COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
8e Chambre C
ARRÊT AU FOND
DU 14 NOVEMBRE 2013
N°2013/466
Rôle N° 11/04056
[X] [R]
C/
[N] [P]
Grosse délivrée
le :
à :TOLLINCHI
BOULAN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 17 Janvier 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 07/1955.
APPELANT
Maître [X] [R], agissant en qualité de mandataire liquidateur de Monsieur [L] [G]
demeurant [Adresse 2]
représenté par la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIME
Maître [N] [P]
huissier de justice
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Françoise BOULAN de la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP BOTTAI GEREUX BOULAN, avoués
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 15 Octobre 2013 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Yves ROUSSEL, Président, et Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller, chargés du rapport.
Monsieur Yves ROUSSEL, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Yves ROUSSEL, Président
Monsieur Vincent PELLEFIGUES, Conseiller
Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Novembre 2013.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Novembre 2013.
Rédigé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président,
Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Monsieur [L] [G], a été nommé huissier de justice à la résidence de [Localité 1] (Haute-Corse) en 1979.
L'administration provisoire de son étude était entre les mains de Me [N] [P] depuis le 12 mars 2002, lorsqu'il a été destitué de ses fonctions par arrêt de la cour d'appel de Bastia, le 9 mars 2004.
Il résultait, en effet, d'un rapport d'inspection du 30 août 2000 qu'il avait commis diverses irrégularités dans la gestion de l'étude, dépourvue de comptabilité depuis 1999.
Le 25 août 2006 Monsieur [G] a assigné Me [P] en remboursement des échéances impayées d'un prêt de 121 951,21 euros, qu'il avait contracté à son nom, le 10 mars 2001, soit quelques semaines avant sa suspension provisoire.
Il estimait, en effet, que la charge du remboursement de cet emprunt, contracté auprès de la SOCIETE GENERALE, incombait à l'étude et non à lui-même, puisqu'il n'avait servi qu'à la restructuration de la trésorerie de l'étude.
L'affaire a été renvoyée devant le tribunal de grande instance de Nice, en application de l'article 47 du code de procédure civile.
Reconventionnellement, Me [N] [P] a demandé la condamnation de Monsieur [G] à lui rembourser les sommes déjà payées par l'étude au titre du même prêt, soit 13 470,75 euros , outre des dommages-intérêts et une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 17 novembre 2008, Monsieur [L] [G], devenu agriculteur a été déclaré en liquidation judiciaire, sous le mandat de Me [R].
Par jugement en date du 17 janvier 2011, le tribunal de grande instance de Nice a déclaré Me [N] [P] irrecevable en son exception de nullité de l'assignation, dit que le prêt souscrit le 10 mars 2011 avait été conclu par Monsieur [G] en son nom personnel, constaté que la cause de l'engagement était illicite, rejeté les demandes de ce dernier ainsi que celles de Me [R], pris en sa qualité, condamné Monsieur [G] à payer à Me [P] la somme de 13 470,75 euros, outre 2000 € à titre de dommages-intérêts, et mis les dépens à la charge de Monsieur [G].
Vu la déclaration d'appel en date du 4 mars 2011, formé par Me [R] à l'encontre de Me [N] [P].
Vu les conclusions de Me [R] en date du 6 juin 2011 par lesquelles il demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevable la demande de Me [P], de déclarer irrecevable cette demande comme n'ayant aucun lien avec l'activité d'agriculteur de Monsieur [G], subsidiairement d'infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé des condamnations à l'encontre de Monsieur [G] qui est en liquidation judiciaire, de juger qu'il ne pouvait s'agir que d'une fixation de créance, sous réserve que Me [P] justifie avoir été relevée de la forclusion et de laisser les dépens à la charge de cette dernière, ceux d'appel distraits au profit de la SCP TOLLINCHI VIGNERON TOLLINCHI.
Vu les conclusions de Me [P] en date du 8 août 2011, par lesquelles elle demande à la cour de confirmer le jugement, subsidiairement de constater que la cause de l'engagement de Monsieur [G] est illicite, de prononcer la nullité du prêt et de rejeter ses demandes, encore plus subsidiairement de constater qu'elle n'est plus en charge de l'ancienne étude d'huissier de justice et qu'il appartient à Monsieur [G] de se pourvoir ainsi qu'il appartiendra, à titre reconventionnel de le condamner à lui payer la somme de 13 470,75 euros en remboursement des échéances du prêt, outre 3000 € pour procédure abusive et 1500 € sur l'article 700 du code de procédure civile, encore plus subsidiairement de fixer sa créance à la liquidation judiciaire à 13 470,75 euros, outre 3000 € à titre de dommages-intérêts et les dépens.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 17 septembre 2013.
SUR CE, LA COUR
1. Me [N] [P], qui conclut au fond, indique incidemment qu'elle n'est plus en charge de l'administration de l'étude, ayant été remplacée par Maître [E].
Son défaut de qualité à agir ne lui est pas opposé par Me [R] et la cour n'entend pas user de la faculté de relever d'office la fin de non-recevoir tiré du défaut de cette qualité, comme le lui permettrait l'article 125 alinéa 2 du code de procédure civile.
2. Me [R] ne critique pas les dispositions du jugement déféré par lesquelles la demande principale de Monsieur [G] a été rejetée.
En tant que de besoin la cour, qui n'est saisie d'aucun moyen, adopte la motivation par laquelle le premier juge a écarté cette demande.
3. Me [R] fait valoir que la créance dont se prévaut Me [P] n'a aucun rapport avec l'activité d'agriculteur de Monsieur [G], à raison de laquelle il a été placé en liquidation judiciaire.
Mais, le principe de l'unité du patrimoine a pour effet de soumettre l'ensemble du patrimoine du débiteur à la procédure collective en cours, peu important le fait que la dette invoquée par Me [N] [P] ait pour origine une activité professionnelle autre que celle exercée en dernier lieu par Monsieur [G].
4. En revanche, c'est à juste titre que Me [R] soutient qu'aucune condamnation ne peut intervenir à l'encontre de Monsieur [G] et que seule une fixation de créance au passif de la liquidation judiciaire peut intervenir.
Sur ce point, Me [N] [P], qui prétend qu'elle a déclaré sa créance au passif de la liquidation judiciaire, après avoir été relevée de la forclusion, suivant ordonnance du juge-commissaire en date du 7 décembre 2009, n'en justifie pas .
Il en résulte une inopposabilité de la créance au débiteur, par application de l'article L 622-26 du Code de commerce.
5. Monsieur [G] a explicité sa demande au moyen de conclusions motivées en fait et en droit. Celle-ci n'apparaît donc pas être abusive. La demande de dommages-intérêts formée par Me [N] [P] sera rejetée.
L'appel était rendu nécessaire par le prononcé d'une condamnation à paiement contre Monsieur [G], alors qu'il était déjà en liquidation judiciaire et qu'il était représenté par Me [R].
Pour cette raison, l'équité commande qu'il ne soit pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et que chacune des deux parties conserve à sa charge les dépens de l'instance d'appel.
PAR CES MOTIFS
statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a condamné Monsieur [G] à payer à Me [P] la somme de 13 470,75 euros, outre 2000 € à titre de dommages-intérêts,
Réformant et statuant à nouveau de ce chef,
Rejette les demandes de Me [P],
Rejette toute autre demande,
Dit que chacune des deux parties conservera la charge de ses propres dépens,
Le GreffierLe Président