COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
11e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 30 MAI 2013
N° 2013/281
Rôle N° 11/13029
SA MERCIALYS
SOCIETE IMMORENTE
C/
SARL ALICE ET ARSEN
Grosse délivrée
le :
à :
BADIE
JAUFFRES
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance à compétence commerciale de MARSEILLE en date du 06 Juin 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 07/11440.
APPELANTES
SA MERCIALYS Agissant poursuites et diligences de son représentant légal
dont le siège social est sis [Adresse 4]
représentée par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constituée en lieu et place de la SCP DE SAINT FERREOL - TOUBOUL, avoués
plaidant par SCP F. ROSENFELD- G. ROSENFELD & V. ROSENFELD, avocats au barreau de MARSEILLE,
SOCIETE IMMORENTE Agissant poursuites et diligences de son représentant légal,
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constituée en lieu et place de la SCP DE SAINT FERREOL - TOUBOUL, avoués
plaidant par SCP F. ROSENFELD- G. ROSENFELD & V. ROSENFELD, avocats au barreau de MARSEILLE,
INTIMEE
SARL ALICE ET ARSEN, poursuites et diligences de son représentant légal, demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Jean marie JAUFFRES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
plaidant par Me Xavier GARRIOT, avocat au barreau de MARSEILLE,
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 02 Avril 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Mme Anne CAMUGLI, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre
Mme Anne CAMUGLI, Conseiller
Monsieur Michel JUNILLON, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Anaïs ROMINGER.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Mai 2013
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Mai 2013,
Signé par Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre et Mme Anaïs ROMINGER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Par acte du 5 novembre 1997, la SCI Centre Dromel aux droits de laquelle est venue la SA MERCIALYS a donné à bail à usage commercial à la SARL Rolland aux droits de laquelle vient la SARL ALICE ET ARSEN les locaux situés [Adresse 2] pour une durée de neuf années à compter du 5 novembre 1997 pour un loyer annuel de 21 952,66 euros.
Le bail s'est poursuivi par tacite reconduction à compter du 5 novembre 2006.
Par acte du 14 novembre 2006, la SA MERCIALYS a fait délivrer à la SARL ALICE ET ARSEN un congé avec offre de renouvellement au loyer annuel hors taxes de 33 600 EUR à compter du 29 septembre 2007 pour une nouvelle durée de neuf ans
La SARL ALICE ET ARSEN a accepté l'offre de renouvellement mais contesté le montant du loyer.
Par décision du 9 juin 2008, la juridiction des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Marseille a ordonné une expertise destinée à fixer la valeur locative des locaux loués.
L'expert, M. [V] [N] a déposé son rapport le 3 novembre 2010, proposant une valeur locative annuelle au 29 septembre 2007, de 17 950 EU .
Par mémoire du 9 mars 2011, la SA MERCIALYS a sollicité la fixation du loyer déplafonné à compter du 29 septembre 2007 à la somme annuelle de 26 673, 66€ avec intérêts au taux légal à compter de la date d'effet du congé et capitalisation des intérêts.
Par jugement contradictoire du 6 juin 2011, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Marseille a fixé le prix du loyer du bail renouvelé au 29 septembre 2007 à la somme annuelle hors charges et taxes de 17950 EUR
condamné la SA MERCIALYS ( erreur)à payer des intérêts au taux légal sur l'arriéré à compter de chacune des échéances échues le 29 septembre 2007
ordonné la capitalisation annuelle des intérêts
ordonné l'exécution provisoire,
rejeté tout autre demande,
fait masse des dépens comprenant les frais d'expertise et dit que chaque partie en supporterait la moitié.
La SA MERCIALYS et la société IMMORENTE venant aux droits de celle-ci ont relevé appel de la décision le 21 juillet 2011.
Par conclusions déposées et signifiées le 12 octobre 2011, elles sollicitent la réformation de la décision la fixation du prix du loyer renouvelé au 29 septembre 2007 à la somme de 23 600 EUR hors taxes et hors charges par an, toutes autres clauses et conditions du bail restant inchangées outre intérêts et capitalisation sur chacune des échéances échues depuis le 29 septembre 2007, la condamnation de la SARL ALICE ET ARSEN au paiement de la somme de 2000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d'appel et d'expertise.
Elles rappellent que la SA MERCIALYS a cédé les murs de son exploitation à la société IMMORENTE , cession régulièrement notifiée le 7 mars 2011 .
Elles sollicitent confirmation des appréciations de l'expert sur l'évolution favorable des facteurs locaux de commercialité notamment à raison de l'édification au cours du bail à renouveler du complexe immobilier le Magritte, le fait que le quartier de [Adresse 6] est devenue un des plus importants employeurs de [Localité 1], la création dans ce secteur de 13 500 emplois, la progression du nombre des ménages et de la qualité du logement, l'amélioration de la qualité de vie et du niveau de vie ayant généré un pouvoir d'achat plus important, que la valeur locative par m2 de 190 EUR appliquée à une surface utile pondérée de 94,40m2 retenue par l'expert est contestable des lors que ce dernier a retenu des locaux non équivalents, les locaux mitoyens disposant d'une valeur locative moyenne de 250 EUR parM2 sur laquelle doit être alignée celle des locaux loués.
Par conclusions au fond déposées et signifiées le 6 décembre 2011, la SARL ALICE ET ARSEN conclut à la confirmation du jugement déféré et à la condamnation de la société IMMORENTE à lui payer la somme de 3000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle conteste l'allégation de dynamisme invoqué par la bailleresse, invoque la concurrence accrue d'un voisin direct de la boulangerie, l'absence de modification notable de la commercialité du secteur, le fait que les surfaces louées (120 m²) sont supérieures à la surface mesurée par l'expert judiciaire (108,2 m²), le caractère exorbitant d'un certain nombre de clauses du contrat, (paiement du foncier par le preneur, solidarité cédant/cessionnaire en cas de cession du fonds de commerce, fixation annuelle du loyer par rapport à l'indice du coût de la construction et non ILD, moins évolutif'), le fait que les deux références locatives produites par la bailleresse concernent des locaux appartenant également à celle-ci.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 7 mars 2013.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La recevabilité de l'appel n'est pas contestée et la procédure ne révèle aucune irrégularité susceptible d'être relevée d'office.
Sur le fond.
Contrairement aux affirmations de les sociétés MERCIALYS et IMMORENTE, le jugement du 9 juin 2008 , qualifié d'avant dire droit au fond, ne se prononce pas sur le principe du déplafonnement du loyer du bail renouvelé. Il n'ordonne qu'avant dire droit une expertise à raison du désaccord opposant les parties sur la valeur locative.
Le principe du déplafonnement n'est dès lors pas acquis.
L'expert judiciaire décrivant le secteur dans lequel se situe le local concerné, estime que ce dernier dépend du noyau villageois étendu de l'intersection du [Adresse 2] [Adresse 5] et [Adresse 6], zone dans laquelle on trouve une poste, le pôle emploi, des services bancaires, une pharmacie, un bar PMU, des commerces de bouche, épicerie, primeur et des commerces de services. L'expert qualifie le lieu de très passant du fait d'un trafic voiturier notable.
Il relève que les immeubles d'habitation sont majoritaires et abritent pour l'essentiel la classe moyenne, que les infrastructures sportives comme le palais des ports et le stade vélodrome drainent également lors des manifestations sportives une population considérable, que le complexe immobilier le Magritte composé d'appartements de standing et de commerces en rez-de-chaussée, édifié au cours du bail à renouveler et mis en service après celui ci témoigne de l'activité du secteur. Il en conclut que les facteurs locaux de commercialité du secteur lui semblent favorables puisque s'appuyant de manière concomitante sur une cliente pérenne résidante, une clientèle de passage et enfin une clientèle festive lors des manifestations culturelles ou sportives.
Or, ces conclusions retiennent le caractère favorable des facteurs locaux de commercialité du secteur sans caractériser d'évolution notable, pendant la période de référence ni affirmer que l'amélioration de la commercialité aurait présenté un intérêt pour le commerce considéré .
Au demeurant l'expert retient une valeur locative inférieure au loyer contractuel initial.
La SARL Alice et ARSEN produit quant à elle les données démographiques et conclusions d'un expert dont il ressort que l'évolution de la population du quartier [Localité 2] n'a pas connu une évolution significative puisque sa progression n'a été que de 1,96 % entre les recensements de 1990 et 1999, que sur la période de référence, aucune nouvelle voie ni zone piétonne n'a été créée pour faciliter l'accès aux commerces de la SARL Alice et ARSEN, qu'il n'y a pas eu davantage de création de lignes de bus ou de métro.
En l'absence de modification notable démontrée des facteurs locaux de commercialité de nature à avoir eu une incidence favorable sur l'activité commerciale du preneur et en l'absence de toute autre modification des caractéristiques du local considéré , de la destination des lieux, des obligations respectives des parties , il n'y a pas lieu de retenir que le loyer des locaux loués doive être déplafonné par application de l'article L 145-34 du code de commerce.
Le jugement déféré sera par conséquent infirmé et la valeur du bail renouvelé sera fixée conformément aux dispositions de l'article L 145-34 du code de commerce
Sur l'article 700 du code de procédure civile.
Il n'y a pas lieu de faire application en est un des dispositions de l'article 700 du code de civile.
La charge des dépens sera supportée par les sociétés MERCIALYS et IMMORENTE
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant publiquement, contradictoirement,
Infirme le jugement déféré.
Dit n'y avoir lieu à déplafonnement du loyer du bail renouvelé.
Dit que la valeur du bail renouvelé sera fixée conformément aux dispositions de l'article L 145-34 du code de commerce.
Rejette toute autre demande.
Condamne les sociétés MERCIALYS et IMMORENTE aux dépens en ceux compris le coût de l'expertise judiciaire, avec distraction au profit de Me Jauffres, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT