La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/11/2013 | FRANCE | N°12/04591

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre c, 15 novembre 2013, 12/04591


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre C



ARRÊT AU FOND



DU 15 NOVEMBRE 2013



N°2013/ 683















Rôle N° 12/04591







[F] [J]





C/



SAS UFIFRANCE PATRIMOINE























Grosse délivrée le :



à :



-Me Bruno SCARDINA, avocat au barreau d'ANGERS



- Me Nicolas CALLIES, avocat au barreau de HAUTS DE S

EINE





Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 14 Février 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 09/4246.





APPELANT



Monsieur [F] [J], demeurant [Adresse 2...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 15 NOVEMBRE 2013

N°2013/ 683

Rôle N° 12/04591

[F] [J]

C/

SAS UFIFRANCE PATRIMOINE

Grosse délivrée le :

à :

-Me Bruno SCARDINA, avocat au barreau d'ANGERS

- Me Nicolas CALLIES, avocat au barreau de HAUTS DE SEINE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 14 Février 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 09/4246.

APPELANT

Monsieur [F] [J], demeurant [Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Bruno SCARDINA, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEE

SAS UFIFRANCE PATRIMOINE, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Nicolas CALLIES, avocat au barreau de HAUTS DE SEINE substitué par Me Faustine MONCHABLON, avocat au barreau de HAUTS DE SEINE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 24 Septembre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Louis DABOSVILLE, Président de Chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Louis DABOSVILLE, Président de Chambre

Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre

Madame Catherine VINDREAU, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Novembre 2013

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Novembre 2013

Signé par Monsieur Louis DABOSVILLE, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M.[J] a été embauché en qualité de démarcheur par la société UFIFRANCE PATRIMOINE selon contrat à durée indéterminée en date du 24 janvier 1997.

Il a ensuite accédé au poste de conseiller en gestion de patrimoine.

Aux termes de son nouveau contrat de travail du 3 mars 2003, modifié suite à l'entrée en vigueur d'un accord d'entreprise du 28 février 2003, puis d'un avenant du 17 janvier 2005, sa rémunération était composée d'une partie fixe mensuelle, égale au SMIC, majorée de 10 % au titre des congés payés, d'une somme brute de 230,00 € au titre d'un remboursement forfaitaire des frais professionnels et d'une partie variable constituée de commissions de production, les versements au titre de la partie variable incluant une indemnité de 10 % correspondant à un remboursement complémentaire de frais professionnels et une indemnité de 10 % au titre des congés payés.

M.[J] a fait l'objet d'un avertissement le 7 octobre 2008.

A dater du 12 octobre 2009 M.[J] a été placé en arrêt de travail pour dépression.

Par lettre du 5 novembre 2009 M.[J] a pris acte de la rupture de son contrat de travail et, le 11 décembre 2005, il a saisi le Conseil de Prud'hommes de Marseille pour demander qu'il soit pris acte de la rupture du contrat de travail aux torts de la société UFIFRANCE PATRIMOINE, et demander à l'encontre de son employeur le règlement de diverses sommes.

-------------------------------------------------

Par jugement de départage en date du 14 février 2012, le Conseil de Prud'hommes de Marseille a:

-dit que la convention collective des entreprises de courtage assurance est applicable et que M.[J] relève de la classe E

-débouté M.[J] de sa demande de rappel de salaires

-dit que la clause d'intégration des frais du contrat initial est illicite mais constaté la prescription des demandes de frais pour cette période

-dit que les clauses 2-1 et 2-2-2 du contrat du 3 mars 2003 ne sont pas illicites

-débouté M.[J] de sa demande de remboursement de frais

- condamné l'employeur à lui payer la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de paiement intégral du forfait de remboursement de frais

- dit que la prise d'acte du 5 novembre 2009 a les effets d'une démission

-débouté la société UFIFRANCE PATRIMOINE de sa demande au titre du préavis

-dit que la clause de non concurrence est illicite

- condamné l'employeur à payer à M.[J] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

------------------------------------

M.[J] a interjeté appel de cette décision.

----------------------------------------

Au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la Cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués, M.[J] demande la confirmation du jugement en ce qu'il a dit que la convention collective des entreprises de courtage assurance est applicable et que M.[J] relève de la classe E ; l'infirmation du jugement pour le surplus et de :

- condamner UFIFRANCE PATRIMOINE au paiement d'un rappel de salaire au titre du revenu minimum afférent à la classe E soit la somme de 7492, 47 euros, outre l'incidence congés payés d'un dixième soit 749,24 euros,

- juger non opposable la prescription quinquennale en vertu de l'article 2224 du code civil,

- juger la prescription quinquennale interrompue par la signature le 3 mars 2003 du nouveau contrat de travail consacrant un droit individuel au remboursement des frais professionnels et ce en vertu de l'article 2228 du code civil,

- juger en conséquence qu'il est en droit d'obtenir remboursement par la SAS UFIFRANCE PATRIMOINE des frais professionnels exposés dans le cadre de son emploi de démarcheur sur toute la durée d'emploi et à tout le moins depuis le 3 mars 1998,

- annuler la clause d'intégration des frais dans les commissions en vigueur avant le 3 mars 2003,

- juger que les clause 2.2 et 2.3 du contrat de travail du 3 mars 2003, lui sont inopposables et par la même qu'il est en droit d'être remboursé de l'intégralité des frais exposés,

- constater qu'aucun remboursement forfaitaire des frais n'a été opéré à son bénéfice les mois payés à la commission et en conséquence, condamner la SAS UFIFRANCE PATRIMOINE au remboursement des frais professionnels exposés et non remboursés soit :

Année 1998 : 8032 euros

Année 1999 : 9887 euros

Année 2000 : 10021 euros

Année 2001 : 10 142 euros

Année 2002 : 11154 euros

Tenant compte des sommes versées en remboursement des frais :

Année 2003 : 11026, 60 euros

Année 2004 : 9971 euros

Année 2005 : 11924 euros

Année 2006 : 11766 euros

Année 2007 : 11766 euros

Année 2008 : 9969, 33 euros,

- assortir la condamnation des intérêts légaux à compter de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation,

- ordonner la capitalisation des intérêts qui est de droit, application faite de l'article 2254 du code civil,

- subsidiairement, si la clause 2.2 lui était jugée opposable juger qu'ayant exposé des frais pour un montant supérieur au forfait frais alloué, il a droit à un rappel de salaire à calculer chaque mois pour atteindre le smic sur la période non prescrite et condamner la société UFIFRANCE PATRIMOINE au paiement de 8770, 16 euros ,outre l'incidence congés payés (877 euros),

- juger que la SAS UFIFRANCE PATRIMOINE a manqué à plusieurs de ses obligations et exécuté de mauvaise foi le contrat de travail et la condamner au paiement de la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts et en réparation du préjudice matériel et moral subis,

- juger que rupture des relations contractuelles de travail est imputable à la SAS UFIFRANCE PATRIMOINE et condamner UFIFRANCE PATRIMOINE au paiement de la somme de 50 000 euros en indemnisation du préjudice moral et matériel subis en application des dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail,

- condamner la société UFIFRANCE PATRIMOINE au paiement de l'indemnité légale de licenciement soit la somme de 7367 euros, et au paiement de indemnité légale de préavis soit la somme de 5214, 68 euros outre l'incidence congés payés d'un dixième soit 521, 46 euros

- annuler la clause 4-4 de non concurrence du contrat de travail du 3 mars 2003,

- juger nécessairement fautif et préjudiciable le maintien par UFIFRANCE PATRIMOINE et jusqu'au licenciement prononcé la clause nulle de non concurrence et la condamner au paiement de la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts.

- débouter la société UFIFRANCE PATRIMOINE de ses prétentions.

M.[J] sollicite en outre la somme de 5000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

----------------------------------------------------------------------------------------------------

Au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la Cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués, la société UFIFRANCE PATRIMOINE demande de débouter M.[J] de ses prétentions et de le condamner à payer l'indemnité de préavis et la somme de 2000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la prise d'acte

En cas de prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié, cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse , si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.

Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.

L'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige.; le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit.

Il résulte de la combinaison des articles L.1231-1, L.1237-2 et L.1235-1 du code du

travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de

manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat

de travail.

Il convient en conséquence d'examiner le bien fondé et la portée de l'ensemble des griefs avancés par l'appelant ;

M.[J] invoquait dans sa la lettre de prise d'acte divers griefs :

Il revendiquait en préalable le bénéfice de la convention collective du Courtage d'assurance du 18 janvier 2002.

Il contestait l'application de la clause de remboursement forfaitaire des frais à hauteur de 230€ et le montant de sa rémunération et la validité de la clause intégrant les frais dans les commissions.

Il invoquait des faits de discrimination et de harcèlement moral.

Il imputait à la société UFIFRANCE PATRIMOINE des pratiques déloyales.

En cause d'appel M.[J] reprend et amplifie ces griefs :

Sur le rappel de salaire, il revendique le bénéfice de la classe E définie par la convention collective en faisant valoir la complexité de ses fonctions, son autonomie, ses connaissances techniques et ses responsabilités.

Sur la demande de remboursement de ses frais professionnels, il soutient tout d'abord, pour la période antérieure à mars 2003, que la prescription quinquennale n'a pas couru contre lui, dans la mesure où il ignorait ses droits, qu'il n'a connu qu'après la rupture de son contrat, ce principe ayant été repris par la loi du 17 juin 2008 réformant la prescription, la société ne l'ayant pas informé de son droit à remboursement intégral de ses frais, et ayant continué à insérer dans les contrats antérieurs à mars 2003, une clause nulle, intégrant les frais dans son traitement et ses commissions, et ce malgré la jurisprudence constante de la cour de cassation.

Que, pour cette période, il était soumis à un horaire de travail non collectif mais individuel.

En second lieu, il allègue que la prescription a été interrompue par la signature de l'accord d'entreprise du 28 février 2003 et la signature du contrat de travail du 3 mars 2003, valant reconnaissance de son droit à remboursement de ses frais, de sorte que la prescription peut remonter cinq ans en arrière soit jusque février 1998.

Sur la période postérieure à mars 2003, il expose que la clause de son contrat, qui prévoit un remboursement forfaitaire des frais à hauteur de 230€, ne couvre pas tous ses frais et lui est inopposable, dans la mesure ou elle le prive de ressources au moins égales au salaire conventionnel ou au smic.

Il fait valoir encore, que le forfait de 230€ ne lui a pas été versé, mais a été imputé sur le montant des commissions.

Selon lui, la clause intégrant les frais dans les commissions et prévoyant un défraiement sous forme d'un pourcentage est nulle, un tel dispositif ayant déjà été censuré à plusieurs reprises par la cour de cassation.

Il soutient, de manière générale, que les faits qu'il invoque et doivent s'apprécier au regard du comportement de l'employeur, qui n'a pas respecté ses obligations et l'a au contraire dénigré.

Que, dans cette logique, les examens médicaux obligatoires n'ont pas été effectués.

Il expose enfin, que la clause de non-concurrence insérée à son contrat, était nulle car lui interdisant tout contact avec la clientèle et ne comportant aucune contrepartie financière.

Sur la demande d'application de Convention Collective du Courtage d'assurance du 18 janvier 2002 et ses conséquences

M.[J] expose que UFIFRANCE est une société de courtage d'assurance immatriculée comme «courtier» auprès du registre des intermédiaires en assurance, ayant une activité d'intermédiaire en assurance, inscrite sur son k bis et sur tous ses papiers à en tète, qui place en clientèle des contrats d'assurance représentant près de 40% du chiffre d'affaire annuel, soit la part la plus importante du chiffre d'affaire réalisé auprès de la clientèle, qui emploie des salariés formés en droit des assurances, habilités a présenter des opérations d'assurance, détenteurs de carte professionnelle les autorisant a placer de l'assurance.

A titre de rappel de salaire, M.[J] revendique en conséquence le bénéfice de la classe E définie par la convention collective en faisant valoir la complexité de ses fonctions, son autonomie, ses connaissances techniques et ses responsabilités.

La société UFIFRANCE PATRIMOINEconteste la prétention du salarié, arguant de ce qu'elle est une société de conseil en gestion de patrimoine, domaine qui n'est régi par aucune convention collective.

La convention collective nationale du courtage d'assurances a pour objet, selon son article 1, de « régler les rapports entre :

D'une part,

Les employeurs, compris dans la nomenclature de l'INSEE sous le code NAF 67.2Z, et inscrits au registre du commerce avec la mention « Courtage d'assurances et/ou de réassurances » ;

Les groupements d'intérêt économique (GIE), constitués exclusivement d'entreprises visées ci-dessus, ou contrôlées par elles, et ayant pour objet de faciliter, par la mise en 'uvre de moyens techniques ou humains, l'exercice des activités de courtage d'assurances ou de réassurances que ces entreprises pratiquent (1),

D'autre part,

Le personnel de toutes catégories - appartenant à leurs services intérieurs ou extérieurs, au siège social ou à leurs succursales - lié à leur employeur par un contrat de travail. »

Il est constant, que le code APE ou NAF de la société ufifrance est 671E, qui n'est pas le code des sociétés de courtage d'assurances, et que le contrat de travail du salarié et ses bulletins de paie ne mentionnent aucune convention collective applicable.

Toutefois, ces seuls éléments sont insuffisants pour écarter l'application de la convention collective en cause, le critère déterminant étant, selon l'article L2261-2 du code du travail, l'activité principale exercée par l'employeur.

La société UFIFRANCE PATRIMOINE, filiale de la société UNION FINANCIERE DE FRANCE (U.F.F.) BANQUE, a, selon l'extrait K.BIS produit aux débats, comme activité :

« La diffusion de tous produits financiers et de placement pour le compte de l'UNION FINANCIERE DE FRANCE, notamment le démarchage en matière mobilière, transactions immobilières, opérations de courtage et de commerce et notamment le courtage d'assurances, conseil en investissements financiers dont la fourniture de conseil aux entreprise en matière de structure de capital, de stratégie industrielle. »

Il est constant, que le salarié était chargé de diffuser auprès des particuliers les produits financiers élaborés par la société, en vue de générer pour celle-ci, des bénéfices, et pour le salarié, des commissions.

La société commercialise essentiellement trois types de produits :

- des fonds communs de placement,

- des contrats d'assurance vie

- des produits d'immobilier locatif.

La société UFIFRANCE PATRIMOINE est inscrite au registre des intermédiaires assurance, avec cette précision que l'intermédiation en assurance est déclarée comme faite à titre accessoire, l'activité principale étant : « autres auxiliaires financiers » .

Le critère du chiffre d'affaires, n'est pas probant , dans la mesure où les résultats peuvent fluctuer en fonction des aléas de la situation économique, la part respective des différents produits évoluant d'année en année.

Ainsi, l'examen des chiffres mentionnés par M.[J] sur la part respective des produits (la société UFIFRANCE PATRIMOINE , qui se contente de renvoyer la Cour à d'autres décisions judiciaires, n'en produisant aucun) démontre que, même si les commissions relatives aux contrats d'assurance demeuraient supérieures (66.307 Keuro en 2010) à celles des produits immobiliers (57.236 Keuro pour la même année), ces derniers avaient augmenté significativement (40 050 K euro en 2009) et que, de manière générale, les autres produits de placement représentaient une part supérieure à celle de l'assurance.

En outre, si les conseillers en gestion de patrimoine sont habilités au nom de leur employeur à proposer à la clientèle des contrats d'assurance, il ne s'agit pas d'assurances de biens ou de personnes (tels qu'assurances sur la vie, incendie, accidents et risques divers) mais uniquement de produits de placement (assurance-vie) constituant des modalités, parmi d'autres, de gestion du patrimoine.

De même apparaît-il que, dans le domaine de l'assurance, l'activité de la société UFIFRANCE PATRIMOINE est réduite aux seuls placements financiers et n'est pas celle exercée habituellement par un courtier d'assurances, qui consiste essentiellement à conseiller les assurés qu'il assiste pour l'exécution des contrats et le règlement des sinistres.

Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient M.[J] , il en résulte que l'activité principale de la société UFIFRANCE PATRIMOINE est le conseil en investissements et la commercialisation de divers produits notamment financiers (Fonds commun de placement, Assurance, Immobilier), dont le courtage d'assurances n'est qu'un des aspects-certes conséquent- activité ne relevant pas de la convention collective des sociétés de courtage d'assurance.

M.[J] sera donc débouté de toutes ses demandes découlant de l'application de la convention collective du courtage d'assurance, la décision de premiers juges étant infirmée sur ce point.

Sur la demande de remboursement de ses frais professionnels

Sur la prescription

L'article L3245 - 1 du code du travail, dispose que l'action en paiement ou en répétition du salaire, se prescrit par cinq ans, conformément à l' article 2224 du Code civil .

L'article 2224 du code civil, précise que le point de départ de la prescription quinquennale, est le jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Or, la prise en charge de ses frais professionnels par les traitements et commissions que M.[J] percevait, comme le prévoyait avant mars 2003 la clause arguée d' illicite de son contrat de travail, était une donnée connue du salarié depuis le début de la relation contractuelle, qui aurait pu lui permettre de demander la nullité de cette clause et des rappels de salaire, comme l'avaient fait d'autres salariés.

Cette connaissance de ses droits est d'autant plus avérée dans le cas présent, s'agissant d'un salarié qui exerçait auparavant la profession de notaire, dont il est rappelé qu'elle se prévaut de prodiguer, et prodigue effectivement des conseils juridiques aux particuliers ;

M.[J] ne saurait en conséquence sérieusement soutenir qu'il était ignorant de ses droits, ni que ceux-ci auraient pu lui être celés par son employeur, et, notamment s'agissant de l'arrêt du 24 octobre 2001, et plus encore de celui du 25 février 1998 : il n'existe en vérité aucun procédé permettant la dissimulation d'une jurisprudence de la Cour de Cassation, et spécifiquement envers un juriste professionnel;

Ainsi, la prescription a commencé à courir depuis le début de la relation contractuelle.

La prescription ne peut être interrompue que, d'une part, par une citation en justice, un commandement ou une saisie, signifiés par celui qui veut empêcher de prescrire et, d'autre part, par la reconnaissance que le débiteur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait .

En conséquence, en l'absence de disposition particulière, la signature de l'accord d'entreprise du 28 février 2003, qui ne traite pas spécifiquement de la question du remboursement des frais professionnels mais globalement des relations de travail au sein de l'entreprise, n'opère aucun constat d'un caractère irrégulier des clauses contractuelles antérieures en la matière et n'a pas pour objet de régler sur ce point un litige entre les parties, ne vaut pas reconnaissance par l'employeur des droits individuels allégués par le salarié pour la période antérieure à ces signature et n'a pu de ce fait interrompre la prescription.

Il en est de même, pour les mêmes raisons, de la signature du contrat de travail en mars 2003, qui ne vaut prise en compte du droit du salarié au remboursement des frais professionnels que pour l'avenir mais non reconnaissance de droits pour la période antérieure.

Ainsi, en raison de la prescription quinquennale, M.[J] ne peut revendiquer que les sommes qui lui seraient dues entre le 4 novembre 2004 et le 5 novembre 2009, date de sa prise d'acte.

Pour la même raison il n'est pas justifié à réclamer rétroactivement l'annulation de la clause intégrant les frais dans les commissions antérieurement au 4 novembre 2004 ;

Sur les frais professionnels

Les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur, doivent être remboursés sans qu'il ne puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et à la condition que la rémunération proprement dite du travail reste au moins égale au SMIC.

En l'espèce le contrat de travail du 3 mars 2003 stipulait que la partie fixe était constituée d'un salaire égal au SMIC majorée de la somme brute de 230 euros correspondant au remboursement forfaitaire des frais professionnels ( article 2.2) et d'une partie variable (commissions) incluant une indemnité de 10% correspondant à un complément de remboursement forfaitaire des frais professionnels ( article 2.3).

Ces deux clauses qui forment un tout et qui relèvent de la liberté contractuelle, étant licites et donc opposables au salarié, celui ci ne peut prétendre à un rappel de salaire, que pour autant qu'il établisse qu'il a perçu, après imputation des frais réellement exposés , une rémunération inférieure au smic.

Il en découle que M.[J] n'est pas justifié à demander que la clause 2.2 du contrat de travail du 3 mars 2003, lui est d'emblée inopposable ;

Il résulte des bulletins de paie produits aux débats, qu'après déduction des forfaits frais professionnels, le salarié a perçu :

en 2005 : 46 280, 45 € soit une moyenne mensuelle de 3865, 71€ ( smic : 1.217, 88 Euros)
en 2006 : 66 078, 51 € soit soit une moyenne mensuelle de 5506,54€ ( smic 1254, 28 Euros)
en 2007 : 92 777, 24 € soit une moyenne mensuelle de 7731,43€ ( smic : 1.280, 07 Euros )
en 2008 : 70295, 80 € soit une moyenne mensuelle de 5857,99€ ( smic :1307, 38 Euros)

en 2009 : 38 846, 40 sur dix mois soit une moyenne mensuelle de 3884, 64€ ( smic :1321, 02 Euros puis 1337, 70 Euros )

Dès lors, même en imputant l'intégralité des frais professionnels que le salarié revendique, sa rémunération est restée supérieure au smic ;

Il s'ensuit, que M.[J] ne peut qu'être débouté de sa demande de paiement de rappels de salaires et des congés payés afférents, sans qu'il y ait lieu d'ordonner la réouverture des débats.

Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail

M.[J] soutient que depuis 1998 jusque mars 2003, la société UFIFRANCE a inséré dans les contrats de travail du salarié une clause stipulant que les traitements fixes et commissions versés couvraient tous les frais qu'il pourrait être amené à exposer, dont elle ne pouvait ignorer le caractère illicite, puisque de telles clauses ont déjà été sanctionnées dans le passé, notamment par la cour de cassation dans un arrêt du 24 octobre 2001, dans la cause duquel l'intimée était partie ;que, jusque mars 2003, le salarié n'a pas été rempli de ses droits au titre de ses frais professionnels, ce qui caractérise le préjudice par lui subi; et que, passé cette date, l'employeur a persisté, avec une déloyauté contractuelle totale à contraindre les salariés, à signer un nouveau contrat qui ne procédait d'aucune obligation d'information et cachait en revanche le droit du salarié d'être remboursé de ses frais, lesquels se montaient en l'espèce à plus de 35000 euros ;

Cependant il a été relevé plus haut que M.[J] était défaillant sur de tels moyens reposant sur une volonté de tromperie de l'employeur alliée à sa prétendue incapacité de sa part à connaître et chiffrer ses droits : il est rappelé que sa formation juridique particulièrement pointue, se cumulant avec sa nécessaire qualification en matière financière, ne permet pas de dire que M.[J] ait été victime de manquements qu'il n'aurait pas pu relever, et, partant, dont il n'aurait jamais pu demander réparation, et qu'ainsi la répétition de ce système qui aurait généré de telles pertes à son détriment n'aurait pas été cautionnée par lui ;

Les demandes antérieures au 4 novembre 2004 sont prescrites ; cette prescription ne saurait être contournée par d'autres voies, lesquelles reposent en réalité sur les mêmes moyens : ne peut ainsi être argué de ce que, jusque mars 2003, M.[J] n'a pas été rempli de ses droits au titre de ses frais professionnels, et que l'employeur ne pouvait de bonne foi l'ignorer, ce qui caractériserait le préjudice subi par le salarié.

La demande de dommages et intérêts est rejetée et le jugement est également infirmé en ce qu'il a alloué la somme de 5000 € au motif d'une clause contractuelle prétendument ambigue, issue d'une pratique persistante bien que condamnée, et source de difficulté pour le salarié à vérifier ses droits : les calculs présentés par M.[J] attestent de ce que, pour les époques concernées, il était à même d'y procéder, et, en outre avec plus d'éléments, lors que, selon ses dires, il était victime d'une pratique désastreuse ;

Sur les rappels de salaires postérieurs au 4 novembre 2004

M.[J] soutient que ses bulletins de salaire démontrent que le montant de ses frais professionnels n'a pas été pris en compte, en l'absence d'une somme s'ajoutant, à ce titre, aux commissions et du versement forfaitaire du par l'employeur indépendamment de ces mêmes commissions ; que le forfait de 230€ ne lui a pas été versé, mais a été imputé sur le montant des commissions ; qu'ainsi le salaire brut perçu devient égal au montant de ces dernières ;

Cependant 'l'erreur' de la société UFIFRANCE PATRIMOINE sur ce point n'en est pas une dès lors qu'elle est admise par l'intimée comme procédant des clauses mêmes du contrat : les termes de ce contrat, rappelés plus haut, ont été jugés valables et en conséquence ce calcul ne peut être mis en cause que s'il conduit, selon la jurisprudence rappelée par M.[J], à établir que la rémunération proprement dite du travail ne reste pas au moins égale au SMIC , rappel fait que les clauses liant les parties n'impliquaient pas que le salarié perçoive la totalité des commissions ;

Or, il a été dit qu'il résulte des bulletins de paie produits aux débats et des éléments de calcul présentés par la société UFIFRANCE PATRIMOINE, qu'après déduction des forfaits frais professionnels, le salarié a perçu pour les années en cause une rémunération moyenne mensuelle supérieure au smic ;

M.[J] conteste ces données en ce qu'elles font abstraction de ses frais réellement exposés en raison de l'étendue de sa clientèle, de son suivi, partant du nombre considérable de visites à effectuer-440 à 550 déplacements annuels, soit a minima 2000 kms mensuels-outre les frais de téléphone, de restauration, d'achat de matériel de bureau et d'une pièce privative à cet effet- tous éléments connus de la société UFIFRANCE PATRIMOINE, laquelle l'a à dessein dispensé d'en justifier et de garder ainsi les éléments de preuve correspondants ;

M.[J] chiffre en conséquence la moyenne mensuelle des frais restés à sa charge à une somme dépassant 11000 € ;

Toutefois, c'est par des motifs pertinents que la Cour adopte expressément sans les paraphraser inutilement que le premier juge a analysé et répondu à ces moyens sur lesquels M.[J] n'apporte pas en cause d'appel d'éléments nouveaux de nature à remettre en cause la décision querellée ; force est en effet de constater que les demandes de ce dernier, émanant qui plus est d'un professionnel des opérations financières, ne reposent que sur des évaluations et des éléments de base (nécessité de disposer d'un véhicule, d'un téléphone..)qui ne peuvent fonder ses revendications, dont, ainsi que le relève la société UFIFRANCE PATRIMOINE, le montant excède parfois celui des sommes déclarées à l'administration fiscale ; vainement est-il, de nouveau, imputé à la société UFIFRANCE PATRIMOINE d'avoir abusé de la prétendue et improbable loyauté de son salarié, lequel était en outre parfaitement à même, lors de la signature de son second contrat, de faire le point des prétendues pertes de salaire qu'il invoque, sans en avoir six ans durant recueilli les éléments de preuve ;

Le jugement entrepris est en conséquence confirmé sur ce point ;

Sur les autres manquements de la société UFIFRANCE PATRIMOINE

M.[J] soutient que, antérieurement à l'année 2003, et postérieurement à cette date, en violation de ses obligations légales, la société UFIFRANCE a inséré dans les contrats de travail du salarié, une clause stipulant que les traitements fixes et commissions versés couvraient tous les frais qu'il pourrait être amené à exposer, dont elle ne pouvait ignorer le caractère illicite, puisqu'elles ont déjà été sanctionnées dans le passé, notamment par la cour de cassation dans un arrêt du 24 octobre 2001, dans la cause duquel l'appelante était partie.

Qu'il s'en déduit que la mauvaise foi de la société UFIFRANCE est établie.

Cependant les faits antérieurs au 4 novembre 2004 sont prescrits ;

Ensuite, la circonstance que les bases des rapports contractuels liant une entreprise à ses salariés soient sanctionnées en justice-ce que l'employeur ait libre d'intégrer ou de persister dans sa conception des règles applicables, ne vaut pas violation de la loi stricto sensu et laisse la porte ouverte à des changements de jurisprudence ou des analyses divergentes ; partant, le salarié, et s'agissant de M.[J] , d'une personne au fait de ses droits, ne pouvait ignorer la problématique de cette clause et la faculté de saisir la justice s'il estimait préjudiciable à ses intérêts qu'elle fût maintenue par l'employeur ;

En conséquence la demande est rejetée ;

M.[J] soutient également que, pour cette même période, il était soumis à un horaire de travail non collectif mais individuel et ce sans qu'aucun accord d'entreprise ait prévu un quelconque dispositif de contrôle, la société UFIFRANCE PATRIMOINE n'ayant elle même pas décompté son temps de travail ; qu'il en a été du reste de même pour l'application du contrat de 2003 ;

Cependant la première de ces deux périodes est prescrite ;

S'agissant de la seconde est opposé par la société UFIFRANCE PATRIMOINE qu'étaient applicables à M.[J] les accords d'entreprise conclus avec les partenaires sociaux sur un forfait horaire annuel de 1607 heures : ces dispositions figurent en effet dans le contrat entrant en vigueur le 14 mars 2003 ;

En conséquence le moyen n'est pas fondé ;

Sur la clause de non-concurrence

Il a été inséré dans le contrat de travail la clause suivante :

4.4 Après son départ de la Société, le Signataire s'interdit d'entrer en relation, directement ou indirectement, et selon quelque procédé que ce soit, avec les clients de la Société dont il a eu la charge, et pour lesquels il aura perçu une commission de production directe et des gratifications durant les douze mois précédant son départ en vue de leur proposer une formule de placement, pendant une durée de vingt quatre mois, à compter de sa date de sortie des effectifs.

Il est expressément convenu que dans l'hypothèse où le Signataire contreviendrait aux dispositions de la présente clause, il devrait verser à la Société des dommages et intérêts qui seraient, au choix de cette dernière et par infraction constatée, soit fonction des dommages qui auraient été occasionnés de ce fait, soit forfaitairement fixés au montant de la rémunération acquise par lui au titre de ses douze derniers mois de travail effectif au sein de la Société, sans pouvoir être inférieurs à 12 fois le montant de sa dernière rémunération mensuelle brute, tous éléments de rémunération et indemnités inclus, et ce, indépendamment, du droit pour la Société de faire cesser cette contravention par toutes les voies de droit et, en particulier au moyen d'une astreinte égale à l/10eme de sa dernière rémunération brute, tous éléments de rémunération et indemnités inclus, par jour de retard à cesser l'infraction.

Vainement est il allégué par l'intimée d'une clause de 'protection de la clientèle ' ;

La stipulation dans le contrat de travail d'une telle clause, qui s'analyse en une clause de non-concurrence, aucune disposition ne la limitant dans l'espace, et nulle puisque ne comportant aucune contrepartie financière, ne cause pas nécessairement un préjudice au salarié, dès lors l'employeur l'a délié de cette clause lors de la rupture du contrat, en l'espèce le 16 décembre 2009.

La demande de dommages intérêts est rejetée .

Sur l'absence de visite médicale

Il n'est justifié d'aucune visite d'embauche et de visite périodique auprès de la médecine du travail;

Pour autant il n'est pas réclamé d' indemnisation spécifique de ce chef ;

Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l'article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral et pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

L'article L.1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, M.[J] invoque les faits suivants : l'attitude critique, injurieuse et grossière de son supérieur hiérarchique, M.[X], lequel le remettait en cause en permanence, interférait dans la gestion de sa clientèle, l'a accusé sans fondement de faux rendez vous et a contrôlé inopinément, le 8 juillet 2008, quarante dossiers, traitement exceptionnel et injustifié ;

M.[J] soutient également que M.[X] lui a délivré, le 7 octobre 2008, un avertissement injustifié et qu'il a contesté, et que in fine, cette dégradation des conditions de travail a entraîné une baisse de ses résultats, sans que pour autant le changement de groupe promis soit effectué, l'employeur entérinant même le bruit lancé par M.[X], d'un prétendu départ à la concurrence ;

Pour étayer ses affirmations, produit notamment des attestations ;

Il établit ainsi l'existence matérielle de faits précis et concordants, qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre.

L'employeur fait valoir le peu de portée de ces attestations, la dénaturation des faits allégués, qui ne procèdent que de son pouvoir de direction, la plainte d'une cliente, Mme [I] ayant conduit à une enquête interne et à la délivrance d'un avertissement, M.[J] ayant reconnu les faits ;

Les attestations produites par M.[J] sont effectivement d'odre général ( 'M.[X] s'emportait contre les collaborateurs et tenait parfois des propos injurieux et grossiers' ) ; le contrôle des dossiers de M.[J] relève du pouvoir de l'employeur, lequel justifie également d'une plainte de Mme [I], et partant de la procédure disciplinaire engagée ; il n'est pas plus justifié de procédés déloyaux (propagation de faux bruits) de la part de M.[X] ;

L'employeur démontre ainsi que les faits allégués par M.[J] sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Les demandes relatives au harcèlement doivent par conséquent être rejetées.

Sur la discrimination

Aux termes de l'article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loi n° 2008- 496 du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L.3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

Selon l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses mesures d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations :

- constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race, sa religion, ses convictions, son âge, son handicap, son orientation sexuelle ou de son sexe, une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable,

- constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d'entraîner, pour l'un des motifs précités, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d'autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés,

- la discrimination inclut tout agissement lié à l'un des motifs précités et tout agissement à connotation sexuelle, subis par une personne et ayant pour objet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement hostile, dégradant, humiliant ou offensant.

L'article L.1134-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En l'espèce, M.[J] invoque les faits suivants :

-absence d'encadrement du superviseur, lequel ne l'accompagnait pas sur le terrain, évinçant ainsi un salarié qu'il n'estimait pas.

-affectation des dossiers, attribués de manière discrétionnaire, mais, s'agissant de M.[J] , de sorte que les capitaux qui lui étaient affectés représentaient en 2006 19, 30 % de son portefeuille, au regard de chiffres allant de 47% à 60 % pour d'autres salariés.

Pour étayer ses affirmations, M.[J] produit notamment, des attestations de clients sur le premier point, et un tableau sur le second.

M.[J] établit ainsi l'existence matérielle de faits pouvant laisser présumer l'existence d'une discrimination à son encontre.

L'employeur n'invoque aucun moyen ni aucune explication à l'encontre de cette accusation, qui était pourtant mentionnée dans la lettre de prise d'acte.

L'employeur échoue ainsi à démontrer que les faits matériellement établis par M.[J] sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

La discrimination est établie.

Ce manquement justifie à lui seul de la prise d'acte emportant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

S'y ajoute l'absence de visites médicales ;

Sur les dommages intérêts pour préjudice moral et pour exécution déloyale du contrat de travail

En réparation du préjudice nécessairement subi du fait de ces fautes sera allouée à M.[J] la somme de 2000 € à titre de dommages et intérêts ;

Sur les incidences financières du licenciement

- indemnité légale de licenciement

La somme de 7367 euros n'est pas discutée

- indemnité de préavis

Au visa des articles L 122-6 devenu L 1234-1 et L 122-8 devenu L 1234-5 du code du travail, et tenant compte de l'ancienneté dans l'entreprise et du salaire brut perçu à la date du licenciement, M.[J] est en droit de prétendre à la somme de 5214, 68 euros outre l'incidence congés payés d'un dixième soit 521, 46 euros

- indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse

Compte tenu de l'ancienneté du salarié, celui ci peut prétendre, par application de l'article L 1235-3 du code du travail, à des dommages intérêts ne pouvant être inférieurs à 6 mois de salaire.

Tenant l'ancienneté de 12 ans du salarié, son âge, le salaire de référence non contesté perçu au cours des trois derniers mois, soit 2607, 34 €, et au regard de sa situation actuelle- M.[J] ayant retrouvé un emploi par le biais de la création d'une société concurrente de conseil concurrente MS CONSEIL & INVEST créée par lui le 12 mars 2010, - il lui sera alloué la sommes de 16 500€ à titre de dommages intérêts.

Sur la demande reconventionnelle

La société UFIFRANCE PATRIMOINE n'est évidemment plus fondée à réclamer paiement du préavis ;

Les sommes allouées en exécution du contrat de travail (préavis, congés payés sur préavis, indemnité de licenciement,) porteront intérêts au taux légal à compter de la demande initiale.

En revanche les créances indemnitaires ne produisent intérêts moratoires que du jour de leur fixation judiciaire.

Il sera fait application des règles en matière de capitalisation des intérêts pour ceux dus sur une année entière ;

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Aucune considération tirée de l'équité ne conduit à condamner l'une ou l'autre des parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Succombant chacun pour partie, la SAS UFIFRANCE et M.[J] partagerons les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par décision prononcée par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale

Infirme partiellement le jugement entrepris;

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant

Dit que la prescription quinquennale rend irrecevables toute demande de sommes concernant les salaires et assimilés et toute demande afférente à un manquement de l'employeur avant le 2 novembre 2004;

Dit que la convention collective du courtage d'assurance n'est pas applicable,

Déboute M.[J] de ses demandes de rappels de salaire et de remboursement de frais professionnels;

Dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par M.[J] a produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à dater du 5 novembre 2009

Condamne la SAS UFIFRANCE à verser à M.[J] les sommes suivantes:

- indemnité légale de licenciement : 7367 euros,

- indemnité légale de préavis :5214, 68 euros outre l'incidence congés payés de 521, 46 euros

- dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :16 500€

- dommages et intérêts pour préjudice moral et exécution déloyale du contrat de travail : 2.000 €,

Dit que les sommes allouées en exécution du contrat de travail (préavis, congés payés sur préavis, indemnité de licenciement, rappel de salaires) porteront intérêts au taux légal à compter de la demande initiale

Dit que les créances indemnitaires ne produisent intérêts moratoires que du jour de leur fixation judiciaire.

Ordonne la capitalisation des intérêts pour ceux dus sur une année dans les conditions de l'article 1154 du code civil

Confirme le jugement pour le surplus

Dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile

Rejette les demandes plus amples ou contraires;

Partage les dépens de l'instance par moitié entre les parties.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre c
Numéro d'arrêt : 12/04591
Date de la décision : 15/11/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9C, arrêt n°12/04591 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-11-15;12.04591 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award