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24/09/2015 | FRANCE | N°15/03552

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre b, 24 septembre 2015, 15/03552


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B



ARRÊT EN MATIERE REGLEMENTAIRE

DU 24 SEPTEMBRE 2015

FG

N° 2015/21D





Rôle N° 15/03552



[Q] [I]



C/



CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE MARSEILLE





MINISTERE PUBLIC AIX EN PROVENCE







































Grosse délivrée le :

à :



Me Nathalie OLMER
r>Décision déférée à la Cour :



Délibération du Conseil de l'ordre des avocats au barreau de Marseille en date du 16 Décembre 2014 désignant deux rapporteurs dans le cadre de poursuites disciplinaires.



APPELANT



Maître [Q] [I]

avocat au barreau de Marseille

né le [Date naissance 1] 1965 à [Locali...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B

ARRÊT EN MATIERE REGLEMENTAIRE

DU 24 SEPTEMBRE 2015

FG

N° 2015/21D

Rôle N° 15/03552

[Q] [I]

C/

CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE MARSEILLE

MINISTERE PUBLIC AIX EN PROVENCE

Grosse délivrée le :

à :

Me Nathalie OLMER

Décision déférée à la Cour :

Délibération du Conseil de l'ordre des avocats au barreau de Marseille en date du 16 Décembre 2014 désignant deux rapporteurs dans le cadre de poursuites disciplinaires.

APPELANT

Maître [Q] [I]

avocat au barreau de Marseille

né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 1]

demeurant [Adresse 1]

([Adresse 3])

comparant en personne

INTIME

LE CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE MARSEILLE

[Adresse 4]

[Adresse 2]

représenté par Me Nathalie OLMER, avocat au barreau de MARSEILLE, membre du conseil de l'ordre.

LE BARREAU DES AVOCATS DE MARSEILLE

[Adresse 2]

pris en la personne de son bâtonnier en exercice.

intervenant volontaire

représenté par Me Nathalie OLMER, avocat au barreau de MARSEILLE, membre du conseil de l'ordre.

En présence de

MONSIEUR LE PROCUREUR GÉNÉRAL PRÈS LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

[Adresse 5]

représenté par Monsieur Thierry VILLARDO Avocat général

MONSIEUR LE BÂTONNIER DE L'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE MARSEILLE

[Adresse 4]

[Adresse 2]

représenté par Me Nathalie OLMER, avocat au barreau de MARSEILLE, membre du conseil de l'ordre.

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue en audience publique, à la demande de Me [I], le 10 Septembre 2015 en audience solennelle tenue dans les conditions prévues par l'article R 312-9 du code de l'organisation judiciaire devant la Cour composée de :

Monsieur François GROSJEAN, Président

Madame Catherine DURAND, Conseiller

Monsieur Olivier BRUE, Conseiller

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

Mme Danielle DEMONT, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE

Ministère Public : Monsieur Thierry VILLARDO, avocat général, présent uniquement lors des débats.

ARRÊT

Contradictoire

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Septembre 2015.

Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

M. François GROSJEAN, Président, est entendu en son rapport,

Me [Q] [I], appelant, est entendu au soutient de son appel,

Me Nathalie OLMER, représentant le Conseil de l'ordre des avocats au barreau de Marseille, le Barreau des avocats de Marseille et M. Le Bâtonnier de l'ordre des avocats , est entendu en ses observations,

M. Thierry VILLARDO, avocat général, est entendu en ses réquisitions,

Me [Q] [I] a eu la parole en dernier.

Sur quoi, les débats sont déclarés clos et l'affaire mise en délibéré, les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe de la cour le 24 septembre 2015.

M.[Q] [I], né le [Date naissance 1] 1965 à Marseille, est avocat au barreau de Marseille.

Le 9 décembre 2014, le bâtonnier des avocats au barreau de Marseille a saisi le conseil régional de discipline des avocats de la cour d'appel d'Aix-en-Provence d'une poursuite disciplinaire à l'égard de M.[Q] [I], eu égard à une plainte de ses anciens clients, les époux [P], à une plainte du président de la Cour de justice de l'Union européenne.

Le conseil de l'ordre des avocats au barreau de Marseille a été saisi en application de l'article 188 du décret du 27 novembre 1991 aux fins de désignation d'un rapporteur pour procéder à l'instruction de l'affaire objet de la poursuite.

Par délibération du 16 décembre 2014 le conseil de l'ordre des avocats au barreau de Marseille a désigné désignant Me [F] [V] et Me [G] [B] comme rapporteurs.

Par lettre recommandée avec avis de réception reçue le 14 janvier 2015 par le bâtonnier,

M.[I] a demandé au bâtonnier de saisir le conseil de l'ordre aux fins de rétractation de cette délibération.

Il n'a pas eu de réponse

Par lettre recommandée avec avis de réception postée le 20 février 2015 M.[Q] [I] a saisi la cour d'appel d'Aix-en-Provence d'un recours contre la délibération du conseil de l'ordre du 16 décembre 2014.

L'audience a été fixée au 10 juin 2015 à 9h.

M.[I] a reçu la convocation pour cette audience le 24 juin 2015 par lettre recommandée avec avis de réception.

Le conseil de l'ordre des avocats au barreau de Marseille a reçu la convocation pour cette audience le 24 juin 2015 par lettre recommandée avec avis de réception.

Le Ministère public a été avisé le 22 juin 2015.

Le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Marseille a été avisé.

M.[I] a joint à sa déclaration de recours, un mémoire écrit, que le conseil de l'ordre, le Ministère public et le bâtonnier reconnaissent leur être contradictoire.

Il a ensuite déposé le 7 septembre 2015 un dernier mémoire, mémoire en réplique, que le conseil de l'ordre, le Ministère public et le bâtonnier reconnaissent leur être contradictoire.

Dans ce dernier mémoire (135 pages), il demande à la cour d'appel, au visa du principe de la prééminence du droit, de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 27 août 1989, notamment ses articles 4,5, 15 et 16, de la Constitution du 4 octobre 1958, notamment son article 63 alinéa 2, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966, de l'article 19 alinéa 2 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, ensemble les articles 15 alinéa 3 et 16 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, de :

1°) constater l'absence de toute délibération du conseil de l'ordre, antérieure ou postérieure au 1er janvier 2015, autorisant le bâtonnier en exercice ou l'un de ses membres préalablement délégué par celui-ci, à ester en justice au nom et pour le compte du barreau de Marseille devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, dans le cadre des recours de Me [Q] [I] dirigés contre les délibérations des 16 décembre 2014 désignant respectivement Me [F] [V] et Me [G] [B] en qualité de rapporteurs, d'une part et les membres titulaires et suppléants appelés à composer le conseil régional de discipline des avocats des avocats du ressort de la cour d'appel d'Aix-en-Provence pour l'année 2015, d'autre part,

en conséquence,

2°) annuler pour irrégularité de fond les conclusions prétendument prises au nom du barreau de Marseille et communiquées à Me [Q] [I] par Me Nathalie OLMER, le 27 août 2015 pour l'audience du 10 septembre 2015,

3°) dire que Me Nathalie OLMER a, en signant les conclusions prétendument prises au nom du barreau de Marseille, communiquées le 27 août 2015, manifestement agi en dehors de tout mandat,

subsidiairement,

4°) déclarer irrecevables, dans leur intégralité des prétentions du barreau de Marseille,

en tout état de cause,

5°) constater l'abrogation implicite de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, notamment se articles 22 à 25-1 (chapitre III - De la Discipline) par l'effet de la promulgation de la loi n°82-506 du 15 juin 1982 relative à la procédure applicable en cas de faute professionnelle commise à l'audience par un avocat, instaurant le serment légale d'indépendance de l'avocat (JO du 16 juin 1982 p.1899) ,

6°) dire que la délibération du conseil de l'ordre des avocats au barreau de Marseille en date du 16 décembre 2014 désignant pour l'année 2015 les membres titulaires et suppléants du conseil régional de discipline des avocats du ressort de la cour d'appel d'Aix-en-Provence , concomitante de la délibération du même jour désignant Me [F] [V] et Me [G] [B] en qualité de rapporteurs dans le cadre des prétendues poursuites disciplinaires initiées à l'encontre de Me [Q] [I] par Me [C] [R], alors bâtonnier en exercice, par acte du 9 décembre 2014, notifié par lettre recommandée avec avis de réception du 11 décembre 2014, reçue le 12 décembre 2014, méconnaît l'autorité de chose jugée erga omnes qui s'attache, en vertu de l'article 62 alinéa 3 de la constitution du 4 octobre 1958 aux motifs et au dispositif de la décision n°80-127 DC. des 19 et 20 janvier 1981, loi renforçant la sécurité et protégeant la liberté des personnes, par laquelle le Conseil constitutionnel a consacré le statut constitutionnel de l'avocat défenseur, exclusif de tout régime disciplinaire,

7°) dire que la même délibération du conseil de l'ordre des avocats au barreau de Marseille en date du 16 décembre 2014 méconnaît l'exigence d'impartialité qui s'impose aux membres du conseil régional de discipline des avocats du ressort de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, comme à tout membre d'une juridiction,

8°) en conséquence, annuler en toutes ses dispositions la délibération du conseil de l'ordre des avocats au barreau de Marseille en date du 16 décembre 2014 désignant pour l'année 2015 les membres titulaires et suppléants du conseil régional de discipline des avocats du ressort de la cour d'appel d'Aix-en-Provence ,

vu les articles 697, 698 et 700 du code de procédure civile,

9°) condamner in solidum le barreau de Marseille et Me Nathalie OLMER aux entiers dépens de l'instance,

10°) condamner in solidum le barreau de Marseille et Me Nathalie OLMER à payer à Me [Q] [I] la somme de 3.000 € au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

M.[I] expose avoir fait l'objet d'un acte de saisine disciplinaire du conseil régional de discipline des avocats par Me [R], alors bâtonnier en exercice, au prétexte d'un manquement grave de l'obligation de renseignement et au devoir de conseil concernant un litige d'honoraires qui l'oppose à ses anciens clients les époux [P], de la saisine par onze requérants de la Cour de justice de l'Union européenne le 13 mai 2014, pour le génocide arménien et d'autres crimes contre l'humanité, sa réponse à la lettre de M.[N] [T], président en exercice de la Cour de justice de l'Union européenne.

M.[I] estime que son recours est recevable, qu'il a intérêt à agir alors que le choix de la désignation de rapporteurs est de nature à léser ses intérêts.

M.[I] soulève la nullité pour irrégularité de fond des conclusions communiquées le 27 août 2015 par Me Nathalie OLMER, prétendument prises au nom et pour le compte du barreau de Marseille, en application de l'article 117 du code de procédure civile.

Il estime que Me Nathalie OLMER est dépourvue du pouvoir de représenter en justice le barreau de Marseille. Il fait valoir qu'en application de l'article 17 de la loi du 31 décembre 1971, le conseil de l'ordre peut autoriser le bâtonnier à ester en justice et considère que le bâtonnier ne peut agir en justice pour le compte du barreau sans y être expressément habilité.

Il fait observer que le bâtonnier n'a pas eu d'autorisation d'agir en justice et que Me OLMER ne pouvait être mandaté par quiconque. Il estime que les conclusions prises par Me OLMER sont hors des limites de son mandat.

Il estime qu'aucun de ses recours n'est abusif.

M.[I] estime son recours bien fondé, alors que le régime disciplinaire est selon lui radicalement incompatible avec le statut d'avocat défenseur, que le bâtonnier [R] manque d'impartialité en raison d'un conflit ouvert avec lui, que la désignation de Me [V] et de Me [B] méconnaît les dispositions de l'article 188 du décret du 27 novembre 1991, que la désignation de ces deux rapporteurs contrevient à l'exigence d'impartialité, et en tout état de cause que nul grief ne peut lui être fait quant au respect de ses obligations déontologiques.

M.[I] estime que le régime disciplinaire des avocats est incompatible avec le statut constitutionnel de l'avocat défenseur, lequel s'oppose à toute genre d'immixtion par quiconque dans la sphère de ses prérogatives de défense. Il se prévaut d'une décision du Conseil constitutionnel des 19 et 20 janvier 1981 qui déclare inconstitutionnelle une disposition de la loi renforçant la sécurité et protégeant la liberté des personnes qui permettait au président de la juridiction d'écarter un avocat de l'audience.

Il se réfère au principe d'indépendance affirmé à l'article 1er et à l'article 53 de la loi du 31 décembre 1971 et dans le serment de l'avocat, dans la définition des professions libérales par l'article 29 de la loi du 23 mars 2012. Il se réfère au délit d'intimidation envers un avocat. Il se réfère à la notion antique du 'tribun de la plèbe'. Il considère que l'avocat est un rouage essentiel dans une société démocratique et qu'il doit avoir pour ce une existence constitutionnelle.

M.[I] estime que le statut constitutionnel de l'avocat défenseur est opposable erga omnes.

M.[I] considère que les dispositions de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 assujettissant les avocats à un régime disciplinaire lui sont inopposables. Il fait état d'un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d'Etat suite au refus du Président du Conseil constitutionnel d'examiner les questions prioritaires de constitutionnalité dont il avait saisi le Conseil d'Etat.

M.[I] estime que l'animosité personnelle de Me [R] contre lui disqualifie l'initiateur des poursuites pour porter une quelconque appréciation déontologique contre lui

M.[I] considère que la désignation de deux rapporteurs, Me [F] [V] et de Me [G] [B], au lieu d'un est contraire aux dispositions des articles 188, 189 et 190 du décret du 27 novembre 1991.

Il estime que ces désignations procèdent d'une décision partiale, alors que ces deux avocats se proposés comme rapporteurs après une présentation fallacieuse des faits par Me [X] [Z], ancien bâtonnier, qui a pris parti contre lui.

En tout état de cause, il estime les griefs formulés par Me [C] [R] et Me [X] [Z] totalement mal fondés.

Le conseil de l'ordre n'a pas déposé de conclusions écrites.

Le bâtonnier des avocats au barreau de Marseille a déposé le 9 septembre 2015 un écrit, dont M.[I], le Ministère public et le barreau déclarent avoir eu connaissance, par lequel il fait observer que :

- la décision attaquée est prise par le conseil de l'ordre des avocats au barreau de Marseille et non par le barreau de Marseille,

- l'appel formé par Me [Q] [I] le 20 février 2015 à l'encontre de la décision du conseil de l'ordre du barreau de Marseille en date du 16 décembre 2014 qui désigne deux rapporteurs dans le cadre des poursuites disciplinaires à son encontre est irrecevable à titre principal et infondé à titre subsidiaire.

Le Ministère public a déposé des conclusions écrites datées du 10 mars 2015, reconnues comme leur étant contradictoires par M.[I] et par le conseil de l'ordre.

Il fait observer qu'il n'appartient pas à la cour de se prononcer sur le contrôle de constitutionnalité. Il observe qu'aucune discrimination n'est établie à travers ces poursuites. Il fait observer que l'animosité personnelle du bâtonnier à son égard n'est pas établie et qu'en tout état de cause, le bâtonnier poursuivant n'a pas participé à la décision litigieuse.

Le Ministère public estime que la désignation de deux rapporteurs, plutôt qu'un renforce les garanties accordées à l'avocat poursuivi. Il observe que le bâtonnier [Z] s'est borné à présenter le dossier et que ce n'est pas ce dernier qui a proposé les rapporteurs, ceux-ci s'étant spontanément proposés.

Il fait remarquer que la réalité ou non des fautes disciplinaires n'a aucun lien avec la décision contestée.

A l'audience Me [I] a soutenu oralement ses conclusions écrites.

A l'audience, Me OLMER a conclu oralement pour le conseil de l'ordre, estimant non fondé le recours et demandant la condamnation de M.[I] à payer une de 3.000 € à titre de frais irrépétibles au conseil de l'ordre.

Me OLMER a soutenu oralement les observations écrites du bâtonnier.

Me OLMER a conclu oralement pour le barreau de Marseille, au soutien de la recevabilité de son intervention, à l'appui de la position du conseil de l'ordre.

A l'audience, le Ministère public a soutenu oralement ses conclusions. Il a fait observer qu'il est habituel lors de désignation de membres pour un service de faire appel d'abord à des volontaires et que le fait que deux avocats aient accepté de se dévouer pour faire fonction de rapporteurs n'est pas un signe de partialité.

M.[I] a eu la parole le denier.

MOTIFS,

-I )Sur la recevabilité du recours :

La décision, contre laquelle M.[I] a formé un recours, est une décision du conseil de l'ordre des avocats au barreau de Marseille.

Cette décision est celle visée à l'article 188 du décret du 27 novembre 1991 qui dispose que dans les 15 jours de la notification au conseil de l'ordre de la mise en oeuvre d'une action disciplinaire contre un avocat, le conseil de l'ordre dont relève l'avocat poursuivi désigne l'un de ses membres pour procéder à l'instruction de l'affaire.

Aucun recours n'est prévu expressément par cet article contre une telle décision.

Par contre il résulte des dispositions de l'article 19 alinéa deux de la loi du 31 décembre 1971 qu'un avocat peut toujours déférer à la cour d'appel une délibération ou une décision du conseil de l'ordre de nature à léser ses intérêts professionnels.

La procédure à respecter est alors celles prévues aux articles 15 et 16 du décret du 27 novembre 1991 qui prévoient la réclamation préalable devant le bâtonnier de ce conseil de l'ordre.

Le choix de la désignation d'un rapporteur dans le cadre d'une poursuite disciplinaire contre un avocat peut être de nature à léser les intérêts de cet avocat.

Un recours est en conséquence recevable sous réserve de respecter la procédure de réclamation préalable.

Ce recours est recevable alors que M.[I] a respecté la procédure de réclamation préalable et que le bâtonnier n'y a pas répondu dans le mois de celle-ci.

-II) sur la recevabilité de l'intervention volontaire du barreau :

La procédure contestation d'une décision du conseil de l'ordre par un avocat, dont s'agit, oppose M.[I] au conseil de l'ordre des avocats au barreau de Marseille, en présence du Ministère public et du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Marseille.

Le barreau n'est en principe pas partie à ce litige.

Le barreau a décidé d'intervenir.

Aucune délibération n'a spécifiquement autorisé le bâtonnier à intervenir pour le barreau dans cette contestation à laquelle le barreau n'est pas partie et n'est pas en défense.

Cette intervention volontaire n'est pas recevable.

-III) sur la mise en cause de Me OLMER :

Me OLMER, avocat représentant le conseil de l'ordre, le bâtonnier et le barreau, n'est en aucune façon partie au litige.

L'irrecevabilité du barreau ne met en aucune façon en cause à titre personnel l'avocat ayant conclu, lequel n'est pas partie.

Les conclusions de M.[I] contre Me OLMER sont hors débats et ne peuvent être prises en considération.

-IV) sur la question du statut de l'avocat :

M.[I] estime que l'avocat a un statut constitutionnel et ne peut être poursuivi disciplinairement, de sorte que la question de la désignation d'un rapporteur pour instruire le dossier disciplinaire serait sans objet, sans possibilité de poursuite.

En l'état du droit positif français, la poursuite disciplinaire est prévue aux articles 22 et suivants de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 et aux articles 180 et suivants du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991.

C'est dans ce cadre que le conseil de l'ordre des avocats au barreau de Marseille a été saisi, conformément aux dispositions de l'article 188 du décret du 27 novembre 1991 pour désignation d'un rapporteur.

M.[I] estime que l'avocat a un statut constitutionnel et ne peut être poursuivi disciplinairement, de sorte que la question de la désignation d'un rapporteur pour instruire le dossier disciplinaire serait sans objet, sans possibilité de poursuite.

En l'état du droit positif français, la poursuite disciplinaire est prévue aux articles 22 et suivants de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 et aux articles 180 et suivants du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991.

M.[I] se prévaut d'une décision du Conseil constitutionnel des 19 et 20 janvier 1981 pour prétendre au statut constitutionnel de l'avocat.

Cette décision, qui a déclaré inconstitutionnelle une disposition de la loi renforçant la sécurité et protégeant la liberté des personnes qui permettait au président de la juridiction d'écarter un avocat de l'audience, visait la protection des droits de la défense et non celle du statut de l'avocat, et ne remet pas en cause la possibilité de poursuite disciplinaire d'un avocat devant la juridiction disciplinaire prévue par la loi du 31 décembre 1971.

Par arrêt de ce jour la présente cour a refusé de transmettre à la Cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité présentée à ce sujet par M.[I].

-V) Sur la désignation :

Le procès verbal de la séance du conseil de l'ordre du 16 décembre 2014 est ainsi libellé :

par courrier du 9 décembre 2014, le conseil régional de discipline a été saisi de l'exercice d'une action disciplinaire à l'encontre de Me [Q] [I].

...cette saisine est motivée par l'existence de deux difficultés : l'une concernant des clients de Me [Q] [I], en l'occurrence les époux [P] ; l'autre concernant une saisine réalisée par Me [Q] [I] de la cour de justice de l'Union européenne.

Concernant les époux [P], M.le bâtonnier [X] [Z] indique que le comportement adopté par Me [Q] [I] à leur égard constitue des fautes professionnelles caractérisées par : un abus de confiance, une exploitation de leur naïveté, un défaut de conseil et une disproportion anormale entre l'objet et l'intérêt financier du litige ainsi que l'importance du travail fourni qui a généré des honoraires considérables.

Concernant la saisine de la cour de justice de l'Union européenne, M.le bâtonnier [X] [Z] expose aux membres du conseil de l'ordre que Me [Q] [I] a adopté, notamment à l'égard de cette cour, un comportement notamment empreint d'absence totale de délicatesse.

A l'issue de cet exposé, M.le bâtonnier [X] [Z] indique qu'il y a nécessité de désigner deux rapporteurs disciplinaires.

Mes [F] [V] et [G] [B] proposent leur candidature.

Cette candidature est adoptée favorablement$gt;$gt;.

L'article 188 alinéa quatre du décret du 27 novembre 1991 dispose que, dans les quinze jours de la notification de l'acte de poursuite à l'avocat poursuivi, le conseil de l'ordre dont relève l'avocat poursuivi désigne l'un de ses membres pour procéder à l'instruction de l'affaire.

Il importe qu'un avocat rapporteur soit membre du conseil de l'ordre.

Le texte n'interdit pas au conseil de l'ordre de désigner deux rapporteurs, par précaution.

Cette précaution du conseil de l'ordre ne porte aucunement grief à l'avocat poursuivi, mais au contraire préserve d'avantage ses intérêts.

L'absence d'impartialité des deux rapporteurs n'est pas établie.

Rien ne permet de dire que Me [G] [B] ou que Me [F] [V] aurait eu la moindre attitude partiale à l'égard de M.[I].

La question de l'animosité prétendue du bâtonnier [R] à l'égard de M.[I] est sans intérêt pour le litige alors que ce dernier n'a pas participé à la désignation des rapporteurs.

La cour n'est pas saisie sur le point de savoir si la poursuite disciplinaire initiée contre M.[Q] [I] est ou non fondée.

La cour n'a pas à se prononcer sur la poursuite.

Le recours de M.[I] sera rejeté.

-VI) sur les frais irrépétibles :

Au vu de la nature de la procédure, entre un avocat et son conseil de l'ordre, entre avocats et sans représentation obligatoire, il n'y a pas lieu de prononcer de condamnation en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,

Déclare recevable le recours,

Vu l'arrêt de ce jour de la présente cour en la procédure RG 15/15421 refusant de transmettre à la Cour de cassation une question prioritaire de constitutionnalité de M.[Q] [I] quant à un prétendu statut constitutionnel de l'avocat,

Déclare le recours recevable,

Déclare irrecevable l'intervention volontaire du barreau des avocats de Marseille,

Au fond rejette ce recours contre la décision du conseil de l'ordre des avocats au barreau de Marseille en date du 16 décembre 2014 par laquelle ce conseil de l'ordre a désigné, en application de l'article 188 alinéa 4 du décret du 27 novembre 1991, Me [F] [V] et Me [G] [B], avocats au barreau de Marseille, membres du conseil de l'ordre, comme rapporteurs pour procéder à l'instruction de l'affaire disciplinaire ouverte contre M.[Q] [I], avocat au barreau de Marseille, sur acte de poursuite du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Marseille du 9 décembre 2014,

Dit ne pas y avoir lieu à condamnation en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit la procédure sans dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre b
Numéro d'arrêt : 15/03552
Date de la décision : 24/09/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1B, arrêt n°15/03552 : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-09-24;15.03552 ?
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