COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
14e Chambre
ARRÊT AVANT DIRE DROIT
DU 20 MAI 2014
N°2014/434
Renvoi 02/12/2014 - 09 heures
Rôle N° 12/24345
[N] [Z]
C/
CPAM DU VAR
SA ESCOTA
ARS Provence - Alpes - Côte d'Azur (anciennement DRASS)
Grosse délivrée le :
à :
Me Brigitte FOSSAT de la SCP LABORDE FOSSAT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Me Jean-Marc CAZERES, avocat au barreau de MARSEILLE
Me Christophe BIDAL, avocat au barreau de LYON
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VAR en date du 26 Octobre 2012,enregistré au répertoire général sous le n° 21000862.
APPELANT
Monsieur [N] [Z], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Brigitte FOSSAT de la SCP LABORDE FOSSAT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
INTIMEES
CPAM DU VAR, demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Jean-Marc CAZERES, avocat au barreau de MARSEILLE
SA ESCOTA, prise en la personne de son représentant légal en exercice, demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Christophe BIDAL, avocat au barreau de LYON substitué par Me Jean-François BONNAND, avocat au barreau d'AUXERRE
PARTIE INTERVENANTE
ARS Provence - Alpes - Côte d'Azur (anciennement DRASS), demeurant [Adresse 4]
non comparant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 08 Avril 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Bernadette AUGE, Président, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Bernadette AUGE, Président
Madame Florence DELORD, Conseiller
Monsieur Jean-Luc CABAUSSEL, Conseiller
Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Mai 2014
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Mai 2014
Signé par Madame Bernadette AUGE, Président et Monsieur Kamel BENKHIRA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE - PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Monsieur [N] [Z] a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du Var d'une contestation de la décision de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Var confirmée par décision de la Commission de Recours Amiable lui refusant la prise en charge de la pathologie déclarée le 16 janvier 2007 au titre de la législation professionnelle.
Le tribunal, par jugement en date du 26 octobre 2012, a déclaré le recours irrecevable pour saisine de la juridiction avant le délai réglementaire.
[N] [Z] a relevé appel de cette décision le 21 décembre 2012.
Par des moyens qui seront analysés dans le corps du présent arrêt, il expose qu'il a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision de la Commission de Recours Amiable de sorte que son recours est recevable. Il ajoute que sa demande de reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie n'est pas prescrite.
Il demande à la Cour de reconnaître ce caractère et à titre subsidiaire de désigner un autre CRRMP que celui déjà saisi par la caisse et il réclame le paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Var, à l'audience, s'en rapporte sur l'irrecevabilité retenue par le tribunal. Elle maintien que la demande de reconnaissance de la maladie professionnelle a été effectuée au delà du délai biennal. Enfin, dans l'hypothèse où la prescription ne serait par retenue, elle fait valoir qu'un deuxième CRRMP doit être désigné par la Cour. Elle demande que la maladie professionnelle si elle est reconnue soit déclarée opposable à la SA ESCOTA.
La SA ESCOTA s'en rapporte à l'audience sur l'irrecevabilité du recours.
Elle soutient que la déclaration de maladie professionnelle a été effectuée au delà du délai de deux ans dont le point de départ est l'examen du 16 décembre 2004. Elle conclut au déboutement de Monsieur [Z] de toutes ses demandes et à l'inopposabilité de la prise en charge de la pathologie au titre de la législation professionnelle, si celle-ci était ordonnée.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer aux écritures de celles-ci reprises oralement à l'audience.
L'ARS, régulièrement avisée ne comparaît pas.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1/ Sur la recevabilité du recours
Attendu que le tribunal a retenu que Monsieur [Z] avait reçu notification du refus de prise en charge de sa pathologie au titre de la législation professionnelle le 5 mars 2010 ; qu'il avait contesté cette décision devant la Commission de Recours Amiable le 23 mars 2010 et qu'il avait saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale le 15 avril 2010 soit avant l'expiration du délai d'un mois de l'article R.142-6 code de la sécurité sociale ;
Attendu que cependant, les pièces produites aux débats permettent de constater que l'appelant a adressé à la caisse une déclaration de maladie professionnelle le 5 juin 2007 ; qu'une enquête administrative a été diligentée concluant le 30 juillet 2007 à la nécessité de soumettre le dossier au médecin-conseil ;
Que celui-ci le 5 septembre 2007 a donné un avis défavorable en précisant que le taux d'incapacité n'atteignant pas 25% était donc inférieur au seuil réglementaire ; qu'à la suite de cet avis, la caisse a adressé un refus de prise en charge le 10 septembre 2007 mentionnant d'une part le fait que la maladie ne figurait pas dans les tableaux de maladie professionnelle et d'autre part que le taux d'incapacité était inférieur à 25% ; qu'elle mentionnait deux recours possibles à savoir, pour le refus de prise en charge la Commission de Recours Amiable et pour le taux d'incapacité le tribunal du contentieux de l'incapacité ;
Attendu que Monsieur [Z] a saisi la Commission de Recours Amiable le 14 octobre 2007 et le tribunal du contentieux de l'incapacité le 28 septembre 2008 ; que cette juridiction a porté son taux d'incapacité à 30%, ce qui a motivé la saisine d'un CRRMP par la caisse ;
Attendu qu'à la suite de l'avis négatif de cet organisme, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie a le 5 mars 2010 notifié un nouveau refus à Monsieur [Z] en mentionnant la voie de recours devant la Commission de Recours Amiable ;
Attendu que dans l'intervalle, la Commission de Recours Amiable saisie du recours du 14 octobre 2007 a statué le 25 février 2010 en indiquant les délai (2 mois) et voie (Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale ) de recours ; que par courrier daté du 14 avril 2010 et reçu au greffe le 16 avril 2010, Monsieur [Z] a saisi la Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du Var d'un recours contre la décision de la Commission de Recours Amiable du 25 février 2010 comme il le mentionne dans sa lettre ;
Attendu que par ailleurs, il a saisi la Commission de Recours Amiable le 23 mars 2010 d'un recours contre la décision de refus de la caisse en date du 5 mars 2010 ;
Attendu que les premiers juges ont déclaré le recours devant le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale irrecevable pour avoir été formé le 15 avril 2010 soit avant l'expiration du délai d'un mois à compter de la saisine de la Commission de Recours Amiable ; que cependant, le tribunal a opéré une confusion entre le recours contre la décision de la Commission de Recours Amiable du 25 février 2010 qui était bien celle visée par le courrier du 14 avril 2010 formalisant ce recours et la contestation de la décision de la caisse du 5 mars 2010 ayant donné lieu à la saisine de la Commission de Recours Amiable du 23 mars 2010 ;
Attendu que Monsieur [Z] a bien saisi le tribunal dans le délai de deux mois à compter de la décision de la Commission de Recours Amiable du 25 février 2010 confirmant le refus du 5 septembre 2007 ; que son recours est donc recevable ; que le jugement sera infirmé de ce chef ;
2/Sur la prescription de l'action en reconnaissance de la maladie professionnelle
Attendu qu'il résulte des dispositions des articles L.461-1 et L. 431-2 du code de la sécurité sociale que l'action en reconnaissance du caractère professionnel d'une maladie peut être engagée dans le délai de deux ans qui suit la date à laquelle la victime ou ses ayants droit ont été informés par un certificat médical du lien possible entre la maladie et l'activité professionnelle.
Attendu que le document médical auquel renvoie le premier de ces textes ne peut être qu'un certificat médical et non un examen ou un compte rendu d'examen ;
Attendu que Monsieur [Z] a déclaré une maladie professionnelle le 5 juin 2007 ; que tant la caisse primaire d'assurance maladie du Var que la société ESCOTA invoquent la prescription de l'action en reconnaissance de la maladie professionnelle au motif que l'appelant avait été informé du lien entre sa maladie et son activité professionnelle par un certificat médical en date du 16 décembre 2004 ;
Attendu que cependant, le document médical daté du 16 décembre 2004 n'est pas un certificat médical mais un compte rendu d'examen écho-doppler veineux des membres inférieurs ; que le fait que le médecin ait mentionné une insuffisance veineuse peu compatible avec l'activité professionnelle et la demande d'un dossier de reconnaissance en maladie professionnelle ne confère pas à ce document la nature de certificat médical ;
Attendu que l'action de Monsieur [Z] n'est pas prescrite ;
3/ Sur le fond
Attendu que la décision de refus de prise en charge a été prise par la caisse au vu de l'avis du Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles de [Localité 1] qui n'a pas retenu de lien direct et essentiel entre la pathologie et la profession exercée ;
Attendu que l'article R.142-24-2 du code de la sécurité sociale prévoit que lorsque le différend porte sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas de l'article L. 461-1, la juridiction, avant de statuer recueille préalablement l'avis d'un comité régional autre que celui qui a déjà été saisi par la caisse en application du cinquième alinéa de l'article L. 461-1 ;
Attendu qu'il y a lieu de recueillir l'avis du Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles de [Localité 2] ;
Attendu qu'en conséquence ; il sera sursis à statuer sur la demande de Monsieur [Z] ;
Attendu que les demandes accessoires seront réservées ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière de sécurité sociale,
Infirme le jugement,
Et statuant à nouveau,
Dit le recours de Monsieur [Z] recevable,
Dit que l'action de Monsieur [Z] en reconnaissance de maladie professionnelle n'est pas prescrite,
Avant dire droit,
Ordonne la saisine du Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Montpellier,
Dit que ce comité :
- prendra connaissance des éléments de l'affaire, sollicitera et recueillera des parties toutes pièces utiles à l'accomplissement de sa mission,
- indiquera, de manière motivée, si compte tenu des éléments de l'espèce, il est établi que la maladie déclarée par Monsieur [N] [Z] le 5 juin 2007, a été essentiellement et directement causée par son travail habituel,
Dit que ce comité déposera son rapport écrit au greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence (14ème chambre) dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine,
Dit que le greffe transmettra, par lettre recommandée avec accusé de réception, aux parties à la cause, copie dudit rapport,
Dit que l'affaire sera appelée à nouveau devant la Cour le 02 Décembre 2014 à 09 heures, la notification du présent arrêt valant convocation des parties à la dite audience,
Réserve les autres demandes.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT