COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
9e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 07 NOVEMBRE 2013
N° 2013/
Rôle N° 11/09204
[S] [N]
C/
Société [2]
Grosse délivrée
le :
à :
Me Benjamin CORDIEZ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Me Christian SALORD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE en date du 03 Mai 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 10/477.
APPELANTE
Madame [S] [N], demeurant [Localité 1]
représentée par Me Benjamin CORDIEZ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMEE
Société [2], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Christian SALORD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 25 Septembre 2013 en audience publique devant la Cour composée de :
Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre
Monsieur Philippe ASNARD, Conseiller
Madame Nathalie VAUCHERET, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Novembre 2013.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Novembre 2013.
Signé par Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre et Monsieur Guy MELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
[S] [N] a été engagée le 19 janvier 1999 par le restaurant "[1]", dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée en date du 15 janvier 1999, en qualité de cuisinière, niveau II, échelon 3. Son horaire mensuel théorique était de 86,60 heures.
La convention collective applicable est celle des cafés hôtels restaurants.
Elle a été promue, en raison de son sérieux, chef de cuisine à compter du 1er avril1999.
Son contrat de travail a été transféré par application de l'article L 122-12 ancien du code du travail (article L 1224-1du code du travail), à compter du 1er février 2003, à l'EURL [2].
[S] [N] a été placée en arrêt de travail du 25 mars au 27 octobre 2003 en raison d'un syndrome anxio-dépressif moyen.
Par avenant du 21 octobre 2003, l'horaire de travail de [S] [N] a été porté, à compter du 28 octobre 2003 à 130 heures par mois pour une rémunération mensuelle brute de 1300€. La répartition de son temps de travail était ainsi définie : mardi, mercredi, jeudi, vendredi, samedi, de 9 heures à 15 heures.
La salariée a été, à nouveau, placée en arrêt de travail du 8 novembre au 31 décembre 2004, pour les mêmes raisons médicales.
Le gérant du restaurant [2], [C] [I], a fait savoir à la CPAM qu'il soupçonnait sa salariée, [S] [N], d'exercer une activité chez un particulier alors qu'elle se trouvait en arrêt de travail pour cause de maladie.
Le rapport établi le 2 février 2005 par un inspecteur de la caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône résume ainsi les dires d' [C] [I] :
«Je soupçonne mon employé, [S] [N], en arrêt de travail depuis le 8 novembre 2004 de travailler chez un particulier. J'ai pu constater à plusieurs reprises lors d'un précédent arrêt de travail en 2003 qu'elle travaillait les après-midi dans une villa située à [Localité 1], dans un garage à la préparation de produits (volailles, lapins, rôtis) pour être vendus sur les marchés par le propriétaire de cette villa, Monsieur [T]. A plusieurs reprises, [S] [N] m'a demandé de la licencier, ce que j'ai refusé systématiquement. C'est donc pour cela qu'elle s'est mise en arrêt de travail. Fin novembre, j'ai pu constater que sa voiture une Renault Twingo immatriculée [Immatriculation 1] étaient garée devant la maison de Monsieur [T] et je l'ai vue en train de s'activer, habillée en tenue de travail (bonnet, combinaison) ».
L'inspecteur chargé de l'enquête indique qu'il s'est rendu les 3,4,5,6 et 7 janvier 2005 entre 14 et 16 heures, aux abords du [Localité 1] à [Localité 2] , adresse que lui avait indiquée [C] [I] et qu'il a vu [S] [N] entrer dans la propriété sans toutefois pouvoir observer ce qu'elle y faisait puisqu'une grande toile était tirée de part et d'autre de l'allée centrale.
Entendue, [S] [N] a certifié sur l'honneur qu'elle ne travaillait pas chez Monsieur [T], qu'elle n'avait jamais perçu de rémunération et que si elle se rendait régulièrement à l'adresse où elle avait été observée c'était parce qu'elle tenait compagnie au père de Monsieur [T], très souffrant. Elle a précisé que Monsieur [O] [T] vendait de la rôtisserie sur le marché et qu'il venait avec son camion au [Localité 1] pour se ravitailler.
L'inspecteur de la CPAM a conclu son rapport en indiquant qu'il avait la quasi-certitude que [S] [N] travaillait effectivement au service de Monsieur [T].
Le 7 janvier 2005, le médecin du travail dans le cadre d'une visite de reprise, a émis l'avis suivant : « Inapte à tout poste de l'entreprise selon la procédure R 245-51, 1er alinéa ».
La salariée ne s'est plus présentée à son poste de travail.
Par courrier du 19 janvier 2005, l'employeur a demandé au médecin du travail de bien vouloir, d'une part, procéder à une seconde visite, d'autre part, de lui préciser quels postes pourraient être compatibles avec l'état de santé de la salariée.
La réponse du médecin du travail, en date du 21 janvier 2005, précise qu'il avait jugé, dès la première visite, que le maintien de [S] [N] à son poste de travail entraînait un danger immédiat et qu'il n'y avait donc pas lieu de procéder, ni à une deuxième visite, ni à une recherche de reclassement dans l'entreprise.
Après convocation le 24 janvier 2005 à un entretien préalable, l'employeur a licencié [S] [N] par lettre recommandée du 5 février 2005 avec avis de réception, en ces termes :
« Comme suite à l'entretien préalable du 2 février 2005, nous nous voyons contraints de vous notifier par la présente votre licenciement pour inaptitude physique constatée par le médecin du travail.
A l'issue de votre dernier arrêt maladie, vous avez passé une visite de reprise auprès de la médecine du travail en date du 7 janvier 2005. A cette occasion le médecin du travail a constaté votre «inaptitude à tous postes de l'entreprise ».
En conséquence nous nous sommes rapprochés du médecin du travail afin de savoir si l'un des postes existants dans l'entreprise, à savoir commis de cuisine et personnel de salle, était compatible avec votre état de santé.
Malheureusement le médecin du travail nous a indiqué par courrier du 21 janvier 2005 qu'un reclassement n'était pas envisageable.
Dans ces conditions, compte tenu de l'impossibilité de reclassement à laquelle nous sommes confrontés, nous ne pouvons que procéder à votre licenciement pour inaptitude physique à tous les postes de l'entreprise.
Le constat d'inaptitude fait par le médecin du travail rendant impossible l'accomplissement d'un préavis, celui-ci ne vous sera pas rémunéré et la rupture de votre contrat de travail sera effective à la date de première présentation de cette lettre.
Nous tenons à votre disposition votre certificat de travail, attestation ASSEDIC, reçu pour solde de tout compte, etc ... »
[S] [N] a, le 10 juin 2005, saisi le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence section commerce de différentes demandes tendant, notamment, à la requalification de son contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps plein, à un rappel de salaire, à des dommages et intérêts et à des indemnités de rupture pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
A la suite de l'enquête réalisée en janvier 2005, la caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône a, par courrier du 10 mai 2006, notifié à [S] [N] une pénalité d'un montant de 1244,88 €, équivalant à une retenue de 56 indemnités journalières, au titre de l'article L 323-6 du code de la sécurité sociale.
[S] [N] a contesté cette décision et saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône, lequel, par jugement du 22 mai 2008, l'a accueillie en sa contestation et a rejeté la demande de la CPAM .
Les principaux motifs de ce jugement sont les suivants :
' l'employeur, avant de procéder à une dénonciation auprès de la CPAM, a personnellement procédé à des constatations dans des conditions contraires aux dispositions des articles 8 de la Convention Européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 9 du code de procédure civile et L120-2 du code du travail,
' l'enquête a été régulièrement diligentée par l'inspecteur de la CPAM puisque celle-ci a démarré sur la base d'une dénonciation,
' les époux [O] [T] ont établi des attestations confirmant les dires de la salariée,
' il y a lieu de considérer que [S] [N] ne s'est pas livrée une activité non autorisée.
L'affaire opposant [S] [N] à la société [2] a été radiée du rôle à l'audience de jugement du conseil des prud'hommes d'Aix-en-Provence du 11 septembre 2008 et réinscrite, à la demande de la salariée, le 27 avril 2010.
Par jugement en date du 3 mai 2011, la juridiction prud'homale a:
*dit n'y avoir lieu à requalification du contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps complet,
*dit que le licenciement de [S] [N] reposait sur une cause réelle et sérieuse,
*débouté [S] [N] de l'intégralité de ses demandes,
*débouté la société [2] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
*condamné [S] [N] aux dépens.
[S] [N] a, le 24 mai 2011,interjeté régulièrement appel de ce jugement.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Dans ses conclusions, l'appelante demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et de :
' requalifier le contrat de travail à temps partiel en date du 15 janvier 1999 en un contrat de travail à temps complet,
' dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
' condamner la société [2] à lui payer :
*26 815,58 € à titre de rappel de salaire sur la base d'un temps complet,
*2681,56 € pour les congés payés afférents,
*3033,40 € à titre d'indemnité de préavis
*303,34 € pour les congés payés afférents,
*15 000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution gravement fautive du contrat de travail par l'employeur,
*20 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement réputé dépourvu de cause réelle et sérieuse,
*2500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
' ordonner à la société [2], sous astreinte de 150 € par jour de retard, huit jours à compter de la notification du « jugement » à intervenir, d'avoir à lui délivrer les bulletins de salaire mentionnant un horaire à temps complet et la rémunération correspondante, l'attestation pôle emploi rectifiée des mêmes chefs mentionnant au titre de la rupture « un licenciement sans cause réelle et sérieuse »,
' condamner la société [2] aux dépens.
Elle soutient que :
' le contrat de travail à temps partiel en date du 15 janvier 1999 ne comporte aucune mention de la répartition des horaires de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois et que la répartition prévue par l'avenant en date du 21 octobre 2003 n'a jamais été respectée, de sorte qu'il y a lieu de requalifier son contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps plein,
' le comportement gravement fautif de son employeur lui a causé un important préjudice,
' la dégradation de son état de santé qui a abouti à son licenciement pour inaptitude est la conséquence des agissements de l'employeur,
' l'employeur n'a procédé à aucune recherche de reclassement de sorte que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
Aux termes de ses écritures, la société intimée conclut à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de l'appelante à lui payer la somme de 2500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que :
' la salariée a travaillé, à compter de son embauche et jusqu'au 27 octobre 2003, du mardi au samedi de 9 heures à 14 heures avec une heure de pose de 11 heures à 12 heures, puis à compter du 28 octobre 2003, du mardi au samedi, de 9 heures à 15 heures,
' elle a souhaité être licenciée de la société [2] afin de percevoir des allocations chômage tout en continuant de travailler en qualité de préparatrice de volaille sans être déclarée,
' les arrêts de maladie sont consécutifs au refus, par deux fois exprimé, de son employeur de la licencier,
' la prétendue exécution fautive du contrat de travail ou l'allégation de faits de harcèlement moral permettent à la salariée de justifier ses arrêts de travail et de se venger de la dénonciation effectuée par son employeur auprès de la CPAM,
' le courrier adressé par la société au médecin du travail afin de savoir si les postes de commis de cuisine et de personnel de salle pouvaient être ou non compatibles avec l'état de santé de la salariée constitue la preuve de la réalité de la recherche de reclassement.
Pour plus ample exposé, la cour renvoie aux écritures déposées par les parties et réitérées oralement à l'audience.
SUR CE
I- Sur la requalification du contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps plein :
Aux termes de l'article L 3123-14 du Code du travail, le contrat de travail des salariés à temps partiel est un contrat écrit qui doit mentionner la durée hebdomadaire ou mensuelle avec la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.
En l'absence des mentions obligatoires de la répartition des horaires, le contrat est présumé avoir été conclu pour un horaire à temps normal.
Il appartient à l'employeur qui souhaite contester cette présomption de rapporter la preuve qu'il s'agit d'un emploi à temps partiel et que le salarié n'est pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler et qu'il n'est pas contraint de se tenir constamment à la disposition de son employeur.
Le contrat de travail à temps partiel en date du 15 janvier 1999 précise seulement les durées hebdomadaire et mensuelle de travail, soit 20 heures et 86,60 heures.
L'avenant signé par les parties le 21 octobre 2003 mentionne, quant à lui , la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine. La salariée soutient cependant que l'horaire de travail n'était pas respecté et qu'elle effectuait de nombreuses heures supplémentaires.
1- Sur la période antérieure à la signature de l'avenant :
Il appartient à l'employeur, qui entend renverser la présomption, de prouver que [S] [N] a occupé, du 19 janvier 1999 au 27 octobre 2003, un emploi à temps partiel, qu'elle connaissait son rythme de travail et qu'elle n'était pas contrainte de se tenir constamment à sa disposition.
L'employeur produit trois attestations correspondant à cette période puisque les pièces 19 et 20 concernent la période postérieure à l'avenant.
La pièce 17, non conforme aux dispositions de l'article 202 du Code de procédure civile en ce qu'elle n'indique pas qu'elle est établie en vue de sa production en justice et que son auteur a connaissance qu'une fausse attestation l'expose à des sanctions pénales, n'emporte pas la conviction de la cour .
Le rédacteur de la pièce 16, [B] [D], ex salarié du [2], atteste qu'il travaillait avec [S] [N] du mardi au samedi , de 9 h à 14 h,
Le rédacteur de la pièce 18, [M] [L], indique qu'il a travaillé de mai 2000 à juillet 2002 au restaurant "[1]" puis au [2] et affirme que [S] [N] n'effectuait que les services du midi.
Ces deux seules pièces, qui ne mentionnent pas si [S] [N] bénéficiait, ainsi que le soutient l'employeur, d'une pause d'une heure entre 11 h et 12 h et qui, pour l'une d'entre elles, ne précise même pas quels étaient les horaires de la salariée, sont insuffisantes pour renverser la présomption.
La cour fait en conséquence droit à la demande de l'appelante. Elle requalifie, pour la période du 19 janvier 1999 au 27 octobre 2003, son contrat de travail à temps partiel en un contrat à temps plein et condamne, en tenant compte de ses périodes d'absence, la société intimée à lui payer, à titre de rappel de salaire, la somme de 21989 €, outre celle de 2198,90 € pour les congés payés afférents.
Le jugement entrepris est donc infirmé de ce chef.
2-Sur la période postérieure à la signature de l'avenant :
L'avenant signé le 21 octobre 2003 par les parties répond aux exigences légales. La salariée, qui indique que les horaires n'étaient pas respectés, ne produit aucun élément suffisamment précis sur les horaires qu'elle aurait, selon elle, effectivement réalisés. La cour rejette, en conséquence, le surplus de sa demande de rappel de salaire.
II -Sur l'exécution du contrat de travail :
Conformément aux dispositions de l'article L 1222 du Code du travail (article 120-4 ancien), «le contrat de travail est exécuté de bonne foi».
Il ressort clairement des écritures de l'appelante que celle-ci présente sa demande de dommages et intérêts au titre, non pas du harcèlement moral, mais d'une exécution fautive du contrat par l'employeur, de sorte que la cour examinera les éléments de la cause sous ce seul angle même si les premiers juges ont recherché si le harcèlement moral était établi.
La salariée soutient à l'appui de sa demande indemnitaire :
-qu'elle faisait régulièrement l'objet d'insultes et d'agressions verbales de la part de son employeur,
-qu'elle a fait l'objet d'une rétrogradation sans motifs au poste de commis de cuisine,
-que son employeur a procédé à une véritable filature afin de tenter de convaincre un enquêteur de la CPAM qu'elle travaillait pour le compte d'un tiers durant son congé maladie.
Ses attestations, non numérotées, rédigées en des termes imprécis, ne précisent pas quelles insultes auraient été proférées par l'employeur à son endroit.
Elles ne caractérisent aucun fait de rétrogradation.
S'agissant du troisième grief fait à l'employeur, la salariée se contente de produire le jugement rendu par le TASS de Marseille.
Considérant, d'une part, qu'aucune pièce à la procédure n'établit dans quelles circonstances l'employeur a pu se convaincre que [S] [N] travaillait pour [O] [T], d'autre part, qu'il ne résulte pas du jugement du 22 mai 2008 que le juge a, au cours des débats, recueilli de l'employeur une sorte « d'aveu de filature », enfin, qu'elle ne peut procéder par voie de déduction ou de supputation, la cour confirme, par substitution de motifs, le jugement déféré qui a débouté la salariée de sa demande de dommages et intérêts.
III- sur le licenciement :
Selon les dispositions de l'article L 1226-2 du Code du travail, 'lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnels, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.
Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des taches existantes dans l'entreprise.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.'
L'employeur doit rechercher par tous moyens s'il est possible de préserver l'emploi.
Le seul fait qu'il ait interrogé le médecin du travail le 19 janvier 2005 afin de savoir quels postes dans l'entreprise pourraient être compatibles avec l'état de santé de la salariée n'établit pas qu'il a procédé à des recherches sérieuses de reclassement, la lettre de licenciement indiquant d'ailleurs clairement le contraire.
Le licenciement de [S] [N] s'analyse, en conséquence, en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le jugement déféré est infirmé de ce chef.
IV- Sur la rupture :
1-Sur l'indemnité de préavis :
Si le salarié ne peut, en principe, prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité physique d'exécuter en raison d'une inaptitude à son emploi, cette indemnité est due au salarié dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement consécutive à l'inaptitude.
Il convient donc d'allouer à l'appelante la somme de 2600 € à titre d'indemnité de préavis et de 260 € pour les congés payés afférents.
2- Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
Tenant compte de l'âge de la salariée au moment de la rupture (51 ans et demi), de son ancienneté (6 ans et 2 mois) de son salaire moyen mensuel brut (1300 €), de l'absence de justification de sa situation après la rupture, il y a lieu de lui allouer 11 700 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
V- Sur les autres demandes :
La remise de l'attestation Pôle Emploi et d'un bulletin rectificatif conforme au présent arrêt s'impose sans qu'il y ait lieu de prévoir une astreinte.
Il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile à l'appelante.
L'employeur, qui succombe, ne peut bénéficier de cet article et doit être tenu aux dépens.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Infirme le jugement entrepris, sauf en ses dispositions ayant débouté la salariée de sa demande de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
Requalifie, depuis sa signature, le 15 janvier 1999, jusqu'à la signature de l'avenant en date du 21 octobre 2003, le contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps plein,
Dit que le licenciement de [S] [N] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
Condamne l'EURL [2] à payer à [S] [N] les sommes suivantes:
-21 989 € à titre de rappel de salaire,
-2 198,90 € pour les congés payés afférents,
-2 600 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
-260 € pour les congés payés afférents,
-11700 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Déboute [S] [N] du surplus de sa demande au titre du rappel de salaire,
Confirme le jugement entrepris pour le surplus,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Ordonne la remise par l'EURL [2] à [S] [N] de l'attestation Pôle Emploi et d'un bulletin de salaire récapitulatif conforme au présent arrêt,
Condamne l'EURLLe [2] aux dépens d'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT