COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
18e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 27 MARS 2014
N°2014/149
Rôle N° 12/10269
[O] [G]
C/
EURL VAR VIDANGE
Grosse délivrée le :
à :
- Monsieur [O] [G]
- Me Claudine MERLET, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Copie pour information délivrée le :
à :
- M. [S] [M] (Délégué syndical ouvrier)
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DRAGUIGNAN - section Commerce - en date du 03 Mai 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 10/168.
APPELANT
Monsieur [O] [G], demeurant [Adresse 1]
comparant en personne, assisté de M. Michel DEBUCQUOY (Délégué syndical ouvrier)
INTIMEE
EURL VAR VIDANGE, prise en la personne de son représentant légal en exercice, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Claudine MERLET, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 06 Mars 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Gisèle BAETSLE, Président, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Gisèle BAETSLE, Président
Madame Fabienne ADAM, Conseiller
Monsieur Jean-Bruno MASSARD, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Julia DELABORDE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Mars 2014
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Mars 2014
Signé par Madame Gisèle BAETSLE, Président et Mme Julia DELABORDE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES
M. [G] a régulièrement fait appel d'un jugement rendu le 03/05/2012 par le Conseil de Prud'hommes de Draguignan qui, à la suite de la rupture de ses relations contractuelles avec l'EURL VAR VIDANGE, a dit que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et a condamné l'EURL VAR VIDANGE à lui payer :
- 14 488 € au titre des heures supplémentaires
- 3 687,60 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis
- 368,76 € au titre des congés payés sur préavis
- 1.567,23 € au titre de l'indemnité de licenciement
- 6.637,68 € d' indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile a ordonné la remise de l'attestation Pôle Emploi et celle du certificat de travail sous astreinte
et l'a débouté de ses autres demandes.
Reprenant oralement leurs conclusions auxquelles il convient de se référer pour l'exposé de leurs moyens, M. [G] sollicite la réformation de la décision entreprise et réclame :
-1 398 € de rappel salaire en arrêt de travail plus congés payés
-16 802 € de rappel salaire contractuel ·
-14 488 € d'heures supplémentaires à 125 %
-13 074 € Travail dissimulé
-5 165 € d'indemnité compensatrice de préavis,
-1 995 € d'indemnité de licenciement
- 24 926 € Dommages intérêts pour rupture abusive,
- 800 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
L'EURL VAR VIDANGE demande à la cour de :
A titre liminaire :
- déclarer irrecevable [O] [G] dans sa demande de voir payer 1099 heures supplémentaires au titre des travaux d'entreprise générale du bâtiment qu'il déclare avoir réalisés dans les biens immobiliers des époux [X] qu'il qualifie sous la dénomination 'cabanon des Vaussières'.
A titre principal :
-débouter purement et simplement [O] [G] de son appel partiel tel que visé dans son courrier au greffe du 7 Juin 2012 en l'absence de la production de moyens d'appel et de pièces, comme de ses réclamations nouvelles visées dans le document manuscrit de son conseil du 8 Octobre 2013,
-En conséquence, de réformer partiellement le jugement rendu par le Conseil des Prud'hommes de DRAGUIGNAN le 3 Mai 2012 pour tous les chefs de condamnation contre la société VAR VIDANGE,
et de :
-Dire et juger que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par [O] [G] produit les effets d'une démission à compter du 23 Mars 2010,
-Dire et juger que [O] [G] n'a justifié d'aucune heure supplémentaire en tant que chauffeur poids lourd au sein de la société VAR VIDANGE ; au regard de ce que ci-dessus démontré en droit et en fait,
-Dire et juger que le salaire contractuel liant la société VAR VIDANGE à [O] [G] est celui visé dans l'ensemble des bulletins de salaire délivrés à ce salarié durant sa période d'activité,
-Dire et juger [O] [G] prescrit à pouvoir réclamer, pour la première fois le 8 Octobre 2013, la fixation de son salaire contractuel à 2.529 € brut pour les années 2005, 2006 et 2007, d'autant qu'il le fixe sur la base de son ancienneté en 2009.
-Dire et juger n'y avoir lieu alors à accorder à [O] [G] un maintien du salaire en accident du travail, un rappel du salaire contractuel, l'allocation d'heures supplémentaires, une indemnité compensatrice de préavis, une indemnité légale de licenciement, des dommages et intérêts pour rupture abusive et une allocation au titre d'un travail dissimulé,
et par conséquent de :
- Condamner [O] [G] à verser à la société VAR VIDANGES la somme de 2.493.14 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect du préavis,
-Dire et juger que [O] [G] doit rembourser la totalité des sommes versées par la société V AR VIDANGE en exécution du jugement de première instance,
- Condamner [O] [G] à verser à la société VAR VIDANGES la somme de 42.065,15 € représentant le coût global des sommes payées en exécution du jugement avec intérêts aux taux légal à compter du 3/05/2012
- Condamner [O] [G] à verser à la société VAR VIDANGES la somme de 7000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
- Condamner [O] [G] aux dépens.
MOTIVATION
En préambule, il sera observé que M. [G] a remis à la cour un dossier peu lisible, très épais dont les pièces ne sont pas listée , parfois remises en plusieurs exemplaires et dont certaines comme les attestations d'un M. [L] n'ont pas été trouvées.
Il ressort des débats et des documents produits et exploitables que M [G] a été embauché en qualité de chauffeur à compter du 27/06/2005 par l'EURL VAR VIDANGE d'abord dans le cadre d'un contrat à durée déterminée puis d'un contrat à durée indéterminée.
Il a été victime d'un accident du travail le 28 août 2009.
Il a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 23/03/2010 par courrier recommandé avec accusé de réception ainsi rédigé :
«Pendant mon arrêt pour accident de travail, j'ai pris la peine de relever les nombreuses fautes et inobservations de vos obligations d'employeur, par exemple:
' refus de compléter les indemnités journalières de la CPAM pour accident de travail,
' absence de contrat de travail,
' salaire contractuel non respecté,
' partie du salaire versé en espèces hors fiches de paie - non règlement des heures supplémentaires,
' non-respect des prescriptions de l'INRS,
' absence de qualification et de coefficient sur les fiches de paie,
' absence de formation à la sécurité,
' absence d'un deuxième agent lors de l'utilisation de la haute pression,
' absence de locaux sanitaires (douches, WC, vestiaires .. .),
' absence d'entretien des vêtements de travail,
' absence de prime de salissure,
' absence des vaccinations obligatoires que j'ai faites à mes frais,
' absence de visites médicales du travail annuelles et d'embauche,
' non-respect des règles de protection de l'environnement (épandages sauvages, dessablages),
' véhicules non conformes aux normes d'entretien et de réparations,
' absence d'affichage obligatoire des conventions collectives.
Malgré une tentative de médiation amiable entre votre avocat et mon conseiller syndical vous avez persisté dans vos refus.
Dans ces conditions, je prends acte de la rupture de mon contrat de travail de votre faite et vous en laisse l'entière responsabilité.'
Sur la demande d'irrecevabilité des heures supplémentaires relatives à des travaux de maçonnerie :
M. [G] affirme qu'il a effectué plus de 1100 heures supplémentaires pour le compter de Mme [X], gérante de l'EURL VAR VIDANGE ;
Il est admis que M. [G] a effectué des travaux de maçonnerie et notamment un mur d'enceinte d'une propriété appartenant suivant une attestation notariale du 14/12/2004 et située lieudit [Localité 1] à [Localité 2] à Mme [X], qui en a donné une partie en location à L'EURL VAR VIDANGE.
Sur le récapitulatif des heures effectuées sur ce chantier, M. [G] précise qu'elle ont été effectuées en sus de ses horaires de travail de chauffeur, ce qui s'induit d'ailleurs de sa demande d'heures supplémentaires relatives à ses fonctions.
Il est donc acquis que M. [G] a travaillé pour le compte de Mme [X] en dehors de ses heures de travail et alors qu'il n'était plus dans le cadre de ses fonctions professionnelles contractuelles.
Les heures dont il réclame paiement ne relèvent pas de l'exécution du contrat travail mais de l'exécution d'un contrat civil de la compétence du tribunal d'instance ou du tribunal de grande instance selon le montant de la demande.
Sur le contrat de travail et la rémunération contractuelle :
Lorsque le contrat de travail n'est pas passé par écrit, il relève du droit commun.
Il appartient à la partie qui excipe d'une clause particulière d'en rapporter la preuve par tout moyen.
M. [G] soutient qu'il a été embauché par Mme [X] comme chauffeur contre une rémunération annoncée de 1700 €, dont 500 € en espèces qui lui furent versés mensuellement, rémunération conforme à celle mentionnée dans l'annonce de l'ANPE.
L'EURL VAR VIDANGE conteste le versement de 500 € en espèces et fait observer que le salaire annoncée par l'ANPE s'adressait à un chauffeur ayant de l'expérience qui n'était pas le cas de M. [G] retraité militaire directeur des ressources humaines n'ayant aucune expérience en matière d'assainissement.
A défaut pour M. [G] de justifier le versement effectif de la somme de 500 € en espèces chaque mois et en complément de son salaire, alors que par ailleurs, il réclame le paiement d'heures de travail effectuées pour Mme [X] ; en l'état de la démonstration faite et justifiée par l'employeur de ce que M. [G] percevait une rémunération équivalente à ses collègues chauffeurs comme lui et conforme à la convention collective ; de la constatation que pendant toute sa période de travail au sein de L'EURLVAR VIDANGE, il n'a jamais contesté le montant de sa rémunération, étant précisé qu'en sa qualité de retraité militaire directeur des ressources humaines, il était particulièrement à même de faire respecter ses droits, M. [G] n'est pas fondé en ses demandes en rappel de salaire contractuel et en rappel de salaire pendant la période d' arrêt de travail, le complément n'ayant pas été calculé sur le salaire qu'il réclame.
Sur les heures supplémentaires :
Si, aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.
M. [G] fonde sa demande sur des documents qu'il a lui-même établis, alors qu'il était en arrêt de travail et pour les besoins de la cause.
Il explique qu'il travaillait chaque jour ouvré de 8h à 12 h et de 13h30 à 17 h30, sauf le mercredi après -midi,
soit 40h par semaine alors que son contrat de travail n'en prévoyait que 35 ; que dans les tâches qui étaient les siennes, beaucoup n'ont pas été rémunérées telles les vidanges des pompes, l'accompagnement des camions pour entretien...
Il produit également un planning des tâches exécutées jour par jour avec mention du temps passé pour chacune d'elles.
L'EURL VAR VIDANGE soutient que l'horaire de l'entreprise était de 8h30 à 12h et de 13h30 à 17 h, faisant observer qu'en hiver, il n'est pas possible de travailler au-delà de 17 h en raison de l'obscurité et souvent pas avant 9h30-10h en raison du mauvais temps et du gel ; que de plus et en réalité il rentrait le plus souvent à 11h30 pour prendre son enfant à l'école et travaillait très sporadiquement le samedi matin.
Elle fait également observer que M. [G] a compté des heures supplémentaires sur des périodes où il était en congés et qu'il a compté largement le temps de ses interventions.
Elle conteste que M. [G] ait effectué la moindre heure supplémentaire, les heures supplémentaires nécessaires au fonctionnement de l'entreprise étant effectuées par les autres chauffeurs.
Il sera observé :
-au vu des bulletins de salaire des autres chauffeurs produits au débats, que ces derniers effectuant des heures supplémentaires en ont été rétribué et qu'il est peu probable que M. [G] ne l'aurait pas été dans le même cas.
-au vu du récapitulatif établi par M. [G], qu'à le suivre, il aurait fait davantage d'heures que ces collègues de travail qui demandaient à en faire.
-au vu des ses demandes de rappel de salaire afférent à des travaux de maçonnerie, M. [G] aurait cumulé des heures supplémentaires alors même qu'il travaillait en dehors de ses fonctions de chauffeur PL.
-que durant plus de 3 ans, il n'a fait aucune réclamation à ce titre.
En conséquence des documents produits, de la pertinence des observations de L'EURL VAR VIDANGE sur la demande de M. [G] que celui-ci n'apporte pas des éléments suffisamment crédibles pour étayer sa demande.
Le jugement déféré sera réformé de ce chef.
Sur la prise d'acte de la rupture du contrat de travail :
Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.
En l'espèce, il vient d'être vu que les griefs reprochés à l'employeur concernant :
refus de compléter les indemnités journalières de la CPAM pour accident de travail,
' absence de contrat de travail,
' salaire contractuel non respecté,
' partie du salaire versé en espèces hors fiches de paie - non règlement des heures supplémentaires
ne sont pas fondés.
En ce qui concerne les autres griefs, il sera constaté en ce qui concerne :
' non-respect des prescriptions de l'INRS sans viser lesquelles
' absence de qualification et de coefficient sur les fiches de paie, que cette carence a été réparée en cours de procédure et qu'en elle-même elle n'a pas préjudicié à M. [G]
' absence de formation à la sécurité , que M. [G] n'avance aucun fondement juridique à cette demande
' absence d'un deuxième agent lors de l'utilisation de la haute pression, qu'il résulte de l'attestation de l'un des salariés de l'entreprise qu'en cas de travaux difficiles , ils interviennent à deux
' absence de locaux sanitaires (douches, WC, vestiaires .. .), que l'employeur affirme le contraire et produit des photographies à l'appui.
' absence d'entretien des vêtements de travail que l'employeur justifie de la présence d'une machine à laver dans les locaux de l'entreprise
' absence de prime de salissure, qu'elle a été réglée sur les bulletins de salaire produits
' absence des vaccinations obligatoires que j'ai faites à mes frais, que ces vaccinations ne sont pas obligatoires
' absence de visites médicales du travail annuelles et d'embauche, que M. [G] ne s'est pas rendu à ses visites volontairement au prétexte qu'elles avaient lieu un mercredi après-midi.
' non-respect des règles de protection de l'environnement (épandages sauvages, dessablages), que ce problème n'existe plus depuis plusieurs années
' véhicules non conformes aux normes d'entretien et de réparations, que cette demande n'est pas justifiée
' absence d'affichage obligatoire des conventions collectives, que la secrétaire de l'entreprise affirme qu'elle peut être consultée au bureau
Aucun des griefs ne pouvant être sérieusement retenu, la prise d'acte de la rupture du contrat de travail s'analyse en une démission, de sorte que M. [G] sera débouté de toutes ses demandes.
Il est équitable d'allouer à l'EURL VAR VIDANGE la somme de 1 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
M.[G] qui succombe supportera les dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement,
INFIRME le jugement entrepris,
et statuant à nouveau :
Dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail s'analyse en une démission.
Déboute M. [G] de toutes ses demandes.
Condamne M. [G] à payer à l'EURL VAR VIDANGE la somme de1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
CONDAMNE M. [G] aux dépens.
LE GREFFIER.LE PRÉSIDENT.