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10/07/2013 | FRANCE | N°11/14467

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10e chambre, 10 juillet 2013, 11/14467


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

10e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 10 JUILLET 2013



N° 2013/297













Rôle N° 11/14467







[L] [S] veuve [H]





C/



[D] [K]

[U] [I]

[A] [N]

CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES B

L'ETAT FRANCAIS

MGEN





















Grosse délivrée

le :

à :

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 07 Juillet 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 09/08741.





APPELANTE



Madame [L] [S] [L]

prise tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante légale de ses enfants mineurs [P] [H] née le ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

10e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 10 JUILLET 2013

N° 2013/297

Rôle N° 11/14467

[L] [S] veuve [H]

C/

[D] [K]

[U] [I]

[A] [N]

CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES B

L'ETAT FRANCAIS

MGEN

Grosse délivrée

le :

à :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 07 Juillet 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 09/08741.

APPELANTE

Madame [L] [S] [L]

prise tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante légale de ses enfants mineurs [P] [H] née le [Date naissance 2] 1996 et [W] [H] né le [Date naissance 5] 1997

née le [Date naissance 4] 1969 à [Localité 1], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de Me Laurent COHEN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée de Me Elie MUSACCHIA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

INTIMES

Monsieur [D] [K], demeurant [Adresse 1],

représenté par la SCP BOISSONNET ROUSSEAU, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté de Me Yves SOULAS, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [U] [I] , Médecin Généraliste,

demeurant [Adresse 7]

représenté par la SCP MAYNARD SIMONI, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté de la SCP CARLINI ET ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE substituée par Me Véra TCHIFTBACHIAN, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [A] [N]

né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 2], demeurant [Adresse 3]

représenté par la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté de Me Véronique ESTEVE, avocat au barreau de NICE

CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES B

prise en la personne de son représentant légal, [Adresse 4]

défaillante

L'ETAT FRANCAIS

pris en la personne de l'Agent Judiciaire du Trésor en ses bureaux du Ministère de l'Economie, des Finances, de l'Emploi, de la Fonction Publique et de la Réforme de l'Etat, Dir. des Aff. Juridiques sous direction du droit privé et pé - [Adresse 6]

représentée par Me Jean marie JAUFFRES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

MGEN prise en la personne de son représentant légal, [Adresse 5]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 10 Avril 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Christiane BELIERES, Présidente, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Christiane BELIERES, Présidente

Mme Jacqueline FAURE, Conseiller

Madame Corinne DESJARDINS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2013. Le 5 Juin le délibéré a été prorogé au 19/06/2013, puis au 26/06/2013 et au 10/07/2013.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Juillet 2013,

Signé par Madame Christiane BELIERES, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DES FAITS ET PROCEDURE

Le 11 août 2006 M. [M] [H] s'est tordu le genou gauche lors d'une chute dans son jardin.

Il a fait le 12/08/2006 une échographie réalisée par M. [E] puis le 4 septembre 2006 a consulté son médecin traitant, M [U] [I], qui a diagnostiqué une entorse du genou gauche.

Il s'est soumis le 12/09/2006 à une IRM pratiquée par M. [D] [K], médecin radiologue, qui a mis en évidence une lésion fissuraire de grade III atteignant la surface articulaire inférieure au niveau de la corne postérieure du ménisque interne et l'absence de toute lésion méniscale ou ligamentaire.

Il a fait une nouvelle chute le 15 septembre 2006 et son médecin traitant lui a prescrit le port d'une attelle baleinée et des séances de kinésithérapie.

Il a subi le 29/09/2006, en raison d'une instabilité du genou, un nouvel examen échographique au cours duquel M.[E] a diagnostiqué une rupture traumatique du quadriceps.

Il a été adressé à M. [A] [N], chirurgien orthopédique qui l'a opéré le 2 octobre 2006 de la rupture des 2/3 médiaux du tendon du quadricipital gauche avec sutures et a mentionné dans son compte rendu que le foyer de rupture était fibrosé attestant d'une rupture déjà ancienne, a prescrit une orthèse du genou, des séances de rééducation et un traitement anticoagulation préventif par Lovenox pour une durée de 6 semaines avec contrôle bi-hebdomadaire des plaquettes.

Il a consulté le 16 octobre 2006 pour des douleurs au niveau de la jambe gauche son médecin traitant qui, après avoir diagnostiqué une phlébite, a augmente la dose de produits anticoagulants et prescrit un bilan sanguin.

Il est décédé le lendemain à son domicile, des suites d'une embolie pulmonaire massive.

Estimant que son mari n'avait pas bénéficié d'une prise en charge médicale consciencieuse, son épouse, Mme [L] [S], a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Marseille qui par ordonnances du 20 août 2007 et 19 juin 2008 a prescrit une mesure d'expertise confiée à M. [Z] qui s'est adjoint comme sapiteur M. [F], spécialiste de médecine vasculaire et a déposé son rapport le 20 février 2009.

Par actes des 16, 17, 18 et 25 juin 2009 Mme [S] agissant tant à titre personnel qu'en sa qualité de représentante légale de ses deux enfants mineurs, [P] et [W], a fait assigner M. [I], M. [K] et M. [N] devant le tribunal de grande instance de Marseille en déclaration de responsabilité et réparation des préjudices subis et a appelé en cause la Caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône, la MGEN et l'agent judiciaire du Trésor public en leur qualité de tiers payeurs.

Par jugement du 7 juillet 2011 cette juridiction a

- débouté Mme [S] de l'intégralité de ses demandes

- débouté l'agent judiciaire du Trésor public de ses demandes

- dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire de la décision

- rejeté toute autre demande

- condamné Mme [S] aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise.

Par acte du 16 août 2011, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, Mme [S] en sa double qualité a interjeté appel général de la décision.

MOTFS DE LA DECISION

Mme [S] tant à titre personnel qu'es qualités sollicite dans ses conclusions du 18 mars 2013 de 39 pages auxquelles il convient de se reporter pour plus de précisions de

- réformer le jugement

Vu les dispositions de l'article 1147 du code civil,

A titre principal,

- constater que M. [K] d'une part et M. [I] d'autre part ont commis une faute consistant en une erreur de diagnostic

- constater que M. [I] a commis une faute dans la prise en charge de son patient

- constater que M. [N] a manqué à son devoir d'information et a commis une faute médicale dans la posologie du produit anticoagulant prescrit

- constater que les fautes commises par les médecins ont concouru à la réalisation de l'accident tromboembolique dont a été victime M. [H] qui est décédé des suites de cet accident

En conséquence,

- condamner ensemble et solidairement M. [K], M. [I] et M. [N] à régler à Mme [L] [S] prise tant en son nom personnel qu'es qualité les sommes suivantes :

* 287.101,88 € au titre du préjudice économique de Mme [L] [S] (après déduction du recours des organismes sociaux)

* 50.864,90 € au titre du préjudice économique de [P] [H]

* 54.585,90 € au titre du préjudice économique de [W] [H]

* 8.828,69 € au titre des frais d'obsèques

* 31.108,61 € au titre des droits de succession et frais notariés

* 25.500 € au titre du préjudice d'affection de Mme [L] [S]

* 25.500 € au titre du préjudice d'affection de [P] [H]

* 25.500 € au titre du préjudice d'affection de [W] [H]

* 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

soit au total 511.989,98 € avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir.

Subsidiairement,

- homologuer les conclusions du rapport d'expertise du professeur [Z] en ce qu'il a retenu que le diagnostic d'embolie pulmonaire est de loin le plus vraisemblable et en ce que la phlébite a été à l'origine de l'embolie pulmonaire

- homologuer encore les conclusions du rapport d'expertise du professeur [Z] en ce que la notion de perte de chance doit être retenue

- dire qu'en ne prescrivant pas le bon dosage d'anticoagulant tel qu'il résulte des recommandations de la société française des anesthésistes réanimateurs M. [N] a fait perdre une chance à M. [H] d'éviter la phlébite qui a été à l'origine de son décès par suite d'une embolie pulmonaire

- dire encore qu'en s'abstenant d'hospitaliser son patient alors qu'il avait diagnostiqué une phlébite et en s'abstenant de lui faire des examens complémentaires (scintigraphie pulmonaire, angiographie pulmonaire, scanner spiralé des artères et échographie Dopler) M. [I] a fait perdre une chance à M. [H] de survivre à l'embolie pulmonaire qui l'a terrassé

- dire qu'en procédant à une erreur de diagnostic qui a retardé l'intervention et qui a vraisemblablement été un facteur favorisant une éventuelle phlébite postopératoire, les docteurs [I] et [K] ont ait perdre une chance à M. [H] d'éviter l'accident thromboembolique qui est survenu et qui est la cause de son décès

- dire qu'il n'y a pas lieu de limiter l'indemnisation due par application du mécanisme de la perte de chance

- condamner ensemble et solidairement M. [K], [I] et [N] sur le fondement de la perte de chance à lui régler pris en son nom personnel et en sa qualité de représentante légale de ses enfants mineurs les sommes susvisées

En tout état de cause, vu les article 16, 16-3 et 1382 du code civil

- dire que M. [N] a manqué à son devoir d'information

- condamner M. [N] à lui verser tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante légale de ses enfants mineurs la somme de 100.000 € en réparation du préjudice moral subi

- condamner tout succombant aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise.

Elle fait grief au docteur [K], radiologue et au docteur [I], médecin traitant, d'avoir commis une erreur de diagnostic ayant notamment retardé les soins que M. [H] était en droit d'attendre de la part de professionnels de santé ainsi qu'au docteur [I] un manquement dans la prise en charge du patient et reproche au docteur [N], chirurgien, un manquement à son devoir d'information et une faute médicale dans la posologie du produit anticoagulant prescrit.

Elle rappelle qu'en vertu de l'article 33 du code de déontologie médicale, le médecin doit toujours élaborer son diagnostic avec le plus grand soin, en y consacrant le temps nécessaire, en s'aidant dans toute la mesure du possible des méthodes scientifiques les mieux adaptées et, s'il y a lieu, de concours appropriés.

Elle souligne que le diagnostic de rupture traumatique du quadriceps gauche n'a été porté à la connaissance de M. [H] que le 29 septembre 2006 après la seconde échographie réalisée sur son insistance, soit dix sept jours après l'IRM et plus d'un mois après la première chute et a donc échappé tant au médecin radiologue qu'au médecin traitant, lequel se devait de prendre connaissance des conclusions de son confrère mais surtout de l'imagerie médicale qui mettait bien en évidence une lésion du quadriceps dans sa partie interne et sus rotulienne même si le compte rendu n'en faisait pas état.

Elle prétend qu'en présence d'un important traumatisme du genou gauche et eu égard aux circonstances de l'accident relatées par ce patient aux médecins, le docteur [K] avait l'obligation de rechercher la présence d'une éventuelle rupture du quadriceps, d'autant qu'elle apparaissait sur les images IRM et que l'interprétation des symptômes observés était manifestement inexacte au regard des données acquises de la science.

Elle ajoute que le compte rendu opératoire du docteur [N] fait état d'une zone tendino-musculaire fibrosée, ce qui laisse supposer que la lésion datait d'au moins trois ou quatre semaines (ce qui correspond à la première chute) que l'immobilisation du patient a donc été prolongée d'autant et le risque d'une embolie par suite d'une phlébite d'autant plus important que le bon diagnostic n'a pas été rapidement posé par ces médecins et le geste opératoire retardé ce qui constitue une faute faisant perdre une chance au patient ou aggravant son état.

Elle souligne que le médecin ne doit pas s'arrêter au diagnostic le plus probable mais doit procéder à une véritable recherche de l'ensemble des diagnostics susceptibles de correspondre aux symptômes relevés par le patient alors qu'il avait indiqué à plusieurs reprises que la douleur persistait et qu'il avait la sensation que sa jambe le lâchait, de sorte que la rupture du quadriceps de la jambe gauche était à envisager au même titre qu'une éventuelle entorse du genou, même si le juste diagnostic était difficile à poser du fait de la rareté de ce genre de lésion.

Elle affirme que la teneur du rapport d'expertise ne permet pas d'écarter le lien de causalité, au moins partiel, entre l'erreur de diagnostic commise par ces deux médecins et la phlébite ayant provoqué l'accident thromboembolique et qu'en toute hypothèse cette erreur de diagnostic a nécessairement entraîné une prise en charge inadaptée (séances de kinésithérapie qui n'ont fait qu'aggraver l'état du patient) et été à l'origine d'une augmentation des souffrances endurées par M. [H].

Elle leur reproche, également, un manquement dans la prise en charge du patient puisqu'ayant posé le diagnostic de phlébite la veille du décès il s'est gardé de faire pratiquer immédiatement des examens complémentaires alors qu'il était en possession des résultats d'analyses médicales, notamment ceux des D Dimères, révélant un résultat positif anormalement élevé qui auraient dû le conduire à le faire hospitaliser en vue de réaliser des examens supplémentaires, alors que sous un traitement bien conduit et une surveillance médicale appropriée l'embolie pulmonaire peut guérir sans séquelles.

Elle recherche la responsabilité de M. [N] pour une insuffisance de la posologie d'anticoagulant prescrite au regard des recommandations de la société française d'anesthésie réanimation puisqu'elle aurait dû être du double et n'était donc pas conforme aux données acquises de la science, même si un bon dosage n'aurait pas écarté à 100 % le risque d'accident thromboembolique, qu'en outre il existait des facteurs de risque personnel constitués par son poids supérieur à 90 kilogs pour un sujet athlétique.

Elle lui reproche, aussi, un manquement à son devoir d'information qui en vertu de l'article L 111-2 du code de la santé publique doit porter , non seulement sur le diagnostic mais aussi sur les traitements, les soins envisagés et les risques qui y sont attachés puisque sur les documents remis (livret d'information, consentement éclairé) le risque de problème vasculaire n'est pas clairement exprimé.

Subsidiairement, elle fait valoir que la responsabilité des médecins est encourue sur le fondement de la perte de chance réelle et sérieuse qui n'a pas lieu d'être limitée car M. [H] ne présentait aucun antécédent, aucun facteur aggravant susceptible de favoriser la survenance d'une embolie pulmonaire.

Elle chiffre les préjudices patrimoniaux subis selon détail figurant aux pages 30 à 33 de ses conclusions.

M. [K] demande dans ses conclusions du 15 février 2013 de

- constater qu'aucune faute de nature engager sa responsabilité n'est démontrée à son encontre

- dire, à tout le moins, qu'il n'est pas rapporté la preuve d'un lien de causalité direct entre la faute alléguée et le dommage

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement

- condamner Mme [L] [S] agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante légale de ses deux enfants mineurs à lui payer la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

-la condamner aux entiers dépens.

Il fait valoir que l'IRM réalisée à la demande de M. [I] portait uniquement sur l'articulation dans un bilan d'entorse du genou et non de rupture musculo tendineuse, que Mme [L] [S] s'est toujours abstenue de produire l'ordonnance initiale rédigée par son médecin, que l'expert a souligné le caractère rare de la lésion partielle, l'absence de traduction radiologique particulière, l'absence de demande de rechercher cette lésion, l'absence de conséquence d'un diagnostic plus précoce et en déduit qu'il ne peut être retenu à son encontre une erreur de diagnostic d'autant qu'elle n'a pas été la cause directe et certaine du dommage, le décès résultant vraisemblablement d'une embolie pulmonaire qui trouverait son origine dans une phlébite.

Il rappelle que la mise en jeu de sa responsabilité est subordonnée à la preuve d'une faute commise dans l'accomplissement de l'acte médical en relation de causalité démontrée avec le dommage et ne peut se déduire de l'anormalité du préjudice.

M. [I] demande dans ses conclusions du 4 janvier 2012 de

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [H] de ses demandes à son encontre

- condamner Mme [L] [S] à lui payer la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile

- la condamner aux entiers dépens.

Il fait valoir que l'erreur ou le retard de diagnostic ne revêt un caractère fautif que lorsqu'il résulte d'une méconnaissance de ses obligations par le médecin qui n'a pas su interpréter, conformément aux données acquises de la science, les symptômes traduisant l'état de son patient, que cette diligence s'apprécie eu égard à son domaine de compétence et à la complexité de la pathologie à diagnostiquer.

Il indique que l'état de M. [H] au début du mois de septembre, à savoir une instabilité consécutive à une chute, était spontanément évocateur d'une entorse, que l'IRM demandée pour compléter le diagnostic mentionnait une lésion fissuraire de grade III atteignant la surface articulaire inférieure au niveau de la corne postérieure du ménisque interne et qu'il a logiquement suivi ces conclusions.

Il souligne qu'aucun élément clinique ne permettait d'envisager un autre diagnostic, telle une lésion du quadriceps qui est un traumatisme qui n'intervient qu'exceptionnellement.

Il en déduit qu'étant médecin généraliste, la lésion étant très inhabituelle et le compte rendu radiologique ne mentionnant aucun élément permettant d'attirer son attention sur une autre cause, il ne peut lui être reproché de ne pas avoir posé le diagnostic de rupture du quadriceps à l'issue de l'IRM du 2 septembre 2006.

Il affirme qu'il ne saurait lui être fait grief de ne pas avoir examiné lui-même les clichés IRM alors qu'il n' a pas la compétence pour contredire le spécialiste qu'est M. [K] dont la conclusion ne suggère aucun doute et indique avoir réagi devant la persistance des douleurs en prescrivant un nouvel examen qui a permis de poser le bon diagnostic.

Il ajoute que le retard dans la prise en charge chirurgicale lié au retard de diagnostic n'a joué aucun rôle dans la survenance de l'embolie pulmonaire à l'origine du décès de M. [H] car n'ayant eu aucune incidence sur le problème vasculaire.

Il conteste, également, tout manquement dans la prise en charge dès lors que dès le diagnostic de phlébite posé il a augmenté les doses d'anticoagulant, prescrit un examen spécifique D-Dimères, outre un examen sanguin dont le résultat n'a pas été significatif.

M. [N] dans ses conclusions du 25/03/2013 de 37 pages auxquelles il convient de se reporter pour plus de précisions sollicite de

A titre principal,

Sur l'obligation d'information

- dire que M. [H] a été informé du risque thromboembolique

- réformer le jugement en ce qu'il retenu à son encontre un manquement à son obligation d'information

- débouter Mme [S] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions tant à titre personnel qu'es qualités

Si la cour venait à considérer que la preuve de cette information n'est pas rapportée,

- constater que l'acte pratiqué était indispensable

- dire qu'il n'existe pas de préjudice en relation avec cet éventuel défaut d'information

- confirmer le jugement

- débouter Mme [L] [S] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions tant à titre personnel qu'es qualités

Sur les soins apportés à M. [H]

- dire qu'il n'est tenu que par une obligation de moyens

- constater que les conditions de l'article L 1142-1-I du code de la santé publique ne sont pas réunies en l'absence de faute de sa part

- constater que la prévention du risque tromboembolique a été faite en conformité avec les recommandations de la SFAR 2005 en dépit des conclusions expertales, la chirurgie pratiquée étant à risque modéré et non élevé

- confirmer le jugement

- débouter Mme [L] [S] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions tant à titre personnel qu'es qualités

Si la cour venait à considérer que la prévention du risque était insuffisante,

- constater que la prétendue insuffisance de prévention du risque n'est pas à l'origine du dommage, la preuve scientifique de l'efficacité de ce traitement préventif n'étant pas établie

En outre,

- constater que la cause du décès n'est pas certaine

- dire que, même si la cause du décès retenue est une embolie pulmonaire, il n'est pas établi que sa survenue soit en relation directe et certaine avec sa prise en charge

- dire qu'en l'absence de lien de causalité direct et certain entre le décès de M. [H] et la prétendue insuffisance de prévention du risque, la perte de chance n'est pas démontrée

- débouter Mme [L] [S] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions tant à titre personnel qu'es qualités

A titre reconventionnel,

- condamner Mme [L] [S] à lui payer la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- mettre les entiers dépens à la charge de Mme [L] [S].

Il soutient qu'il a, de fait, rempli son obligation d'information, qu'il a vu M. [H] à deux reprises lors des deux consultations pré-opératoires le 12 puis le 29 septembre 2006 où l'information lui a été oralement donnée accompagnée de la remise d'un livret d'information et d'un document de consentement éclairé signé le 2 octobre 2006 et, même si le risque de problème vasculaire n'y est pas expressément noté, un faisceaux d'indices au sens de l'article 1353 du code civil établit que le risque de thrombose veineuse a bien été signalé car, dans le cas contraire, il n'aurait pu justifier auprès de son patient la prescription d'injections quotidiennes sous cutanées et des contrôles sanguins bi hebdomadaires.

Il ajoute que la seule sanction du non respect du devoir d'information est la perte d'une chance d'échapper au risque qui s'est finalement réalisé et qu'en toute hypothèse l'intervention chirurgicale étant indispensable pour éviter une aggravation de son état de santé, il n'existait aucun préjudice indemnisable.

Il prétend n'avoir commis aucune faute dans la prise en charge de M. [H] en relation de causalité directe et certaine avec le dommage dont la réparation est demandée.

Il affirme que la prévention du risque thromboembolique a été faite en conformité avec la prescription de Lovenox au dictionnaire Vidal 2007, ouvrage de référence pour les praticiens, et les recommandations SFR 2005 s'agissant d'une chirurgie à risque modéré voire faible de sorte que le dosage à 0,20 ml était conforme, d'autant qu'il n'existe pas de preuve scientifique quant à la nécessité de mettre en oeuvre un tel traitement, comme souligné par l'expert judiciaire, cette décoagulation n'étant pas validée pour ce type d'intervention, quels que soient les facteurs de risque présentés par le patient, compte tenu du faible nombre de cas de cette chirurgie musculaire.

Il souligne qu'en l'absence d' autopsie et de vérification médico-légale, la cause exacte du décès n'est pas certaine, qu'il a été attribué à une embolie pulmonaire sans pouvoir éliminer d'autres causes de mort brutale telles un accident vasculaire cérébral, une rupture d'anévrysme, un infractus du myocarde et que, même en présence d'une prévention du risque, la survenue d'une embolie n'est pas inévitable.

Subsidiairement, il fait valoir que la perte d'une chance n'est un préjudice indemnisable que si la chance perdue était réelle et sérieuse et qu'en l'espèce elle ne pourrait qu'être très faible et être supérieure à 10 % à répartir avec les autres praticiens qui y ont participé dès lors que l'erreur de diagnostic a retardé la prise en charge chirurgicale et que l'absence d'hospitalisation malgré le diagnostic de phlébite profonde a contribué de manière prépondérante dans la survenue du décès, de sorte que tant Mme [L] [S] que l'agent judiciaire de l'Etat ne pourraient prétendre qu'à une indemnisation partielle à hauteur de ce pourcentage.

Il demande de ramener l'indemnisation réclamée à de plus justes proportions tant en ce qui concerne le préjudice moral que le préjudice économique en prenant en compte, pour celui subi par Mme [L] [S], la pension de réversion, de procéder à l'abattement pour perte de chance et de rejeter la réclamation présentée au titre des droits de succession et frais de notaire qui procèdent d'une obligation légale et ne constituent pas un élément de préjudice né directement du dommage.

L'agent judiciaire du Trésor Public demande dans ses conclusions du 3 mai 2012 de

- infirmer le jugement

- constater que les fautes des docteurs [K], [I], [N] ont concouru à la réalisation de l'accident thromboembolique dont a été victime M. [H]

- condamner in solidum des docteurs [K], [I], [N] à lui payer les sommes de

* 2.886,78 € au titre des rémunérations

* 55.868 € au titre de la pension de réversion

* 1.540 € au titre des charges sociales patronales

* 10.993,83 € au titre du capital décès versé à Mme [H]

* 11.792,18 € au titre du capital décès versé à Mlle [P] [H]

* 11.792, 18 € au titre du capital décès versé à M. [W] [H]

- dit que cette somme totale de 94.872,97 € doit être majorée des intérêts au taux légal à compter de la signification des présentes conclusions faisant connaître le montant définitif du recours de l'Etat

- dire que les préjudices économiques accordés à Mme [L] [H], Mlle [J] [H] et M. [W] [H] sont fixés avant déduction du recours de l'Etat

- condamner in solidum les docteurs [K], [I], [N] à lui payer les sommes de 760 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.

La CPAM des Bouches du Rhône assignée par Mme [S] par acte du 10 novembre 2011 délivré à personne habilitée et contenant dénonce de l'appel et de ses conclusions n'a pas constitué avocat.

Par courrier du 31 mai 2012 elle a précisé qu'elle n'avait aucune réclamation à formuler

L'arrêt sera réputé contradictoire conformément aux dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'expertise

L'expert [Z] indique dans son rapport que M. [H] a présenté 'au niveau de son genou gauche une lésion musculaire sous forme d'une désinsertion partielle du muscle quadriceps sur la rotule, affaiblissant le muscle quadriceps responsable de dérobement du genou.

Le décès par embolie pulmonaire massive dans les heures qui suivent le diagnostic de phlébite du membre inférieur reste l'hypothèse la plus probable.

Le docteur [N] aurait du choisir une posologie de Lovenox 4000 eu égard aux recommandations de la S.F.A.R., comme le soulignent les réflexions de Pr [F]. Il faut rappeler que la décoagulation dans ce type de pathologie n'est pas validée eu égard au faible nombre de cas de cette chirurgie musculaire. Le niveau de preuve pour une chirurgie 'apparentée' est de grade D, c'est-à-dire qu'il n' a pas de preuve scientifique de la nécessité de mettre en route un traitement anticoagulant. La phlébite a été à l'origine de l'embolie pulmonaire.

La notion de perte de chance doit être retenue. Soulignons qu'il n'y a de fait aucune preuve de recommander d'instituer une décoagulation pour ce genre de chirurgie musculaire. Les recommandations de bonne pratique ne sont que des instruments d'aide à la décision médicale et ne doivent pas être considérées comme des obligations absolues de faire. La prévention de la maladie thromboembolique ne met pas à l'abri d'une phlébite dans 100 % des cas.'

Sur les responsabilités et leurs incidences

En vertu de l'article L 1142-1 I du code de la santé publique le professionnel de santé n'est responsable des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute de sa part.

Quatre types de fautes sont invoquées par Mme [S] : une erreur de diagnostic à l'encontre du radiologue et du médecin traitant, une défaillance dans la prise en charge du patient à l'encontre du médecin traitant, un défaut d'information et un manquement à son obligation de soins à l'encontre du chirurgien.

en ce qui concerne M. [K]

Le médecin a l'obligation d'établir son diagnostic en respectant les données acquises de la science.

La défaillance de M. [K] est caractérisée dès lors que les images retenues sur l'IRM du 12 septembre 2006 font bien apparaître la rupture du quadriceps et mettent en évidence un aspect en S du LCA et une lésion du quadriceps dans sa partie interne et sus rotulienne (page 5 du pré-rapport du 10 avril 2008)

Elle n'engage pas pour autant la responsabilité de ce radiologue en l'absence de lien de causalité avec le dommage subi.

En effet, l'expert judiciaire, orthopédiste, considère d'une part qu'un diagnostic plus précoce n'aurait pas réduit en quoi que ce soit la durée de l'immobilisation post-opératoire et d'autre part que le retard de diagnostic n'a pu être un facteur favorisant une éventuelle phlébite post opératoire (page 2 et 3 du rapport d'expertise du 20 février 2009) et ajoute que les difficultés diagnostiques n'ont pas eu de conséquences sur la prise en charge chirurgicale puisqu'il était possible de réinsérer anatomiquement le tendon (page 6 du pré-rapport du 10 avril 2008).

Son sapiteur, médecin vasculaire, a lui-même indiqué que 'si on peut penser qu'un diagnostic plus précoce aurait éventuellement conduit à un acte chirurgical anticipé, rien ne permet de penser qu'il aurait permis de contrôler au mieux la complication post-opératoire'

Aucune critique n'est apportée à ces avis motivés émanant de professionnels spécialisés qui reposent sur des données objectives, après consultation de l'entier dossier médical et analyse des doléances.

Mme [S] ne produit aucun élément technique de nature à remettre en cause cette conclusion.

L'erreur fautive de diagnostic de M. [K] n'a donc pas privé M. [H] de la possibilité de bénéficier, en temps utile, de soins spécialisés et adaptés qui auraient pu avoir une influence favorable sur l'évolution de sa pathologie.

en ce qui concerne M. [I]

Tenu comme le médecin radiologue à l'obligation d'établir son diagnostic en respectant les données acquises de la science, le médecin traitant, ne peut se voir reprocher un manquement fautif à ce titre.

L'expert judiciaire précise que la lésion partielle musculaire présentée par M. [H] était non seulement rare mais ne présentait aucune traduction clinique spécifique et radiologique particulière, ce qui exclut de la part de M. [I] toute interprétation inexacte de symptômes observés.

Celui-ci a également fait procéder aux examens et investigations les plus appropriés en se conformant aux données acquises de la science puisqu'il a prescrit une échographie puis une IRM qui n'a rien révélé de nature à attirer l'attention sur une cause autre que la symptomatologie engendrée évocatrice d'entorse grave du genou et, devant la persistance des douleurs, une nouvelle échographie qui a révélé la nature exacte de la lésion à savoir une désinsertion partielle du muscle quadriceps sur la rotule alors que seule la désinsertion complète donne un tableau évocateur du diagnostic.

Il ne peut lui être fait grief de s'être tenu à la lecture du compte rendu IRM du radiologue et de n'avoir pas personnellement examiné les images du CD de cet examen dès lors qu'un tel contrôle ne relève pas de sa spécialité et excède ses compétences techniques propres.

En toute hypothèse et comme déjà analysé, les difficultés diagnostiques n'ont pas eu d'incidence sur le problème vasculaire à l'origine du décès.

Aucune défaillance dans la prise en charge de son patient n'est davantage caractérisée après l'intervention chirurgicale.

Lorsqu'il a été rappelé en consultation le 16 octobre 2006 et a diagnostiqué une phlébite M. [I] a augmenté la dose d'anticoagulant Lovenox donnée par le chirurgien en prescrivant une posologie curative, a demandé un dosage de D-Dimères et est repassé le soir même.

Le sapiteur explique dans sa note annexée au pré-rapport du 10 avril 2008 que 'les dispositions adéquates ont été prises dans la mesure où, sur la base de la forte suspicion clinique le docteur [I] a entamé dès sa consultation le 16.10 le passage à un traitement curatif par héparine, que de nombreuses études de la littérature ont validé le traitement ambulatoire des phlébites, que la réalisation de l'écho doppler , ne devait de toute manière pas, au vu de la clinique, retarder la thérapeutique et rappelé que le Lovenox est une héparine' que l'expert lui-même a fait sienne.

Il a par cette réponse écarté le dire de Mme [S] qui estimait qu'il aurait dû 'faire admettre son patient aux urgences pour une surveillance ou faire pratiquer un doppler ou le placer sous héparine'.

Or, Mme [S] se borne à les reformuler dans ses conclusions sans tenir compte de la réponse précise et motivée qui y a été apportée lors des opérations d'expertise judiciaire et sans présenter à l'appui de donnée scientifique critique.

en ce qui concerne M. [N]

** au titre du devoir d'information

En vertu des articles L 1111-2 et R 4127-35 du code de la santé publique, le médecin est tenu de donner à son patient sur son état de santé une information portant sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus ; délivrée au cours d'un entretien individuel, cette information doit être loyale, claire et appropriée, la charge de la preuve de son exécution pesant sur le praticien, même si elle peut être faite par tous moyens.

Le droit à réparation de la victime reste, cependant, subordonné à l'existence d'un préjudice en relation de causalité avec le défaut d'information allégué.

M. [N] a reçu M. [H] à deux reprises le 12 septembre 2006 et le 29 septembre 2006, lui a fait signer un document de consentement éclairé et lui a remis un livret d'information mais ne démontre nullement l'avoir informé du risque de thrombose veineuse et éventuellement d'embolie pulmonaire ; aucun de ces documents ne contient de mention spécifique sur ce point, ainsi que souligné par l'expert judiciaire.

Un défaut d'information de la part de M. [N] doit, ainsi, être retenu.

Mme [S] ne peut, cependant, se prévaloir d'un préjudice corporel subi par son mari en relation de causalité avec ce manquement à l'obligation d'information.

En effet, le dommage découlant d'une violation du devoir d'information n'est pas l'atteinte à l'intégrité physique elle-même consécutive à l'intervention subie mais la perte d'une chance d'échapper à cette intervention et aux conséquences du risque qui s'est finalement réalisé.

Son existence doit s'apprécier en prenant en considération l'état de santé du patient ainsi que son évolution prévisible, sa personnalité, les raisons pour lesquelles les investigations ou les soins à risques lui sont proposés ainsi que les caractéristiques de ces investigations, de ces soins et de ces risques, les effets qu'aurait pu avoir une telle information quant à son consentement ou à son refus.

Or même si M. [H] avait été averti de tous les risques de l'intervention, il est raisonnablement improbable qu'il l'ait refusé car l'information aurait dû mettre en parallèle les risques encourus statistiquement limités et l'évolution prévisible de son état de santé en cas d'inaction, ce qui rend illusoire la chance perdue et ne lui laissait pas de choix réel entre l'opération et l'abstention.

En effet, l'expert judiciaire précise à la page 7 de son pré-rapport que l'acte chirurgical était 'indispensable'.

La méconnaissance de ce devoir d'information a, toutefois, porté atteinte aux droits de M. [H] et causé à ce patient un préjudice indépendant des lésions corporelles découlant de l'acte médical qui, au regard de l'article 1382 du code civil et des principes du respect de la dignité de la personne humaine et d'intégrité du corps humain, ne peut être laissé sans réparation.

Ce préjudice d'ordre moral, invoqué pour la première fois en cause d'appel, résulte d'un défaut de préparation aux risques encourus et du ressentiment éprouvé à l'idée de ne pas avoir consenti à une atteinte à son intégrité corporelle.

Une indemnité de 3.000 € doit être allouée à ce titre aux ayant droits de M. [H] comme assurant la réparation intégrale de ce chef de dommage.

** au titre d'une faute de technique médicale

sur la faute

La responsabilité de M. [N] doit être retenue pour manquement à son obligation de donner des soins attentifs, consciencieux et conformes aux données acquises de la science.

Une erreur de posologie en relation de causalité avec le dommage est caractérisée à son encontre.

La note du sapiteur à laquelle renvoie expressément l'expert explique que 'la prévention de la maladie thromboembolique veineuse a fait l'objet de recommandations (2005) de la société française d'anesthésie réanimation et de l'association nationale d'anesthésie réanimation, .....que désormais en orthopédique, la dose 'risque modéré' d'HBPM n' a plus cours , que seule la dose risque élevé persiste.. que lorsqu'elle est administrée la posologie d'HBPM est pour le Lovenox de 4.000 U et non de 2.000 U.

La dose de 2000 U prescrite par M. [N] le 3 octobre 2006 pour une durée de 45 jours était donc inférieure de moitié à celle recommandée par la profession, la rendant par la même inefficace.

Elle traduit un manquement de ce chirurgien à ses obligations.

Le sapiteur explique que les recommandations susvisées 'sont basées sur l'analyse de la littérature et les niveaux de preuve scientifique apportés par cette analyse. Ces recommandations sont gradées en fonction des niveaux de preuves apportées (grade A preuve scientifique établie, grade B Présomptions scientifiques, grade C Niveau de preuve faible, grade D pas de niveau de preuve, Accord professionnel)'.

ll précise 'qu'un chapitre est consacré à la chirurgie orthopédique dans lequel sont envisagées plusieurs situations pathologiques qui font l'objet soit d'une prévention par héparine de bas poids de type 'haut risque' soit de l'absence de prévention médicamenteuse. L'affection dont souffrait M. [H] ne fait pas partie des situations décrites, probablement par manque total de données de la littérature.

Pour les situations prises en compte pour lesquelles les niveaux de preuve sont les plus faibles, la décision d'une prophylaxie médicamenteuse prend en compte 'le risque chirurgical' et le 'risque patient'. Par exemple, selon ce consensus, l'arthroscopie du genou est considérée à faible risque chirurgical, ne nécessitant pas de prophylaxie médicamenteuse, sauf en cas de risque surajouté au patient. Il faut cependant noter que cette dernière recommandation est de grade D le plus faible. Concernant le cas de M. [H], les facteurs de risque pouvant être considérés étaient représentés par l'immobilité, l'âge supérieur à 40 ans, l'obésité (BMI31,7) et sous réserve du faible niveau de preuve, pouvaient justifier d'utilisation éventuelle d'une dose plus élevée'

Ainsi, quel que soit le niveau de preuve scientifique, la recommandation existait, reposait sur accord de la profession et, en présence d'un patient qui présentait trois facteurs de risques cumulés, devait conduire à mettre en oeuvre la prévention médicamenteuse d'un traitement anticoagulant.

M. [N] l'a d'ailleurs instaurée mais selon un dosage insuffisant, même utilisé dans un cadre préventif et non curatif.

Cette erreur dans la posologie médicamenteuse prescrite au regard des normes et usages professionnels, qui doivent être adaptés au cas particulier du patient qu'il soigne, revêt un caractère fautif.

Le manquement de M. [N] à l'obligation de donner des soins consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science à la date de ceux ci est parfaitement établi.

Il a privé le patient de la possibilité de bénéficier en temps utile de soins adaptés qui auraient pu avoir une influence favorable sur l'évolution de son état pathologique qui a conduit à son décès quelques jours plus tard, le médicament prescrit étant destiné à éviter la phlébite qui s'est compliquée d'une embolie pulmonaire (page 7 du pré-rapport).

Elle engage la responsabilité civile de M. [N].

Certes, le lien de causalité direct entre cette faute et le décès n'est pas démontré puisqu'il ne peut être affirmé avec certitude que si la faute n'avait pas été commise M. [H] aurait survécu, ce qui ne permet pas la réparation de l'entier dommage qui en est résulté pour les ayants-droits.

Mais il est certain que, sans la faute, ce patient avait une chance d'éviter l'issue fatale, ce qui permet l'indemnisation du dommage au titre de la perte de chance de survie.

Le préjudice de la victime présente, en effet, un caractère certain et direct chaque fois qu'est constatée la disparition d'une éventualité favorable.

M. [N] est donc tenu de réparer les conséquences dommageables subies par les ayants droits de M. [H].

Sur le préjudice

Dans le cas où la faute médicale a fait perdre au patient une chance d'éviter une atteinte à son intégrité physique, l'indemnisation doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle était réalisée ; elle correspond à une fraction seulement des différents chefs de préjudices subis.

Son étendue doit s'apprécier en prenant en considération l'état du patient et les conséquences qui en découlent.

M. [H] était sans antécédent particulier selon le rapport de pré-anesthésie qui signalait '174 cm, 96 kgs, TA 13/7 ; aucun problème avec des anesthésies antérieures, état veineux OK. Le patient est classé en ASA 2 échelle de risque qui en compte 4'.

L'expert note également que 'la prévention de la maladie thromboembolique, quant bien même elle serait optimale, ne permet pas un risque 0 d'événements thromboemboliques (page 7 du pré-rapport) ; la prévention de la maladie thromboembolique ne met pas à l'abri d'une phlébite dans 100 % des cas'.

Au vu de ces données, cette perte de chance de survie doit être évaluée à trois quart du dommage et la condamnation de M. [N] limitée à cette proportion qui représente la partie du préjudice total à la réalisation duquel il a contribué.

sur son évaluation

** sur les préjudices moraux

M. [H], né le [Date naissance 3] 1954, âgé de 52 ans à son décès le [Date décès 1] 2006, était marié et avait deux enfants, [P] née le [Date naissance 2] 1996 (10 ans) et [W] né le [Date naissance 5] 1997 (9 ans).

Les préjudices moraux de ces ayants-droit doit être fixé comme suit :

* la veuve : 25.500 €

* les enfants : 25.500 € chacun

Ils ne sont toutefois indemnisables, en raison de la perte de chance ci dessus retenue qu'à hauteur de 75 % pour chacun d'eux, soit respectivement

* pour la veuve :19.125 €

* pour chacun des enfants : 19.125 €.

En vertu de l'article 1153-1 du code civil ils portent intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt.

** sur les préjudices patrimoniaux

Sur le préjudice matériel

Au vu de la facture produite émanant des Pompes Funèbres Martial en date du [Date décès 1] 2006 , il convient de retenir une somme de 6.828,69 € au titre des frais d'obsèques, indemnisable à hauteur de 75 % soit 5.121,51 €.

Les droits de succession et frais notariés acquittés par les héritiers ne constituent pas, en revanche, un chef de préjudice juridiquement indemnisable ; dus par les ayants-droit après le décès de la victime directe, ils découlent de la loi et ne peuvent être mis la charge de la personne tenue à réparation car ils ne naissent pas directement de sa faute.

Sur les préjudices économiques

Il devra être tenu compte, conformément à l'article 28 de la loi du 5 juillet 1985 applicable à tout dommage résultant d'une atteinte à la personne quelle que soit la nature de l'événement ayant occasionné ce dommage, à l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale et à l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel sauf s'ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un tel chef de dommage et de ce qu'en vertu de 1252 du code civil, la subrogation des tiers payeur ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, qui, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales, peut alors exercer ses droits contre le responsable par préférence aux tiers payeurs subrogés.

M. [H] était enseignant de l'éducation nationale et son épouse salariée.

Au vu des avis d'imposition sur le revenu de 2005 et 2006, de leurs bulletins de salaire de 2005, le mari percevait un salaire moyen de 40.990 € et 35.384 € et l'épouse de 19.982 € et 15.879 € soit une moyenne de 38.187 € pour M. [H] et de 17.930,50 € pour Mme [S] qui a continué l'exercice de la même activité professionnelle après le décès.

Les revenus du couple à prendre en considération s'élevaient ainsi à la somme de 56.117,50 €, chiffre que les consorts [H] retiennent pour servir de base à leur réclamation.

La part conservée par le mari pour ses besoins personnels doit être fixée à 20 % soit 11.223,50 €.

La perte annuelle du foyer s'établit ainsi à 26.963,50 € [56.117,50 € - (11.223,50 + 17.930,50 €)].

La part revenant au conjoint doit être fixée à 60 % pour les frais fixes incompressibles et les besoins personnels soit 16.178,10 €.

La part revenant à chacun des enfants pour ses besoins personnels doit être fixée à 20 % soit 5.392,70 €.

Au vu du barème de capitalisation publié par la Gazette du Palais des 7 et 9 novembre 2004 de rente viagère pour l'épouse et de rente temporaire limitée à 25 ans pour chacun des enfants, de l'âge de la victime (52 ans) et des enfants (10 et 8 ans) au jour du décès, les préjudices économiques doivent être fixés

* pour Mme [S] à la somme de 287.096,56 € (16.178,10 € x 17,746)

* pour [P] [H] à la somme de 64.189,86 € (5.292,70 € x 12,128)

* pour [W] [H] à la somme de 70.599,32 € (5.292,70 € x 13.339)

Il n'est indemnisable qu' à hauteur de 75 % soit

* pour celui subi par Mme [S] à hauteur de 215.322,42 € (287.096,56 € x 75 %)

* pour celui subi par [P] [H] à hauteur de 48.142,39 € (64.189,86 € x 75 %)

* pour celui subi par [W] [H] à hauteur de 52.949,49 € (70.599,32 € x 75 %)

L'agent judiciaire de l'Etat verse une pension de reversion à Mme [S] dont le capital représentatif s'élève pour la période du 1er novembre 2006, date d'entrée en jouissance, au 13 octobre 2014, date normale d'accession à la retraite, à 55.868 € et a versé un capital décès de 10.993,83 € soit au total 61.545,72 € qui s'imputent sur ce poste qu'ils ont vocation à réparer de sorte que l'indemnité complémentaire devant revenir à cette victime pour réparer ce chef de dommage s'établit à 225.550,84 € (287.096,56 € -61.545,72 €).

Comme cette indemnité excède la part de 215.322,42 € mise à la charge de M. [N], auteur du dommage, Mme [S] recevra, en vertu de son droit de priorité, l'intégralité de cette dernière somme et le tiers payeur ne percevra rien, en l'absence de solde à distribuer.

L'agent judiciaire de l'Etat a également versé à [P] [H] un capital décès de 11.792,18 € qui s'impute sur le poste ci-dessus fixé à 64.189,86 € qu'il a vocation à réparer, de sorte que l'indemnité complémentaire devant revenir à cette enfant mineure s'établit à 52.397,68 € (64.189,86 € - 11.792,18 €).

Comme cette indemnité excède la part de 48.142,39 € mise à la charge de M. [N], auteur du dommage, Mlle [P] [H] recevra, en vertu de son droit de priorité, l'intégralité de cette dernière somme et le tiers payeur ne percevra rien, en l'absence de solde à distribuer.

L'agent judiciaire de l'Etat a versé à [W] [H] un capital décès de 11.792,18 € qui s'impute sur le poste ci-dessus fixé à 70.599,32 € qu'il a vocation à réparer de sorte que l'indemnité complémentaire devant revenir à cet enfant mineur s'établit à 58.807,14 € (70.599,32 € - 11.792,18 €).

Comme cette indemnité excède la part de 52.949,49 € mise à la charge de M. [N], auteur du dommage, M. [W] [H] recevra, en vertu de son droit de priorité, l'intégralité de cette dernière somme et le tiers payeur ne percevra rien, en l'absence de solde à distribuer.

Les autres débours de l'agent judiciaire de l'Etat ne sont pas en relation de causalité avec la fautes commise par M. [N] ; relatifs aux salaires maintenus à la victime pour la période du 4 septembre 2006 au 9 septembre 2006 et du 24 septembre 2006 au [Date décès 1] 2006 (2.886,78 €) et aux charges sociales patronales durant cette même période (1.540 €), ils sont en relation de causalité avec la chute survenue le 11 août 2006 et les suites normales de l'intervention ayant induit une période d'incapacité temporaire de travail et non avec le manquement fautif du chirurgien commis le 2 octobre 2006 dans le cadre du suivi post opératoire ayant mené à son décès.

M. [N] doit être condamné au paiement des indemnités respectives de 220.443,93 € (215.322,42 € + 5.121,51 €), 48.142,39 € et 52.949,49 € au profit de la veuve et des deux enfants qui porte intérêt au taux légal à compter du 10 juillet 2013, date du prononcé du présent arrêt, en application de l'article 1153-1 du code civil.

Sur les demandes annexes

M. [N] qui succombe dans ses prétentions supportera la charge des entiers dépens de première instance en ce compris les frais de référé et d'expertise en application de l'article 695 4° du code civil et les dépens d'appel et ne peut, de ce fait, bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande d'allouer aux consorts [H] qui ont fait choix d'un avocat commun une indemnité globale de 3.000 € au titre des frais irrépétibles exposés devant le tribunal et la cour à la charge de M. [N].

Les demandes présentées à ce même titre par M. [K] et par M. [I] à l'encontre de Mme [S] doivent, en équité, être rejetées.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Infirme le jugement

hormis en ses dispositions relatives à M. [I] et à M. [K].

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- Dit que M. [A] [N] a engagé sa responsabilité envers Mme [S] agissant tant à titre personnel qu'en sa qualité de représentante légale de ses deux enfants mineurs, [P] et [W], pris en leur qualité d'ayants-droit de M. [M] [H], au titre de son obligation de soins.

- Dit que le préjudice subi par Mme [L] [S], [P] [H] et [W], [H] est constitué par la perte d'une chance de M. [M] [H] d'échapper au risque de décès.

- Dit qu'il est indemnisable à hauteur de 75 %.

- Fixe les préjudices moraux de Mme [L] [S], [P] [H] et [W], [H] à la somme de 25.500 € pour chacun d'eux.

- Dit que M. [N] est tenu à les réparer à hauteur de 19.125 € pour chacun d'eux.

- Condamne M. [A] [N] à payer à Mme [L] [S] tant à titre personnel qu'en sa qualité d'administratrice légale de ses deux enfants mineurs [P] [H] et [W] [H] la somme de 19.125 € pour chacun d'eux au titre de leurs préjudices moraux.

- Fixe les préjudices patrimoniaux de Mme [L] [S] à la somme de 293.925,25€

- Dit que M. [A] [N] est tenu à les réparer à hauteur de 220.443,93 €

- Condamne M. [A] [N] à payer à Mme [L] [S] à titre personnel les sommes de

* 5.212,51 € au titre des frais d'obsèques.

* 215.322,42 € au titre de son préjudice économique

- Fixe le préjudice patrimonial de [P] [H] et [W] [H] aux sommes respectives de 64.189,86 € et 70.599,32 €

- Dit que M. [A] [N] est tenu à les réparer respectivement à hauteur de 48.1242,39 € et 52.949,49 €

- Condamne M. [A] [N] à payer à Mme [L] [S] en sa qualité d'administratrice légale de sa fille mineure [P] [H] la somme de 48.1242,39 € au titre de son préjudice économique.

- Condamne M. [A] [N] à payer à Mme [L] [S] en sa qualité d'administratrice légale de son fils mineur [W] [H] la somme de 52.949,49 € au titre de son préjudice économique.

- Déboute l'agent judiciaire de l'Etat de l'ensemble de ses demandes.

- Dit que M. [A] [N] a engagé sa responsabilité envers Mme [L] [S] agissant tant à titre personnel qu'en sa qualité de représentante légale de ses deux enfants mineurs, [P] et [W], pris en leur qualité d'ayants-droit de M. [M] [H], au titre de son devoir d'information.

- Condamne M. [A] [N] à payer à Mme [L] [S] agissant tant à titre personnel qu'en sa qualité de représentante légale de ses deux enfants mineurs, [P] et [W], la somme globale de 3.000 € en réparation du préjudice moral.

- Dit que l'ensemble des sommes allouées portent intérêt au taux légal à compter du 10 juillet 2013.

- Rappelle que les fonds allouées aux deux victimes mineures seront placés sous le contrôle du juge des tutelles territorialement compétent à qui une copie de la présente décision sera transmise.

- Condamne M. [A] [N] à payer à Mme [L] [S] tant à titre personnel qu'en sa qualité d'administratrice légale de ses deux enfants mineurs [P] [H] et [W] [H] la somme globale de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile couvrant la première instance et l'appel.

- Déboute M. [D] [K], M. [U] [I], l'agent judiciaire de l'Etat de leur demande à ce même titre.

- Condamne M. [A] [N] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

- Dit qu'ils seront recouvrés, pour ceux d'appel, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 10e chambre
Numéro d'arrêt : 11/14467
Date de la décision : 10/07/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 10, arrêt n°11/14467 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-07-10;11.14467 ?
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