COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
10e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 16 AVRIL 2015
N° 2015/191
Rôle N° 14/02766
[D] [J]
C/
Société MATMUT
[X] [N]
CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES
BOUCHES-DU-RHÔNE
Grosse délivrée
le :
à :
Me Touboul-Elbez
Me DeVillepin
Me Selles
Me Dureuil
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal d'Instance de MARSEILLE en date du 18 Décembre 2013.
APPELANT
Monsieur [D] [J], demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Karine TOUBOUL-ELBEZ, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES
Société MATMUT, [Adresse 3]
représentée par Me Etienne DE VILLEPIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Alexandre ACQUAVIVA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Monsieur [X] [N], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Audrey SELLES, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Félicie JASSEM, avocat au barreau de MARSEILLE
CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHÔNE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège, [Adresse 2]
représentée par Me Christian DUREUIL de l'AARPI LEX CAUSA CHRISIAN DUREUIL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 04 Mars 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Lise LEROY-GISSINGER, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Christiane BELIERES, Présidente
Madame Lise LEROY-GISSINGER, Conseiller
Madame Rachel ISABEY, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Avril 2015
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Avril 2015,
Signé par Madame Christiane BELIERES, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Le 6 août 2011, M. [J], sur son jet ski, a été percuté par celui piloté par M. [N] qui le dépassait et a été blessé dans cet accident, une hémorragie interne ayant été diagnostiquée le soir même.
M. [N] a déclaré cet accident à son assureur multirisque habitation, la Matmut, qui lui a opposé une exclusion de garantie et a refusé d'indemniser ce sinistre.
Statuant sur l'assignation délivrée le 21 septembre 2012 par M. [J] à la Matmut, à M. [N] et à la CPAM des Bouches-du-Rhône, le tribunal d'instance de Marseille a :
- déclaré M. [N] responsable des dommages subis par M. [J],
- constaté qu'en vertu de la clause d'exclusion de garantie contenue dans l'article 38 des conditions générales du contrat d'assurance liant M. [N] à la Matmut, celle-ci n'était pas tenue de garantir les dommages causés par la faute de son assuré,
- débouté M. [J] de toutes ses demandes dirigées contre la Matmut,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le tribunal a retenu que
- M. [N] était responsable de la collision, en faisant application de l'article L. 5131-1 du code des transports relatifs à l'abordage des navires,
- que M. [J] avait été informé de la clause d'exclusion du contrat et que celle-ci était formelle et limitée,
- que la demande d'expertise ne pouvait être accueillie, dès lors que M. [J] ne sollicitait que la condamnation de la Matmut et non de M. [N].
Par déclaration du 11 février 2014, dont la recevabilité et la régularité ne sont pas contestées, M. [J] a formé un appel général contre cette décision et a conclu le 29 avril 2014. M. [N] a formé un appel incident le 27 mai 2014.
Prétentions et moyens des parties
M. [J] par conclusions du 24 septembre 2014 demande de
- juger que la clause d'exclusion ne répond pas aux exigences légales et jurisprudentielles,
- juger que la Matmut doit relever et garantir M. [N] et indemniser l'intégralité du préjudice,
- désigner un médecin expert,
- condamner la Matmut à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de provision,
- condamner la Matmut à lui payer 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions du 9 février 2015, la Matmut a conclu à la confirmation pure et simple du jugement et à la condamnation de M. [J] à lui verser la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 5 juin 2014, M. [N] a conclu à la réformation du jugement, et demande à la cour de
- juger que la clause ne répond pas aux exigences légale et jurisprudentielles et doit être écartée,
- constater qu'elle lui inopposable,
- juger que la Matmut doit le garantir,
- condamner la Matmut à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il soutient
- qu'il n'a jamais été en possession des conditions générales avant la signature du contrat et que la mention de l'existence d'une fiche d'information et des conditions générales est mentionnée en tous petits caractères en bas des conditions particulières, ce qui est insuffisant pour considérer qu'il a pu en avoir connaissance,
- que l'exclusion est contenue à l'article 38 des conditions générales et ne figure pas dans des caractères particulièrement apparents,
- qu'il existe une difficulté d'interprétation de la clause.
Motifs de la décision
Le jugement n'est pas critiqué en ce qui concerne la responsabilité de M. [N] dans l'accident, qui n'est pas contestée. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.
Il n'est pas davantage contesté que M. [N] est lié à son assureur, la Matmut, par un contrat multirisque habitation, prenant effet le 1er septembre 2008, comprenant une garantie responsabilité civile privée et familiale.
Pour dénier sa garantie, la Matmut se prévaut d'une clause d'exclusion figurant aux conditions générales applicables.
Elle doit donc prouver l'existence de cette clause, que celle-ci a été portée à la connaissance de l'assuré au moment de son adhésion à la police, ou antérieurement à la réalisation du risque et que cette clause remplit les conditions de l'article L. 112-4 in fine du code des assurances, qui exige qu'elle soit mentionnée en caractères très apparents et de l'article L.113-1 du même code, qui exige qu'elle soit formelle et limitée.
L'exclusion est formelle si elle est rédigée de façon claire, précise et non équivoque, de sorte que l'assuré peut déterminer sans difficulté les cas dans lesquels le risque ne sera pas couvert.
Les conditions contractuelles particulières, signées par M. [N], indiquent, avant les signatures : 'vous reconnaissez avoir reçu, conformément à l'article L.112-2 du code des assurances, la fiche d'information sur le prix et les garanties, les présentes conditions particulières, ainsi qu'un exemplaire des Conditions Générales datées de mai 2008, valant projet de contrat, dont vous déclarez avoir pris connaissance et accepter les termes'.
Quand bien même ces mentions figureraient en caractères plus petits que ceux utilisés dans le reste du document, M. [N] ne peut pas contester en avoir eu connaissance dès lors qu'elles sont parfaitement lisibles, très apparentes en raison de ce que leurs caractères sont différents de ceux du reste du texte et figurent juste au dessus de l'endroit où il a apposé la mention 'lu et approuvé' et sa signature. Il est donc lié par les conditions générales de mai 2008, qu'il a reconnu avoir reçues.
Ces conditions générales comportent en page 56 une rubrique 'exclusion', comprenant un article 38, qui n'est produit qu'en photocopie noir et blanc, indiquant :
'Outre les exclusions spécifiques à chacun des risques couverts, nous n'assurons pas les dommages :
Pour toutes les garanties :
- (...),
- engageant la responsabilité de l'assuré du fait de la conduite, de la garde ou de la propriété :
. (...)
. d'appareil de locomotion aérienne, d'embarcation à moteur ou à voile (sauf planche à voile ou kitesurf).'
L'article est rédigé dans la même police que les autres stipulations contractuelles, mais l'ensemble de l'article, y inclus son numéro, figure en caractères gras, alors que, s'agissant des autres clauses, seul leur titre est en caractère gras. Par ailleurs, le titre de la rubrique 'exclusions' est surligné, de sorte qu'il se détache clairement du texte et est incluse dans un ensemble de pages parquées par un bandeau latéral intitulé 'limitation de garanties'.
Ainsi, il peut être considéré que l'attention du lecteur est particulièrement attirée sur les clauses d'exclusion et que la clause d'exclusion en cause est rédigée en caractères très apparents, comme l'exige la loi.
Par ailleurs, la clause dont le caractère limité n'est pas contesté, est également formelle, dès lors qu'elle vise des cas d'exclusion précis et limitativement énumérés et que la notion d'embarcation à moteur ne prête pas à confusion : le terme d'embarcation, plus large que celui de barque, de navire ou de bateau, désignant tout objet sur lequel on peut monter et qui flotte sur l'eau, ce qui correspond incontestablement à la définition d'un jet ski. En effet, le
dictionnaire donne pour définition de cet engin : petite embarcation propulsée par le jet d'eau d'un moteur.
Dans ces conditions, il doit être retenu que la clause d'exclusion peut être opposée par la Matmut à M. [N] et à M. [J].
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [J], qui n'agit que contre l'assureur, de l'ensemble de ses demandes, y inclus sa demande d'expertise.
Sur les demandes annexes :
M. [J], qui succombe en son appel, sera condamné aux dépens de l'instance d'appel. L'équité commande de ne pas le condamner à supporter tout ou partie des frais irrépétibles engagés par la Matmut. La demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile par M. [N], qui succombe en son appel incident, sera également rejetée.
PAR CES MOTIFS
La cour,
- Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
- Rejette les demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile par toutes les parties,
- Condamne M. [J] aux dépens de l'instance d'appel et dit qu'ils pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Le greffierLe président,