COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
8e Chambre C
ARRÊT AU FOND
DU 20 FEVRIER 2014
N° 2014/ 110
Rôle N° 11/12747
[Y] [U] [B]
C/
Société HOIST KREDIT AB
Grosse délivrée
le :
à :ERMENEUX
DESOMBRE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de DRAGUIGNAN en date du 28 Juin 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 2011/856.
APPELANT
Monsieur [Y] [U] [B], demeurant [Adresse 1]
représenté par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMEE
Société HOIST KREDIT AB venant aux droits de la société DAIMLER CHRYSLER devenue MERCEDES BENZ FINANCIAL SERVICES FRANCE SA, prise en la personne de son représentant légal en exercice en dont le siège est sis [Adresse 2]) et encore en ses Bureaux en France, [Adresse 3]
représentée par la SCP DESOMBRE M & J, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 21 Janvier 2014 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur Yves ROUSSEL, Président
Monsieur Vincent PELLEFIGUES, Conseiller
Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Février 2014
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Février 2014,
Rédigé par Monsieur Vincent PELLEFIGUES, Conseiller,
Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Par acte du 30 mai 2007, la société DAIMLER CHRYSLER devenue MERCEDES BENZ FINANCIAL SERVICES a consenti un contrat de location longue durée avec option d'achat à la société FINANCIÈRE [B] pour une durée de 60 mois portant sur un véhicule Mercedes d'une valeur de 85 999 € moyennant le versement de mensualités de 1711,69 € , assurance et prestations comprises , la valeur de rachat s'établissant à 12 900 €.
Par acte du même jour M. [B] , gérant de la société FINANCIÈRE [B], s'est engagé en qualité de colocataire solidaire ou de caution , cette qualité faisant discussion entre les parties, à hauteur de la somme de 115 601,40 € en principal, intérêts et pénalités.
Après plusieurs impayés, le contrat a été résilié par LRAR du 17 janvier 2010 et le véhicule a été restitué puis vendu
La société FINANCIÈRE [B] a été placée en liquidation judiciaire et la société MERCEDES BENZ FINANCIAL SERVICES a déclaré sa créance au passif de la procédure collective le 26 avril 2010 .
Après mise en demeure infructueuse du 10 mars 2010, la société HOIST KREDIT AB , venant aux droits de la société MERCEDES BENZ FINANCIAL SERVICES en vertu d'un contrat de cession de portefeuilles de créances du 23 juin 2010 , a fait assigner M. [B] pour règlement de la somme de 32 865,01 € , ce dernier opposant divers moyens à l'action notamment la nullité de son engagement de caution, le non-respect du délai de réflexion, l'inopposabilité de l'acte de cession de créances et l'incompétence du tribunal de commerce.
Par jugement assorti de l'exécution provisoire du 28 juin 2011, le tribunal de commerce de Draguignan a :
' débouté M.[B] de son exception d'incompétence
' condamné M.[B] à payer à la société HOIST KREDIT AB la somme de 32 891,30 € avec intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2010
-- condamné M.[B] à payer à la société HOIST KREDIT AB la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
-- condamné M.[B] aux dépens.
Le 18 juillet 2011, M. [B] a interjeté appel de cette décision .
***
Vu les conclusions déposées et signifiées le 29 mars 2012 par M.[B] qui soutient l'infirmation du jugement et sollicite :
' le débouté de l'ensemble des demandes formées par la société HOIST KREDIT AB
' la condamnation de la société HOIST KREDIT AB à lui payer la somme de 3000 € à titre de dommages-intérêts au titre de son préjudice moral et financier
' la condamnation de la société HOIST KREDIT AB en paiement de la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
' la condamnation de la société HOIST KREDIT AB aux entiers dépens .
À l'appui de ses prétentions, M. [B] fait valoir :
' s'être engagé en qualité de caution comme gérant de société et non à titre personnel
' ne pas avoir reçu signification du transport de créance qui lui est ainsi inopposable au visa de l'article 1690 du Code civil
' que la créance dont se prévaut la société HOIST KREDIT AB à son encontre ne fait pas partie des créances qui lui ont été cédées
'que la société débitrice FINANCIÈRE [B] n'a pas été mise en situation de pouvoir exercer sa faculté de retrait , telle que prévue à l'article 1699 du Code civil , la créance litigieuse ne lui ayant pas été dénoncée , préalable nécessaire à lui permettre de racheter les droits cédés directement auprès du cessionnaire HOIST KREDIT AB
' que la cession de créance n'a pas été déclarée au représentant des créanciers de la procédure collective de la société FINANCIÈRE [B]
' que par ordonnance définitive du 11 juillet 2011, le juge commissaire a rejeté la créance de la MERCEDES BENZ FINANCIAL SERVICES .
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Vu les conclusions déposées et signifiées le 22 avril 2012 par la société HOIST KREDIT AB qui soutient la confirmation du jugement critiqué en toutes ses dispositions , le débouté des demandes de M.[B] et sa condamnation aux dépens et en paiement de la somme de 1200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, la société HOIST KREDIT AB fait valoir :
' que l'engagement de M. [B] est un engagement de colocataire solidaire et non de caution
' que la cession de créances s'applique à tous les accessoires dont font partie les actions qui y sont attachées, notamment celles contre tous les co obligés (article 1692 du Code civil )
'que la déclaration de créance a été faite valablement par la société MERCEDES BENZ FINANCIAL SERVICES, la signification de son transport entre les mains de la société HOIST KREDIT AB ayant été valablement effectuée par les conclusions déposées dans le cadre de l'instance
' que l'exercice du retrait litigieux ne peut s'opérer que dans la mesure où le débiteur cédé justifie avoir contesté en justice la créance avant qu'elle ne soit cédée (article 1700 du Code civil)
' que l'ordonnance du juge commissaire du 6 juillet 2011 n'a pas l'autorité de la chose jugée puisque postérieure au jugement du tribunal de grande instance de Draguignan querellé en date du 28 juin 2011, l'irrécouvrabilité de la créance dans le cadre de la liquidation judiciaire justifiant qu'il n'en ait pas été fait appel .
Sur quoi
1° sur la nature de l'engagement souscrit par M. [B] :
Il s'évince de l'examen du contrat de location avec option d'achat litigieux que celui-ci a été souscrit par la société FINANCIÈRE [B] FET sous la signature de son représentant légal ,M. [B] , ainsi que par M. [B] en qualité de colocataire personne physique, cette mention s'inscrivant dans le cartouche prévu à cet effet .
En outre , la double signature de M.[B] a été apposée au bas de ce document sous la mention ' locataire ' pour le compte de la société FINANCIÈRE [B] et sous celle de ' colocataire ' . Il n'est ainsi pas douteux que M. [B] se soit engagé comme codébiteur, cet état de choses étant encore corroboré par le fait que cette double obligation a été cautionnée la société CAP MOBILIER dont le représentant légal n'est autre que le même M [B].
Le moyen selon lequel ce dernier ne se serait engagé qu'à titre de caution pour le compte de sa société , ce qui amènerait non sans quelque étrangeté à considérer que celle-ci se cautionne elle-même, n'est ainsi pas fondé outre qu'il manque de sérieux .
2° sur l' opposabilité à M.[B] de la cession de créances :
Aux termes de l'article 1689 du Code civil :
Dans le transport d'une créance, d'un droit ou d'une action sur un tiers, la délivrance s'opère entre le cédant et le cessionnaire par la remise du titre .
L'article 1690 du Code civil ajoute :
Le cessionnaire n'est saisi à l'égard des tiers que par la signification du transport faite au débiteur.
Néanmoins, le cessionnaire peut être également saisi par l'acceptation du transport faite par le débiteur dans un acte authentique.
M. [B] se prévaut de l'inopposabilité du transport d e la créance qui ne lui a pas été régulièrement signifié dans les termes de l'article 1690 du Code civil.
Cependant, la signification de ce transport peut résulter d'une assignation ou de conclusions en justice dès lors qu'elles s'accompagnent des pièces nécessaires rendant certain ce transport tel que l'annexe du contrat de cession que M [B], colocataire solidaire, ne conteste pas avoir reçu et où figure la créance litigieuse .
Le moyen tiré de l'inopposabilité de cette créance sera ainsi rejeté
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Aux termes de l'article 1699 du Code civil
Celui contre lequel on a cédé un droit litigieux peut s'en faire tenir quitte par le cessionnaire, en lui remboursant le prix réel de la cession avec les frais et loyaux coûts, et avec les intérêts à compter du jour où le cessionnaire a payé le prix de la cession à lui faite .
L'article 1700 du Code civil ajoute :
La chose est censée litigieuse dès qu'il y a procès et contestation sur le fond du droit
M. [B] se prévaut encore de l'inopposabilité de la cession de créance e n ce que le débiteur n'aurait pas été placé en mesure d'exercer son droit de retrait lui permettant de rembourser au cessionnaire le prix auquel il l'avait acquise .
Cette action n'appartient cependant qu'à celui qui conteste un droit litigieux prêtant à discussion . Or M. [B] n'établit pas avoir engagé d'action quelconque pour contester la créance avant que celle-ci soit cédée. Dès lors, il n'est pas fondé à soutenir avoir été privé de sa faculté de retrait litigieux. Ce moyen sera rejeté.
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M. [B] est engagé personnellement en tant que colocataire solidaire et il est indifférent que l'ordonnance du juge commissaire rejetant la créance de la société FINANCIÈRE [B], débitrice principale, soit définitive alors que le seul effet du rejet de cette déclaration de créance est d'exclure celle-ci des répartitions intervenant dans le cadre de la procédure collective sans entraîner son extinction. Au demeurant, M. [B] est recherché en temps que codébiteur et cet argument ne peut prospérer.
Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu'il a prononcé la condamnation de M. [B] à payer la somme de 32 891,30 € avec intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2010 par ailleurs non contestée quant à son quantum.
3° sur les autres dispositions :
Le jugement ,confirmé au principal par substitution de motifs, sera également confirmé dans ses autres dispositions et, succombant, M. [B] sera débouté de ses demandes à titre de dommages-intérêts ainsi que sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, supportera les dépens d'appel et sera condamné à payer à la société HOIST KREDIT AB la somme de 1200 € pour l'avoir contrainte à exposer des frais irrépétibles qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge
PAR CES MOTIFS
La cour, publiquement et contradictoirement :
Confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions
Y ajoutant :
' déboute M. [B] de sa demande en dommages intérêts et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
--condamne M. [B] à payer à la société HOIST KREDIT AB la somme de 1200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
'condamne M. [B] aux dépens d'appel dont distraction au profit de SCP Desombre, avocat
Le GreffierLe Président