COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
9e Chambre C
ARRÊT AU FOND
DU 05 JUIN 2015
N°2015/ 314
Rôle N° 13/14806
[X] [T]
C/
SAS GIFI MAG
Grosse délivrée le :
à :
- Me Patrice PASCAL, avocat au barreau de TARASCON
- Me Anne-France LEON-OULIE, avocat au barreau de BORDEAUX
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ARLES - section C - en date du 20 Juin 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 12/287.
APPELANTE
Madame [X] [T], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Patrice PASCAL, avocat au barreau de TARASCON substitué par Me Alexandre JAMMET, avocat au barreau de TARASCON
INTIMEE
SAS GIFI MAG, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Anne-France LEON-OULIE, avocat au barreau de BORDEAUX
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 09 Avril 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine VINDREAU, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur Louis-Marie DABOSVILLE, Président de Chambre
Madame Catherine VINDREAU, Conseiller
Madame Laurence VALETTE, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2015
ARRÊT
CONTRADICTOIRE
Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2015
Signé par Monsieur Louis-Marie DABOSVILLE, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
[X] [T] a été engagée, par la société GIFI MAG,au sein de son magasin d'[Localité 1] en qualité de vendeuse/employée de caisse - niveau II - statut employé dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée prenant effet le 1er octobre 2011 et se terminant le 31 octobre 2011.
Son salaire mensuel brut était de 1.387 € pour 151,67 heures de travail par mois.
La convention collective applicable était celle des commerces de détail non alimentaires.
Madame [T] a été victime d'un accident du travail le 29 octobre 2011.
Au terme du contrat à durée déterminée , elle s'est vu remettre les documents de fin de contrat de travail.
Ultérieurement, madame [T] a écrit à la société pour lui indiquer qu'elle pouvait reprendre son poste de travail.
Madame [T] va alors faire valoir qu'elle était liée à la société GIFI MAG par un contrat à durée indéterminée.
Elle rappelle que la société DISTRI TALANGES ( laquelle a fait l'objet le 1er septembre 2010 d'une transmission universelle de son patrimoine au profit de la société GIFI MAG) avait confié la gestion du magasin d'[Localité 1] à la société RAPHAEL dans le cadre d'une prestation de service.
Elle indique qu'elle a été salarié de la société RAPHAEL à compter du 4 octobre 2008 avant d'en devenir co-gérante le 1er novembre 2010.
Il est constant que la société GIFI MAG a repris la gestion du magasin à compter du 1er octobre 2011 et que conformément aux dispositions de l'article L.1224-1 du code du travail , tous les contrats en cours à la date du 30 septembre 2011 lui ont été transférés.
Madame [T] considère ainsi que si, au jour de la rupture du contrat de mandat, son contrat de travail se trouvait suspendu du fait de ses fonctions de co-gérante, il demeurait attaché à l'activité commerciale et devait se poursuivre avec la société GIFI MAG de plein droit.
C'est dans ses conditions qu'elle a saisi le 2 août 2012 le conseil de prud'hommes d'ARLES pour demander à titre principal de prononcer la nullité de contrat à durée déterminée du 1er octobre 2011, subsidiairement de le requalifier en un contrat à durée indéterminée , et de condamner la société GIFI MAG au titre d'un licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse.
Par jugement en date du 20 juin 2013, le conseil de prud'hommes a :
- dit que le contrat à durée déterminée du 1er octobre 2011 était conforme aux dispositions légales,
- dit que la société GIFI MAG avait eu recours à juste titre à un contrat à durée déterminée pour surcroît d'activité,
- débouté madame [T] de l'ensemble de ses demandes,
- débouté la société GIFI MAG de sa demande reconventionnelle,
- condamné la partie succombante aux dépens.
*
Madame [T] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués , elle demande de :
- à titre principal, de dire le contrat à durée déterminée nul et de nul effet,
- subsidiairement, le requalifier en contrat à durée indéterminée ,
- condamner la société GIFI MAG à lui payer:
- indemnité de requalification :1.387 €
- indemnité pour non respect de la procédure de licenciement :1. 000 €
- dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 15.000 €
- indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile :2.500 €
- ordonner l'exécution provisoire,
- condamner la société GIFI MAG aux dépens.
En réplique, au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués , la société GIFI MAG demande de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,
- constater que Madame [T] était bien la dirigeante en sa qualité de co-gérante de la société RAPHAEL à la date de la conclusion du contrat de travail à durée déterminée le 1er octobre 2011,
- constater que la société GIFI MAG a eu recours à juste titre à un contrat de travail à durée déterminée pour surcroît d'activité,
- constater que le contrat à durée déterminée de Madame [T] a pris automatiquement fin, à l'arrivée de son terme, le 31 octobre 2011,
- constater que Madame [T] a bien occupé des fonctions de vendeuse/employée de caisse pendant la durée du contrat de travail à durée déterminée
- en conséquence, dire et juger que le contrat de travail à durée déterminée du 1er octobre 2011 est conforme aux dispositions légales,
- débouter Madame [T] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- reconventionnellement, condamner Madame [T] à verser à la société GIFI MAG une somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la nullité du contrat à durée déterminée du 1er octobre 2011
Madame [T] soutient qu'en concluant avec elle un contrat à durée déterminée le 1er octobre 2011, la rupture du contrat de travail de mandat ayant pris effet le 30 septembre 2011, l'intimée a violé les dispositions d'ordre public de la loi et rompu illégitimement le contrat à durée indéterminée dont elle bénéficiait en refusant de poursuivre la relation à durée indéterminée dont elle bénéficiait depuis le 4 octobre 2008.
Force est de constater qu'au delà de ses affirmations, madame [T] ne verse aux débats aucun élément de nature à démontrer :
- qu'elle avait été salariée par la société RAPHAEL au delà du mois de novembre 2008, aucun contrat de travail n'étant versé aux débats et le seul bulletin de paie produit concernant ce mois,
- qu'elle bénéficiait d'un contrat à durée indéterminée avant de devenir gérante de cette société à compter du 1er novembre 2010, écrivant singulièrement alors qu'elle se prévaut d'un contrat à durée indéterminée que ' ... la concluante avait été embauchée le 4 octobre 2008 par la société RAPHAEL mandataire de la société DISTRI TALANGE dans le cadre du contrat de travail de gérance mandat ... ce contrat de travail a rapidement débouché sur un contrat à durée indéterminée en qualité d'employée libre service', ce qui tend bien à démontrer que le contrat de travail du 4 octobre 2008 n'était pas un contrat à durée indéterminée ,
- qu'elle aurait informé la société GIFI MAG de l'existence d'un contrat à durée indéterminée lors de la conclusion du contrat à durée déterminée du 1er octobre 2011.
Il convient de relever, en tout état de cause, qu'à la date de la fin du contrat de gérance mandat, soit le 30 septembre 2011, madame [T] n'était pas salariée de la société RAPHAEL mais co-gérante, ce qu'elle était toujours à la date de la conclusion du contrat à durée déterminée le 1er octobre 2011, comme en atteste l'extrait K-bis du 19 janvier 2012.
Ce n'est donc qu'en vertu d'un nouveau contrat de travail conclu avec la société GIFI MAG à savoir le contrat à durée déterminée du 1er octobre 2011 que l'appelante est entrée au service du repreneur.
C'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont dit que c'était de façon légitime que la société GIFI MAG , tiers au mandat social, avait pu conclure avec l'intéressée, un contrat à durée déterminée à compter du 1er octobre 2011 et l'ont déboutée de sa demande de nullité.
Sur la requalification du contrat à durée déterminée
Madame [T] fonde à titre subsidiaire sa demande de la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée , d'une part, sur la violation des dispositions de l'article L.1242-2 du code du travail, d'autre part, sur les véritables fonctions qu'elle exerçait.
L'article L.1242-2 du code du travail dispose que le contrat à durée déterminée ne peut être conclu que pour une tâche précise et temporaire et seulement dans des cas énumérés dont l'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise.
Madame [T] soutient qu'il y a une discordance évidente entre la période très limitée de la relation contractuelle , un mois, et le motif de recours et fait valoir que les autres salariées embauchées dans le même cadre ont vu leur contrat prolongé par avenant jusqu'au 31 décembre.
Pour autant, elle ne conteste pas véritablement la réalité du motif de recours ('accroissement temporaire d'activité en raison de la réception de nombreuses marchandises et de leur mise en place: Halloween, Toussaint, Jouets de Noël, Déco de Noël et affluence de la clientèle aux fêtes de fin d'année').
L'employeur justifie par la production de son registre du personnel, des importantes entrées et sorties de personnel sur cette période, ne pouvant être nié qu'à partir du mois d'octobre, le magasin reçoit de nombreuses marchandises qui doivent en suite être mises en rayon, le motif invoqué ne visant pas uniquement, comme tend à le soutenir la salariée , que les fêtes de fin d'année.
Aucune disposition légale ne vient imposer à un employeur d'embaucher un salarié sur la totalité de la période de recours.
La société GIFI MAG s'inscrit en outre en faux contre l'allégation de l'appelante selon laquelle il aurait été mis fin à la relation contractuelle en raison de l'accident du travail dont elle avait été victime.
Elle souligne que son contrat a pris fin, non en raison de son état de santé, mais qu'il était arrivé à son terme.
Elle justifie qu'une autre salariée, également embauchée en contrat à durée déterminée ( madame [J]) n'a pas non plus été renouvelée à l'issue de son contrat de travail ( au 13 novembre) alors qu'elle ne connaissait pas de problèmes de santé.
L'appelante fait en outre valoir qu'elle a occupé dès le début d'exécution de son contrat à durée déterminée les fonctions d'adjointe au responsable, tâches qui n'étaient pas celles d'une simple employée dans le cadre d'un contrat à durée déterminée pour accroissement d'activité depuis quelques jours seulement.
A l'appui de ses dires, elle produit des attestations de salariés (mesdames [U], [G]...) lesquelles indiquent qu'elle leur avait été présentée en tant qu'adjointe, (sans préciser par qui), qu'elle effectuait l'ouverture et la fermeture du magasin, qu'elle s'occupait de la trésorerie et disposait des clés du magasin) ainsi qu'un échange de mails entre deux salariés, mentionnant la validation d'une promotion en tant que responsable.
Comme relevé par le conseil de prud'hommes , le registre unique du personnel au 30 septembre 2012 ne mentionne que des vendeurs , caissiers et le poste d'adjointe n'a été officialisé et attribué à madame [D] qu'au 1er février 2012.
La société GIFI MAG nie avoir proposé ou promis un quelconque contrat à durée indéterminée à la salariée et indique n'avoir pas eu connaissance de l'échange de mails entre messieurs [W] et [Q] lesquels ne disposaient d'aucune autorité sur une quelconque embauche qui ne relevait que du seul pouvoir de direction de l'employeur.
La société ajoute que même dans l'hypothèse où madame [T] aurait occupé les fonctions dont elle se prévaut, celles-ci n'auraient pas privé de légitimité le motif de recours figurant sur le contrat de travail, le surcroît de travail existant quel que soit le poste occupé.
Bien plus, madame [T] ne rapporte pas la preuve qu'elle occupait de façon permanente les fonctions dont elle se prévaut.
La déclaration d'accident du travail du 3 novembre 2011 signé par monsieur [W], responsable du magasin indique ' après être montée sur le haut d'une échelle, mdame [T] a déplacé des cartons de meubles et a reçu le reste de la pile de cartons sur la tête', ce qui démontre bien qu'elle effectuait des tâches de rangement dévolues à une employée vendeuse.
S'ensuit que c'est à juste titre que les premiers juges ont débouté madame [T] de ses demandes de ce chef.
Sur la rupture
En l'état d'un contrat à durée déterminée, la relation contractuelle a normalement pris fin au terme du contrat de travail sans que madame [T] ne puisse réclamer d'indemnités au titre d'un licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement sera confirmé.
Sur les autres demandes des parties
L'équité en la cause commande de confirmer le jugement sur l'article 700 du code de procédure civile et de condamner madame [T] , sur ce même fondement , à payer à la société GIFI MAG la somme de 500 € en cause d'appel.
Madame [T], qui succombe, supportera les dépens d'appel .
Il n'y a pas lieu à exécution provisoire en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant par décision prononcée par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale,
Reçoit l'appel régulier en la forme,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré rendu le 20 juin 2013 par le conseil de prud'hommes d'ARLES,
Y ajoutant,
Condamne madame [T] à payer à la société GIFI MAG la somme de 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Condamne madame [T] aux dépens d'appel.
Rejette toute autre demande.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT