COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
9e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 19 JUIN 2015
N°2015/465
Rôle N° 13/14192
[S] [D]
C/
REGIE DES TRANSPORTS DE MARSEILLE
Grosse délivrée le :
à :
Me Christelle SANTIAGO, avocat au barreau de MARSEILLE
Me Béatrice DUPUY, avocat au barreau de MARSEILLE
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE - section C - en date du 03 Mai 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 11/1368.
APPELANT
Monsieur [S] [D], demeurant [Adresse 2]
comparant en personne, assisté de Me Christelle SANTIAGO, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
REGIE DES TRANSPORTS DE MARSEILLE, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Béatrice DUPUY, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 23 Avril 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur [S] JACOB, Président de Chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur [S] JACOB, Président de Chambre
Madame Pascale MARTIN, Conseiller
Madame Annick CORONA, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Juin 2015
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Juin 2015
Signé par Monsieur Bernard JACOB, Président de Chambre et Mme Nadège LAVIGNASSE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
[S] [D] a été embauché par la RÉGIE DES TRANSPORTS MARSEILLAIS à compter du 16 juin 1986 comme conducteur-receveur, coefficient 200 dans le cadre de plusieurs contrats à durée déterminée successifs, puis, à partir du 1er janvier 1989, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée.
Il a fait l'objet de plusieurs décisions d'inaptitude temporaire pour maladie entre octobre 1990 et avril 1993.
Il a été déclaré définitivement inapte à la conduite le 7 avril 1993 et a été affecté à un poste de guichetier, coefficient 185, sans perte de salaire, dans lequel il a titularisé à compter du 7 avril 1994.
Le 1er février 2000, [S] [D] est devenu employé administratif au coefficient 210, affecté au département 'finance et budget' le 1er mars 2001, puis au département 'billettique' et caisse le 1er janvier 2007.
Il a été victime d'un accident de trajet le 7 mars 2006 pour lequel il a été en arrêt de travail jusqu'au 11 septembre 2006, prolongé d'un arrêt pour maladie jusqu'au 8 janvier 2007.
Le 9 janvier 2007, il a repris le travail en mi-temps thérapeutique (75h36) comme employé administratif échelon 2 coefficient 210.
À compter du 1er octobre 2007, il a été placé en invalidité catégorie 1.
Le 17 décembre 2007, le médecin du travail l'a déclaré apte à un poste à mi-temps, et, en conséquence, un avenant de son contrat de travail a été signé, pour une activité réduite de 50 % soit 75,36 h.
Le 1er mai 2010, [S] [D] a été placé en invalidité catégorie 2 par l'assurance maladie et déclaré apte à son poste par le médecin du travail pour un temps de travail de 30 %, soit de 45h22 sans possibilité d'heures complémentaires.
Il travaillait les mardis, mercredis et jeudis matin de 9h à 11h45 au sein de la DFAC au département 'billettique-caisse'.
En octobre 2011, il a été affecté au sein de l'administration des ventes sur un poste de saisie des comptages des recettes distributeurs en espèces.
A la suite d'une scène qui s'est déroulée le 20 mars 2012,[S] [D] a été convoqué par courrier du 20 avril 2012, renouvelé le 27 avril 2012, devant le conseil de discipline ainsi qu'à un entretien préalable au licenciement.
L'entretien préalable s'est tenu le 10 mai 2012 et le conseil de discipline le 11 mai 2012.
[S] [D] a été licencié par courrier du 31 mai 2012 en raison d'une faute grave.
Le 31 mars 2011, il a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille pour obtenir son reclassement dans les fonctions exercées avant l'accident du travail de 2007, sa nomination au coefficient 250 outre rappels de salaire, ainsi que le paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi par une mise 'au placard' et du préjudice financier lié à l'absence d'évolution de carrière. Il a par la suite contesté la procédure de licenciement.
Par jugement du 3 mai 2013, le conseil de prud'hommes a :
- dit que le licenciement de [S] [D] était fondé sur une cause réelle et sérieuse,
- condamné la RÉGIE DES TRANSPORTS MARSEILLAIS à lui payer les sommes suivantes :
- 4.512,93 € au titre d'indemnité légale de licenciement,
- 1.385,88 € à titre d'indemnité de préavis outre 135,88 € de congés payés afférents,
- 15.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
- 1.500 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- dans la motivation seulement, dit que le salaire moyen des trois derniers mois était de 679 €,
- débouté [S] [D] du surplus de ses demandes,
- débouté la RÉGIE DES TRANSPORTS MARSEILLAIS de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La décision a été notifiée aux parties par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 5 juin 2013.
[S] [D] a relevé appel par déclaration du 2 juillet 2013.
Aux termes de ses écritures développées oralement à l'audience, il conclut à l'infirmation du jugement.
Il demande à la cour de :
- fixer son salaire moyen sur les douze derniers mois à 776,69 €,
- dire que le licenciement du 31 mai 2012 est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- condamner la RÉGIE DES TRANSPORTS MARSEILLAIS à lui payer :
- 20.000 € au titre du harcèlement moral,
- 15.000 € au titre de l'absence de formation,
- 25.000 € au titre du licenciement abusif,
- 6.778,46 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
- 1.553,80 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 155,38 € de congés payés afférents,
- 4.500 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
[S] [D] explique avoir été victime de faits de harcèlement moral de son employeur qui ont altéré sa santé et compromis son avenir professionnel.
Il explique que :
- il avait été conduit à se plaindre à plusieurs reprises de ses conditions de travail dès 2004,
- durant l'arrêt de travail suite à l'accident de trajet survenu en 2007, il a fait l'objet de douze contrôles de son arrêt par l'employeur,
- lors de son retour il a été 'mis au placard' au prétexte de la suppression de son poste,
- depuis 2007 il a été affecté à des postes sans lien avec les missions qu'il exerçait auparavant, restant 18 mois seul dans un local servant d'ancienne chambre-forte, sans fenêtre et très basse de plafond sans être, malgré ses demandes, réintégré dans son poste,
- embauché en 1986, il a fait l'objet d'une promotion le 1er février 2000 sans bénéficier d'évolution de coefficient depuis 2004 et a été cantonné dans des tâches subalternes durant 12 ans,
- depuis sa reprise le 9 janvier 2007, il n'a pas bénéficié de la formation professionnelle qui lui aurait permis d'évoluer et de postuler utilement sur des postes compatibles avec ses compétences,
- le licenciement prononcé pour faute grave est abusif, car il n'a commis aucune faute et la réaction qui lui a été reprochée a été provoquée par le comportement particulièrement vexatoire de son supérieur hiérarchique venu l'invectiver devant ses collègues de travail,
- la procédure de licenciement a été engagée un mois plus tard
Il réclame une indemnité de licenciement calculée conformément à la convention collective, qui, compte tenu de son ancienneté de 24 ans, de sa présence à temps complet dans l'entreprise pendant plus de 15 ans, doit s'élever à la somme de 6.778,46 €.
La RÉGIE DES TRANSPORTS MARSEILLAIS qui forme un appel incident, demande à la cour d'infirmer le jugement, de dire qu'elle a respecté ses obligations en affectant [S] [D] en janvier 2007 à un poste équivalent à celui qu'il occupait antérieurement, qu'aucune faute ni aucun fait de harcèlement moral ne peut lui être reproché dans l'exécution du contrat de travail, que le licenciement du salarié est fondé sur une faute grave et qu'en conséquence il doit être débouté de ses demandes.
La RÉGIE fait valoir que :
- pour la première fois devant la cour [S] [D] affirme avoir été harcelé moralement en 2004 alors que :
- le premier arrêt de travail mentionnant un syndrome réactionnel ou dépressif est de 2009,
- les faits isolés de 2004 ne peuvent constituer des faits précis caractérisant le harcèlement moral,
- les contrôles médicaux entre le 7 mars 2006 et le 9 janvier 2007, intervenus pendant des périodes de suspension du contrat de travail sont justifiés par le fait que la Régie est sa propre caisse de sécurité sociale et verse elle-même les salaires à ses agents et peut ainsi faire des contrôles médicaux qui ont permis, à deux reprises, de constater que [S] [D] était en absence injustifiée de son domicile, sans pour autant que des sanctions soient prises,
- loin d'être mis à l'écart lors de sa reprise du travail en janvier 2007, [S] [D] a été reclassé sans perte de salaire et son poste de travail a été aménagé,
- contrairement aux affirmations erronées des attestations produites par [S] [D], les tâches qui lui étaient confiées avant l'arrêt de travail de 2006 n'existaient plus à son retour en 2007,
- il a été reclassé sur un poste similaire avec une rémunération au moins équivalente, dans plusieurs lieux successifs avec son accord et il effectuait un travail réel correspondant à sa qualification 'd'employé d'administration échelon 2, coefficient 210",
- [S] [D] a connu une évolution de carrière jusqu'en février 2000 mais à partir de 2001 n'a jamais répondu à un appel de candidature,
- ses prétentions professionnelles de l'époque tendant à obtenir un poste d'agent de maîtrise n'étaient pas en adéquation avec les compétences qui étaient les siennes,
- une formation lui a été donnée pour passer d'un poste de conduite à un poste administratif et elle n'a pas l'obligation d'assurer à [S] [D] une formation initiale lui permettant d'accéder à des fonctions de caissier comptable,
- [S] [D] n'a jamais sollicité de DIF ou de CIF, et n'a jamais été refusé sur un poste en raison d'une absence de connaissance ou de formation de base,
- tous les membres du conseil de discipline ont été favorables au principe d'une sanction à la suite des faits du 20 mars 2010,
- le délai de 2 mois suivant les faits pour prononcer le licenciement a été respecté,
- les faits sont établis et ont été filmés par une caméra de vidéo surveillance ; ils constituent une faute grave justifiant le licenciement, la fragilité de l'état de santé de [S] [D] depuis 2009 ne pouvant justifier le comportement inadmissible à l'encontre de sa hiérarchie.
La RÉGIE DES TRANSPORTS MARSEILLAIS demande 1.000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l'audience.
DISCUSSION
- sur le harcèlement moral :
Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Selon l'article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral et pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.
L'article L.1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
En l'espèce, [S] [D] invoque les faits suivants :
- des conditions de travail dégradées en février 2004,
- des contrôles excessifs de présence à domicile à l'occasion de l'arrêt de travail pour accident de trajet du 7 mars 2006 au 9 janvier 2007,
- une mise à l'écart lors de la reprise du travail en janvier 2007, en lui attribuant des tâches dévalorisantes ou en l'affectant à des 'pseudos postes'alors qu'il existait des postes correspondant à ses compétences,
- une absence d'évolution professionnelle,
- une dégradation de son état de santé.
Pour étayer ses affirmations, [S] [D] produit notamment :
- s'agissant de ses conditions de travail en 2004 :
- l'e-mail adressé le 28 janvier 2004 par M [R] et [S] [D] à leur supérieure pour l'informer de difficultés à se déplacer dans leur bureau et solliciter l'attribution d'un bureau plus grand,
- la réponse de [A] [H] du même jour,
- la saisine du CHSCT le 10 février 2004 et la réponse de cet organe du 10 avril 2004 qui constate l'encombrement du bureau par des documents et du mobilier ainsi que la présence de fils au sol, facteur de risque de chute,
- s'agissant des contrôles effectués durant l'arrêt de travail 2006/2007 :
- un document manuscrit portant douze dates entre 6/4 et 4/1 en regard desquelles figurent des heures (sauf pour 6/4 et 28/8),
- s'agissant des faits relatifs à sa mise à l'écart :
- des attestations de Messieurs [G], [F] et [M], collègues de travail, qui ont constaté que, le 6 janvier 2007, lors de sa reprise de travail, [S] [D] ne pouvait plus accéder à son ordinateur, les codes d'accès ayant été modifiés, que le poste était occupé par un autre salarié et que [S] [D] avait ensuite été déplacé de poste en poste, devant faire des photocopies, du classement puis de la saisie dans un local aveugle, alors qu'auparavant il faisait des rapprochements bancaires,
- une attestation d'[P] [W] qui déclare avoir entendu le directeur financier de la RTM qualifier ce local de cave,
- un courrier du 6 mai 2009 adressé [J] [X], agent comptable de la RTM, demandant un changement de poste,
- des interventions du syndicat CFTC ([K] [G]) en sa faveur,
- des appels à candidature interne pour un poste de caissier comptable en février 201 et juillet 2011,
- s'agissant de l'absence d'évolution professionnelle :
- sa fiche de carrière
- s'agissant de la dégradation de son état de santé :
- des avis d'arrêt de travail et des certificats médicaux.
[S] [D] établit ainsi l'existence matérielle de faits précis et concordants, qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre.
La RÉGIE DES TRANSPORTS MARSEILLAIS fait valoir que les éléments invoqués ne sont pas constitutifs de harcèlement moral soit en raison de leur ancienneté, soit parce qu'il ne sont pas avérés.
Elle produit :
- s'agissant des conditions de travail :
- la procédure établie en 2004 et le blâme infligé à [S] [D] le 29 mars 2004 pour la réaction agressive du salarié à l'égard de sa supérieure hiérarchique,
- s'agissant des contrôles durant l'arrêt maladie pour accident du trajet :
- la RÉGIE ne conteste pas les douze contrôles, dont deux ont conclu à l'absence du salarié à son domicile,
- s'agissant du reclassement de [S] [D] :
- les attestions de Mme [E], de MM [X] et [L] qui expliquent que la mission de [S] [D] consistant à vérifier des encaissements par rapprochement manuel avait été supprimée par un logiciel mis à disposition par la BNP au cours de son arrêt de travail, que [S] [D] donnait satisfaction dans les différents postes où il a été affecté, qui étaient de véritables postes, dont il a pu changer sur sa demande,
- l'organigramme de la DFAC en 2009 qui mentionne [S] [D] comme 'opérateur de saisie' dans le département billettique,
- l'attestation de M [T] qui indique que [S] [D] ne se plaignait pas de ses conditions de travail lorsqu'il était affecté à la caisse principale Saint-Charles, en février 2007.
- l'attestation de [Z] [E] qui précise que le bureau sécurisé dans lequel se trouvait [S] [D] était nécessaire à sa fonction, et était occupé par d'autres salariés en son absence, notamment toute l'équipe manipulant du numéraire.
- s'agissant de l'évolution de carrière :
- le poste occupé par M [O] auquel celui-ci avait postulé contrairement à [S] [D],
- les bilans de compétences extérieurs qui expliquent le refus d'affectation comme caissier comptable ou comme assistant de gestion (ne va pas suffisamment au fond pour réaliser un travail de qualité, potentiel évolutif peu satisfaisant, au delà des tâches de pure exécution, a du mal à s'adapter),
- description des postes revendiqués par [S] [D] (coefficient 250) auxquels il ne peut prétendre, s'agissant de postes d'agents de maîtrise pour lesquels il n'a pas la qualification.
Il doit être relevé que les premiers faits dénoncés par le salarié, qui datent de 2004, sont anciens et ont été évoqués pour la première fois lors de la procédure devant la cour. Si la réponse apportée à l'époque par la supérieure de [S] [D] était maladroite sur la forme, elle avait, sur le fond, justifié de manière objective l'impossibilité d'affecter les salariés (Messieurs [D] et [R])dans un autre bureau plus grand, qui était utilisé par des magistrats en charge d'un contrôle de fonctionnement de la RTM. [S] [D] avait été sanctionné d'un blâme pour la forme de la réponse qu'il avait alors adressée à sa supérieure.
S'agissant des contrôles destinés à vérifier la présence de l'agent à son domicile lors de l'arrêt de travail pour accident de trajet du 7 mars 2006 au 9 janvier 2007, ils sont, comme le précise l'employeur qui est son propre organisme de sécurité sociale, destinés à s'assurer du respect des périodes de présence à domicile des agents malades, et, sont donc nécessaires. S'agissant de [S] [D], ils ont révélé à deux reprises l'absence du salarié qui n'a pas répondu à l'agent de contrôle. La fréquence de ces contrôles, de l'ordre de un par mois, outre les deux pour lesquels [S] [D] n'a pas répondu, n'est pas excessive.
La RÉGIE DES TRANSPORTS MARSEILLAIS justifie de manière objective les conditions du reclassement de [S] [D] lors de sa reprise en janvier 2007 après un arrêt de dix mois, alors que sa fonction antérieure qui consistait à réaliser des rapprochements manuels avait été supprimée au profit d'un logiciel, et qui, contrairement aux affirmations de [S] [D], n'avait pas été confiée à un autre salarié.
La RTM justifie aussi la réalité des fonctions occupées par [S] [D] dans la Régie, qui correspondaient à ses compétences et à l''emploi d'employé administratif d'échelon 2", qui le destinait à des tâches d'exécution, alors qu'il bénéficiait par ailleurs d'une garantie de rémunération liée à son reclassement.
Si [S] [D] a été affecté dans plusieurs lieux différents, il n'a jamais formalisé de désaccord.
De même, la RTM justifie que le local en sous sol était un local sécurisé dans lesquels d'autres salariés que [S] [D] travaillaient et qui était exigé par les fonctions exercées en rapport avec la manipulation d'espèces.
Enfin, si [S] [D] n'a pas pu évoluer dans sa carrière depuis 2004, il doit être relevé qu'il n'a postulé pour aucun poste depuis 2001 et que la description de ses qualités professionnelles par des organismes extérieurs ne le conduisaient manifestement pas à l'exercice de fonctions relevant de la maîtrise.
L'employeur démontre ainsi que les faits matériellement établis par [S] [D] sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Les demandes relatives au harcèlement doivent par conséquent être rejetées.
- sur la demande de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de formation :
[S] [D] reproche à son employeur de ne pas lui avoir assuré une formation professionnelle et ainsi de ne pas lui avoir permis d'évoluer en 25 ans de carrière.
Il ressort cependant des pièces produites que [S] [D] a bénéficié d'une formation pour permettre sa reconversion en employeur administratif.
Il ne démontre pas que c'est en raison d'une absence de formation qu'il n'a pu obtenir par la suite des postes plus attractifs puisqu'il n'a plus sollicité de changement depuis 2001.
Il n'a pas non plus demandé à bénéficier de DIF ou de CIF.
[S] [D], qui ne démontre pas en quoi son employeur aurait eu un comportement fautif, sera débouté de sa demande de dommages et intérêts de ce chef.
- sur le licenciement :
L'article L 1232-1 du code du travail dispose que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ; qu'en l'absence d'énonciation des motifs, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ; que l'énoncé d'un motif imprécis équivaut à une absence de motif.
L'article L 1235-1 du code du travail dispose qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que si un doute subsiste, il profite au salarié.
La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, adressée le 31 mai 2012 reproche en substance à [S] [D], alors qu'il avait été absent de son poste de travail le 20 mars 2012 depuis plus d'une heure et qu'il venait d'être rappelé à l'ordre par son supérieur, M [Q], dans le bureau duquel il se trouvait :
- d'avoir jeté violemment des documents sur le bureau et proféré des menaces et injures à son encontre,
- d'avoir pointé le doigt à quelques centimètres du visage de celui-ci et de s'en être approché en continuant de l'injurier et de le menacer,
- de l'avoir ensuite touché à deux reprises alors qu'il était assis, sans qu'il réagisse,
- d'avoir refusé d'écouter les remarques de M [Q],
- d'avoir ensuite repris le travail normalement.
Il ressort des pièces produites que la procédure de licenciement a été entreprise par l'employeur par la saisine du conseil de discipline qui a proposé une sanction ; que le licenciement a été prononcé le 31 mai 2012 alors que l'entretien préalable avait été repoussé en raison d'une difficulté affectant la remise de la lettre recommandée de convocation ; que la décision de licenciement a aussi été repoussée pour tenir compte d'un arrêt maladie du salarié.
Aucun retard ne peut être reproché à l'employeur et le délai de deux mois exigé pour la procédure de licenciement disciplinaire a été respecté.
Sur le fond, il ressort de la transcription de la vidéo surveillance réalisée par un agent habilité que [S] [D], arrivé sur le site de son emploi à 9h30, s'est trouvé, à 11h21, quelques secondes face à son supérieur, qui avait 'une main dans la poche de son pantalon et l'autre avec un geste faisant penser qu'il regardait sa montre' et qui s'est ensuite dirigé vers les escaliers ; que les agents, dont [S] [D] ont ensuite continué de discuter quelques instants, puis, qu'à 11h22, ce dernier a quitté calmement le hall d'accueil en empruntant les escaliers.
La description de cette scène, qui ne peut être qualifiée d'altercation comme le prétendent à tort M [U] et [F], ne caractérise aucun comportement critiquable de M [Q], ni aucune provocation de sa part, le geste de désigner sa montre à un salarié qui aurait dû être au travail depuis 9h ne pouvant être considéré comme menaçant.
De plus, l'état de sidération évoqué par M [F] face à cette scène 'injustifiée et disproportionnée' selon son attestation, est inconciliable avec la description issue de la transcription de la vidéo-surveillance qui évoque la poursuite d'une discussion.
Ce qui s'est ensuite déroulé dans le bureau de M [Q] et qui est le seul reproche fait à [S] [D], n'est pas sérieusement contesté par le salarié qui prétend s'être emporté, et qui a déclaré lors du conseil de discipline assumer les paroles tenues (sauf le mot 'bandidos'), s'être rapproché de son supérieur sans l'avoir poussé, et avoir déposé un dossier non violemment sur le bureau.
Les déclarations de M [Q] selon lesquelles il a été touché, insulté ('je t'encule'...), menacé ('je suis un 'bandidos'', 'ici je fais ce que je veux', 'si t'étais pas ici je t'aurai cassé la tête', 'je suis pas un minot, on ne me parle pas comme cela',' on ne me fait pas un geste avec le doigt'...), touché (les deux mains sur sa poitrine) sont confirmées par [Y] [O] qui a entendu les insultes et vu le geste.
Quelques soient les raisons pour lesquelles [S] [D] était 'à cran', selon ses propos, le comportement qui lui est reproché est avéré et ne peut être toléré.
Ce fait qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, y compris pendant la durée du préavis.
C'est donc à bon droit que la RÉGIE DES TRANSPORTS MARSEILLAIS a licencié [S] [D] pour faute grave.
[S] [D] sera débouté de ses demandes et le jugement du conseil de prud'hommes sera infirmé sur ce point.
- sur le salaire mensuel moyen :
Au vu des bulletins de salaire des douze derniers mois, le salaire mensuel moyen de [S] [D] doit être fixé à 759,09 €.
- sur la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile :
[S] [D] qui succombe sera débouté de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la REGIE DES TRANSPORTS MARSEILLAIS et [S] [D] sera condamné à lui payer une somme de 200 € de ce chef.
- sur les dépens :
[S] [D] qui succombe sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile,
INFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Marseille en toutes ses dispositions,
DIT que le licenciement de [S] [D] a été à juste titre prononcé pour faute grave,
en conséquence,
DÉBOUTE [S] [D] de ses demandes de ce chef,
DÉBOUTE [S] [D] de ses demandes de dommages et intérêts pour harcèlement moral et défaut de formation,
FIXE le salaire mensuel moyen sur douze mois à 759,09 €,
DÉBOUTE [S] [D] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE [S] [D] à payer à la RÉGIE DES TRANSPORTS MARSEILLAIS la somme de 200 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
CONDAMNE [S] [D] aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT