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28/03/2014 | FRANCE | N°13/23840

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 15e chambre a, 28 mars 2014, 13/23840


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

15e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 28 MARS 2014



N° 2014/249













Rôle N° 13/23840







[F] [R]

[Y] [D] épouse [R]





C/



Société LANDSBANKI LUXEMBOURG SA





















Grosse délivrée

le :

à : Me Rachel SARAGA-BROSSAT



Me Agnes ERMENEUX-CHAMPLY












r>Décision déférée à la Cour :



Jugement du Juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 28 Novembre 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 13/00099.





APPELANTS



Monsieur [F] [R]

né le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 1] (ITALIE), demeurant [Adresse 2]



représenté par Me Rach...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

15e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 28 MARS 2014

N° 2014/249

Rôle N° 13/23840

[F] [R]

[Y] [D] épouse [R]

C/

Société LANDSBANKI LUXEMBOURG SA

Grosse délivrée

le :

à : Me Rachel SARAGA-BROSSAT

Me Agnes ERMENEUX-CHAMPLY

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 28 Novembre 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 13/00099.

APPELANTS

Monsieur [F] [R]

né le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 1] (ITALIE), demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Rachel SARAGA-BROSSAT, avocat au barreau d'AIX-EN- PROVENCE, assistée de Me Maxence LAUGIER, avocat au barreau de LILLE

Madame [Y] [D] épouse [R]

née le [Date naissance 2] 1956 à [Localité 1] (ITALIE), demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Rachel SARAGA-BROSSAT, avocat au barreau d'AIX-EN- PROVENCE, assistée de Me Maxence LAUGIER, avocat au barreau de LILLE

INTIMEE

Société LANDSBANKI LUXEMBOURG SA Société anonyme de droit luxembourgeois au capital de 54.000.000 €, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Luxembourg sous le numéro B 78-804, en liquidation judiciaire selon jugement prononcé par le Tribunal d'arrondissement de Luxembourg le 12 Décembre 2008, agissant poursuites et diligences de son liquidateur, Madame [P] [W], Avocat, nommée à cette fonction par le jugement précité, domicilié en cette qualité au siège, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Agnes ERMENEUX-CHAMPLY de la SCP ERMENEUX- LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN- PROVENCE, plaidant par Me Valérie DESFORGES, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 12 Février 2014 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Olivier COLENO, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier COLENO, Président (rédacteur)

Monsieur Christian COUCHET, Conseiller

Madame Françoise BEL, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2014

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2014,

Signé par Monsieur Olivier COLENO, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Par le jugement d'orientation dont appel du du 28 novembre 2013, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Toulon a ordonné la vente forcée de l'immeuble saisi au préjudice des époux [R] par la SA LANDSBANKI LUXEMBOURG représentée par son liquidateur Maître [P] [W] pour recouvrement forcé d'une créance de 404.208,10 € en vertu d'un contrat de prêt ou ouverture de crédit du 7 août 2007 dite Equity release et d'un acte notarié d'affectation hypothécaire du 6 novembre 2007, après :

-rejet de la demande de nullité de la saisie immobilière à raison de l'existence d'une saisie pénale de la créance, au motif que la saisie immobilière porte sur l'immeuble tandis que la saisie pénale ne suspend que l'exécution relative au droit mobilier incorporel que constitue la créance de la banque,

-rejet de la contestation du caractère liquide de la créance, le caractère erroné allégué du décompte n'étant pas démontré, et la déchéance du terme ayant été dénoncée aux époux [R],

-rejet des demandes de sursis dès lors que l'information pénale en cours ne fait pas obstacle à la poursuite de la saisie immobilière, de délai de paiement dès lors qu'aucun élément de preuve n'est fourni sur la capacité des débiteurs à respecter un échéancier quelconque, et d'autorisation de vente amiable en l'absence de justification de démarches en ce sens.

Vu la remise faite au greffe avant l'audience de l'assignation à jour fixe délivrée le 9 janvier 2014 à la SA LANDSBANKI LUXEMBOURG en vertu de l'autorisation présidentielle donnée par ordonnance du 16 décembre 2013 sur une requête déposée le même jour après déclaration d'appel du 12 décembre 2013,

Vu les dernières conclusions déposées le 13 décembre 2013 par les époux [R] tendant à l'infirmation de cette décision et à l'annulation de la saisie immobilière au motif de l'indisponibilité de la créance à la suite de l'ordonnance de saisie pénale du 6 décembre 2012, au rejet de toutes les demandes en ce qu'il n'est pas justifié d'une créance certaine, liquide et exigible, à titre subsidiaire au sursis à statuer dans l'attente de l'issue de l'instruction, plus subsidiairement à l'octroi des plus larges délais de paiement, infiniment subsidiairement à l'autorisation de vente amiable à un prix minimum de 600.000 €, en tout état de cause à la condamnation du liquidateur de la société LANDSBANKI à leur payer la somme de 15.000 € à titre de dommages-intérêts,

soutenant notamment que la paralysie de la créance résultant de la saisie s'étend à son accessoire, le droit d'hypothèque, que le commandement a été délivré le 19 avril 2013 postérieurement à la saisie pénale,

que le caractère certain de la créance est contredit par l'information sur une infraction pénale, que le caractère liquide de la créance de même outre que son montant est inexact, que le principe de la déchéance et son prononcé ne sont pas démontrés,

Vu les dernières conclusions déposées le 30 janvier 2013 par M°[W] tendant à la confirmation du jugement dont appel, au rejet des prétentions des époux [R] et au renvoi du dossier devant le juge de l'exécution pour fixation de la date d'adjudication,

soutenant notamment :

que la saisie pénale n'a pas été faite de l'immeuble mais de la créance, se référant aux dispositions de l'article 706-145 et 706-146 du code de procédure pénale, d'où il résulte que seules sont interdites les procédures d'exécution sur le bien faisant l'objet de la saisie pénale et non sur les biens donnés en garantie du recouvrement de la créance, que la saisie immobilière porte sur le bien donné en garantie et non sur la créance, que le principe d'interprétation stricte de la loi pénale exclut d'étendre la disposition afférente au bien saisi, la créance, à l'accessoire de celle-ci, que la saisie pénale n'a pas pour effet de remettre en cause l'exigibilité de la créance et ne fait pas obstacle à la saisie immobilière, et que l'article 706-155 du code de procédure pénale dispose que les fonds doivent être consignés lorsque les créances saisies deviennent exigibles,

qu'elle justifie d'une créance liquide et exigible,

que l'article 4 du code de procédure pénale ne s'applique pas aux procédures civiles d'exécution,

que l'existence de la déchéance du terme est vainement contestée, de même que la valeur de la police LEX LIFE,

que les demandes de délais comme d'autorisation de vente amiable ne sont assorties d'aucune justification,

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu, sur la demande d'annulation de la procédure de saisie immobilière tirée de la saisie pénale de la créance de la banque par le juge d'instruction, qu'est versée aux débats une ordonnance du juge d'instruction du tribunal de grande instance de Paris du 28 novembre 2012 notifiée le 6 décembre 2012 emportant, au visa des articles 706-141 à 706-147 et 706-156 du code de procédure pénale, 131-21 alinéa 3 du code pénal, « saisie pénale de la créance appartenant à la LANDSBANKI LUXEMBOURG sur Monsieur [F] [R] et Madame [Y] [D] épouse [R] selon contrat de prêt en date du 15 septembre 2007 » dans le cadre d'une information suivie contre la société LANDSBANKI LUXEMBOURG, représentée par [W] [P], société sous contrôle judiciaire, des chefs d'exercice illégal de l'activité de prestataire de services d'investissement en France et escroquerie ;

Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article 706-145 du code de procédure pénale d'une part que nul ne peut valablement disposer des biens saisis dans le cadre d'une procédure pénale hors les cas prévus par ledit code, d'autre part que jusqu'à sa mainlevée ou la confiscation du bien saisi, la saisie pénale suspend ou interdit toute procédure civile d'exécution sur le bien objet de la saisie ;

Attendu que n'est certes pas ici en cause une procédure civile d'exécution portant sur le bien objet de la saisie, le bien sur lequel porte la procédure civile d'exécution en litige devant la Cour étant l'immeuble affecté à la garantie de la créance saisie, lequel n'est pas saisi ;

que n'est donc pas en cause l'interdiction résultant du deuxième alinéa de l'article 706-145, mais celle résultant du premier alinéa précité ;

Attendu qu'il résulte d'autre part des dispositions des articles 706-141 et 706-143 du code de procédure pénale que s'agissant d'une saisie sans dépossession, le propriétaire ou le détenteur du bien saisi a la charge de l'entretien et de la conservation de celui-ci et ne peut procéder à un acte ayant pour conséquence de transformer le bien qu'avec l'autorisation du juge d'instruction qui a ordonné la saisie ;

Attendu qu'en poursuivant la saisie de l'immeuble affecté à la garantie de la créance saisie alors d'une part que le caractère exigible de celle-ci est contesté et d'autre part que ses droits sont préservés par une inscription d'hypothèque, le créancier qui ne prétend pas que la mesure d'exécution serait nécessaire à la conservation de la créance, exerce une action tendant à mobiliser le montant de sa créance à son profit, et de la sorte prétend disposer du bien saisi en le transformant par force en somme d'argent, ainsi en violation des articles précités faute d'être en mesure de se prévaloir des exceptions et autorisations prévues par la loi ;

que si l'exercice d'une mesure d'exécution est par principe considéré comme un acte d'administration aux termes de l'article L111-9 du code des procédures civiles d'exécution, le juge d'instruction a expressément exclu que la société LANDSBANKI agisse pour mobiliser sa créance ;

que la société LANDSBANKI LUXEMBOURG, qui pour exercer la saisie immobilière est tenue de présenter le titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, précisément la créance objet de la saisie pénale, ne peut pas prétendre que, ce faisant, elle n'agit pas sur la créance saisie, pour la transformer en somme d'argent et en disposer ;

et attendu que la consignation prévue à l'article 706-155 de la somme d'argent que représente la créance concerne les créances dont l'exigibilité est acquise ou vient à l'être, ce qui est ici contesté, et en tout état de cause s'impose au débiteur et n'est pas à la disposition du titulaire de la créance saisie sans autorisation ;

Attendu que le commandement valant saisie immobilière a été délivré le 19 avril 2013 après qu'ait été notifiée l'ordonnance de saisie le 6 décembre 2012, et par conséquent en méconnaissance directe des interdictions résultant expressément de la décision exécutoire nonobstant appel ;

qu'il en résulte que c'est à bon droit que la nullité de la procédure de saisie immobilière est demandée ;

Attendu que les époux [R] sont fondés en leur principal ;

qu'il sont également fondés à soutenir que la saisie immobilière engagée au mépris d'une décision de justice exécutoire est fautive et génératrice pour eux d'un préjudice moral ;

que ce préjudice sera complètement réparé par une indemnité de 3.000 € ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Déclare l'appel recevable ;

Infirme le jugement dont appel, et, statuant à nouveau,

Vu l'ordonnance rendue par le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Paris le 28 novembre 2012 emportant saisie pénale de la créance appartenant à la SA LANDSBANKI LUXEMBOURG sur Monsieur et Madame [R] selon contrat de prêt en date du 15 septembre 2007,

Annule la procédure de saisie immobilière engagée par la SA LANDSBANKI LUXEMBOURG représentée par son liquidateur Maître [P] [W] suivant commandement valant saisie immobilière délivré aux époux [F] [R] et [Y] [D] le 19 avril 2013 par acte de Maître [C], huissier de justice associé de la SCP BABAU PETER CHAMBON, huissier de justice à Toulon, publié au 1er bureau de la publicité foncière le 14 mai 2013, volume 2013 S n°41 ;

Condamne la SA LANDSBANKI LUXEMBOURG représentée par son liquidateur Maître [P] [W] à payer aux époux [R] la somme de 3.000 € à titre de dommages-intérêts;

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette la demande de la SA LANDSBANKI LUXEMBOURG représentée par son liquidateur Maître [P] [W];

Condamne la SA LANDSBANKI LUXEMBOURG représentée par son liquidateur Maître [P] [W] à payer aux époux [R] la somme de 3.000 € ;

Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples;

Condamne la SA LANDSBANKI LUXEMBOURG représentée par son liquidateur Maître [P] [W] aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 15e chambre a
Numéro d'arrêt : 13/23840
Date de la décision : 28/03/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 5A, arrêt n°13/23840 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-03-28;13.23840 ?
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