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19/11/2015 | FRANCE | N°13/04977

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 2e chambre, 19 novembre 2015, 13/04977


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

2e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 19 NOVEMBRE 2015



N° 2015/ 384













Rôle N° 13/04977







S.A.S. MAGHREB SOLUTIONS





C/



SARL BOYS LOGISTIC





















Grosse délivrée

le :

à :



- Me DRUJON D'ASTROS



- Me PALLUAUD













Décision déférée à

la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 25 Février 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 2012F00549.





APPELANTE





S.A.S. MAGHREB SOLUTIONS

immatriculée au RCS d'AIX EN PROVENCE sous le n° B 452 174 345, demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Nicolas DRUJON D'ASTROS de la SCP DRUJ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

2e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 19 NOVEMBRE 2015

N° 2015/ 384

Rôle N° 13/04977

S.A.S. MAGHREB SOLUTIONS

C/

SARL BOYS LOGISTIC

Grosse délivrée

le :

à :

- Me DRUJON D'ASTROS

- Me PALLUAUD

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 25 Février 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 2012F00549.

APPELANTE

S.A.S. MAGHREB SOLUTIONS

immatriculée au RCS d'AIX EN PROVENCE sous le n° B 452 174 345, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Nicolas DRUJON D'ASTROS de la SCP DRUJON D'ASTROS BALDO & ASSOCIES, avocat postulant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée et plaidant par Me Laurent SABLET, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

SARL BOYS LOGISTIC,

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Emmanuelle PALLUAUD, avocat postulant et plaidant au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 05 Octobre 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur PRIEUR, conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président

Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller

Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Viviane BALLESTER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Novembre 2015

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Novembre 2015,

Signé par Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président et Madame Viviane BALLESTER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DE L'AFFAIRE

La société BOYS LOGISTIC, société de droit marocain ayant son siège social à Casablanca, a signé un contrat d'affrètement régulier n° 001/09 le 6 août 2009 avec la société MAGHREB SOLUTIONS (Agence de [Localité 1]) pour une durée de 5 ans ferme.

Ce contrat a été conclu à partir du constat suivant :

- la société MAGHREB SOLUTIONS disposait de trafics routiers dont elle ne pouvait assurer la réalisation par ses propres moyens et se trouvait donc à la recherche d'un sous-traitant capable de lui fournir une solution de remplacement ;

- la société BOYS LOGISTIC cherchait, quant à elle, à s'assurer une activité régulière dans le cadre d'une sous-traitance de longue durée, avec une garantie de rémunération.

Par ce contrat, la société BOYS LOGISTIC s'engageait à mettre à la disposition exclusive de la société MAGHREB SOLUTIONS cinq véhicules avec personnel de conduite et à lui fournir les moyens et services nécessaires à son utilisation.

En rémunération des prestations fournies, la société MAGHREB SOLUTIONS s'engageait à lui verser selon les termes de l'article 12 du même contrat :

- « 0,80 €euros par kilomètre résultant des déplacements en charge et à vide, nets tous frais inclus avec un chauffeur,

- 0,84 €euros par kilomètre résultant des déplacements en charge et à vide, nets tous frais inclus avec deux chauffeurs. »

Par ailleurs, la société MAGHREB SOLUTIONS s'engageait à l'égard de son cocontractant sur un minimum de kilomètres par an et par camion, à savoir :

- 3 camions avec un forfait minimum de 200 000 kms par an et par tracteur,

- 2 camions avec un forfait minimum de 160 000 kms par an et par tracteur.

La société BOYS LOGISTIC estimant être créancière de la société MAGHREB SOLUTIONS, elle l'a fait assigner devant le Tribunal de Commerce de Marseille pour obtenir paiement des sommes suivantes :

- la somme de 336.986 Euros représentant le montant des factures avec intérêts au taux légal à compter du 26 septembre 2011 ;

- la somme de 40.000 Euros à titre de dommages et intérêts compte tenu de la résistance abusive dans le paiement des factures dues ;

- la somme de 4.494,20 Euros au titre des pénalités de retard sur le fondement de l'article L.441-6 du Code de commerce.

Par jugement en date du 25 février 2013 le Tribunal de Commerce de Marseille a statué ainsi :

- déboute la SAS MAGHREB SOLUTIONS de son exception d'incompétence et déclare le Tribunal de Commerce de Marseille compétent ;

- déboute la SAS MAGHREB SOLUTIONS de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ; - condamne la SAS MAGHREB SOLUTIONS au paiement de la somme de 336.986 Euros avec intérêt au taux légal à compter du 26 septembre 2011, celle de 4.494,20 Euros au titre des pénalités de retard sur le fondement de l'article L.441-6 du Code de commerce et celle de 6.000 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société MAGHREB SOLUTIONS a interjeté appel de ce jugement et soutient que :

-l'exception de nullité qui tend à voir la société MAGHREB SOLUTIONS déclarée irrecevable en son appel relève de la compétence exclusive du Conseiller de la mise en état, et que la cour doit se déclarer incompétente,

-A titre subsidiaire, il convient de constater que l'assignation sur appel comportant dénonciation de la déclaration d'appel et signification des conclusions d°appel est datée du 7juin 2013 et donc rejeter l'exception de nullité soulevée par la société BOYS LOGISTIC,

- la société BOYS LOGISTIC était dépourvue d'intérêt à agir devant la juridiction consulaire de Marseille en première instance, faute d'avoir respecté la clause contractuelle d'arbitrage préalable,

Sur le fond,

- que le contrat écrit dénommé « CONTRAT D'AFFRETEMENT REGULIER » daté du 6 août 2009 signé par Monsieur [P] [O], représentant BOYS LOGISTIC, d'une part, et par Monsieur [R] [S], pour MAGHREB SOLUTIONS, d'autre part, lequel ne disposait pas, à cette date, du pouvoir de représenter cette société puisqu' il en était uniquement l'un des salariés, en qualité de chef d'exploitation, « annexe 4 groupe 3, coefficient l13 »,

- qu'elle n'est débitrice d'aucune somme du fait que les prestations réalisées par la société BOYS LOGISTIC pour le compte de la société MAGHREB SOLUTIONS ont fait l'objet de règlements réguliers, comme le prouvent les échanges de courriers électroniques entre les parties,

- qu'il y a violation par la société BOYS LOGISTIC des stipulations contractuelles relatives au respect de ses obligations sociales.

La société appelante demande donc la réformation du jugement.

La société BOYS LOGISTIC soulève la nullité l'assignation portant appel délivrée par la société MAGHREB SOLUTIONS pour violation de l'article 648 du code de procédure civile et prétend que la société MAGHREB SOLUTIONS n'est pas recevable en son appel.

Sur le fond, la société intimée soutient que :

- le contrat signé le 6 août 2009 entre les parties est soumis à la convention relative au contrat de transport international de marchandises par route (CMR) du 19 mai 1956 dont la France et le Maroc sont signataires,

- si cette convention prévoit dans son article 33 que le contrat de transport peut contenir une clause attribuant compétence à un tribunal arbitral à condition que cette clause prévoit que le tribunal arbitral appliquera la convention, cette clause n'apparaît pas dans le contrat en litige,

- au surplus, pour respecter les termes de l'article 17, encore faut-il qu'une telle chambre syndicale existe dans l'Etat dans lequel les sociétés ont leur siège social, or au Maroc, cette chambre n'existe pas,

- la Cour d'Appel ne pourra que confirmer de ce chef le jugement entrepris aux termes duquel le Tribunal de Commerce s'est déclaré compétent pour examiner le litige qui lui a été soumis et a rejeté l'exception soulevée par la société MAGHREB SOLUTIONS.

La société BOYS LOGISTIC indique que par lettre en date du 21 février 2008, elle a été informée que Monsieur [S] prendrait la direction de l'agence MAGHREB SOLUTIONS BORDEAUX à partir du 1er mars 2008, et que le contrat ne saurait être nul.

La société intimée soutient le bien fondé de ses demandes et conclut à la confirmation de la décision déférée sauf à statuer ainsi :

- Condamner la société MAGHREB SOLUTIONS à payer à la société BOYS LOGISTIC la somme de 40.000 Euros à titre de dommages et intérêts compte tenu de la résistance abusive dans le paiement des factures dues.

- Condamner la société MAGHREB SOLUTIONS à payer à la société BOYS LOGISTIC la somme de 45.000 Euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral.

- Dire que dans un délai de huit (8) jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, la Caisse des Dépôts et Consignations devra se libérer en faveur de la société BOYS LOGISTIC de la totalité de la somme de 350.250 Euros et des intérêts de droit acquis sur cette somme.

La cour renvoie, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, à leurs écritures précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la nullité de l'assignation portant appel délivrée par la société MAGHREB SOLUTIONS.

Ce moyen a été tranché par ordonnance du conseiller de la mise en état du 2 décembre 2014 et ne saurait être débattu devant la formation collégiale de la Cour.

Sur la compétence du tribunal de commerce

Le contrat signé le 6 août 2009 est soumis à la convention relative au transport international de marchandises par route dont la France et le Maroc sont signataires.

Cette convention prévoit dans son article 33 que le contrat de transport peut contenir une clause attribuant compétence à un Tribunal arbitral à condition que cette clause prévoit que le Tribunal arbitral appliquera la convention.

Cette clause n'apparaissant pas dans le contrat de transport signé le 6 août 2009 entre la société MAGHREB SOLUTIONS et la SARL BOYS LOGISTIC, c'est à juste titre que le tribunal de commerce de Marseille a retenu sa compétence.

L'exception soulevée à ce titre est rejetée.

Sur la nullité du contrat pour défaut de pouvoir de l'un des signataires.

Par courrier en date du 21 février 2008, une société Mony a informé la société BOYS LOGISTIC de la cession de son fonds de commerce relatif à ses activités de transport à [Localité 2] (Gironde) au profit de la société MAGHREB SOLUTIONS et que Monsieur [R] [S] prendrait la direction de cette agence.

Le contrat signé le 6 aout 2009 indique clairement que Monsieur [S] est le directeur de l'agence de [Localité 2] et disposait donc du pouvoir et de la qualité pour engager la société MAGHREB SOLUTIONS et signer le contrat litigieux.

La fin de non recevoir soulevée est rejetée.

Sur le fond

Concernant la facture du 23 mai 2011 d'un montant de 237.546 euros, l'appelante qui indique ne pas la contester, soutient l'existence d'un avoir daté du 9 août 2011 du même montant.

Toutefois, il n'est pas démontré que cet avoir aurait été émis par la société BOYS LOGISTIC puisqu'il ne figure pas dans sa comptabilité comme tous les autres avoirs. Le courrier électronique dont se prévaut la société appelante est pour le moins suspect compte tenu des indications portées, et la preuve qu'il aurait été envoyé par la société BOYS LOGISTIC pour la somme de 237.546 euros à M. [S] n'est pas rapportée.

La société MAGHREB SOLUTIONS n'explique aucunement à quoi aurait pu correspondre cet avoir dont le montant correspond à celui de la facture du 23 mai 2011 qu'elle ne conteste pas.

Concernant la facture du 8 août 2011, d'un montant de 99.440 euros, la société intimée, en application de l'article 12 du contrat qui prévoit que chaque année un état des lieux doit être fait pour déterminer si le nombre de kilomètres garanti au contrat a été ou non atteint, justifie du bien fondé de sa demande du fait de la comparaison entre le nombre de kilomètres effectués sur l'année et celui prévu au contrat.

Contrairement à ce que prétend l'appelante, le fait qu'il soit mentionné dans le contrat « un point sera fait chaque fin d'année afin d'effectuer ou pas une facture complémentaire » n'obligeait pas la société BOYS LOGISTIC a effectué une réunion contradictoire avec son client.

Concernant la violation par la société BOYS LOGISTIC des stipulations contractuelles relatives au respect de ses obligations sociales, l'article 5 du contrat prévoit que «Le transporteur affrété la Sté BOYS LOGISTIC, signataire du présent contrat, déclare être à jour du versement des cotisations sociales afférentes au personnel de conduite impliqué par le présent acte. Cette obligation faite à l 'entreprise de transport employeur du personnel de conduite, est essentielle pour toute la durée du contrat (...) Toute défaillance relative au versement des charges sociales par le transporteur affrété, portée à la connaissance du donneur d 'ordre MAGHREB SOLUTIONS entraînera irrévocablement la suspension, voire la résiliation sans préavis du présent contrat ».

La société appelante produit aux débats une attestation de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale de Casablanca (CNSS) qui indique que la société BOYS LOGISTIC serait redevable de la somme de 21.250,48 Dirhams au titre des cotisations sociales dues sur la période de mai 2005 à novembre 2011.

Toutefois, la société intimée établit que des paiements effectués à cette caisse n'ont pas été pris en compte, et que par lettre en date du 12 mars 2012, la CNSS a régularisé la situation de la société BOYS LOGISTIC mettant ainsi à néant la prétendue dette de 21.250,48 Dirhams.

En outre l'article précité ne prévoit comme sanction que « la suspension, voire la résiliation sans préavis du présent contrat », mais ne dispensait aucunement la société MAGHREB SOLUTIONS du paiement des sommes dues en vertu des prestations réalisées par son co-contractant.

Sur la demande de dommages et intérêts présentée par la société BOYS LOGISTIC.

Aucuns dommages et intérêts ne peuvent être dus en sus des intérêts, à la charge de la partie en retard pour l'exécution d'une obligation ayant pour objet le versement d'une somme d'argent, à moins que cette partie ait, par sa mauvaise foi causé au créancier un préjudice indépendant de celui qui résulterait du retard lui même ou d'une faute particulière du débiteur.

La société BOYS LOGISTIC ne prouvant pas que la société MAGHREB SOLUTIONS aurait agi de mauvaise foi ou aurait commis une faute particulière à son encontre, il n'y a lieu de lui octroyer des dommages et intérêts.

Le jugement, à la motivation duquel il convient de se référer pour le surplus, est confirmé en toutes ses dispositions.

Il convient de dire que dans un délai de huit (8) jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, la Caisse des Dépôts et Consignations devra se libérer en faveur de la société BOYS LOGISTIC de la totalité de la somme de 350.250 Euros et des intérêts de droit acquis sur cette somme.

Il est équitable de condamner la société MAGHREB SOLUTIONS, dont les demandes sont rejetées, à payer à la société BOYS LOGISTIC une somme de 12.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement attaqué,

Y ajoutant,

Dit que dans un délai de huit (8) jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, la Caisse des Dépôts et Consignations devra se libérer en faveur de la société BOYS LOGISTIC de la totalité de la somme de 350.250 Euros et des intérêts de droit acquis sur cette somme.

Condamne la société MAGHREB SOLUTIONS à payer à la société BOYS LOGISTIC une somme de 12.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples,

Condamne la société MAGHREB SOLUTIONS aux dépens recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 13/04977
Date de la décision : 19/11/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 02, arrêt n°13/04977 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-11-19;13.04977 ?
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