COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
9e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 18 JUILLET 2013
N°2013/624
Rôle N° 11/09654
[K] [D]
C/
SAS CUSTOM SOLUTIONS
Grosse délivrée le :
à :
Me Antoine SOLANS, avocat au barreau de CARCASSONNE
Me Etienne DE VILLEPIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage d'AIX-EN-PROVENCE en date du 05 Mai 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 09/247.
APPELANTE
Madame [K] [D], demeurant [Adresse 1]
comparante en personne, assistée de Me Antoine SOLANS, avocat au barreau de CARCASSONNE
INTIMEE
SAS CUSTOM SOLUTIONS, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Etienne DE VILLEPIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 03 Juin 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre
Monsieur Philippe ASNARD, Conseiller
Madame Nathalie VAUCHERET, Conseiller
Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2013, prorogé au 11 juillet 2013 puis au 18 juillet 2013.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Juillet 2013
Signé par Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre et Monsieur Guy MELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
[K] [D] a été engagée par la SAS Custom Solutions ayant une activité d' agence de publicité en qualité d'opératrice de saisie suivant deux contrats à durée déterminée, le premier du 1er novembre 2003 pour la période 1er au 30 novembre 2003, le second du 12 janvier 2004 pour la période du 12 janvier 2004 au 13 février 2004.
Le 20 février 2004, elle a été embauchée par la même société suivant contrat à durée indéterminée à effet du 14 février 2004 en qualité toujours d'opératrice de saisie sous la même classification 1.2 et coefficient 200 moyennant une rémunération mensuelle brute minimum de 1540 € pour une durée hebdomadaire de travail de 35 heures correspondant à 720 saisies quotidiennes sur la base de 7 heures de travail effectif par jour outre une prime mensuelle de rendement calculée sur la base du nombre de saisies totales par mois ( 720 X par le nombre de jours travaillés dans le mois)X 0, 11 €.
A compter du 19 novembre 2004, la salariée a fait l'objet d'un arrêt de travail pour maladie, qui sur sa demande a été pris en charge par l'organisme social au titre de la législation professionnelle ( ténosynovite tableau n° 57 des maladies professionnelles).
Le 4 février 2008, elle a repris de travail dans le cadre mi-temps thérapeutique suivant avis du médecin du travail du même jour mais à compter du 14 avril 2008, elle a été à nouveau arrêtée.
Le 16 septembre 2008, lors de la visite de reprise, le médecin du travail l'a déclaré inapte à la reprise au poste d'opérateur de saisie et à l'issue de la seconde visite le 30 septembre 2008, il a donné l'avis suivant : « inapte de manière définitive à la reprise de son poste de travail après étude de poste et des conditions de travail dans l'entreprise le 26 septembre 2008, proposant un reclassement pour un poste même à temps partiel, sans port de charges, sans déplacements motorisés pendant les heures de travail permettant l'usage actuellement exclusif du membre inférieur droit, un poste d'agent d'accueil ou de standardiste pouvant convenir avec port d'une oreillette et micro-intégré ».
Par lettre recommandée du 1er octobre 2008, l'employeur a informé la salariée qu'il était dans l'incapacité de lui proposer un reclassement aux postes préconisés par le médecin du travail compte tenu de l'absence en son sein de besoin pour ce type de postes.
Après convocation le 13 octobre 2008 à un entretien préalable, par lettre recommandée du 24 octobre 2008 avec avis de réception, l'employeur a licencié le salarié en ces termes :
«Suite à l'entretien préalable que nous avons eu mardi 2l octobre 2008 à I I heures, nous avons le regret de vous signifier par la présente votre licenciement pour inaptitude professionnelle en raison des faits suivants :
Vous avez été embauchée comme Opératrice de Saisie d'abord en Contrat à Durée Déterminée en date du 12
janvier 2004 puis en Contrat à Durée indéterminée à compter du 14 février 2004. Le 19 novembre 2004 vous avez
été reconnue comme souffrant d'une maladie professionnelle indemnisable (Ténosynovite de Quervain). Vous
avez bénéficié d'un arrêt maladie et eu 2 rechutes ; en date du 06 janvier 2006 et en date du 13 avril 2008.
Durant le second semestre 2007, des études ont été menées par la société, en collaboration avec le Médecin du
travail et un Cabinet d'études ergonomiques, concernant la recherche de solutions d'aménagement de votre poste
de travail afin de maintenir votre emploi.
Ainsi, compte tenu de la spécificité de votre handicap nous avons procédé à des aménagements de votre poste de
travail et de votre véhicule : Clavier ergonomique, Système de repose poignet afin de bénéficier d'un soutien des
poignets lors des phases de saisie, Repose bras articulé afin d'accompagner votre bras, boule au volant de votre
véhicule pour faciliter les manoeuvres lors des trajets domicile travail.
Malgré ces divers équipements et une reprise de travail en horaires aménagés, vous avez rechuté en date du 13
avril 2008. Devant cette situation le médecin du travail, suite à 2 examens cliniques effectués les 16 et 30 septembre 2008, vous a déclaré définitivement inapte à votre poste d'opératrice de saisie.
Un reclassement peut être envisagé à un autre poste sans port de charge, sans déplacements motorisés pendant les heures de travail, permettant l'usage actuellement exclusif du membre inférieur droit. Le Médecin du travail a
proposé uni poste d'agent d'accueil ou de standardiste avec oreillette et micro intégré.
Or nous ne pouvons à ce jour vous faire une proposition car il n'y a aucun besoin pour ces types de postes au sein
de notre société.
Compte tenu de ces remarques je suis malheureusement amené à vous signifier votre licenciement pour inaptitude
professionnelle.
Votre inaptitude définitive étant déclarée vous ne pouvez donc pas exécuter votre préavis et il ne vous sera pas
payé.
A réception de la présente notification, nous vous adresserons votre solde de tout compte ainsi que votre certificat
.de travail ».
Contestant la légitimité de son licenciement, [K] [D] a le 2 mars 2009 saisi le conseil de prud'hommes d' Aix-en-Provence lequel section activités diverses en formation de départage par jugement en date du 5 mai 2011 a:
*dit que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse,
* donné acte à la SAS Custom Solutions de ce qu'elle reconnaît devoir à [K] [D] -2894,24 € au titre du complément de sa participation, déduction faite de 379,80 € déjà versée,
*condamné l'employeur à payer à la salariée:
-2539 € à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement,
- 2894,24 € au titre de complément de sa participation , déduction faite de 379,80 € déjà versée,
-500 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive dans le versement du complément de la participation due,
*débouté la salariée du surplus de ses demandes,
*dit n'y avoir lieu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
*fait masse des dépens et dit que chacune des parties en supportera la moitié.
[K] [D] a le 27 mai 2011 interjeté régulièrement appel de ce jugement, recours limité en ce qu'il a considéré le licenciement reposant sur une cause réelle et sérieuse, ne lui a pas accordé la somme qu'elle sollicitait pour le complément de sa participation et des réclamations dont elle a été débouté .
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Dans ses conclusions, l'appelante demande à la cour de :
*confirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu l'irrégularité de procédure et la résistance abusive sauf à augmenter le quantum de la condamnation pour le dernier chef à 2000 €
*l'infirmer pour le surplus:
*dire le licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse,
*dire que l'employeur n'a pas respecté son obligation de reclassement, les recherches de reclassement effectuées avant la déclaration définitive de l'inaptitude intervenue le 30 septembre 2008 ne devant pas être prises en compte,
*dire que possédant une rémunération composée d'un fixe et d'une rémunération variable, les indemnités prévues à l'article L. 1226 - 14 doivent être calculés sur la base du salaire moyen des 12 derniers mois travaillés soit 2538,99 €,
*dire que le conseil des prud'hommes est compétent pour connaître des litiges liés au montant de la participation individuelle lui revenant du fait de la violation par l'employeur des articles L. 1324 -6 et D 3324 - 11 du code du travail
*condamner l'intimée à lui payer :
- 2539 € net de CSG et CRDS à titre d'indemnité pour licenciement irrégulier en application de l'article L. 1235 -2 du code du travail,,
-32'468 € nets de CSG et CRDS à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse application de l'article L. 1226 - 15 du code du travail,
-4536,97 € à titre de complément de l'indemnité compensatrice prévue à l'article L. 1226- 14 correspondant à l'indemnité compensatrice de préavis,
-3063,10 € à titre de complément de l'indemnité spécifique de licenciement,
- 5074, 11 € à titre de complément de participation outre les intérêts légaux sur la même somme depuis le 1er janvier 2009 date à laquelle cette participation aurait dû être versée,
- 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
*condamner l'employeur à lui remettre le certificat de travail, attestation pôle emploi rectifiée ne faisant pas apparaître de préavis inexistant sous astreinte de 50 € par document et par jour de retard à compter du huitième jour de la décision à intervenir.
Elle invoque:
-le non-respect du délai de l'article L. 1232 -2 du code du travail,
-l'absence de propositions de reclassement, relevant:
- qu'aucune recherche de reclassement n'a été faite par l'employeur après la deuxième visite,
-que deux emplois au moins auraient pu lui être proposés à savoir le poste de responsable du service « saisies et courriers » qui était disponible ainsi qu'un reclassement à domicile ayant lors de son premier CTT effectué des travaux à domicile et sans déplacements, au besoin des mesures telles que mutations et transformations de postes pouvant donner lieu à l'aide de l'Agefiph ou aménagement du temps de travail pouvant être mis en oeuvre,
-que malgré la sommation de communiquer, l'employeur n'a pas produit le registre des entrées et sorties du personnel ce qui démontre qu'il a délibérément violé son obligation de reclassement,
- l'absence totale de recherche de reclassement et la hâte flagrante du licenciement,
- le défaut de consultation des représentants du personnel, précisant que le compte rendu est daté 30 septembre jour où elle a passé sa deuxième visite de reprise, qu'il semble même antidaté au regard du dernier paragraphe qui y figure sur son déménagement dans la région de [Localité 2], qu'il est étrange que si la consultation a véritablement eu lieu l'employeur aurait pris soin de la viser dans le courrier qui lui a adressé le 1er octobre 2008, qu' en dernier lieu la consultation est en tout état de cause irrégulière, les représentants du personnel n'ayant pu être convoqués au moins trois jours à l'avance.
Elle insiste sur sa demande au titre de la participation et les calculs qu'elle présente, relevant que la somme dont l'employeur s'est reconnue débiteur n'est pas suffisante, qu'au demeurant, elle ne lui a toujours pas été payée et qu'il ne lui a pas été adressé l'état récapitulatif prévu à l'article L 3341-7 du code du travail.
Aux termes de ses écritures, la société intimée conclut:
*à la recevabilité de son appel incident,
*à ce qu'il soit dit:
- sur l'irrégularité de la procédure tenant au délai de convocation à l'entretien préalable, que la salariée sera indemnisé à hauteur de 308 €,
- sur le salaire de référence qu'il est celui défini à l'article R 1234-4 du code du travail et en conséquence, il convient de le fixer en l'espèce à 1540 €,
*pour le surplus au débouté de l'intégralité des demandes de l'appelante et à sa condamnation à lui payer 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle souligne sur l'irrégularité de la procédure que la salariée a été privée d'un jour, que la perte d'un seul jour ne peut entraîner la somme prévue par l'article L 1235-2 qui constitue un maximum, qu'en utilisant la règle proportionnelle , l'indemnisation doit être limitée à 1540 € ,
Elle invoque sur l'obligation de reclassement:
-la première période de suspension du 19 novembre 2004 au 4 février 2008, le suivi médical de la salariée et la reprise à mi-temps thérapeutique et le fait que la situation de la salariée était parfaitement connue et son inaptitude prévisible en raison de l'épuisement des mesures d'aménagement de son poste,
- le fait que les délégués du personnel ont été immédiatement consultés après avoir pris connaissance des résultats de la visite médicale de reprise, rappelant que le registre spécial des délibérations a vocation à recevoir les demandes formulées par les déléguées du personnel et des réponses émises par l'employeur mais nullement la teneur des avis recueillis en matière d'inaptitude, que le formalisme de la convocation au bénéfice de trois jours ne s'applique qu'aux consultations obligatoires et non à raison de la sollicitation d'un avis relatif à l'inaptitude d'origine professionnelle d'un salarié,
-qu'elle a effectivement dans le cadre de la pathologie permanente et unique de la salariée transformé son poste de travail, aménagé le temps de travail par la mise en place d'un mi-temps thérapeutique contraignant, modifié à l'aide d'un ergothérapeute les contraintes physiques du poste et procédé à l'aménagement du véhicule personnel de la salariée,
-qu'elle a étudié en collaboration avec les services de la médecine du travail, d'un cabinet d'études ergonomiques et au regard des restrictions apportées, les possibilités de reclassement extrêmement limitées, qu'elle a toujours voulu conserver la salarié et s'est attachée à suivre les recommandations du médecin du travail allant même au delà en finançant une étude ergonomique,
-qu'elle a pu légitimement constaté avec les délégués du personnel que l'ensemble des propositions de reclassement avaient été épuisées.
Elle précise que la salariée s'est installée depuis de nombreux mois dans la région de [Localité 2] et qu'il était parfaitement admis qu'elle n'entendait pas reprendre un poste dans la région d' [Localité 1] en souhaitant être rapidement être licenciée.
Elle s'oppose au rappel de l'indemnité compensatrice relevant que l'on ne peut raisonner par analogie au préavis, qu'il y a prohibition du cumul de l'indemnité compensatrice avec les autres indemnités, que la salariée n'avait pas la qualité d'handicapé à la date de la notification du licenciement ,que pour le calcul de l'indemnité spéciale de licenciement, il faut se référer à l'article R 1234-4 du code du travail et non reconstituer le salaire sur des périodes qui ne précédent pas son licenciement.
Sur la participation, elle argue de l'incompétence des juridictions sociales en matière de contestation quant au montant de la participation à verser et considère que l'appelante commet une erreur d'appréciation.
A l'audience avant la clôture des débats, oralement avec mention au plumitif, l'appelante a formulé une demande complémentaire pour le préjudice lié à la perte d'emploi dans l'hypothèse où le tribunal des affaires de sécurité sociale reconnaîtrait la faute inexcusable de l'employeur pour sa maladie professionnelle et en conséquence le sursis à statuer sur cette demande.
Le conseil de l'intimée s'est opposé à cette demande la considérant comme irrecevable.
En cours de délibéré, le conseil de l'appelante a produit deux courriers adressés par la CPAM du Var l'un à l'assurée en date du 12 mai 2010 par lequel l'organisme social l'informait que la mutation de son dossier ne pourrait être fait qu'après instruction de tous les événements en cours (une attente de la décision du tribunal du contentieux de l'incapacité et des suites de sa demande pour faute inexcusable de l'employeur), l'autre en date du 12 mai 2010 à l'employeur pour l'informer que son service avait été saisi d'une demande de reconnaissance de faute inexcusable de la part de [K] [D].
Pour plus ample exposé, la cour renvoie aux écritures déposées par les parties et réitérées oralement à l'audience.
SUR CE
I sur le licenciement
1° sur la régularité de la procédure,
En vertu de l'article L. 1232 -2 du code du travail, l'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation au salarié de la lettre recommandée de convocation ou sa remise en main propre. Il doit être précisé que le délai ne commence à courir qu'à compter du lendemain du jour de la notification et que le délai expire le dernier jour à 24 heures en application des articles 641 et 642 du code de procédure civile.
En l'état, il ressort des pièces versées au débat que l'employeur a adressé la convocation à un entretien préalable prévu le 21 octobre 2008 par lettre recommandée datée du 13 octobre 2008 qui n'a été présentée au domicile de la salariée que le 16 octobre 2008 et a été distribuée le 17 octobre 2008 c'est-à-dire moins du délai légal de cinq jours ouvrables avant la tenue de l'entretien
En conséquence, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu l'irrégularité de la procédure et lui ont accordé une indemnité de 2539 € à ce titre correspondant à un mois de salaire par référence à la moyenne perçue dans le cadre du contrat à durée indéterminée avant son arrêt de travail.
2° sur le fond,
L'article L.1226-10 dispose que
'Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.
Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste ou aménagement du temps de travail'.
L'article 1226-12 prévoit que
'lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement . L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L.1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions.
S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre II'.
Il est constant et non contesté que les textes applicables sont ceux ci-dessus visés relatifs à l'inaptitude professionnelle.
L'obligation pesant sur l'employeur lui impose outre de consulter les représentants du personnel de rechercher de manière concrète toutes les possibilités de reclassement du salarié, au sein de l'entreprise, des différents établissements et si nécessaire au sein du groupe auquel l'entreprise appartient sous réserve de possibilité de permutations et ce en fonction des préconisations du médecin du travail; Il lui incombe de rapporter la preuve de l'impossibilité dans laquelle il s'est trouvé de procéder au licenciement.
En ce qui concerne la consultation des délégués du personnel, il convient de rappeler que cette consultation doit intervenir après que l'inaptitude a été définitivement constatée., avant que ne soit faite la proposition de reclassement et avant que l'employeur engage la procédure de licenciement même lorsque l'employeur invoque l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié .
En l'état, au vu du compte rendu de consultation produit par l'employeur en date du 30 septembre 2008 à 18 heures 30 soit après l'avis d'inaptitude définitif c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté le moyen opposé par la salariée étant précisé que rien ne permet d'établir que le dit compte rendu aurait été antidaté et qu'il n'est nullement exigé pour ce type de consultation une convocation trois jours à l'avance.
Au surplus, il convient de relever comme le précise à juste titre l'intimée que le registre spécial dont la tenue est prévue à l'article L 2315-2 n'a pas vocation à recueillir les avis visés à l'article L1226-10 .
En ce qui concerne le reclassement proprement dit, la cour adopte les motifs pertinents des premiers juges qui ont retenu que l'employeur avait parfaitement respecté son obligation ayant déjà aménagé son poste de façon érgonomique et son temps de travail dans le cadre du mi temps thérapeutique et n'ayant aucun poste de standardiste ou d'agent d'accueil au sein de son entreprise tel que préconisé par le médecin du travail dans son avis définitif, ce que reconnaît la salariée dans le mail en date du 13 octobre 2008 qu'elle a envoyé à l'employeur.
Il convient d'ajouter:
- que l'employeur n'a pas l'obligation de créer un poste au bénéfice d'un reclassement, qu' un poste à domicile n'a nullement été préconisé par le médecin du travail, que la responsabilité des saisies et courriers dont fait état la salariée ne constituait pas un poste mais des tâches relevant du statut de cadre auquel elle ne pouvait prétendre ce qui aurait excéder les limites du reclassement.
-que contrairement aux dires de l'appelante sa sommation de communiquer (pièce 19) ne concerne que le registre spécial des délégués du personnel et non celui d'entrées et de sorties du personnel.
En conséquence, le licenciement doit être déclaré fondé sur une cause réelle et sérieuse.
II sur l'application de l'article L 1226-14 du code du travail
Cet article L1226-14 prévoit:
' La rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'Article L1226 12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'Article L1234 -5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'Article L1234 -9.
Toutefois, ces indemnités ne sont pas dues par l'employeur qui établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif.
Les dispositions du présent article ne se cumulent pas avec les avantages de même nature prévus par des dispositions conventionnelles ou contractuelles en vigueur au 7 janvier 1981 et destinés à compenser le préjudice résultant de la perte de l'emploi consécutive à l'accident du travail ou à la maladie professionnelle'
En l'état, la salariée reconnaît dans ses écritures avoir reçu respectivement au titre de l'indemnité de préavis 3080 € et à titre d'indemnité de licenciement 1845,63 € .
Or, en l'espèce, elle est bien en droit de revendiquer l'application de l'article L 1226-14, l'employeur s'étant trouvé dans l'impossibilité de la reclasser comme il a été ci dessus.
Il convient en conséquence de lui allouer sur la base du salaire avant son arrêt (soit 2538,99 € )
- pour l' indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis un solde de 1997, 98 € calculé ainsi qu'il suit: deux mois de salaire 5077,98 € moins la somme perçue, étant précisé d'une part que la salariée qui ne produit que la décision de l'attribution d'une rente annuelle de la sécurité sociale sur la base d'un taux de 10 % d'incapacité permanente ne justifie pas avoir le statut de travailleur handicapé et d'autre part que l'article 5213-9 qui a pour but de doubler la durée du délai congé en faveur des travailleurs handicapés n'est pas applicable à l'indemnité compensatrice prévue à l'article L 1226-14,
-pour l' indemnité spéciale de licenciement égale au double de l'indemnité prévue par l'Article L1234- 9, un solde de 3063,10 € (soit 4908,03 € moins 1845,63 € déjà perçu).
III sur les demandes au titre de la participation et en dommages et intérêts
Le moyen tiré de l'incompétence de la juridiction prud'homale opposé par l'employeur ne peut prospérer; cette exception doit être rejetée dans la mesure où la violation des articles visés par la salariée relève bien de la compétence du juge prud'homal, l'appelante ne contestant pas le montant des salaires déclarés à l'adminstration fiscale mais seulement son temps de présence et le salaire à prendre en compte pour le calcul de la participation lui revenant.
Au demeurant, tout en soulevant cette exception, l'employeur s'est reconnu débiteur à ce titre devant les premiers juges de 2894,24 € déduction de 379,80 € versés.
D'autre part, le second moyen opposé par l'intimée ne peut être non plus accueilli, la salariée justifiant qu'elle a adressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 27 septembre 2010 sa contestation sur le montant de sa participation et en demandant expressément de voir mettre en place la procédure de conciliation prévue à l'article 11 de l'accord de participation;
En l'état, il est constant que la salariée qui a été licenciée le 24 octobre 2008 a droit à la participation pour l'exercice du 1er octobre 2007 au 30 septembre 2008 comme l'a reconnu à l'audience l'employeur.
Pour le calcul de cette participation, en application de l'article D 3324-11, le salaire à prendre en compte est celui moyen sur les 9 mois précédents l'arrêt de travail pour maladie professionnelle et qui comprend tant la rémunération fixe que la prime de rendement de sorte que comme l'indique la salariée la participation à laquelle elle a droit s'élève bien à 5074,11 € déduction faite de 379,80 € qui a été versé avec intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2009, date à laquelle cette participation aurait dû être versée.
La confirmation du jugement s'impose par contre sur l'octroi de 500 € pour résistance abusive dans la remise du livret d'épargne salariale et l'état récapitulatif prévu à l'article l 3341-7 du code du travail ainsi que dans le réglement du montant de la participation due.
IV Sur les autres demandes
La remise de l'attestation Pôle Emploi d'un bulletin recapitulatif conformes au présent arrêt s'impose sans qu'il y ait lieu de prévoir une astreinte.
Dans la mesure où le licenciement est considéré fondé sur une cause réelle et sérieuse, la demande complémentaire pour le préjudice lié à la perte d'emploi dans l'hypothèse où le tribunal des affaires de sécurité sociale reconnaîtrait la faute inexcusable de l'employeur, est irrecevable et il n'y a pas lieu en conséquence de surseoir à statuer.
Il y a lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer à ce titre 1500 € à l'appelante.
L'employeur qui succombe en partie ne peut bénéficier de cet article et doit être tenu aux dépens.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Confirme le jugement déféré sauf sur le complément de la participation auquel [K] [D] pouvait prétendre, et sur les soldes dus en application de l'article L 1226-14 du code du travail .
Statuant à nouveau sur les points réformés et y ajoutant,
Condamne la SAS Custom Solutions à payer à [K] [D] en sus de indemnités confirmées les sommes suivantes:
-5074,11 € déduction faite de 379,80 € au titre de la participation avec intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2009,
-1997,98 € à titre de solde de l'indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L 1226-14 du code du travail ,
-3063,10 € à titre de solde de l' indemnité spéciale de licenciement prévue au même article sus visé,
- 1500 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Ordonne la remise par la SAS Custom Solutions à [K] [D] de l'attestation Pôle Emploi et d'un bulletin de salaire récapitulatif conformes au présent arrêt,
Condamne la SAS Custom Solutions aux dépens d'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT