COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
9e Chambre C
ARRÊT AU FOND
DU 21 JUIN 2013
N°2013/ 433
Rôle N° 11/18756
Société AVENANCE ENSEIGNEMENT ET SANTE
C/
[G] [R]
Grosse délivrée le :
à :
-Me Virginie SAUVAT, avocat au barreau de MARSEILLE
- Me Fabrice ANDRAC, avocat au barreau de MARSEILLE
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 06 Septembre 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 10/1434.
APPELANTE
Société AVENANCE ENSEIGNEMENT ET SANTE, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Virginie SAUVAT, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIME
Monsieur [G] [R], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Fabrice ANDRAC, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Emmanuelle LE TREUT, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 07 Mai 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Louis DABOSVILLE, Président de Chambre et Madame Catherine VINDREAU, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur Louis DABOSVILLE, Président de Chambre
Monsieur Michel VANNIER, Président de Chambre
Madame Catherine VINDREAU, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Juin 2013
ARRÊT
CONTRADICTOIRE,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Juin 2013
Signé par Monsieur Louis DABOSVILLE, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
M.[R] a été embauché en qualité d'employé de restauration par diverses entreprises et en dernier lieu par la société ELRES(anciennement AVENANCE) selon contrat à durée indéterminée en date du 1° janvier 2003.
Cet emploi est soumis à la convention collective de la restauration.
M.[R] a présenté sa démission par courrier du 14 avril 2009, avec effet au 1° mai 2009.
Le 7 mai 2010 M.[R] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Marseille pour demander de requalifier la rupture du contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse aux torts de la société ELRES et demander à l'encontre de son employeur le règlement de diverses sommes.
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Par jugement du 6 septembre 2011, le Conseil de Prud'hommes de Marseille a :
- requalifié la rupture du contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamné l'employeur à payer à M.[R] les sommes suivantes:
- indemnité de préavis : 2216 euros,
- indemnité de congés payés sur préavis: 221 euros,
- indemnité de licenciement : 1920 euros,
- indemnité pour préjudice moral: 26 600 euros,
- frais irrépétibles: 1500 euros.
- débouté les parties de leurs autres demandes principales et reconventionnelles.
- fixé la moyenne mensuelle des salaires des trois derniers mois à la somme de 1108, 10 euros.
-ordonné l'exécution provisoire.
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La société ELRES a interjeté appel de cette décision.
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Au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la Cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués, la société ELRES demande l'infirmation du jugement, de débouter M.[R] de ses prétentions et de le condamner à payer la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
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Au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la Cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués, M.[R] demande la confirmation du jugement sauf à porter à la somme de 30 000 euros le montant des dommages et intérêts attribués pour exécution déloyale du contrat de travail, et la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de l'appel
L'examen des éléments produits aux débats tant en ce qui concerne la formalité de la déclaration d'appel que le respect du délai légal applicable à ce recours, au regard de la date de notification du jugement, rend cet appel recevable en la forme.
Sur la démission
La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire etnon équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.
Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de la démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire, d'une démission.
Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.
Le contenu de la lettre de démission en date du 14 avril 2009 précise ce qui suit, en termes dactylographiés:
'Je souhaite faire valoir mes droits à la retraite à compter du 1° mai 2009.
Je ne ferais(sic) donc plus partie des effectifs à cette date.'
M.[R] ne soutient plus que la signature apposée au bas de ce document n'était pas la sienne: la question a été posée par la Cour à l'audience et ce point acté ;
En revanche M.[R] expose qu'il ne sait ni lire ni écrire, ce dont a profité l'employeur pour orchestrer une prétendue demande de mise à la retraite, lors que, âgé de moins de 60 ans, il n'avait aucun intérêt à la solliciter, faute de pouvoir bénéficier d'une retraite à taux plein ;
M.[R] souligne ainsi que, de fait, la CRAM a d'abord rejeté sa demande du fait de l'absence de cessation d'activité au 1° janvier 2009, ce que la société ELRES a pallié par de nouvelles démarches en attestant de manière irrégulière d'un départ au 1° mai 2009, nonobstant la circonstance qu'elle n'ait payé les sommes en cause qu'en juillet ;
M.[R] expose ainsi qu'il n'avait lu-même pas réalisé qu'il ne faisait plus partie des effectifs de la société puisqu'il a produit en juillet de la même années deux certificats médicaux attestant de son aptitude à reprendre le travail ;
M.[R] considère en conséquence qu'il n'a pas manifesté de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail, la seule demande de solliciter de l'employeur de remplir les imprimés relatifs à la liquidation d'une pension qu'il ne pouvait à l'époque percevoir à taux plein n'étant pas de nature à caractériser sa demande de rupture ;
La société ELRES oppose la validité du document signé par M.[R] , attestant d'une démarche dont elle n'était pas juge, et dont l'intéressé n'a pas protesté pendant plus d'un an, ce d'autant qu'il bénéficiait d'une retraite à taux plein au titre de l'inaptitude au travail ; elle estime ne pas être tenue pour responsable de l'erreur d'appréciation qu'aurait faite M.[R] quant au montant de ses droits ;
Il n'est, de fait, aucunement établi que la société ELRES ait été à l'origine de la démarche effectuée par M.[R], ce tant sur le fond que sur la forme : la lettre de démission du 14 avril 2009 est simplement dactylographiée et elle est en revanche signée par M.[R] , lequel ne donne aucune précision sur les circonstances qui auraient entouré sa rédaction par l'employeur, si tel avait été le cas ;
M.[R] était quasi analphabète mais il était ainsi, comme le démontrent les attestations qu'il produit, aidé par des collègues ;
Il n'est aucunement établi que la société ELRES ait procédé, directement ou indirectement, aux démarches auprès de la CRAM et qu'elle ait réceptionné les correspondances de cette dernière ou rempli les imprimés nécessaires, et les éventuelles incohérences dont se prévaut M.[R], pas plus que les erreurs d'appréciation sur la validité de sa démarche ne lui sont pas opposables : si en effet l'employeur doit être tenu à faute pour s'être substitué à son salarié pour lui imposer de solliciter ses droits à retraite, il ne peut logiquement pas plus être tenu d'un rôle de conseiller qui est celui des services de la CRAM ;
La démission de M.[R] doit en conséquence être tenue pour valable ;
Le jugement est infirmé ;
Sur les incidences indemnitaires
Les demandes de M.[R] procédant de la reconnaissance d'un licenciement sont rejetées, étant rappelé que le courrier de l'intéressé incluait le préavis de 15 jours du en vertu de la convention collective en cas de démission ;
Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile
Aucune considération tirée de l'équité ne conduit à condamner l'une ou l'autre des parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant par décision prononcée par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale,
Déclare l'appel recevable en la forme.
Infirme le jugement du Conseil de Prud'hommes de Marseille
Statuant à nouveau,
Dit que la rupture des relations contractuelles de travail procède de la démission de M.[R]
Déboute en conséquence M.[R] de ses prétentions
Dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Condamne M.[R] aux dépens de l'instance, qui seront recouvrés selon les textes de l'aide juridictionnelle.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT