COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 28 MAI 2014
DT
N° 2014/367
Rôle N° 13/17095
SCI [Adresse 2]
C/
DIRECTRICE REGIONALE DES FINANCES PUBLIQUES DE PROVENCE , ALPES , COTE D'AZUR et du DEPARTEMENT DES BOUCHES DU RHONE
Grosse délivrée
le :
à :
Me Christian LESTOURNELLE
SCP ROUSTAN-BERIDOT
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 17 Juin 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 08/12629.
APPELANTE
SCI [Adresse 2],
dont le siège social est sis [Adresse 2]
prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités audit siège.
représentée et assistée par Me Christian LESTOURNELLE, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Benoît GRANJARD, avocat au barreau de MARSEILLE.
INTIMEE
Directrice Régionale des Finances Publiques de Provence , Alpes , Cote d'Azur et du Département des Bouches du Rhône dont le bureaux sont situés [Adresse 1]
représentée et assistée par Me Marc BERIDOT de la SCP ROUSTAN-BERIDOT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 17 Avril 2014 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Dominique TATOUEIX, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur François GROSJEAN, Président
Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller
Monsieur Dominique TATOUEIX, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Mai 2014.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Mai 2014,
Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DES FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS,
La SCI [Adresse 2] a été constituée par acte dressé le 11 février 1980 par Me [K] [D] notaire à [Localité 2].
Parmi les associés figurait M. [W] [F], détenteur de 46,30% du capital, qui résidait à [Localité 1] mais est décédé à [Localité 3] le [Date décès 1] 1998.
A1'occasion d'un contrôle fiscal, l'administration fiscale a demandé à la SCI [Adresse 2] par courrier en date du 21 mars 2006, de désigner les successeurs de M. [W] [F], à défaut de quoi la SCI serait passible d'une taxe de 3% prévue par les articles 990 D et suivants du code général des impôts.
Par courrier en date du 16 juillet 2006, le service de l'assiette a notifié à la SCI [Adresse 2] une proposition de rectification portant sur les années 2003, 2004, 2005 relative à la taxe prévue par les articles 990 D et suivants du code général des impôts avec notification selon la procédure de la taxation d'office prévue pour les droits d 'enregistrement et assimilés en application des articles L66-4ème et L67 du livre des procédures fiscales.
Ont ainsi été réclamées à la SCI [Adresse 2] en prenant appui sur diverses cessions immobilières :
- pour 2003, une taxe de 24.000 i assise sur un prix moyen de 981 i,
- pour 2004, une taxe de 33.600 i assise sur un prix moyen de 1.329 i,
- pour 2005, une taxe de 45.000 i assise sur un prix moyen de 1.778 i,
- des intérêts de retard,
- et une majoration de retard de 40% prévue par l=article 1728 du code général des impôts.
Malgré deux courriers de contestation de la SCI [Adresse 2], l'administration fiscale a maintenu sa position de redressement.
La commission départementale de conciliation qui a été saisie s'est déclarée incompétente à l'issue d'une audience s'étant tenue le 26 octobre 2007.
Le service des impôts des entreprises a, par courrier du 29 janvier 2008, adressé à la SCI [Adresse 2] un avis de mise en recouvrement pour un montant global de 153.425 i dont 41.400 i de pénalités et 8.552 i d'intérêts de retard.
La réclamation préalable aux fins de dégrèvement adressée par la SCI [Adresse 2] à la direction générale des impôts, par lettre recommandée avec accusé de réception du 27 mars 2008, étant restée sans réponse pendant plus de six mois, a été implicitement rejetée.
La SCI [Adresse 2] a, par acte en date du 17 novembre 2008 et sur le fondement de l'article R198-10 du livre des procédures fiscales, fait citer devant le tribunal de grande instance de Marseille la direction générale des impôts à l'effet de voir dire que la taxe qui lui est réclamée sur le fondement des articles 990 D et E du code général des impôts ne peut pas être due, ces textes n'étant pas compatibles avec les normes communautaires supérieures.
Par jugement contradictoire en date du 17 juin 2013, le tribunal de grande instance de Marseille a :
- dit que la taxe de 3% réclamée en application des articles 990 D et 990 E est due par la SCI [Adresse 2] concernant les années 2003, 2004 et 2005,
- confirmé la décision de rejet du 13 juin 2008 prise par le directeur des services fiscaux, sauf concernant la pénalité de 40% réclamée pour les années 2003 et 2004,
- dit que la pénalité de 40% n est pas due pour les années 2003 et 2004,
- débouté la SCI [Adresse 2] de ses demandes sauf concernant la pénalité de 40% pour les années 2003 et 2004,
- condamné la SCI [Adresse 2] à verser à M. le comptable des impôts du service des impôts des entreprises de [Localité 2] la somme de 1.000 i au titre de l=article 700 du code de procédure civile,
- mis les dépens à la charge de la SCI [Adresse 2] avec distraction au profit de Me CAULE.
Sur l'application du dispositif prévu aux articles 990 E à 990 F, le tribunal a considéré que la SCI [Adresse 2] ne peut se prévaloir de l'arrêt de la cour de justice des communautés européennes du 11 octobre 2007 et l'arrêt de la Cour de Cassation du 8 avril 2008 dès lors que celle-ci n'est pas privée de la possibilité de s'exonérer de la taxe de 3 % en communiquant chaque année la situation et la consistance des immeubles possédés.
Le tribunal a ensuite jugé que la taxe de 3 % était due pour les années 2003 et 2004 au motif que la SCI [Adresse 2] n'a pas communiqué les noms et adresses des héritiers légaux de M. [F] dans le délai de deux mois de l'article 990 E 3° du code général des impôts et pour l'année 2005, au motif qu'elle ne justifie pas avoir répondu dans le délai de 30 jours à la mise en demeure adressée le 8 juin 2006.
Le tribunal a par ailleurs écarté l'argument selon lequel la taxe devrait être ramenée à la proportion des droits des héritiers de M. [F] dans la SCI, au motif que la taxe étant évalué d'après la valeur vénale de l'immeuble, le pourcentage des parts sociales n'entre pas en considération dans l'assiette de cette taxe.
Le tribunal a toutefois rejeté les pénalités de 40 % pour les années 2003 et 2004 faute de mises en demeure de la part de l'administration fiscale après sa demande de renseignements du 21 mars 2006.
La SCI [Adresse 2] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 19 août 2013.
L=affaire a été fixée à bref délai, en application des dispositions de l=article 905 du code de procédure civile.
Par ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 19 novembre 2013, la SCI [Adresse 2] demande à la cour d=appel de :
- vu les articles 990 D et E du CGI,
- vu les articles 52 et suivants et 73 B et suivants du traité de Rome du 25 mars 1957 modifié par le traité d'Amsterdam,
- vu l=article 8'1 de la directive européenne 77/799 CEE du 19 décembre 1997,
- vu la convention d'entraide conclue entre la France et le Royaume-Uni le 22 mai 1968,
- vu 1'arrêt de la CJCE du 11 octobre 2007,
- vu 1'instruction du 22 octobre 1993 7Q-3-93 n 53
- vu le jugement rendu en date du 17 juin 2013 par le tribunal de grande instance de Marseille,
- réformer la décision entreprise sauf en ce qu'elle a dit que la pénalité de 40 % n'est pas due pour les années 2003 et 2004,
- juger que :
- principalement les articles 990 D et E du code général des impôts n'étant pas compatibles avec des normes communautaires supérieures, la taxe réclamée ne peut être due,
- subsidiairement, la SCI [Adresse 2] a parfaitement bien remplie ses obligations déclaratives,
- plus subsidiairement aucune taxation ne peut intervenir pour les années 2003 et 2004 dans la mesure où pour ces deux années l=administration n'a formulée aucune demande,
- encore plus subsidiairement, les pénalités de retard de 40% ne sont pas justifiées et l=administration ne démontre pas la pertinence de l'évaluation du bien en cause,
- reconventionnellement et en tant que de besoin :
- désigner un expert chargé de l'évaluation du bien en cause qui doit servir à1'assiette de l'impôt,
- condamner la direction générale des impôts à la somme de 3.000i correspondant au préjudice subi du fait d'une demande de suris à statuer au prétexte d'une procédure engagée en date du 10 septembre 2008 qui s'est avérée inexistante,
- condamner la direction générale des impôts aux entiers dépens et au paiement d'une somme de 2.000i au titre de l=article 700 du code de procédure civile.
La SCI [Adresse 2] soutient que l'article 990 D du code général des impôts dans sa rédaction antérieure à la loi du 25 décembre 2007 qui subordonne l'exonération de la taxe de 3 % à des conditions et obligations différentes selon que les personnes morales ont leur siège en France ou dans un autre État de l'union européenne, n'est pas compatible avec les normes communautaires supérieures.
A titre subsidiaire, la SCI [Adresse 2] fait valoir que :
- elle a bien désigné les héritiers de M. [F] en soutenant qu'il appartient à l'administration de rapporter la preuve que cette désignation est insuffisante ou incorrecte,
- l'administration n'en a fait la demande que pour l'année 2005, ce qui exclut toute rectification pour les années 2003 et 2004,
- pour déterminer l'assiette de la taxe, l'administration a retenu des éléments de comparaison qui correspondent à des cessions non comparables dans la mesure où elles portent sur des immeubles de plus petites superficies, donc plus facilement commerciables. Elle sollicite donc la désignation d'un expert en reprochant au tribunal d'avoir rejeté cette demande au motif qu'elle viserait à pallier sa carence dans l'administration de la preuve.
La SCI [Adresse 2] renouvelle sa demande de dommages et intérêts au motif qu'en provoquant une réouverture des débats en invoquant une assignation du 10 septembre 2008 qui n'a finalement jamais existé, l'administration est à l'origine d'un préjudice subi par là SCI [Adresse 2] du fait du retard pris par la procédure.
Par ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 16 décembre 2013, la direction générale des impôts demande à la cour d=appel de :
- débouter la SCI [Adresse 2] de son appel et de ses demandes,
- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré irrecevable et infondée la demande de
la SCI [Adresse 2],
- condamner la SCI [Adresse 2] aux entiers dépens.
La [Adresse 3] fait valoir que :
- la SCI [Adresse 2] a répondu au-delà du délai de deux mois et sans préciser la qualité d'associées dans la SCI des trois personnes désignées dans son courrier, ni le nombre de parts détenues par celles-ci, ni leur résidence fiscale,
- pour les années 2003 et 2004 une demande de renseignements a été adressée le 21 mars 2006, étant précisé que le défaut de réponse à une telle demande rend applicable la taxe de 3 %,
- la valeur vénale des biens a été déterminée par référence à des cessions de biens présentant des caractéristiques proches. La SCI [Adresse 2], qui se contente de faire valoir des généralités, n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause l'évaluation retenue, ce qui exclut qu'il soit fait droit à sa demande d'expertise.
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu que les parties ne font que reprendre devant la cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance ;
Attendu qu'en l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties ; qu'il convient en conséquence de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions ;
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Condamne la SCI [Adresse 2] aux dépens distraits conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT