COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
8e Chambre C
ARRÊT
DU 03 DECEMBRE 2015
N° 2015/ 650
Rôle N° 15/16668
[V] [O]
C/
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL PROVENCE COTE D'AZUR
Grosse délivrée
le :
à :BOULAN
TRUPHEME
Décision déférée à la Cour :
Jugement du tribunal de grande instance de Grasse en date du 19 février 2013
APPELANTE
Madame [V] [O]
née le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 2], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Me Gwenaële DITCHE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituant Me Karole KONOPKA, avocat au barreau de GRASSE
INTIMEE
Caisse Régionale de crédit agricole mutuel Provence Cote d'Azur, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, dont le siège est sis [Adresse 2]
représentée par Me Lise TRUPHEME de la SELARL CADJI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et assistée de Me MASSONG, avocat de la Selarl CADJI
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 04 Novembre 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Hélène Combes, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Hélène COMBES, Président
Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Conseiller
Madame Claudine PHILIPPE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Décembre 2015
MINISTERE PUBLIC
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Décembre 2015,
Signé par Madame Hélène COMBES, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
Par acte notarié des 3 et 6 février 1989, [V] [O] a contracté auprès de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Alpes maritimes, un prêt immobilier de 575.000 francs d'une durée de 20 ans.
Le prêt n'ayant plus été honoré le Crédit Agricole a prononcé la déchéance du terme.
Invoquant divers manquements de la banque, notamment en ce qui concerne l'information relative au taux effectif global, [V] [O] a par acte du 4 juillet 2006, assigné le Crédit Agricole devant le tribunal de grande instance de Grasse pour qu'il prononce l'annulation de la convention de prêt, l'annulation de la stipulation d'intérêt, la déchéance totale des intérêts, et pour obtenir la condamnation de la banque à lui rembourser la somme de 80.329,51 euros et à lui payer des dommages intérêts à hauteur de 10.343,53 euros et 5.000 euros.
Par jugement du 19 février 2013, le tribunal a déclaré les demandes d'[V] [O] irrecevables en raison de l'autorité de la chose jugée qui s'attache à l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Aix en Provence le 16 janvier 2003.
[V] [O] a relevé appel le 12 juillet 2013.
Le 2 septembre 2015, [V] [O] a déposé un acte d'inscription de faux principal à l'encontre de l'acte notarié des 3 et 6 février 1989 qu'elle estime entaché de faux.
Elle fait essentiellement valoir que le taux effectif global mentionné sur l'acte de prêt étant erroné, le prêt n'était pas admissible à la catégorie des prêts conventionnés, ce qui a vicié son consentement
La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel conclut au rejet des demandes et sollicite la condamnation d'[V] [O] à une amende civile de 3.000 euros.
Elle réclame pour elle 6.000 euros à titre de dommages intérêts et 5.000 euros au titre des frais irrépétibles.
Après avoir rappelé les multiples procédures engagées par [V] [O] et observé que l'acte d'inscription de faux reprend mot pour mot l'assignation délivrée en 2009 devant le tribunal de grande instance de Draguignan, elle fait valoir qu'[V] [O] est irrecevable à contester de nouveau le taux d'intérêt au moyen de la présente procédure en l'état de l'arrêt rendu par la cour le 16 janvier 2003.
Elle invoque le détournement de la procédure d'inscription de faux et soutient qu'[V] [O] ne démontre pas que l'acte authentique dont il s'agit est un faux. Elle ajoute qu'une inscription de faux n'a pas pour objet de venir contester le calcul d'un taux effectif global.
Le dossier de l'affaire a été communiqué au ministère public en vertu des dispositions de l'article 303 du code de procédure civile.
DISCUSSION
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées.
L'acte d'inscription de faux, improprement qualifié d'acte d'inscription en faux principal déposé le 2 septembre 2015, vise des dispositions de l'article 306 du code de procédure civile relative à l'inscription de faux incidente.
Dès lors qu'[V] [O] ne soutient pas que l'acte notarié est l'oeuvre d'un faussaire ou qu'il est altéré ou falsifié ce qui constituerait un faux matériel, elle invoque l'existence d'un faux intellectuel.
Le faux intellectuel consiste pour le rédacteur de l'acte authentique à sciemment énoncer des faits ou rapporter des déclarations inexacts.
La procédure d'inscription de faux ne s'applique qu'aux déclarations dont l'officier public doit vérifier l'exactitude.
La mention du taux effectif global figurant en page 11 de l'acte notarié n'est que la reproduction de l'accord des parties tel qu'il résulte de l'offre de prêt acceptée par [V] [O] le 5 décembre 1988 et le notaire n'avait pas à procéder à la vérification de son exactitude.
La mention du taux effectif global ne constitue donc pas une énonciation valant jusqu'à inscription de faux.
L'inscription de faux déposée par [V] [O], dépourvue de fondement sera rejetée.
L'article 305 du code de procédure civile dispose que le demandeur en faux qui succombe est condamné à une amende civile d'un maximum de 3.000 euros.
Eu égard aux éléments du litige, [V] [O] sera condamnée au paiement d'une amende civile de 500 euros.
Le Crédit Agricole ne justifie pas du préjudice que lui cause la présente instance et sera débouté de sa demande de dommages intérêts.
Aucune considération d'équité ne justifie de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement
- Rejette l'inscription de faux déposée par [V] [O] à l'encontre de l'acte notarié dressé par Maître [Z] notaire à [Localité 1] les 3 et 6 février 1989.
- Prononce à l'encontre d'[V] [O] une amende civile de 500 euros.
- Déboute le Crédit Agricole de sa demande de dommages intérêts et de sa demande au titre des frais irrépétibles.
- Condamne [V] [O] aux dépens de la procédure.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT