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29/01/2015 | FRANCE | N°12/17707

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre c, 29 janvier 2015, 12/17707


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre C



ARRÊT AU FOND

DU 29 JANVIER 2015



N° 2015/51













Rôle N° 12/17707







[X] [N]





C/



SA BRACE INGENIERIE





















Grosse délivrée

le :

à :CHERFILS

VAUDANO

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribu

nal de Commerce d'AIX-EN-PROVENCE en date du 24 Juillet 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 2012/02981.





APPELANT



Maître [X] [N] pris en sa qualité de Liquidateur à la liquidation judiciaire de la SA BRACE INGENIERIE

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Romain CHERFILS de la SARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 29 JANVIER 2015

N° 2015/51

Rôle N° 12/17707

[X] [N]

C/

SA BRACE INGENIERIE

Grosse délivrée

le :

à :CHERFILS

VAUDANO

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce d'AIX-EN-PROVENCE en date du 24 Juillet 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 2012/02981.

APPELANT

Maître [X] [N] pris en sa qualité de Liquidateur à la liquidation judiciaire de la SA BRACE INGENIERIE

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Romain CHERFILS de la SARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assisté de Me Claude GAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

SA BRACE INGENIERIE, prise en la personne de son représentant légal, dont le siège est sis [Adresse 2]

actuellement chez M. [H] [V] demeurant [Adresse 1]

représentée et assistée de Me Claude VAUDANO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 16 Décembre 2014 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Yves ROUSSEL, Président

Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller

Mme Françoise DEMORY-PETEL, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Janvier 2015

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Janvier 2015,

Rédigé par Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller,

Signé par Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller pour le président empêché, et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Monsieur [H] [V], PDG de la SA BRACE INGENIERIE, a déclaré la cessation des paiements de sa société le 12 mai 2010.

Par jugement du 20 mai 2010, le tribunal de commerce d'AIX EN PROVENCE a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société BRACE INGENIERIE et a fixé la date de cessation des paiements au 17 mai 2010.

Suivant jugement du 27 juillet 2010 la tribunal a ordonné la cession totale des actifs au profit de la SA BETEM INGENIERIE pour le prix de 270 000 €. La cession est intervenue au profit d'une filiale de la société BETEM INGENIERIE, la SAS BETEM PACA.

Par jugement du 7 septembre 2010 le tribunal a prononcé la liquidation de la société BRACE INGENIERIE et a désigné Maître [X] [N] en qualité de liquidateur.

Ce dernier a assigné la société BRACE INGENIERIE en report de la date de cessation des paiements au 1er janvier 2009.

*

Par jugement rendu le 24 juillet 2012, le tribunal de commerce d'AIX EN PROVENCE a :

rejeté la demande d'irrecevabilité soulevée par la société BRACE INGENIERIE,

rejeté la demande de Maître [X] [N], en qualité de liquidateur de la société BRACE INGENIERIE, comme injustifiée,

débouté la société BRACE INGENIERIE de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive,

condamné Maître [X] [N], en qualité de liquidateur de la société BRACE INGENIERIE, à payer à cette dernière la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné Maître [X] [N], en qualité de liquidateur de la société BRACE INGENIERIE, aux dépens.

Les premiers juges ont retenu que la société BRACE INGENIERIE a fait 239 889 € de pertes en 2007 et était légèrement bénéficiaire en 2008, que les attestations du commissaire aux comptes et de l'expert comptable sur les comptes 2008 ne sont pas alarmantes même si le commissaire aux comptes parle d'avenir « incertain », que les pièces présentées par Maître [X] [N], es qualité, ne contiennent aucune mise en demeure, ni assignation antérieure au 1er janvier 2009 et donc pas de créances exigibles, qu'à l'inverse la société BRACE INGENIERIE fournit des attestations des services fiscaux (attestation du 5 mars 2010) et de l'URSSAF (du 31 juillet 2009) comportant la mention « à jour », que la société BRACE INGENIERIE a obtenu des accords de délais de paiements sur les sommes qu'elle devait conformément à la jurisprudence, qu'en outre la tolérance du créancier qui n'exige pas le paiement de sa créance arrivée à échéance, doit s'interpréter comme un délai de paiement tacitement accordé au débiteur, et que ce délai fait sortir la dette du passif exigible (com. 22/02/94 JCP E 1995 II 699 note L. [W]), que le passif exigible ne peut être pris en considération, dès lors que les créances n'ont pas été réclamées (com. 12/11/1997 n° 94-15829 jurisdata n° 1997 004459 D affaires 1997 p. 1468 Rev. Proc. Coll. 1998 p. 39 obs. JM [Q]), que la valeur du fonds de commerce peut être comptée dans l'actif disponible ([Localité 1] 8ème chambre 9/10/1991) et que ce fonds de commerce valait 270 000 €, que le fait de ne pas être payé est insuffisant pour que le créancier démontre que la condition est remplie, l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible devant être prouvé pour que celui-ci invoque la cessation la cessation des paiements (com. 16/3/1993, com. 25/2/1997 n° 95-18-607) et qu'au final rien ne permet de dire que la société BRACE INGENIERIE était en cessation des paiements au 1er janvier 2009.

Maître [X] [N], en qualité de liquidateur de la SA BRACE INGENIERIE, a interjeté appel de cette décision suivant acte du 25 août 2012.

Par courrier du 4 juillet 2014, Monsieur le procureur général demande l'application de la loi et s'en rapporte à la décision de la cour.

L'instruction a été clôturée suivant ordonnance rendue le 18 novembre 2014.

**

Par dernières conclusions déposées et notifiées le 19 novembre 2014, Maître [X] [N], en qualité de liquidateur de la société BRACE INGENIERIE, demande à la cour de :

révoquer l'ordonnance de clôture prononcée le 18 novembre 2014,

admettre ses écritures,

à défaut, rejeter les conclusions n° 6 signifiées le 17 novembre 2014 dans les intérêts de la société BRACE INGENIERIE,

rejeter comme irrecevables et sans fondement les exceptions soulevées par l'intimé,

au visa des dispositions de l'article L. 631-8 alinéa 4 du code de commerce, reporter la date de cessation des paiements de la société BRACE INGENIERIE au 20 novembre 2008 et subsidiairement au 1er janvier 2009 date à laquelle Monsieur [H] [V] a indiqué qu'il n'avait pas pu obtenir de rétablissement des concours bancaires malgré l'intervention du médiateur du crédit,

rejeter les demandes reconventionnelles au demeurant irrecevables de l'intimée,

fixer l'indemnité due au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la somme de 3 500 €,

subsidiairement, ordonner une expertise aux fins de procéder à l'étude comptable et financière de la société BRACE INGENIERIE et de fournir tous éléments d'appréciation à la cour sur la date de cessation des paiements,

condamner la société BRACE INGENIERIE aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE.

***

Suivant dernières conclusions déposées et notifiées le 1er décembre 2014, la société BRACE INGENIERIE demande à la cour de :

à titre principal

révoquer l'ordonnance de clôture du 18 novembre 2014 pour permettre la recevabilité contradictoire des conclusions des 17 et 19 novembre 2014 ainsi que des pièces qui y étaient jointes,

dire que Maître [X] [N] n'a pas rapporté la preuve à sa charge de l'enrôlement de l'assignation du 22 avril 2011 la seule visée dans le jugement dont appel, dans le délai légal de 8 jours de l'audience du 9 mai 2011,

prononcer la caducité de l'assignation du 22 avril 2011,

débouter l'appelant de ses demandes,

confirmer partiellement le jugement dont appel,

à titre subsidiaire

prononcer la prescription de l'action de Maître [X] [N], à défaut de signification de l'assignation du 22 avril 2011 avant l'expiration de la période d'observation du 20 novembre 2010 fixée par le jugement du 20 mai 2010, et de justification de son enrôlement dans le délai d'un an de ce jugement,

à titre plus subsidiaire

dire irrecevable les conclusions et les bordereaux de communication de pièces de Maître [X] [N], son assignation du 22 avril 2011 et sa déclaration d'appel du 25 septembre 2012 à défaut d'information et d'avis au ministère public en première instance et de sa tardiveté en appel,

dire que les pièces n° 1 à 23 de l'appelant n'ont été communiquées à cette date qu'en mémoire en appel dans ses conclusions du 30 novembre 2012, à l'exclusion du ministère public, sans avoir été produites aux débats en première instance dans son bordereau de communication de pièces du 20 mai 2011,

dire qu'elles n'ont pas été communiquées simultanément avec les conclusions,

dire irrecevables les conclusions et les bordereaux de communication de pièces de Maître [X] [N] dont ses pièces n° 1 à 23 et dès lors son assignation du 22 avril 2011 et sa déclaration d'appel du 25 septembre 2012,

prononcer le sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure relative aux citations directes des 31 décembre 2013 et 2 janvier 2014, si l'attestation de Monsieur [L] n'était pas écartée des débats,

dire et juger que les pièces n° 5, 8 à 13, 21 à 24, 27, 42 à 46, 50 et 51 ont été communiquées en copies le 4 février 2014,

dire que les documents de l'intimée établissent ;

sa restructuration en 2007 et 2008,

son information de Monsieur [R] de ses difficultés financières,

son carnet de commande conséquent aux 20 novembre 2008 et 1er janvier 2009,

ses demandes pour palier à ses difficultés de trésorerie,

dire que les difficultés de trésorerie ne rapportent pas pour autant la preuve à la charge de l'appelant de l'état de cessation des paiements aux 20 novembre 2008 et 1er janvier 2009, du fait notamment des moratoires consentis par les créanciers,

dire que Maître [X] [N] ne justifie pas que le passif exigible était supérieur à l'actif disponible à ces deux dates,

dire que Maître [X] [N] n'établit pas l'augmentation du passif de la société BRACE INGENIERIE des 20 novembre 2008 et 1er janvier 2009 au 17 mai 2010,

dire que l'appelant n'a pas justifié du passif admis et de l'actif de la société BRACE INGENIERIE à ce jour,

débouter Maître [X] [N] de sa demande d'expertise,

si elle était instaurée, mettre à la charge de ce dernier, es-qualité, la consignation éventuelle,

en tout état de cause

condamner l'appelant, en sa qualité de liquidateur, au paiement des sommes suivantes à l'intimée :

la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

la somme de 10 000 € au titre des frais irrépétibles,

le montant retenu par l'huissier,

les dépens, déclarés frais privilégiés de la procédure collective de la société BRACE INGENIERIE, distraits au profit de Maître Claude VAUDANO.

MOTIFS

1/ Sur la révocation de l'ordonnance de clôture

Les parties sont communes en leurs demandes de révocation de l'ordonnance afin que soient admises leurs dernières écritures dont il il vient d'être parlé ainsi que les pièces qu'elles y ont jointes.

En conséquence, l'ordonnance de clôture est rapportée et les écritures dont s'agit admises avec les pièces jointes. L'instruction s'est ainsi achevée à l'ouverture des débats.

2/ Sur la caducité de l'assignation du 22 avril 2011

L'article 857 du code civil dispose que le tribunal est saisi, à la diligence de l'une ou l'autre partie, par la remise au greffe d'une copie de l'assignation et que cette remise doit avoir lieu au plus tard huit jours avant la date de l'audience, sous peine de caducité de l'assignation constatée d'office par ordonnance, selon le cas, du président ou du juge rapporteur, ou, à défaut, à la requête d'une partie.

La société BRACE INGENIERIE demande à la cour de dire que Maître [X] [N] n'a pas rapporté la preuve à sa charge de l'enrôlement de l'assignation du 22 avril 2011, la seule visée dans le jugement dont appel, dans le délai légal de 8 jours de l'audience du 9 mai 2011 et en conséquence de prononcer la caducité de l'assignation du 22 avril 2011.

Mais Maître [X] [N] justifie de ce qu'une première assignation, celle visée par le tribunal, a été délivrée le 22 avril 2011 par la SCP ALBERTIN & CAMOIN, huissiers de Justice associés, pour l'audience du 9 mai 2011 et a été enrôlée le 28 avril 2011 ainsi qu'il ressort du sceau du greffe, que sur cette assignation, Monsieur [H] [V] a comparu par son conseil à l'audience du 9 mai 2011 lors de laquelle la cause a été renvoyée à l'audience du 23 mai 2011 et qu'une nouvelle assignation a été délivrée à toutes fins le 2 mai 2011 au domicile de Monsieur [H] [V] en l'état de ce que la première assignation a donné lieu à l'établissement d'un procès verbal de vaines recherches.

En conséquence l'assignation du 22 avril 2011 n'encourt pas la caducité.

3/ Sur la prescription de l'action

L'article L. 631-8 du code de commerce dispose que le tribunal fixe la date de cessation des paiements après avoir sollicité les observations du débiteur, qu'à défaut de détermination de cette date, la cessation des paiements est réputée être intervenue à la date du jugement d'ouverture de la procédure. Ce texte précise qu'elle peut être reportée une ou plusieurs fois, sans pouvoir être antérieure de plus de dix-huit mois à la date du jugement d'ouverture de la procédure et que sauf cas de fraude, elle ne peut être reportée à une date antérieure à la décision définitive ayant homologué un accord amiable en application du II de l'article L. 611-8 et encore que l'ouverture d'une procédure mentionnée à l'article L. 628-1 ne fait pas obstacle à l'application de ces dispositions.

Le même texte dispose encore que le tribunal est saisi par l'administrateur, le mandataire judiciaire ou le ministère public, qu'il se prononce après avoir entendu ou dûment appelé le débiteur et que la demande de modification de date doit être présentée au tribunal dans le délai d'un an à compter du jugement d'ouverture de la procédure.

La société BRACE INGENIERIE demande à la cour de constater la prescription de l'action de Maître [X] [N], à défaut de signification de l'assignation du 22 avril 2011 avant l'expiration de la période d'observation du 20 novembre 2010 fixée par le jugement du 20 mai 2010 et de justification de son enrôlement dans le délai d'un an de ce jugement.

Mais en l'espèce l'assignation en report de la date de cessation des paiements a été enrôlée le 28 avril 2011 alors que la procédure de redressement judiciaire avait été ouverte par jugement du 20 mai 2010. L'action n'est dès lors pas prescrite.

4/ Sur le défaut d'avis du ministère public en première instance et sa tardiveté en appel

L'article 425 du code de procédure civile dispose que le ministère public doit avoir communication des procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire, des causes relatives à la responsabilité pécuniaire des dirigeants sociaux et des procédures de faillite personnelle ou relatives aux interdictions prévues par l'article L. 653-8 du code de commerce.

La société BRACE INGENIERIE demande à la cour de dire irrecevable les conclusions et les bordereaux de communication de pièces de Maître [X] [N], son assignation du 22 avril 2011 et sa déclaration d'appel du 25 septembre 2012 à défaut d'information et d'avis du ministère public en première instance et de sa tardiveté en appel.

Maitre [X] [N] soutient à l'inverse que l'article 425 du code de procédure civile ne s'applique pas à l'action en report de la date de cessation des paiements.

Quoiqu'il en soit, l'absence de communication au ministère public n'est pas de nature à s'opposer à l'effet dévolutif de l'appel et le dossier a bien été communiqué au procureur général, lequel a régulièrement pris ses réquisitions à trois reprises les 8 novembre 2013, 4 juillet 2014 et 17 octobre 2014, alors que, même si l'article 428 du code de procédure civile dispose que le la communication au ministère public est, sauf disposition particulière, faite à la diligence du juge, Maître [X] [N] a bien fait signifier ses conclusions au parquet général et a même interrogé le greffe de la cour par courrier du 7 janvier 2014 pour savoir si la procédure avait bien été communiquée au ministère public, dans l'hypothèse où cette communication s'imposerait.

Ainsi la procédure est parfaitement régulière de ce chef, ce que le parquet lui-même ne conteste pas.

5/ Sur le recevabilité des pièces n° 1 à 23 produites par Maître Eric VERRECCHIA

La société BRACE INGENIERIE demande à la cour de dire que les pièces n° 1 à 23 de l'appelant n'ont été communiquées qu'en mémoire en appel dans ses conclusions du 30 novembre 2012, à l'exclusion du ministère public, sans avoir été produites aux débats en première instance dans son bordereau de communication de pièces du 20 mai 2011 et de dire qu'elles n'ont pas été communiquées simultanément avec les conclusions.

Mais cette demande comporte en son sein une contradiction dès lors qu'elle expose que les pièces litigieuses auraient communiquées dans les conclusions d'appel du 30 novembre 2012 et qu'il leur est pourtant reproché de ne pas avoir été communiquées simultanément avec les conclusions.

6/ Sur le recevabilité de la déclaration d'appel

La société BRACE INGENIERIE soutient que sont irrecevables les conclusions et les bordereaux de communication de pièces de Maître [X] [N] dont ses pièces n° 1 à 23 et que dès lors son assignation du 22 avril 2011 et sa déclaration d'appel du 25 septembre 2012 doivent être déclarées tout aussi irrecevables.

Mais ce raisonnement manque en droit, le jugement n'étant pas annulé pour une cause tenant à saisine régulière de la juridiction, des difficultés de communication de pièces en première instance ne sauraient faire obstacle au droit d'interjeter appel d'une décision qui fait grief.

7/ Sur le demande de sursis à statuer

La société BRACE INGENIERIE demande à la cour de prononcer le sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure relative aux citations directes des 31 décembre 2013 et 2 janvier 2014, si l'attestation de Monsieur [L] n'était pas écartée des débats.

Cette attestation produite initialement en pièce n° 10 par Maître [X] [N] a été retirée des débats, dès lors la demande de sursis à statuer se trouve privée de cause.

8/ Sur la date de cessation des paiements

L'article L. 631-1 du code de commerce institue une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements. Mais il dispose que le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.

Maître [X] [N] expose que l'exercice 2006 fait ressortir un résultat d'exploitation négatif de 70 589 € et une perte nette de 117 373 €, étant observé que les pertes de l'exercice antérieur s'élevaient déjà à 44 414 €, que le résultat de l'exercice 2007 est négatif pour 239 889 € soit plus de la moitié du capital social. Il soutient que la valorisation des immobilisation n'était pas sincère. Il note encore que le chiffre d'affaire est passé de 2 514 853 € en 2006 à 1 853 751 € en 2007 alors que les concours bancaires passaient de 158 921 € à 619 027 €. Ainsi Maître [X] [N] soutient que la situation était irrémédiablement compromise à la fin 2007 puisqu'à l'exclusion d'un emprunt de 13 717 €, le surplus des emprunts et dettes chiffrées à 1 557 476 € constituait un passif exigible qui ne pouvait être couvert par l'actif disponible puisque de l'actif circulant mentionné pour un montant de 1 598 498 € il faut déduire les encours de production d'un montant de 300 129 €.

Mais cette analyse est erronée en droit, car des emprunts ne constituent un passif exigible que dès lors que la déchéance du terme a été prononcée et que des concours bancaires ne sont pareillement à intégrer au passif exigible que s'ils ont été dénoncés par la banque.

Pour l'exercice 2008, il est même justifié que le résultat était positif pour la somme de 6 180 €.

Ainsi Maître [X] [N], faute de produire des avis de déchéance du terme et des dénonciations de concours, ne justifie pas du montant du passif exigible au 20 novembre 2008, pas plus qu'au 1er janvier 2009. Il rend ainsi toute comparaison impossible avec l'actif disponible.

La société BRACE INGENIERIE explique qu'elle a été créée en 1997 et qu'elle employait 35 salariés, qu'après des années de fort développement elle a connu pour la première fois deux exercices déficitaires en 2005 et 2006, que pour surmonter ses difficultés elle a décidé le 16 juillet 2007 d'une augmentation de capital réservée à un nouveau partenaire, la société ARCANGE+, qu'elle a fermé son agence de [Localité 2] et qu'elle licencié 20 % de son personnel.

Elle expose encore que cette restructuration avait été présentée au juge chargé de la prévention au tribunal de commerce d'AIX EN PROVENCE ainsi qu'il résulte du rapport de gestion sur l'exercice 2008 et du rapport adressé à ce magistrat le 15 septembre 2009 qui faisait apparaître un carnet de commandes fermes de 4 600 000 € sont 1 900 000 € à réaliser sur l'exercice 2009 et que les difficultés insurmontables ne se sont manifestées qu'avec la liquidation judiciaire de la société ARCANGE+ intervenue en novembre 2009 laquelle a abouti à la résiliation du concours bancaire octroyé par le CREDIT DU NORD au 13 janvier 2010 qui n'a pu être évitée malgré la saisine du médiateur du crédit, dans un contexte de violente crise économique notamment pour le secteur du BTP.

La société BRACE INGENIERIE justifie encore que dès novembre 2009 elle a passé des annonces dans le MONITEUR aux fins de recherche de partenaires ou d'investisseurs et qu'ainsi elle est entrée en négociation avec la société PROTEC, que le 3 février 2010, le juge chargé de la prévention avait réuni les sociétés BRACE INGENIERIE et PROTEC, cette dernière présentant un plan d'action destiné à redresser la société BRACE INGENIERIE et obtenir les attestations fiscales indispensables à la poursuite de son activité dans le cadre des marchés publics.

La société BRACE INGENIERIE a ainsi obtenu une attestation du Trésor Public du 5 mars 2010 en contrepartie d'un échelonnement du paiement de ses arriérés. De la même façon l'URSSAF a délivré une attestation le 16 mars 2010 qui confirmait que la société était en règle au 31 décembre 2009.

En conséquence, et sans réduire le passif exigible au passif exigé, il convient de retenir que Maître [X] [N] ne rapporte pas la preuve de la cessation des paiement aux deux dates qu'il invoque et qu'à l'inverse la société BRACE INGENIERIE, qui a recherché activement des remèdes à ses difficultés et a voulu préserver l'emploi en demandant le secours du juge chargé de la prévention ainsi que du médiateur du crédit, prouve les moratoires fiscaux et sociaux ainsi que les concours bancaires dont elle se prévaut conformément aux dispositions de l'article L. 631-1 du code de commerce.

Le cour, n'ayant à suppléer la carence probatoire de l'appelant, n'ordonnera pas la mesure d'expertise sollicitée par ce dernier.

9/ Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

La société BRACE INGENIERIE n'établit pas que Maître [X] [N] ait laissé dégénérer en abus sa liberté d'ester en justice, elle sera en conséquence déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

10/ Sur les autres demandes

L'équité commande que les parties gardent à leur charge les frais irrépétibles qu'elles ont pu exposer, tant en première instance qu'en appel sauf ce qui sera statué in fine.

Les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.

Si le recouvrement des dépens nécessite le concours d'un huissiers de Justice, il sera, comme sollicité, dérogé aux dispositions de l'article 1er du décret du 8 mars 2001 réformant l'article 10 du décret du 12 décembre 1996 lequel dispose, lorsque les huissiers de Justice recouvrent ou encaissent, après avoir reçu mandat ou pouvoir à cet effet conformément aux articles R. 141-1 du code des procédures civiles d'exécution et 18 du décret du 29 février 1956 portant application de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers de justice, des sommes dues par un débiteur, qu'il leur est alloué, en sus éventuellement du droit visé à l'article 8, un droit proportionnel dégressif à la charge du créancier.

PAR CES MOTIFS

La cour, publiquement et contradictoirement

Révoque l'ordonnance de clôture et admet les dernières conclusions des parties.

Dit que l'instruction s'est trouvée clôturée par l'ouverture des débats.

Déboute la société BRACE INGENIERIE de ses exceptions de procédures et de ses fins de non-recevoir.

Confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne les frais irrépétibles de première instance exposés par la société BRACE INGENIERIE qui seront laissés à sa charge.

Déboute Maître [X] [N], en qualité de liquidateur de la société BRACE INGENIERIE, de ses demandes, y compris celles portant sur les frais irrépétibles et les dépens.

Déboute la société BRACE INGENIERIE de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi que d'une indemnité au titre de ses frais irrépétibles au delà du droit proportionnel dégressif.

Emploie les dépens de la procédure en frais privilégiés de la procédure de liquidation judiciaire de la société BRACE INGENIERIE et dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et que s'y ajoutera, en application des dispositions de l'article 700 du code précité, le droit proportionnel dégressif par dérogation aux dispositions de l'article 10 du décret du 12 décembre 1996 qui le laisse à la charge du créancier.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre c
Numéro d'arrêt : 12/17707
Date de la décision : 29/01/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8C, arrêt n°12/17707 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-01-29;12.17707 ?
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