COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
15e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 06 JUIN 2014
N° 2014/422
Rôle N° 13/02717
[X] [Y]
C/
[B] [Q] épouse [K]
[M] [Q]
Grosse délivrée
le :
à : Me Charles TOLLINCHI
Me Corine SIMONI
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 29 Janvier 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 12/06206.
APPELANT
Monsieur [X] [Y], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Charles TOLLINCHI, avocat au barreau D'AIX-EN- PROVENCE, plaidant par Me Patricia SUID-VANHEMELRYCK, avocat au barreau de NICE
INTIMES
Madame [B] [Q] épouse [K]
née le [Date naissance 2] 1933 à [Localité 2], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Corine SIMONI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Véronique BOLIMOWSKI, avocat au barreau de GRASSE
Monsieur [M] [Q]
né le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 1], demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Corine SIMONI , avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Véronique BOLIMOWSKI, avocat au barreau de GRASSE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 11 Décembre 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Olivier COLENO, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Olivier COLENO, Président (rédacteur)
Monsieur Christian COUCHET, Conseiller
Madame Françoise BEL, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Février 2014, puis prorogé au 14 Mars 2014, 11 Avril 2014, 16 Mai 2014 et 13 Juin 2014, la Cour a décidé que le délibéré qui devait être rendu le 13 Juin 2014 serait avancé au 06 Juin 2014.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Juin 2014,
Signé par Monsieur Olivier COLENO, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCÉDURE
Par le jugement dont appel du 29 janvier 2013, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Grasse saisi par [X] [Y] d'une contestation du commandement de saisie-vente notifié par les consorts [Q] et d'un compte de restitutions, spécialement en intérêts, à la suite d'un jugement du 10 juin 2003 portant condamnation à paiement d'une somme de 91.469,41 € plus intérêts au taux légal à compter du 29 mai 1998 avec capitalisation, après arrêt de réformation du 21 février 2007 cassé le 8 octobre 2008, et confirmé le 28 juin 2010 par arrêt sur renvoi de cassation, dont le pourvoi a été rejeté le 25 janvier 2012.
Des paiements réciproques ayant eu lieu dans l'intervalle de toutes ces décisions, le juge de l'exécution a jugé les principes -les intérêts capitalisés dus à compter du 29 mai 1998, leur calcul doit tenir compte des versements opérés par les parties, les intérêts au taux légal sont dus par [X] [Y] à compter de la notification de la décision ouvrant droit à restitution sur les sommes qu'il a récupérées des consorts [Q] en vertu de l'arrêt cassé de 2007, soit les intérêts au taux légal sur la somme récupérée à compter du 27 juillet 2010- et ordonné la réouverture des débats pour un décompte à faire.
Vu les dernières conclusions déposées le 26 avril 2013 par [X] [Y] demandant à la Cour de juger que les intérêts ne peuvent courir, après une inversion de fortune due à une cassation -l'arrêt de cassation du 8 octobre 2008- qu'après une sommation de payer survenue postérieurement à ladite cassation ou tout acte équivalent,
se prévalant de l'arrêt de l'assemblée plénière de la Cour de cassation du 3 mars 1995 selon lequel, au visa de l'article 1153 alinéa 3 du code civil, la partie qui doit restituer une somme qu'elle détenait en vertu d'une décision de justice exécutoire n'en doit les intérêts au taux légal qu'à compter de la notification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution, de sorte que les intérêts -dont on lui réclame 71.000 € sur un principal de 91.000 €, lequel a été acquitté- ne sont dus que entre la mise en demeure de payer consécutive à l'arrêt du 28 juin 2010 et le paiement du principal qui a eu lieu en novembre 2010,
Vu les dernières conclusions déposées le 14 juin 2013 par les consorts [B] et [M] [Q] tendant à la réformation partielle du jugement dont appel :
sa confirmation en ce qu'il a jugé que M.[Y] devait une somme de 91.469,41 € sous déduction des sommes d'ores-et-déjà perçues en exécution de l'ordonnance de référé du 6 janvier 1999, avec intérêts au taux légal à compter du 29 mai 1998 et les intérêts capitalisés,
sa réformation en ce qu'il a jugé que les intérêts de retard devaient prendre en considération les versements opérés par les parties tout au long de la procédure et que M.[Y] devait les intérêts au taux légal à compter de la notification de la décision ouvrant droit à restitution sur la somme qu'il a récupérée des consorts [Q] en vertu de l'arrêt cassé, soit les intérêts au taux légal sur la somme récupérée à compter du 27 juillet 2010, et demandant en conséquence à la Cour de débouter M.[Y] de ses demandes et de le condamner à 5.000 € de dommages-intérêts pour procédure abusive,
soutenant que le jugement confirmé condamnait M.[Y] à leur payer la somme de 91.469,41 € augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 mai 1998, qu'on n'est pas en matière de restitution mais d'exécution d'une condamnation, qu'à la suite de la cassation, et après les restitutions opérées, les parties se retrouvent au point de départ et non en matière de restitution, que lorsqu'ils ont eux-mêmes restitué les sommes perçues en vertu du jugement infirmé, ils ont restitué des intérêts capitalisés,
MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu que le schéma des faits et décisions intervenues dans le litige entre les parties est le suivant :
1-par jugement du 10 juin 2003 assorti de l'exécution provisoire, [X] [Y] est condamné à payer aux consorts [Q] la somme de 91.469,41 €, sous déduction des sommes d'ores-et-déjà perçues en exécution d'une ordonnance de référé du janvier 1999, et avec intérêts au taux légal à compter du 29 mai 1998,
-selon les consorts [Q] qui n'en sont pas critiqués, [X] [Y] avait payé 12.195,92 € le 25 janvier 1999, puis a versé 47.345,81 € le 18 juillet 2003, soit un total de 59.541,73 € et donc un paiement incomplet,
2-par arrêt du 21 février 2007, le jugement est infirmé et les consorts [Q] sont expressément condamnés en dispositif à la restitution des sommes perçues augmentées des intérêts au taux légal à compter du 8 août 2003, date de la première demande, et avec capitalisation,
-selon les consorts [Q] qui n'en sont pas discutés, ils ont opéré cette restitution à hauteur au total de 66.437,16 € le 20 juin 2007 ;
3-cet arrêt est cassé le 8 octobre 2008,
4-sur renvoi de cassation, le jugement de 2003 est purement et simplement confirmé par arrêt du 28 juin 2010, de sorte que ses effets se poursuivent de façon ininterrompue ;
-le 3 novembre 2010, [X] [Y] a payé 91.469,41 €,
5-le pourvoi est rejeté le 25 janvier 2012,
Attendu, sur ce, qu'il n'est pas discuté que la créance de restitution des fonds que [X] [Y] avait payés, dont il avait bénéficié par l'effet de l'arrêt de 2007, a été éteinte par le paiement qu'en ont fait les consorts [Q] ;
Attendu que l'arrêt de cassation du 8 août 2008 a eu pour conséquence que le jugement de 2003, parce qu'il était assorti de l'exécution provisoire, a repris ses effets, faisant renaître l'obligation de payer de [X] [Y] que l'arrêt ensuite rendu sur renvoi de cassation le 28 juin 2010 n'a fait que confirmer purement et simplement ;
Attendu que le premier juge a donc exactement retenu, ainsi que les consorts [Q] le soutiennent à bon droit, que l'on n'est pas en matière de restitution mais d'exécution d'une décision de condamnation à paiement, et que [X] [Y] n'est pas fondé à prétendre se prévaloir d'une jurisprudence, certes bien acquise mais hors d'application en la circonstance, sur le point de départ des intérêts dus sur une créance de restitution née d'une décision judiciaire ;
Attendu par surcroît que [X] [Y] n'a jamais payé qu'une partie des sommes qu'il devait en vertu du jugement de 2003 dont le cours des intérêts tel que fixé au jugement, pour le surplus, n'a jamais été affecté par aucun paiement ;
que de plus encore, et par l'exécution de l'arrêt cassé, la restitution de ses paiements partiels que [X] [Y] a obtenue a été augmentée des intérêts au taux légal avec capitalisation à compter du 8 août 2003 -et non à compter de la signification de l'arrêt de 2007 faisant naître la créance de restitution conformément à la jurisprudence dont il se prévaut-, dont il n'est pas prétendu qu'ils n'auraient pas compensé la détention que les consorts [Q] ont pu avoir pendant quelques années de ces paiements partiels ;
Attendu par conséquent que les consorts [Q] sont fondés à soutenir qu'aucun compte n'est plus à faire des paiements intermédiaires réciproques apparus, compte qui n'a jamais été demandé par [X] [Y] et ne l'est pas devant la Cour, et que le jugement de 2003 reste à exécuter, avec des intérêts qui ont couru depuis le 29 mai 1998 jusqu'au paiement du principal le 3 novembre 2010 ;
Attendu que le caractère abusif des recours exercés par [X] [Y] n'est pas démontré ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement dont appel mais seulement en ce qu'il a dit que [X] [Y] doit la somme de 91.469,41 € dans les termes du dispositif du jugement du 10 juin 2003, avec intérêts au taux légal à compter du 29 mai 1998 et capitalisation ;
L'infirme en toutes ses autres dispositions et, statuant à nouveau sur les chefs infirmés,
Juge qu'il n'y a plus matière à prendre en compte les paiements réciproques intervenus entre les parties tout au long de la procédure ;
Déboute les consorts [B] [Q] épouse [K] et [M] [Q] de leur demande de dommages-intérêts ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette la demande de [X] [Y];
Condamne [X] [Y] à payer aux consorts [B] [Q] épouse [K] et [M] [Q] la somme de 4.500 € ;
Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples;
Condamne [X] [Y] aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,