [N]
né le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 1], demeurant [Adresse 1]
représenté par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
plaidant par Me Isabelle BARACHINI FALLET, avocat au barreau de TARASCON
INTIME
Monsieur [D] [C] [N]
né le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 1], demeurant [Adresse 2].
représenté par la SCP BOISSONNET ROUSSEAU, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
plaidant par Me Claude GAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 11 Mars 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, M.VEYRE, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Jean-Paul LACROIX-ANDRIVET, Président
Monsieur Jean VEYRE, Conseiller
Monsieur Olivier BRUE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Avril 2013
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Avril 2013,
Signé par Monsieur Jean-Paul LACROIX-ANDRIVET, Président et Mademoiselle Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Vu le jugement rendu le 19 mars 2012 par le Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE dans le procès opposant Monsieur [D] [N] à Monsieur [J] [N],
Vu la déclaration d'appel de Monsieur [M] [N] du 6 avril 2012,
Vu les conclusions récapitulatives déposées par Monsieur [D] [N] le 9 novembre 2012,
Vu les conclusions récapitulatives déposées par Monsieur [M] [N] le 18 janvier 2013,
SUR CE
Attendu que Madame [T] [E] est décédée le [Date décès 1] 2000 en laissant pour lui succéder ses deux enfants, M.M [M] et [D] [N], et son mari, Monsieur [Q] [N], lui-même décédé le [Date décès 2] 2008 en l'état d'un testament du 7 octobre 2004 par lequel il léguait la quotité disponible à mon fils [M] ;
Attendu, sur les faits de recel reprochés par Monsieur [D] [N] à son frère, qu'ainsi que l'a relevé le tribunal, Monsieur [D] [N] produit des extraits de compte chèque de son père démontrant que la veille du décès de son épouse, 1.500 000 francs ont été débités et n'ont pas été portés à l'actif de la succession et qu'après le décès de sa femme, il a continué à placer des fonds en compte à terme, notamment 300.000 euros virés sur son compte livret le 3 mai 2000 , cette somme ayant ensuite fait l'objet d'un virement au profit de son fils, [M] [N] le 14 mai 2002, et que ce dernier a effectué une déclaration de succession le 28 avril 2009 sur laquelle ne figure pas la somme de 300.000 euros reçue de son père ;
Attendu qu'il n'apparaît pas que Monsieur [M] [N], ou son père, aient informé Monsieur [D] [N] du don manuel dont le premier avait ainsi bénéficié et qu'il est plus que douteux que le notaire ait évoqué cette donation pour la qualifier de don manuel non rapportable, comme le prétend l'appelant, alors cela ne résulte nullement des pièces versées aux débats, et qu'il est de jurisprudence constante que sauf dispense expresse de rapport qui n'est pas démontrée en l'espèce, les dons manuels sont présumés rapportables, étant en outre observé qu'en présence d'héritier réservataire, la dissimulation d'une donation préciputaire susceptible de réduction est constitutive d'un recel successoral ;
Attendu qu'il est ainsi établi que Monsieur [M] [N] a dissimulé la donation dont il avait bénéficié jusqu'à ce que son frère demande au notaire déjà saisi pour régler la succession de lui communiquer les relevés de comptes leur père, ce qui ne peut s'expliquer que par la volonté de Monsieur [M] [N] de frustrer son cohéritier et que c'est ainsi à juste titre que le tribunal a estimé que le recel était caractérisé et dit que Monsieur [N] serait privé conformément aux dispositions de l'article 778 du code civil, de sa part sur la somme de 326.240,90 euros, en sorte que ses droits devront se calculer sur l'actif partageable, déduction faite de cette somme et des intérêts au taux légal jusqu'à la date du partage, Monsieur [M] [N] pouvant arrêter le cours de ces intérêts en indemnisant son frère, et étant également condamné à verser une provision à son frère de 150.000 euros ;
Attendu que c'est à bon droit et par des motifs pertinents que la Cour adopte que le tribunal a débouté Monsieur [D] [N] de ses demandes concernant la location de l'immeuble [Adresse 3] et la jouissance du terrain [Adresse 4], qui étaient loué ou occupé, non pas par Monsieur [M] [N] personnellement, mais par la société SACTA, et dont il n'est pas établi par les pièces versées aux débats, qu'ils fassent l'objet d'une occupation privative depuis que la société a cessé son activité ;
Attendu, sur l'occupation de la maison du [Adresse 3], que Monsieur [D] [N] ne démontre pas que son frère occupait privativement cet immeuble, et que le fait que celui-ci avait garé dans le sous-sol un véhicule et une moto, ne peut, dès lors que ce stationnement ne peut être assimilé à une jouissance exclusive, justifier l'indemnisation de l'indivision ou du co-indivisaire en application de l'article 815-9 du code civil ;
Attendu, sur le contrat d'assurance- vie du 15 octobre 2007 dont Monsieur [M] [N] est le bénéficiaire, qu'il apparaît à l'examen des signatures figurant sur ce contrat, la demande d'adhésion au contrat et l'attestation intitulée 'contrat en unités de compte', qui sont de la même date, que ces signatures sont de la même main, et que Monsieur [D] [N] n'est pas fondé à soutenir que contrairement aux deux autres documents, le contrat n'a pas été signé par son père ;
Attendu qu'un contrat en assurance-vie peut être requalifié en donation ni les circonstances dans lesquelles son bénéficiaire a été désigné révélent la volonté du souscripteur de se dépouiller de manière irrévocable ; que Monsieur [Q] [N] était agé lorsqu'il a souscrit le contrat litigieux de 95 ans ; qu'il était atteint de la maladie de Parkinson à un stade avancé selon la grille d'évaluation versée aux débats et est décédé un an plus tard ; qu'il a désigné comme bénéficiaire la personne qui était légataire de la quotité disponible de sa succession ; qu'il en résulte que la souscription de ce contrat n'était pas destiné à lui assurer un complément de retraite à cette époque de son existence et dans son état avancé de maladie, et qu'il apparaît qu'il n'y avait pas de véritable aléa dans les dispositions prises, et qu'il existait chez le souscripteur, une volonté actuelle et irrévocable de se dépouiller ; qu'il s'ensuit que l'opération doit être qualifiée de donation et que le montant de la prime versée doit être rapporté à la succession ;
Attendu que Monsieur [D] [N], qui ne démontre ni le caractère infamant des propos tenus pendant le cours de la procédure par l'appelant, ni l'existence d'un préjudice distinct de celui qui est réparé par l'application des sanctions du recel, ne peut prétendre à l'allocation de dommages-intérêts ;
Attendu que les dépens doivent être déclarés frais privilégiés de partage ; qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Déclare les dépens d'appel frais privilégiés de partage et dit qu'ils seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER,LE PRESIDENT,