COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
2e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 27 FEVRIER 2014
N° 2014/ 100
Rôle N° 12/03122
SARL AGRI LOISIRS
C/
[Y] [H]
Grosse délivrée
le :
à :
Me LE LANDAIS
Me KUJUMGIAN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce d'AIX-EN-PROVENCE en date du 23 Janvier 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 2011007662.
APPELANTE
SARL AGRI LOISIRS,
demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Yannick LE LANDAIS, avocat plaidant, postulant au barreau de MARSEILLE
INTIME
Monsieur [Y] [H]
né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 1],
demeurant [Adresse 1]
comparant en personne,
représenté de Me Sophie KUJUMGIAN, avocat postulant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 16 Janvier 2014 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur FOHLEN, conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président
Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller
Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Viviane BALLESTER.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Février 2014
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Février 2014,
Signé par Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président et Madame Viviane BALLESTER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
F A I T S - P R O C E D U R E - D E M A N D E S :
Monsieur [Y] [H], exerçant sous l'enseigne une activité d'installateur d'équipements sportifs et de loisirs, a commandé de novembre 2009 à avril 2010 des rouleaux de gazon synthétique à la S.A.R.L. AGRI LOISIRS ayant pour enseigne .
Le 20 juin 2011 la société AGRI LOISIRS a assigné en paiement de factures Monsieur [H] devant le Tribunal de Commerce d'AIX EN PROVENCE; un jugement du 23 janvier 2012 retenant que le destinataire des factures est GREEN GAZON 13, que le défendeur exerçait son activité en son nom personnel, qu'il n'a signé aucun bon de commande, et que 3 factures émises par Monsieur [H] contre ses clients ont été payées directement à la société AGRI LOISIRS afin d'apurer sa dette, a :
* débouté la société AGRI LOISIRS;
* constaté que Monsieur [H] démontre qu'il a réglé ses dettes envers celle-ci;
* condamné la société AGRI LOISIRS à verser à Monsieur [H] les sommes de :
- 2 000 € 00 à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive;
- 1 000 € 00 sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile;
* ordonné l'exécution provisoire.
La S.A.R.L. AGRI LOISIRS a régulièrement interjeté appel le 22-23 février 2012. Par conclusions du 28 mai 2013 elle soutient notamment que :
- elle a livré ses marchandises à Monsieur [H] qui les a reçues sans réserves; sa créance est de 31 590 € 51 T.T.C., réduite à 22 900 € 51 T.T.C. car certains clients de l'intéressé l'ont directement réglée;
- ses factures laissent apparaître en tant qu'auteur GREEN GAZON qui est mentionné sur son propre extrait K bis, et en tant que destinataire GREEN GAZON 13 qui est le nom commercial de Monsieur [H]; ce dernier a réglé sans difficultés une facture de 1 500 € 00 émise le 30 avril 2010 par GREEN GAZON;
- Monsieur [H] n'a jamais régularisé les chèques impayés pour un total de 13 044 € 82; celui de 3 584 € 01 correspond à la facture 485, et celui de 5 152 € 72 aux factures 447, 452 et 453; le même se constitue une preuve à lui-même en tenant pour payées des sommes qui correspondent à de simples devis;
- elle ne s'est fabriquée aucune preuve.
L'appelante demande à la Cour, vu les articles 289 I - 5 du Code Général des Impôts, et 1315 alinéa 2 du Code Civil, d'infirmer le jugement et de :
- dire et juger que Monsieur [H] ne rapporte pas la preuve de l'extinction de sa dette à son égard;
- condamner le même à lui verser les sommes de :
. 22 900 € 51 en principal, avec intérêts au taux légal à compter du 7 janvier 2011 date la mise en demeure qui lui a été adressée;
. 3 000 € 00 en remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire;
. 3 000 € 00 à titre de dommages et intérêts compte tenu de sa résistance abusive et sa mauvaise foi manifeste;
. 2 000 € 00 au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Par conclusions du 20 juillet 2012 Monsieur [Y] [H] répond notamment que :
- il conteste devoir encore des sommes à la société AGRI LOISIRS, sa dette ayant été totalement et incontestablement apurée;
- il avait été convenu qu'il réalise pour cette société des prestations facturées par son enseigne GREEN GAZON 13, et directement encaissées par la société AGRI LOISIRS à l'enseigne GREEN GAZON; du fait de ces encaissements réguliers, déduction faite du coût des fournitures assurées par cette société, la marge restante venait en déduction du montant des impayés de lui-même;
- les premières factures de la société AGRI LOISIRS, jointes à l'assignation, sont irrégulières : leur auteur est l'enseigne de celle-ci, et leur destinataire n'est aucunement mentionné; les factures produites en cours de procédure ne prouvent pas la créance de cette société; les chèques de lui-même qui ont été rejetés ont été remplacés par des virements; ceux de 3 584 € 01 et 5 152 € 72 ne correspondent à aucune facture;
- la procédure intentée par la société AGRI LOISIRS est abusive et déloyale, car elle s'est fabriquée des pièces à elle-même.
L'intimé demande à la Cour, vu les articles L. 441-3 et suivants, L. 238-3 et R. 123-237 du Code de Commerce, et 1382 du Code Civil, de :
- constater qu'il démontre qu'il a réglé les sommes qui étaient dues à la société AGRI LOISIRS;
- constater qu'aucune pièce produite par celle-ci ne prouve l'existence d'une créance actuelle dont elle serait titulaire à son égard;
- constater la mauvaise foi et la déloyauté de la société AGRI LOISIRS;
- confirmer le jugement;
- condamner la société AGRI LOISIRS à lui payer la somme de 5 000 € 00 sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 décembre 2013.
----------------------
M O T I F S D E L ' A R R E T :
L'extrait Kbis de la société AGRI LOISIRS précise qu'elle a 3 noms commerciaux ou enseignes dont le premier est GREEN GAZON. De son côté Monsieur [H] a comme adresse mail [Courriel 1], et dans sa facture émise le 12 juillet 2010 contre les époux [L] a mis comme en-tête . Par ailleurs la facture n° 000607 du 30 avril 2010 pour 1 500 € 00 a été émise par GREEN GAZON contre GREEN GAZON 13, et payée le 6 mai suivant par Monsieur [H]. Ce dernier et le nom commercial GREEN GAZON 13 ne font donc qu'une personne, contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal de Commerce, ce qui explique que GREEN GAZON ait édité des factures rectificatives en remplaçant logiquement le nom commercial du destinataire (GREEN GAZON 13) par son identité personnelle ([Y] [H]).
Une vente peut licitement être réalisée sans bons de commande préalable écrits et signés, et c'est donc à tort que le Tribunal de Commerce a retenu que Monsieur [H] n'est pas débiteur faute d'avoir signé aucun bon de commande.
Monsieur [H] a émis à l'ordre de la société AGRI LOISIRS trois chèques bancaires qui n' ont pas été payés faute de provision :
- le 5 mars 2010 pour 5 152 € 72 correspondant aux factures n° 447, n° 452 et n° 453,
- le 12 mars 2010 pour 4 308 € 09 correspondant aux factures n° 465 et n° 470,
- le 20 mars 2010 pour 3 584 € 01 correspondant à la facture n° 485. Mais Monsieur [H] ne justifie nullement avoir remplacé ces chèques impayés par des virements. Ces chèques concernent une partie des factures litigieuses, dont la réalité et le non-paiement sont ainsi démontrées.
La société AGRI LOISIRS a logiquement déduit de sa créance contre Monsieur [H] les sommes réglées directement à elle par les clients de celui-ci, d'où un solde de 22 900 € 51 T.T.C. comme réclamé.
C'est en conséquence à juste titre que la société AGRI LOISIRS a interjeté appel du jugement, qui sera infirmé en totalité.
Cette infirmation rend automatiquement infondée la somme de 3 000 € 00 réglée par la société AGRI LOISIRS en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement, et cette somme doit automatiquement être restituée par Monsieur [H] sans qu'il soit besoin pour la Cour de prononcer une condamnation de ce dernier.
Si la résistance de Monsieur [H] était injustifiée, son caractère abusif et de mauvaise foi n'est pas démontré, non plus que le préjudice spécifique qu'en aurait subi la société AGRI LOISIRS; par suite la Cour déboutera cette dernière de sa demande de dommages et intérêts.
Enfin ni l'équité, ni la situation économique de Monsieur [H], ne permettent de rejeter la demande faite par son adversaire au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
---------------------
D E C I S I O N
La Cour, statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire.
Infirme en totalité le jugement du 23 janvier 2012.
Condamne Monsieur [Y] [H] à payer à la S.A.R.L. AGRI LOISIRS :
* la somme principale de 22 900 € 51 T.T.C., avec intérêts au taux légal à compter du 7 janvier 2011;
* une indemnité de 2 000 € 00 au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Rejette toutes autres demandes.
Condamne Monsieur [Y] [H] aux entiers dépens, avec application de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
Le GREFFIER. Le PRÉSIDENT.